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EAN : 9782707173478
504 pages
La Découverte (20/09/2012)
4.25/5   10 notes
Résumé :
Le spectre de la modernisation hante la planète. On compare les sociétés en fonction de leur plus ou moins grand degré de modernisation ; on s'interroge sur ses vertus, ses dangers, son degré d'universalité ou son obsolescence.

Or, chose étrange, on manque d’une description anthropologique de ceux qui se désignent comme étant à l’origine de ce mouvement. Que nous est-il donc arrivé ? De quoi pouvons-nous hériter ? Comment bien nous présenter face aux... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (1) Ajouter une critique
La modernité se définissait par un projet : s'émanciper de la nature par la culture. Elle est en échec sur un point au moins : les civilisations « modernes » sont des facteurs puissants de dégradation de l'environnement. Surtout, comme l'a montré l'anthropologue Bruno Latour (Sciences-Po, Paris) avec un précédent livre, « Nous n'avons jamais été modernes » , elles n'ont jamais réussi à séparer culture et nature. En témoignent les « objets hybrides » - OGM, procréation médicalement assistée, réchauffement climatique – encouragés par le développement des techniques et des connaissances.
Mais au fond, fallait-il tenir à un tel projet ? Alors que la notion de progrès a perdu son aura d'évidence, voici la question à laquelle s'attelle l'auteur. Pas tout seul : son livre est un guide ouvert à qui souhaite contribuer à établir ce à quoi nousl les modernes, tenons vraiment. Il propose inais un répoertoire de « modes d'existence », soit des façons de comprendre et d'agir sur le monde, recouvrant et dépassant nos valeurs. La science, valeur suprême des modernes, y côtoie d'autres valeurs familiales (droit, politique, morale) mais aussi des catégories davantage en usage chez les anthropologues enquêtant sous des latitudes lointaines (métamorphose, attachement, habitude…). L'anthropologue y tient : il faut interroger nos valeurs comme on le ferait de celles d'un peuple inconnu. A l'issue de cette enquête, il espère récolter les preuves qui attesteront des zones de friction entre modes d'existence et, par là, de leur pertinence comme outils de qualification de nos valeurs. Ceci afin d'élaborer une diplomatie des modes d'existence, qui ne dirait pas que toutes les vérités se valent, mais saurait les faire dialoguer entre elles.
Le projet est ambitieux. Ce livre, une « ébauche » de 500 pages, dont une version augmentée se déploie en ligne, fait déjà référence. Les lecteurs motivés seront récompensés : le plaisir de lecture est là, grâce au souffle des idées et à la plume de l'auteur.
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Citations et extraits (14) Voir plus Ajouter une citation
Ils sont assis autour d'une table circulaire, une quinzaine d'industriels français, responsables du développement durable dans différentes sociétés. En face d'eux, un chercheur du Collège de France, Spécialiste des questions de climat. Nous sommes à l'automne 2010 alors que fait rage la querelle sur l'origine humaine ou non du bouleversement climatique. L'un des industriels pose au professeur une question que je trouve quelque peu désinvolte: "Mais pourquoi faudrait-il vous croire, vous plus que les autres?" Je m'étonne. Pourquoi met-il sur le même pied, comme s'il s'agissait d'une simple bataille d'opinions, les spécialistes du climat et ceux qu'on appelle les climatosceptiques - en dévoyant quelque peu le beau vocable de "sceptique"? Disposerait-il par hasard d'un instrument de mesure supérieur à celui du spécialiste? Comment ce simple apparatchik pourrait-il être en position de balancer les positions des experts selon un calcul par moins? Mais, surtout, comment ose-t-il parler de "croyance" à propos des sciences du climat? Décidément je trouve la question presque choquante, surtout de la part de quelqu'un dont le métier consiste à s'intéresser de près à la question écologique. La controverse a-t-elle tellement dégénéré au point que l'on puisse parler du sort de la planète comme si l'on était sur le plateau d'une joute télévisée en faisant semblant d'égaliser les positions?
