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EAN : 9782020416375
384 pages
Seuil (10/06/2000)
3.98/5   311 notes
Résumé :
En un quart de siècle, il n'a publié que trois romans. Pourtant, depuis Les Soleils des indépendances, son premier livre paru en 1975, Ahmadou Kourouma, né en 1927 en Côte d'Ivoire, est considéré comme un classique de la littérature africaine.


I>En attendant le vote des bêtes sauvages fait le portrait d'un certain président Koyaga en qui il est facile de reconnaître bon nombre de dictateurs africains.


Au cours de six v... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (34) Voir plus Ajouter une critique
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Pour l'anniversaire de ses trente années de présidence démocratique, six veillées sont organisées pour honorer le président Koyaga, six veillées qui retracent l'entièreté de son parcours. En digne fils de son père, Tchao, tirailleur qui« avait tué cinq Allemands pendant la Grande Guerre et avait été le premier homme nu à introduire l'habillement. En conséquence, le premier à introduire les débuts de la civilisation dans les montagnes. », Koyaga se bat dans l'armée française au Vietnam et en Algérie.

Il retourne dans son pays quand celui-ci accède à l'indépendance. À la faveur de la confusion générée par un coup d'état manqué, il prend le pouvoir. Sa présidence commence sous les meilleurs auspices : instauration d'un parti unique plébiscité à chaque élection, suicides en masse et automutilations de ses opposants politiques, attentats communistes qui échouent de peu et qui rappellent aux Occidentaux de renflouer les caisses de ce solide rempart contre la menace rouge. Koyaga peut également compter sur le soutien des dictateurs des pays voisins, qui lui apprennent toutes les ficelles du métier.

