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Christian Molinier (Traducteur)
EAN : 9782258079427
312 pages
Presses de la Cité (08/01/2009)
4.28/5   561 notes
Résumé :
"Je t'aime. Dors bien, ma chérie. Je t'en prie, ne te fais pas trop de souci." Telles furent les dernières paroles que Rob Hall, guide himalayen chevronné, adressa à sa femme depuis le sommet de l'Everest. Il ne devait pas redescendre vivant. Le 10 mai 1996, le Toit du monde fut le théâtre d'une véritable hécatombe. En route vers le sommet, quatre expéditions furent prises dans une violente tempête. En vingt-quatre heures, huit alpinistes, dont deux guides réputés, ... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (69) Voir plus Ajouter une critique
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Ces hommes sont vraiment fous ! Peu importe ce qui les motive – soif de gloire, de conquête, goût de l'aventure, fascination pour le risque suprême, l'argent, un romantisme désespéré, ou bien tout cela à la fois – ils sont prêts à toutes les souffrances, tous les sacrifices pour accomplir leur rêve démesuré : marcher sur le toit du monde.
8848 mètres ! A cette hauteur, nous avons quitté l'atmosphère pour rejoindre la troposphère où l'oxygène est une denrée rare. Mais pour fouler des pieds cette pointe d'aiguille balayée par le vent glacial, pour avoir vraiment la tête dans les nuages, que d'épreuves, de tourments, de risques encourus, de dangers écartés de justesse, de frayeurs surmontées… Les marches interminables et harassantes à travers les roches grises ; les contournements risqués des glaciers qui se déplacent ; les crevasses à traverser, les parois à grimper ; le vent glacial et le soleil brulant à supporter ; l'oxygène qui se raréfie et les membres qui s'affaiblissent. C'est au bord de l'apoplexie, au bout de l'épuisement que l'on atteint enfin la « zone de la mort ». Située à 7500 mètres d'altitude, l'homme y est indésirable, et c'est pourtant là que tout commence. Sagarmathaji, la déesse-mère de la terre, ne se laisse pas facilement approcher, et le chemin qui mène au toit du monde est semé de cadavres.
En bon journaliste d'investigation, John Krakauer commence par énumérer la longue liste de tous ces écervelés qui, dès le XIXème, ont tenté, pour le meilleur et pour le pire, la Grande Aventure, jusqu'à ce jour tragique du 10 mai 1996 où le « toit du monde fut l'objet d'une véritable hécatombe. » John Krakauer nous livre de la manière la plus objective possible les derniers moments sur l'Everest de ces alpinistes chevronnés aux horizons et aux motivations différents, mais qui ont ensemble ce point commun : un désir fou, une quête de l'impossible – de leur Graal – plus fort que la raison. A leur retour trop tardif vers le camp de base, ils sont surpris par un blizzard terrifiant. Certains sont avalés par la montagne ; d'autres parviennent à se sortir de cet enfer. Incapables de venir en aide à leurs compagnons, ou leur ayant tout simplement tourner le dos pour sauver leur peau, les survivants devront endurer le poids du remord.
Un roman-témoignage, un roman-enquête, d'une grande force qui parle de ces hommes submergés par leur passion, par ce quelque-chose de plus important que leur propre existence.
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Ce n'est pas nouveau, j'adore tout ce qui parle d'escalade et de montagne.
Tragédie à l'Everest... j'avais vu le film, il me fallait lire le livre.
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L'auteur, Jon Krakauer, journaliste américain pour le magazine Outside, participe à une expédition commerciale dirigée par Rob Hall.
Son rival en affaires, Scott Fisher, décide de guider son groupe de clients jusqu'au sommet le même jour.
D'autres groupes choisissent également cette date pour tenter de rejoindre le toit du monde.
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À tous les clients, dont certains sont inexpérimentés, s'ajoutent les sherpas et les guides.
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Ça en fait du monde sur cette montagne et forcément, on n'accède pas au sommet par 50 chemins, d'où des encombrements dignes de l'ouverture des grands magasins un jour de soldes.
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Tout le monde sait que le 10 mai 1996 fut meurtrier sur l'Everest...
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Dans ce livre auto-biographique, l'auteur nous raconte en détail le déroulement de l'escalade.
Il évoque également chaque participant de manière précise et c'est appréciable, on a l'impression de les connaître, sans toutefois s'y attacher parce qu'ils sont bien trop nombreux.
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J'étais d'ailleurs complètement perdue dans les noms / prénoms, mais ça ne m'a pas empêchée d'apprécier le récit.
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Jon Krakauer nous parle aussi de l'état du pauvre Everest, avec toutes ces allées et venues. Les tonnes d'ordures, les cadavres laissés sur place...
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Il tente bien de déterminer pour quelles raisons l'hécatombe a eu lieu, mais on ne saura jamais vraiment. L'horaire de descente pas respecté, les cordes non posées, et bien entendu la tempête qui s'est déchaînée.
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J'ai beaucoup aimé ce livre, mais ça fait déjà un moment que ma colère couve contre la détérioration de ce site d'exception.
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D'autre part, je ne comprends pas qu'on décide de monter à plus de 8 800 mètres alors qu'on est juste grimpé sur un caillou à Fontainebleau.
Franchement, je nage très bien, c'est pas pour autant que je vais entreprendre de traverser l'Atlantique avec une bouée canard !
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Je ne comprends pas non plus pourquoi des alpinistes chevronnés acceptent d'accompagner des novices dans une telle aventure.
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Et à propos d'argent, je ne comprends pas pourquoi les sherpas sont si mal payés avec tout le gros du boulot qui leur échoit.
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En tout cas, l'homme ferait bien de se rappeler qu'au bout du compte, c'est toujours la nature qui gagne.
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Le mot de la fin : L'auteur n'a pas recherché la beauté du style, il énonce les faits en mode brut de décoffrage. Les chapitres courts sont addictifs, et j'ai dévoré ce livre, n'ayant qu'une hâte, le retrouver quand je devais m'en éloigner.
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Ça faisait longtemps qu'un livre ne m'avait passionné à ce point !

