Arnhild Lauveng nous transporte dans son voyage en schizophrénie, elle nous invite à découvrir cette maladie mentale, sa maladie, puisqu'elle revient de loin, diagnostiquée schizophrène à l'âge de 14 ans, elle va revenir dans le monde réel après plusieurs années d'internement.
Dans son autobiographie, elle revient sur sa maladie et ses conséquences, elle nous livre ses pensées de schizophrène à l'époque où elle était coupée de tout contact avec la réalité. Elle évoque les premiers symptômes comme les hallucinations, les voix intérieures puis sa descente aux enfers, l'isolement, l'hospitalisation en cercle fermé, ses multiples tentatives de suicides, ses automutilations, ses souffrances, ses terreurs, l'indifférence des uns et l'empathie des autres, l'humiliation mais Arnhild nous fait surtout partager son chemin vers la guérison.
Ce livre est un message d'espoir car d'après des études un tiers de patients atteints de schizophrénie guérissent et Ahnhild Lauveng en fait partie. Aujourd'hui elle est psychologue et n'endosse plus le rôle de patiente mais de thérapeute, elle a donc un avantage sur les autres car cette maladie elle l'a vécue.
J'ai été affectée par son témoignage, c'est une femme qui revient de tellement loin et quel courage il lui a fallu pour endurer ce mal, il faut vraiment être accroché à la vie pour supporter toute cette souffrance !
Mais si ce témoignage me touche autant c'est que je connais une personne très proche qui est atteinte de schizophrénie, et je sais à quel point cette maladie mentale est une souffrance au quotidien.
Il s'appelle Guillaume, il a été diagnostiqué schizophrène à 18 ans, depuis 20 ans il se bat contre cette maladie, et ce garçon c'est mon petit frère.
Avant que la maladie ne le touche, Guillaume était un garçon plein de vie, joyeux, heureux, drôle, intelligent et beau, très beau. Enfant, les gens se retournait sur lui et lui disait qu'il ressemblait à un ange ; blond vénitien, les yeux verts et un visage si doux, sa beauté attirait tous les regards mais malheureusement à force d'être admiré, il a fini par croire qu'il était le plus beau ! Il a eu une enfance très heureuse, c'était le petit dernier d'une grande fratrie, choyé par les frères et soeurs et surtout pas mes parents, il est devenu l'enfant roi.
Mais voilà, la maladie est arrivée sournoisement, nous n'avons rien vu, pourtant il y avait des signes avant coureurs. Il a commencé à ne plus accepter la couleur « noir », au point d'arrêter le café, bien sûr nous avons pensé que c'étaient les caprices d'un adolescent.
Et puis ça a été très vite, il s'est intéressé à la religion, à l'époque ma mère très croyante avait à son chevet la bible, il a commencé à la lire et ne plus la lâcher. Il prenait tout à la lettre, ça devenait très inquiétant ! Il ne dormait plus, la nuit il faisait des incantations et mangeait des cailloux. Une nuit, guidé par des voix intérieures, se croyant vêtu de blanc (en fait il était nu), il est sorti de chez mes parents, il a été au bord de l'étang du village, a pris une barque et a jeté tous ses vêtements en plein milieu de l'eau.
Mes parents étaient dans le déni, et je peux les comprendre, c'est dur très dur, et c'est nous frères et soeurs qui avons pris l'initiative de le faire interner...
Il a reçu un traitement de choc, et la première fois que je lui ai rendu visite au pavillon de l'HP, accompagnée de ma mère, j'ai vu un jeune garçon méconnaissable, il avait perdu toute sa beauté, il était terrorisé, j'ai pensé honteusement qu'il serait mieux mort. Et ma mère, pauvre maman je n'ai pas les mots pour exprimer son désarroi quand elle a vu son fils parmi les malades.
Depuis 20 ans Guillaume fait des allers retours à l'HP, la schizophrénie lui a volé sa vie.
Heureusement il connaît de longs moments d'accalmie, mais comme il refuse les traitements chimiques, il les arrête dès qu'il sent qu'il va mieux, et c'est la rechute et inévitablement le chaos, bouffée délirante, paranoïa, dépression, tentative de suicide...
Mon frère est un enfant dans un corps d'adulte, je pense qu'il n'a jamais voulu quitter le monde de l'enfance et son entrée dans le monde des adultes a été brutale.
La schizophrénie souffre d'une mauvaise image, elle suscite le rejet, la peur dans notre société, un schizophrène est souvent comparé à un fou dangereux, mais les personnes atteintes de cette pathologie sont surtout en danger pour eux-mêmes !
Un livre que je conseille vivement pour ceux qui veulent comprendre le monde de la schizophrénie.
Je remercie Babelio de m'avoir sélectionnée pour cette masse critique et je remercie également les éditions Autrement pour l'envoi de « Demain, j'étais folle ».