Véritable coup de coeur, à la fois sur le fond et sur la forme. L'écriture est savoureuse : riche, vivante, sous-entendus et dénonciations féroces derrière les flatteries affichées. le récit mêle contes africains (les coups d'état sont décrits comme des combats magiques entre les prétendants, soutenus par leurs marabouts) et roman moderne. Sur le fond, on aborde la colonisation, l'escroquerie de la décolonisation et de l'indépendance, qui mène au pouvoir, souvent avec l'appui de l'occident, des dictateurs qui s'occupent plus souvent des intérêts des anciens maîtres, puis de leur famille proche, et seulement ensuite, si les caisses ne sont pas encore vides, de leur propre peuple.
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« Retenez le nom de Koyaga, le chasseur et président-dictateur de la République du Golfe. » (p. 9) Ainsi s'ouvre la première des six veillées en l'honneur de Koyaga. « Retenez mon nom de Bingo, je suis le griot musicien de la confrérie des chasseurs. » (p. 9) Avec son répondeur, Tiécoura, Bingo écrit la geste de Koyaga, président-dictateur africain. Pour cela, il remonte au père de l'homme, à Tchao : « le tirailleur Tchao avait tué cinq Allemands pendant la Grande Guerre et avait été le premier homme nu à introduire l'habillement. En conséquence, le premier à introduire les débuts de la civilisation dans les montagnes. » (p. 25) Koyaga est un fils des Montagnes, un chasseur, un homme nu. L'ambition et la transgression du père touchent le fils. Koyaga sera décoré en Indochine. de retour au pays, il ne veut qu'être que le plus puissant. Sa mère, Nadjouma, est une sorcière nue, belle et envoûtante. Avec le marabout Bokano, elle soutient les ambitions de Koyaga. de coup d'état en assassinats, Koyaga devient le nouveau président de la République du Golfe.
Koyaga est accompagné de son âme damnée, Maclédio, un être qui a trouvé son « homme de destin » en la personne du chasseur des montagnes. « Maclédio est devenu votre pou à vous, Koyaga, perpétuellement collé à vous. Il reste votre caleçon oeuvrant où vous êtes pour cacher vos parties honteuses. Cacher votre honte et votre déshonneur. Il ne vous a jamais plus quitté. Vous ne vous déplacerez jamais plus sans lui. » (p. 123) Tout bon tyran a son homme dévoué. Maclédio est plus qu'une ombre, c'est un prolongement organique du dictateur, une expression incarnée de la soumission au démon.
Koyaga sait tout, maîtrise tout. Mais que faire quand tout n'est pas assez ? « La création de son parti unique et sa nomination comme président-fondateur et président à vie n'apportent qu'un éphémère moment de joie à Koyaga. » (p. 292) C'est Maclédio qui trouve la solution et qui crée « des groupes de choc qui partout et toute la journée griotteront, louangeront Koyaga. » (p. 292) En effet, que vaut un souverain qu'on ne vénère pas ? Que vaut une idole à laquelle on ne sacrifie pas ?
Alors que Koyaga fête le trentième anniversaire de son arrivée au pouvoir, le pays est endetté et traverse une crise que renforcent l'insécurité et les soulèvements orchestrés par les « déscolarisés ». le règne de Koyaga peut-il s'achever dans le sang et le meurtre ? D'aucuns lui font miroiter le contraire. « Vous briguerez un nouveau mandat avec la certitude de triompher, d'être réélu. Car vous le savez, vous êtes sûr que si d'aventure les hommes refusent de voter pour vous, les animaux sortiront de la brousse, se muniront de bulletins et vous plébisciteront. » (p. 381)
Le roman dénonce les régimes bananiers, mais il met en perspective les fautes et les ravages de la colonisation. « La transgression de Tchao ne déclencha pas la seule scolarisation des jeunes montagnards : elle entraîna le recrutement massif des montagnards comme tirailleurs. Elle fit des Montagnes un réservoir de tirailleurs dans lequel les Français puisèrent abondamment pour toutes les guerres. » (p. 27) L'Afrique sacrifiée, « terre aussi riche en violeurs de droits de l'homme qu'en hyènes » (p. 275) n'en finit pas de souffrir sur l'autel des guerres occidentales et internationales.
Néanmoins, Koyaga sait tirer profit des troubles mondiaux. Bien que son pays bafoue les droits de l'homme, il est une barrière au grand mal du vingtième, le communisme. Dans le pays de Koyaga se cristallisent les conflits du monde : « En moins de trois ans, trois tentatives perpétrées par le communisme international visant à la suppression physique de Koyaga ont été ourdies. Une persévérance ! Un réel acharnement qu'une seule et bonne signification pouvait signifier. Koyaga constitue un verrou important qui arrête le déferlement du communisme international sur l'Afrique. Koyaga est une pièce maîtresse de la lutte contre le communisme liberticide. L'Occident doit le savoir, le reconnaître, aider et secourir, soutenir beaucoup plus, beaucoup mieux son rempart, son bouclier. » (p. 287) La dictature de Koyaga est pleinement justifiée et encouragée par l'Occident capitaliste qui frémit devant le géant Rouge. Vaut-il mieux un dictateur sanguinaire, corrompu et avide de richesses ou un ennemi aux idéaux trop convaincants ? L'Histoire a fait son choix.