« Tragédie à l'Everest » ou le récit d'une expédition sur le toit du monde qui a mal tourné.

Jon Krakauer, écrivain et alpiniste, travaille pour le magazine Outside qui lui commande un article sur l'Everest, il accepte de l'écrire à une condition qu'on lui laisse un an pour sa préparation physique. le journal accepte et le 29 mars 1996, il s'envole vers une aventure désespérément périlleuse. Il rejoint un groupe totalisant 8 personnes avec comme guide l'illustre Rob Hall d'origine Néo-zélandaise. Sur ces 9 personnes, cinq arriveront au sommet, mais un seul en reviendra vivant.

Quelques semaines après son retour, Jon Krakauer écrira son article, recoupant les témoignages de ceux qui tentaient l'ascension à cette période, c'est à dire début mai 1996.

La tragédie s'est produite le 10 mai, une tempête de neige s'abat sur la montagne, les éléments se déchainent et les alpinistes, pris au piège devront lutter pour résister au froid, à la fatigue, au manque d'oxygène et à l'individualisme. Cette lecture nous en apprend énormément sur l'expérience des aventuriers, leur préparation, les périodes d'acclimatation en haute altitude, la concurrence qui se joue entre les diverses expéditions commerciales. Les guides, anciens aventuriers, qui à un moment donné se voient contraints d'arrêter l'escalade sponsorisée, car trop dangereuse. Qui pourrait imaginer que pour attirer les sponsors, il faut surenchérir, aller toujours plus haut et quand on est allé au sommet, recommencer avec plus de contraintes.

Il faut beaucoup de détermination pour atteindre le sommet, il faut beaucoup d'intelligence pour faire demi-tour à quelques dizaines de mètres seulement. En tant que lectrice qui n'a jamais pratiqué l'escalade, je pensais que le plus dur était d'atteindre l'objectif. Ce à quoi je ne pensais pas, c'est qu'une fois arrivé, il faut redescendre. Franchir une seconde fois tous ces passages périlleux en ayant accumulé la fatigue de la montée, de ces jours où l'oxygène s'était raréfié. Je pensais bien aux gelures des doigts, du nez, mais pas aux oedèmes. Je m'imaginais les tensions qui pouvaient naître au sein du groupe, je n'imaginais même pas la compétition entre équipes. Je m'imaginais des alpinistes aguerris, j'étais loin de penser que les tickets pour l'Everest s'achetaient très cher, l'appât du gain augmentant les risques pris par le groupe. Un seul homme ou une seule femme ne sachant plus se gérer seul devient un danger pour les autres. D'ailleurs, on apprendra dans ce récit qui l'école russe, pousse les alpinistes à ne pas s'occuper des plus faibles, le but étant de monter et de rester en vie, pas de secourir autrui.