Je me demande comment le professeur va répondre : est-ce qu'il va remettre à sa place le fâcheux en lui rappelant qu'il ne s'agit pas de croyance mais de fait? Est-ce qu'il va résumer à nouveau les "données indiscutables" qui ne laissent guère de place au doute? Or, voilà qu'à ma grande surprise, il répond dans un long soupir : "Si l'on n'a pas confiance dans l'institution scientifique, c'est très grave." Et de se mettre à déployer devant son auditoire le grand nombre de chercheurs impliqués dans l'analyse du climat, le système complexe de vérification des données, des articles et des rapports, le principe du jugement par les pairs, l'immense réseau des stations, des bouées dérivantes, des satellites, des ordinateurs qui assurent le flux des informations -puis il se met à expliquer, debout au tableau, les pièges des modèles nécessaires à la rectification des données ainsi que les doutes successifs qu'il a fallu lever sur chacun des points. "Et, dans l'atre camp, ajoute-t-il, qu'est-ce qu'on trouve? Aucun chercheur compétent dans le domaine disposant de l'équipement idoine." Pour répondre à la question posée, le professeur s'est donc servi de la notion d'institution comme du meilleur instrument pour mesurer le poids respectif des positions. Il ne voit pas de cour d'appel plus élevée. Et c'est bien pourquoi il ajoute que "perdre confiance" dans cette resource serait, pour lui, "très grave".
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Les paroles amoureuses ont ceci de particulier qu'elles donnent à la personne à qui elles s'adressent l'existence et l'unité que celle-ci n'avait pas. "je me sentais loin", "j'étais indifférent", "j'étais comme mort", "le temps ne passait pas, maintenant je suis là, présent, à tes côté", "Nous voilà ensemble", "Nous nous sommes beaucoup rapprochés". L'erreur d'adressage serait ici de croire que ces paroles ne nous visent pas, qu'il faut les éviter, comme s'il s'agissait des autres paroles, celles qui permettent de s'adresser aux êtres de la métamorphose. Or, là, au contraire, se fermer à ces paroles - ou ne jamais les prononcer pour les autres -, c'est disparaître pour de bon - ou faire disparaître les autres pour de bon. Quel plus grand malheur pour quelqu'un que de n'avoir jamais été visé par une parole amoureuse : comment se sentirait-il une personne s'il n'avait reçu de tel dons? Qui se sentirait quelqu'un sans avoir été ainsi adressé? Quelle misère de n'avoir jamais suscité que l'indifférence! Ce dont l'expérience donne l'assurance toujours à reprendre, c'est que cette certitude d'exister et d'être proche, d'être uni et complet, nous ne la tirons pas de notre propre fond mais qu'elle vient d'ailleurs, qu'on la reçoit, que c'est un don toujours immérité qui circule par l'étroit canal de ces mots salutaires.
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Entrée en scène de l'Homo faber qui moule ses besoins à travers des outils par une "action efficace sur la matière". Cinq petits mots aussi parfaitement innocents que parfaitement inadéquats pour saisir un tel zigzag : il n'y a pas de matière, on n'agit pas "sur" elle, l'action n'est pas "efficace" (elle le sera peut-être, mais plus tard) et, enfin, comme nous allons le voir, il n'est pas sûr du tout que ce soit une "action", en tout cas pas l'action de "quelqu'un".
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Quelle misère de n'avoir jamais suscité que l'indifférence! Ce dont l'expérience donne l'assurance toujours à reprendre, c'est que cette certitude d'exister et d'être proche, d'être uni et complet, nous ne la tirons pas de notre propre fond mais qu'elle vient d'ailleurs, qu'on la reçoit, que c'est un don toujours immérité qui circule par l'étroit canal de ces mots salutaires.
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Si les géologues eux-mêmes, gens plutôt rassis et sérieux, font de l'humain un force de même ampleur que les volcans ou même que la tectonique des plaques, une chose est devenue sûre: nous n'avons plus aucun espoir de voir demain davantage qu'hier se distinguer définitivement la Science et la politique.
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Videos de Bruno Latour (26) Voir plusAjouter une vidéo
Vidéo de Bruno Latour
Mardi 31 mai 2016, Bruno Latour, philosophe et sociologue des sciences, auteur de Face à Gaïa a été présent sur le plateau des Mardis des Bernardins. L'occasion pour la Lettre de la recherche de vous avoir proposé un entretien avec celui qui à travers les sciences, les techniques, l'économie, l'esthétique et la théologie pensait l'introduction des êtres de la Terre dans le processus politique.
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