Les six veillées déroulent un conte traditionnel. C'est une véritable légende qui se raconte, entre magie et réalité : Koyaga est l'homme qui a vaincu une panthère, un buffle, un éléphant et un caïman. Il est homme que les bêtes sauvages redoutent et respectent. Des proverbes en introduction de chaque veillée annoncent les sujets classiques, les grands thèmes de réflexion que chaque homme doit aborder : la mort, la prédestination, l'apprentissage, la trahison, etc. L'existence de Koyaga est une tragédie africaine, un drame dans le désert. Mais c'est aussi un pamphlet au souffle brûlant, une critique acérée des régimes dictatoriaux africains. Toute louange est ici à double tranchant, vicieuse et serpentine puisque tout succès est issu du mal, de la haine et de la violence. Étourdi par les éloges et ivre de pouvoir, Koyaga n'entend pas le sifflement acerbe que modulent Bingo et Tiécoura. La célébration se fait portrait au vitriol et chaque touche du pinceau complète un hideux tableau.
Le roman d'Ahmadou Kourouma est exigeant et demande une concentration courageuse. Les récits qui s'égarent dans l'espace et le temps, les références historiques et le mélange des genres rendent le texte complexe. Mais également puissant et intemporel. Certes l'Afrique est ici mise au pilori, mais tous les continents ont leurs molochs. Peu importe que la République du Golfe n'existe pas : de vrais territoires souffrent de la même manière et l'exemple n'est pas assez puissant pour les pleurer tous.
Ahmadou Kourouma sait parler du continent africain. Dans une langue riche, parfois idiomatique, lourde de références, il célèbre une terre qu'on a violée, dépossédée de ses beautés sauvages et privée de ses traditions sainement barbares. Pantin entre les mains des autres, qu'ils soient Occidentaux ou Africains dévoyés, le continent n'en finit pas souffrir et de vomir des immondices par toutes ses plaies. En voilà une terre qui peut dire « Pourquoi m'as-tu abandonné ? » En attendant le vote des bêtes sauvages n'est pas un texte à refermer après lecture : c'est une réflexion qui ouvre, au-delà des mots, des infinis de questionnements humains.
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Imaginez un continent qui a été découpé grossièrement, partagé, occupé et dominé, dont on a envoyé les hommes faire la guerre pour des intérêts qui ne les concernent même pas, puis décolonisé sans pour autant avoir été complètement libéré: une poignée d'hommes, présents sur les cinq continents - dont l'Afrique - continuent à tirer les ficelles des dictatures qui y ont été mises en place car tous y trouvent un intérêt: économique, diplomatique, stratégique, politique...
Koyaga (alias Gnassingbé Eyadema) arrive au pouvoir après avoir fait tuer ceux avec qui il le partageait. Commence alors son initiation auprès des souverains des pays voisins, chacun s'évertuant, en l'accueillant dans leur palais, à lui expliquer les règles et tactiques du bon dictateur, avant que ne commence enfin son propre règne despotique.
Dans la langue vivante et impertinente qui lui est propre, Kourouma nous fait faire le tour de l'Afrique de l'Ouest et du Nord et nous raconte, avec verve, les personnalités de personnages haut en couleur tels que Mobutu, le roi Hassan II ou encore Houphouët-Boigny, dictateurs tout droit sortis de nos livres d'Histoire alors sans reliefs.
Il faut déjà porter un certain intérêt à L Histoire africaine contemporaine pour s'engager dans ce roman plein de références, même s'il prend souvent des allures de contes africains, ce qui lui donne des airs de réalisme magique que j'ai adoré, tout comme les expressions africaines très imagées dont il parsème le roman, découpé en veillées contées, selon la tradition orale.
Il a fallu que je m'accroche parfois et que je vérifie certains faits, mais j'ai été, en général, happée par cette lecture. C'est drôle, féroce comme ces dictateurs eux bien réels, impertinent et touché de sorcellerie. Quel grand écrivain que ce Kourouma! Prochain sur ma liste: Monnè, outrages et défis, mais aussi une très grande envie de vraiment consacrer plus de temps à la littérature africaine contemporaine.
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Kourouma nous propose de partager, à la nuit tombée, de magnifiques veillées sous le ciel africain. On rit, souvent, mais on frissonne aussi d'effroi, car ce conte fantastique est aussi et surtout une dénonciation du pouvoir despotique : quelques tyrans – ayant sévis dans quelques pays africains – sont aisément reconnaissables...
...Alors asseyez-vous en tailleur autour d'un bon feu (ou plutôt... le dos collé au radiateur du salon), et écoutez les griots faire le récit de cette histoire tragi-comique, car le bon général-président, se croyant flatté, se trémousse d'aise.
Il existe pas mal de romans qui sont ainsi des métaphores de l'histoire politique récente de l'Afrique et, pour ces magnifiques écrivains, des exutoires à la peur, à l'impuissance qu'ils ressentent...
Celui-ci tient une place toute particulière....le talent de l'auteur y est pour beaucoup. Oui, moquons-nous des tyrans, des dictateurs, de ceux qui se croient aujourd'hui puissants dans ce monde, car leur tyrannie s'effondre à chaque fois que résonne nos rires insolents !
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Comment terrifier les peuples en même pas dix leçons? Le héros de ce livre, dictateur sanguinaire de métier, a tellement de conscience professionnelle qu'il ira jusqu'à entamer une tournée auprès de ses collègues pour parachever sa formation. C'est à la « veillée IV », mais je le mets en exergue pour détromper tous les aigris qui se plaignent que la valeur travail se perd en ces temps décadents. Hé bien non, il y A des gens qui se décarcassent pour être à la hauteur de leur boulot, bande de pessimistes.