Il y a tant de choses dont je voudrais encore vous parler, mais le mieux, c'est de lire ce livre, qui vient de passer en tête de mon classement des lectures de l'année. C'est une histoire passionnante, prenante, enrichissante et qui vous fera voir l'alpinisme extrême d'une autre façon.

Vous l'aurez compris, « Tragédie à l'Everest » de Jon Krakauer, vient de rentrer dans ma catégorie coup de coeur. Et pour couronner le tout, Jon Krakauer qui est également l'auteur d"'Into the wild" possède une écriture très rythmée qui fait que l'on ne s'ennuie pas une minute.


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Tragédie à l'Everest est un ouvrage unique parmi les livres d'alpinisme.
Si vous entamez cette lecture, autant vous prévenir : ce que vous y trouverez n'est pas très joli.
Je serais tentée de vous mettre en garde et de vous dire : "Vous qui entrez ici, abandonnez toute espérance." Toute espérance et toute foi en l'être humain.
Jon Krakauer raconte, de l'intérieur, un drame qui s'est déroulé sur l'Everest en 1996 ; drame qui a coûté la vie à huit personnes, dont deux guides chevronnés. Un drame qui aurait pu, qui aurait dû, être évité.
À l'origine, l'auteur, journaliste pour un magazine d'aventure et excellent alpiniste lui-même, devait faire un reportage sur les expéditions commerciales.
Que viens faire le commerce avec l'alpinisme de haute altitude me direz-vous... et vous aurez raison !
Mais la nature humaine étant ce qu'elle est, la volonté de profit à tout prix, et la bêtise de penser que tout peut s'acheter se sont rencontrées et ont donné naissances aux agences commerciales spécialisées dans l'Everest.
Vous rêvez de vous "payer" le toit du monde ? Si votre compte en banque est suffisamment garni, aucun problème. Il suffit de vous inscrire, et l'agence organise tout pour vous : la mise disposition d'un guide, le recrutement d'une équipe de sherpas, la logistique... bref, tout, absolument tout.
Vous n'avez pas le niveau physique et encore moins mental pour vous lancer dans l'aventure ? Pas grave ! Vous payez, c'est tout ce qu'on vous demande.
Il va sans dire que les différentes agences se font une concurrence féroce, et essaient à tout prix d'avoir les meilleures statistiques, les meilleurs taux de réussite pour attirer le client. D'où des risques inconsidérés et des décisions déraisonnables, quelquefois lourdes de conséquence, à des altitudes où cela pardonne rarement.
Alors, que nous raconte Krakauer ? Toute l'histoire, et pas seulement celle de la tragédie, mais celle de toute l'expédition.
Après un bref rappel historique, l'auteur démarre le récit des évènements de 1996. L'arrivée à Katmandou, l'installation au camp de base, la progression dans les différents camps supérieurs. Un récit banal si j'ose dire, pas au sens péjoratif, mais au sens d'habituel, comme on peut en lire dans d'autres ouvrages. Une qualité d'écriture en plus, car Jon Krakauer écrit vraiment bien. Son livre est une chronique précise, vivante et humaine de l'aventure ; pleine d'émotion également, car l'auteur a écrit ce texte quelques mois seulement après les évènements.
Krakauer détaille les dangers et les conséquences physiologiques et psychologiques de la très haute altitude, en particulier dans ce que l'on appelle couramment la "zone de la mort", au-dessus de huit mille mètres. On comprend alors très bien pourquoi les sommets de plus de huit mille mètres forment une catégorie à part, et pourquoi ils sont réservés à des alpinistes spécialement entraînés physiquement et mentalement. On comprend également pourquoi dans l'ascension de l'Everest, à partir du moment où l'on atteint ce palier fatidique, il faut se dépêcher, et ne pas rester trop longtemps dans cette zone hostile à l'homme : la survie en dépend.
On comprend parfaitement bien, grâce au récit de Jon Krakauer, l'enchaînement des évènements qui ont conduit à la tragédie.
Du fait de l'encombrement lié au trop grand nombre d'alpinistes (dont certains, absolument pas au niveau, sont plus ou moins tirés et poussés par des sherpas) attaquant le sommet le même jour, les différentes cordées doivent faire la queue pour franchir le ressaut Hillary. Absurde ! Vous imaginez ? Une queue, comme à un remonte-pente d'une station de ski. À plus de huit mille mètres d'altitude ! L'heure limite raisonnable (14 heures) à ne pas dépasser pour entamer la descente dans de bonnes conditions se trouve en conséquence largement dépassée, et de nombreuses personnes, au lieu d'être à l'abri au camp, sont encore dehors lorsqu'une tempête se lève, et que la nuit tombe. On connaît le résultat.
Tragédie à l'Everest est un vibrant réquisitoire contre la dérive des expéditions commerciales. Que penser, lorsque l'on connaît l'histoire, de ces mots d'un guide de l'une de ces entreprises : "Nous avions décidé de fixer à 14 heures l'heure limite. Quiconque n'était pas tout près du sommet à cette heure-là devait faire demi-tour et redescendre. C'était à Scott d'obliger les clients à faire demi-tour. Nous en avions parlé et je lui avait dit qu'en tant que troisième guide je ne me sentais pas à l'aise pour dire à des clients qui avaient payé 65 000 dollars de redescendre." Voilà. C'est à désespérer, non ?
Si cette histoire vous intéresse, je vous conseille la lecture du livre de Lene Gammelgaard, "Là-haut. Une femme sur le toit du monde" Elle y donne un autre éclairage de la tragédie, ayant été elle-même membre d'une expédition commerciale, concurrente de celle dont faisait partie Jon Krakauer. Elle était de plus une alpiniste chevronnée, entraînée, dont la présence sur l'Everest était tout à fait légitime.
Enfin, si vous vous intéressez à l'alpinisme pur et authentique, je vous recommande vivement le livre d'Edmund Hillary "Au sommet de l'Everest". Vous revivrez la conquête de l'Everest, par des pionniers qui ont dû batailler pour trouver leur chemin, qui ne bénéficiaient pas de cordes et d'échelles fixes... de vrais aventuriers, de vrais alpinistes. Un livre magnifique !
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Contesté et peut-être contestable, Tragédie à l'Everest est le témoignage passionnant de Jon Krakauer sur la mortelle ascension du sommet à laquelle il participa le 10 mai 1996.

Ce jour-là, ils furent une trentaine à partir avec leurs piolets, 24 à parvenir tout en haut, mais 8 de moins à redescendre. La faute au blizzard, à l'encombrement des voies d'accès en ce jour d'affluence, aux mésententes entre les guides ou les sherpas, aux mauvaises décisions, aux candidats incompétents, mal préparés ou trop équipés, à l'ivresse des cimes qui empêche de renoncer...

Jon Krakauer décrit tous ces petits grains de sable dans les rouages qui seraient anodins en plaine mais se révèlent catastrophiques dans la 'zone de la mort', cette partie de la montagne au-delà de 7500m d'altitude où le manque d'oxygène, le froid, le vent et les crevasses empêchent de vivre très longtemps. C'est son interprétation qu'il donne, apparemment différente de celle que d'autres survivants ont donné dans d'autres livres, mais elle est bouleversante et fascinante.

En alpiniste passionné et compétent, il raconte aussi l'histoire de la conquête de l'Everest, les rêveurs et les inconscients qui s'y sont attaqués, les différents camps pour y parvenir, les phases d'acclimatation à respecter, les dérives des expéditions commerciales, le rôle des sherpas, la pollution, la polémique sur les bouteilles d'oxygène, le quotidien morose des alpinistes rythmé par les douleurs ou les malaises, l'impossibilité de penser correctement quand on est si près du but, la concurrence entre les équipes, l'individualisme ou la connerie de certains...

Je ne sais pas si c'est très normal ou moral d'avoir autant apprécié un témoignage sur la mort de 8 personnes dans des conditions glaciales et glaçantes. Mais le fait est que j'ai énormément aimé cette lecture, bien plus que Into the wild du même auteur.