Au départ, musique ! Que sonnent la flûte et la kora et que s'élèvent les voix des deux griots. Le premier est Bingo, le sora c'est-à-dire le chantre ; le second est Tiécoura, son « répondeur » nommé en malinké cordoua, dans le rôle du bouffon, du fou du roi, à la parole libre car « il n'y a rien qu'on ne lui pardonne pas. » Ici commence la première des six veillées où sera dite l'histoire de Koyaga. C'est lui, le héros consciencieux dont je parle ci-dessus. Quelle ascension fut la sienne ! D'abord, chasseur, ensuite combattant en Indochine dans l'armée française, et finalement président-dictateur de la république africaine du Golfe. Du reste, président-dictateur, il l'est toujours –il semble même bizarrement increvable... Mais on n'est jamais trop prudent : c'est pour être certain de demeurer au faîte du pouvoir que Koyaga organise une grande cérémonie verbale en son propre honneur. Trônant au centre du cercle des plus grands chasseurs, il repaît ses oreilles du « récit purificateur » destiné à le protéger.

Ce qui m'a particulièrement intéressée dans ce livre, c'est non seulement l'art du conteur et la critique politique au vitriol, mais aussi l'arrière plan très présent de sorcellerie qui l'accompagne, et dont l'auteur joue de multiples façons. Ahmadou Korouma expliquait que son projet n'était pas d'endosser la langue française comme un simple costume apporté par le colonisateur, mais de la vriller de l'intérieur. Il nous transporte dans un autre univers mental en relatant en détail certaines pratiques magiques où les morts n'ont pas forcément dit leur dernier mot. Il fait par exemple vivre à l'un des personnages (Maclédio, compagon de route du tyran) une scène insolite et funèbre dont il fut lui-même témoin dans sa jeunesse *: celle des « danseurs de cadavre » qui portent rituellement le corps d'un de ses camarades de classe mort accidentellement. La mort était-elle vraiment accidentelle ? Maclédio n'y aurait-il pas joué un rôle? Aux danseurs de cadavre, interprètes bondissants des pensées du défunt, de le révéler...
Tout en soulignant la place de la magie dans sa culture, Korouma s'en sert également – et c'est jubilatoire- pour faire faussement partir le récit vers le merveilleux. Voici par exemple un homme capable de se métamorphoser en tourbillon de vent. Il «soulève feuilles et poussières, parcourt le jardin de la Résidence d'Est en Ouest et poursuit sa course folle dans la cour voisine» . Il se trouve que cet homme est un président en fuite (le prédécesseur de Koyaga) mais ils se trouve aussi que la cour où il se réfugie est, fort opportunément, celle de l'ambassade des Etats-Unis. Bien sûr, « les non-initiés, par ignorance, douteront de cette version des faits. Ils prétendront qu'un passage existait entre la résidence du Président et l'enceinte de l'ambassade. » Initiés ou non-initiés, je vous conseille en tout cas de goûter à la magie de cette langue d'une grande puissance poétique et politique.

*voir le livre de Jean-Michel Djian, Ahmadou Kourouma



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Citations et extraits (82) Voir plus Ajouter une citation
Bossouma, l'homme au totem hyène, ne connaissait qu'une préoccupation ici-bas : demeurer toujours le soldat le plus gradé de l'Afrique multiple de la guerre froide.