Challenge Multi-Défis 15/52
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Installé sur le toit du monde, un pied en Chine, un pied au Népal, j'essuyai la glace qui s'était formé sur mon masque à oxygène, me recroquevillai pour me protéger du vent et contemplai distraitement l'immense Tibet. Avec une conscience affaiblie et détachée, je comprenais que j'avais devant moi un paysage spectaculaire. Pendant de nombreux mois, j'avais imaginé ce moment et anticipé l'émotion qu'il provoquerait. Mais maintenant, alors que je me tenais vraiment au sommet de l'Everest, je n'avais même plus la force de m'en soucier.
C'était au début de l'après-midi du 10 mai 1996. Je n'avais pas dormi depuis cinquante-sept heures. La seule nourriture que j'avais réussi à avaler se réduisait à un bol de potage soluble et à une poignée de cacahuètes enrobées de chocolat. Une toux violente, qui durait depuis des semaines, transformait chacune de mes respirations en épreuve douloureuse. A 8848 mètres, dans la troposphère, l'oxygène était si raréfié que mes aptitudes mentales étaient ramenées à celles d'un enfant attardé. Dans ces conditions, je sentais que j'avais froid, que j'étais fatigué, et rien d'autre.
J'étais arrivé au sommet quelques minutes après Anatoli Boukreev, un guide russe qui travaillait pour une expédition américaine, et juste devant Andy Harris, guide de l'équipe néo-zélandaise à laquelle j'appartenais. Je connaissais à peine Boukreev, mais en revanche j'avais appris à apprécier Harris au cours des semaines précédentes. Je pris rapidement quelques photos des deux hommes puis je me retournai et commençai à redescendre. A ma montre, il était 13 h 17. J'avais passé moins de cinq minutes sur le toit du monde.
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Sur onze kilomètres, le chemin montait et descendait parmi les pierres instables de la moraine latérale du glacier de Khumbu, ensuite il descendait sur le glacier lui-même. Scories, graviers et rocs de granit couvraient la glace mais, par endroits, la piste traversait une parcelle de glacier propre, une surface gelée et translucide qui brillait comme de l'acier poli. La glace qui fondait produisait en surface et en sous-sol un ruissellement furieux d'innombrables petits cours d'eau dont le grondement spectral résonnait dans tout le corps du glacier.
Au milieu de l'après-midi, nous parvînmes à un bizarre alignement d'aiguilles de glace dont la plus haute atteignait trente mètres. Il portait le nom d'"allée des Fantômes". Façonnée par le soleil, ces aiguilles donnaient une ombre turquoise et l'on pouvait distinguer à perte de vue leurs pointes recourbées comme des dents de requin. Helen, qui était passée par là d'innombrables fois, nous annonça que le but était proche.
Trois kilomètres plus loin, le glacier s'orientait brusquement vers l'est. Nous montâmes jusqu'au faîte d'une longue pente et là, étendue devant nous, nous aperçûmes une agglomération bigarrée de dômes en nylon. Plus de trois cents tentes logeaient les grimpeurs et les sherpas de quatorze expéditions sur un sol de glace parsemé de rocs. Il nous fallut vingt minutes pour trouver nos quartiers dans ce vaste campement. Pendant que nous franchissions la dernière pente, Rob descendit vers nous pour nous saluer avec un grand sourire : " Bienvenue au camp de base de l'Everest ! "
L'altimètre de ma montre indiquait 5365 mètres.
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Tout au long de la journée du 11 mai, ses amis ne cessèrent de le supplier de descendre par ses propres moyens. À plusieurs reprises, il annonça qu'il s'y préparait mais à chaque fois il changea d'avis et resta au sommet sud. À 15h20, Cotter, qui avait rejoint le camp de base, lui dit sur un ton de reproche : «Rob, il faut que tu descendes l'arête.»
Hall répliqua, agacé : «Ecoute, si je pensais pouvoir descendre les cordes avec mes mains gelées cela ferait six heures que je serai en bas. Envoie simplement deux gars avec un grand thermos et tout ira bien. – Ceux qui sont montés aujourd'hui ont dû rebrousser chemin à cause du vent, dit Cotter en essayant de lui faire comprendre aussi délicatement que possible que les secours avaient été abandonnés, aussi, le mieux serait que tu descendes un peu plus bas. – Je peux tenir encore une nuit si tu envoies deux gars avec du thé sherpa dès le matin, pas plus tard que 9h 30, 10 heures. – Nous t'enverrons des garçons demain matin.»
À 18h20, Cotter appela Hall pour lui dire que Jan Arnold était en ligne depuis Christchurch. Donne-moi une minute, dit Rob, ma bouche est sèche, je veux manger un peu de neige avant de lui parler.»
Un peu plus tard, il prit la communication est dit d'une voix lente, affreusement déformée : « Salut, ma chérie, j'espère que tu es dans un bon petit lit chaud. Comment vas-tu? – Je peux te dire que je pense beaucoup à toi. Tu as l'air en meilleure forme que je ne pensais… As-tu chaud? - Dans le contexte de l'altitude et de l'installation, je suis relativement à l'aise. –Comment vont tes pieds? – Je n'ai pas enlevé mes chaussures pour vérifier, mais je crois que j'ai quelques gelures. – Tout ira bien quand tu seras rentré à la maison. Je sais que tu vas être secouru. J’envoie vers toi toute mon énergie!»
Ce furent ces derniers mots. Les tentatives pour établir un contact radio avec lui dans la soirée et le lendemain restèrent sans résultat.
Douze jours plus tard, quand Breashears et Viesturs parvinrent au sommet sud, ils trouvèrent Hall allongé sur le côté droit, dans un creux de glace peu profond. La neige poussée par le vent avait recouvert le haut de son corps.
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Dans l'expédition de Hall, parmi les six grimpeurs qui atteignirent le sommet, deux seulement - Mike Groom et moi - en sont revenus. Quatre camarades, avec lesquels j'avais ri et vomi, et longuement parlé, avaient perdu la vie. Par mes actes - ou leur absence - j'avais joué un rôle direct dans la mort d'Andy Haris. Et pendant que Yasuko Namba s'éteignait sur le Col Sud, j'étais à trois cents mètres de là, blotti dans ma tente, sans imaginer une seconde sa lutte pour survivre. Je ne pensais qu'à ma propre sécurité. Ce genre de chose laisse dans l'esprit une marque qui ne s'efface pas en quelques mois de chagrin et d'auto-accusation.
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Plus la situation est improbable, plus grandes sont les exigences qu'elle impose à l'alpiniste, plus agréable sera ensuite le relâchement de toute sa tension. L'éventualité du danger ne fait qu'aiguiser son attention et sa maîtrise de soi. Là réside peut-être la raison d'être de tous les sports à risque : on élève délibérément le niveau d'effort et de concentration requis de façon, semble-t-il, à libérer son esprit des trivialités de la vie quotidienne. À une petite échelle, c'est un modèle de vie.
Mais il y a une différence. Dans la vie ordinaire, les erreurs peuvent généralement être corrigées et on peut trouver une sorte de compromis, alors que là, pendant une courte période, chaque action peut avoir des conséquences mortelles.
A. Alvarez, "Le Dieu sauvage"
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Le surf ressemble à "Un sport, un passe-temps". Pour ses initiés, c'est bien plus : une addiction merveilleuse, une initiation exigeante, un art de vivre. Élevé en Californie et à Hawaï, William Finnegan a commencé le surf enfant. Après l'université, il a traqué les vagues aux quatre coins du monde, errant des îles Fidji à l'Indonésie, des plages bondées de Los Angeles aux déserts australiens, des townships de Johannesburg aux falaises de l'île de Madère. D'un gamin aventureux, passionné de littérature, il devint un écrivain, un reporter de guerre pour le "New Yorker". À travers ses mémoires, il dépeint une vie à contre-courant, à la recherche d'une autre voie, au-delà des canons de la réussite, de l'argent et du carriérisme ; et avec une infinie pudeur se dessine le portrait d'un homme qui aura trouvé dans son rapport à l'océan une échappatoire au monde et une source constante d'émerveillement. Ode à l'enfance, à l'amitié et à la famille, "Jours Barbares" formule une éthique de vie, entre le paradis et l'enfer des vagues, où l'océan apparaît toujours comme un purgatoire. Un livre rare dont on ne ressort pas tout à fait indemne, entre "Hell's Angels" de Hunter S. Thompson et "Into The Wild" de Jon Krakauer.
William Finnegan a acquis ses galons de journaliste lors de la guerre civile au Soudan, en Afrique du Sud pendant l'Apartheid, dans les Balkans ou à Mogadiscio. Ses reportages sur les théâtres d'opérations sont le fruit de longues immersions et de patientes observations, ou, comme il aime à le résumer : “Je fouine, je parle aux gens, j'attends.” Il a reçu en 2016 pour "Jours Barbares" le prestigieux Prix Pulitzer.
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