Il a accédé un lundi au pouvoir avec le grade de colonel. Le mardi matin, il s'attribua le titre et les étoiles de général. Quand on lui fit remarquer que sur le continent quatre autres dictateurs avaient déjà ce titre, il se proclama maréchal jeudi soir. Quand deux autres généraux le rejoignirent dans le maréchalat, il demande à la France, à son armée et à son peuple de le couronner empereur. La France, l'armée et le peuple du Pays des Deux Fleuves firent venir des invités et des journalistes du monde entier pour assister à son couronnement. Depuis, aucun autre dictateur n'avait encore obtenu la dignité d'empereur. Bossouma (puanteur de pet), l'homme au poitrail caparaçonné de décorations, restait sans conteste le militaire ayant le grade le plus élevé sur le continent des multiples dictateurs militaires.
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Les Zendés sont une ethnie du nord-est du Pays aux Deux Fleuves. Un des peuples les plus intelligents et les plus sages du monde parce qu'il était le seul à considérer l'amour à la fois comme un grand art et comme un sport. Aux jeunes enfants, on enseigne l'amour à l'âge auquel, dans les autres pays, les jeunes filles apprenaient la musique. Dans les villages zendés, pendant les chaudes saisons, s'organisaient des joutes d'amour quand, chez les peuples voisins, s'ouvraient des championnats de lutte.

Les femmes se disputaient l'étranger qui s'aventuraient dans un village zendé. Et celle qui parvenait à se l'approprier l'entraînait immédiatement dans le lit, le balançait, le manipulait jusqu'à l'épuisement, jusqu'à la détumescence, jusqu'à l'anérection, et le chagrinait jusqu'à ce qu'il reconnaisse sa défaite, jusqu'à ce qu'il demande pardon à haut voix, « de sa pleine bouche ». Alors la femme zendé l'abandonnait vidé, inutile ; précipitamment nouait son pagne, sortait dans la rue, allait de case en case, de commère en commère, le caleçon à la main, et se vantait de son exploit.
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Pendant huit siècles, la mythologie et les génies contentèrent les Songhaïs : les cultes holey restèrent immuables. Avec la colonisation qui les frappa, les réprima et les dispersa à travers toute l'Afrique de l'Ouest, les Songhaïs s'aperçurent qu'il manquait une catégorie à leur univers : la méchanceté ; des dieux à leur panthéon : les méchants. Ils créèrent les hawka. Les hawka sont des génies méchants. L'état-major des génies méchants est calqué sur l'organisation de l'administration coloniale. C'est ainsi que dans cet état-major on trouve le génie méchant Gommo (le gouverneur), le Zeneral Malia (le général des militaires), le King Zuzi (le roi des juges), le Sekter (le secrétaire de l'administration) et le Kaporal Gardi (le caporal des gardes).

L'administration coloniale Croccichia qui termina gouverneur des colonies voulut par la force interdire les danses de possession. Il n'y parvient pas et y gagna lui-même d'être divinisé sous la forme du plus méchant des méchants génies, le Krosisya ou Kommando Magu (le commandant mauvais).
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Chaque cordoua était dans son accoutrement effarant de cordoua. Sur la tête, un bonnet ayant comme visière un bec de vieux vautour ; un bec de vautour pour signifier que tout homme est un cupide et un charognard comme le vil vautour. Et rien autre. Au cou, une calebasse pour mendier sa pitance, un gobelet pour boire, une cuillère pour manger et un gros os. Un gros os pour signifier qu'un homme est aussi un chien errant en quête perpétuelle de sa nourriture. Et rien autre. En bandoulière, une besace contenant une flûte pour faire de la musique et un sachet d'antipoison. Un sachet d'antipoison pour ne jamais consommer ce qu'un homme peut t'offrir sans s'assurer qu'il ne t'empoisonne pas. L'homme n'aime pas son prochain et il ne lui offre à manger que pour le supprimer. Et rien autre. À sa ceinture, une peau de singe avec la queue qui bat sur les fesses. La queue de singe sur les fesses pour signifier que tout homme est un péteur. Et pas autre chose. Quand il ne joue pas de sa flûte, des insanités, des balivernes. Des insanités et balivernes pour signifier que l'homme est un mensonger, un arbre de mensonges et de bêtises. Et rien, absolument rien autre.
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La vie est toujours douloureuse pour les gens qui aiment ceux qui les excluent et méprisent ceux qui les acceptent.
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« Les Soleils des indépendances »,d'Ahmadou Kourouma, c'est à lire en poche chez Points/Seuil.
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