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EAN : 9782070149469
112 pages
Gallimard (29/05/2015)
3.33/5   12 notes
Résumé :
«Les partis ne vous ont pas manqué. Vous avez toujours refusé. Pourquoi? One ne le saura jamais.» Ainsi parle à Mademoiselle Clarisse – cinquante-quatre ans – un client de son café-épicerie-mercerie de village. Nous non plus, nous ne saurons pas pourquoi Clarisse – fort sociable pourtant, et qui entretient avec sa clientèle des relations harmonieuses – a vécu et vit solitaire. Mais nous comprenons qu'il y a en elle quelque chose de noué, et qui ne favorise pas les r... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (5) Ajouter une critique
Violette Leduc (1907-1972) est une romancière française. Fille illégitime de Berthe Leduc et d'André Debaralle, un fils de famille de la haute bourgeoisie de Valenciennes qui refuse de reconnaître l'enfant, elle est marquée par la honte de sa naissance. Une vie difficile et scandaleuse pour l'époque, des liaisons homosexuelles, un court mariage ou des amours masculines sans retour car ce sont eux-mêmes des homosexuels, un avortement où elle manque mourir. En 1939, elle est secrétaire pour la Nouvelle Revue Critique, en 1942 elle commence à écrire des souvenirs d'enfance. En 1945, présentée à Simone de Beauvoir elle en tombe amoureuse et la compagne de Sartre qui reconnait immédiatement son talent, la soutiendra toute sa vie. En 1964 elle frôle le Goncourt pour son roman La Bâtarde, une fiction autobiographique. Violette Leduc a fait de sa vie la matière principale de ses livres, ce qui en fait une des pionnières de l'autofiction. La Vieille fille et le mort, paru en 1958, vient d'être réédité.
Dans un petit bled de province, mademoiselle Clarisse tient un de ces petits commerces qui font café-épicerie-mercerie. Un samedi soir, à l'heure de la fermeture et qu'aucun client ne traine alentour, Clarisse découvre un homme mort au milieu de la salle du café. Un inconnu, arrivé ici on ne sait comment. Clarisse, vieille fille de cinquante-quatre ans, « Les hommes ne m'ont pas fait vieillir. Je les aimais d'amitié sans en aimer aucun », épuisée de solitude, voit ce mort comme une chance pour elle : « Il était temps que quelque chose arrive »
Toute la soirée elle va s'inventer une vie avec cet homme tout en réparant ses chaussures ou lavant ses pieds et le col de son imperméable. Leur intimité n'étant troublée que par les arrivées d'un gamin souvent laissé seul par ses parents et qui trouve chez Clarisse un refuge accueillant, du commis voulant absolument boire une dernière bière avant d'aller se coucher ou de la vieille et suspicieuse madame Lambris venue acheter un métrage de ruban.
Le roman est très court, d'une écriture singulière qui place Violette Leduc dans la catégorie des écrivains exigeants. Et si le titre de l'ouvrage, à la Simenon, pourrait évoquer une sorte de polar, il n'en est rien évidemment. Il s'agit d'un texte à la beauté poétique et émouvante, unité de temps (une nuit) et de lieu (le petit commerce) où quelques solitaires tentent désespérément de trouver une compagnie. Clarisse poussant cette quête aux limites du sensé en voulant arracher au mort un souvenir qui puisse enluminer le reste de sa propre vie.
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Petit roman au style superbe.

Le thème abordé est hautement symbolique : une "vieille fille" prend soin toute une nuit d'un homme qu'elle a trouvé mort dans sa boutique, un café épicerie, avant de signaler le décès aux autorités.

On comprend bien ce que suggère l'auteure. Pourtant je n'ai pas adhéré un instant à ce récit dont le principal intérêt est le ciselage de l'écriture, jusqu'à parvenir à un maximum d'effet avec un minimum de moyens.

Cela tient de l'exercice très réussi.
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Clarisse a donc la cinquantaine, elle vit tranquillement, on va la suivre tout au long du récit dans un lieu unique : son épicerie. Son épicerie semble être en quelque sorte le coeur du village ou en tout cas, un lieu de rencontre. Sa vie semble être relativement triste, elle est entourée de gens, mais également de la solitude. Vieille fille, on ne sait pas vraiment ce qu'il s'est passé, mais elle est seule et n'a jamais connu l'amour.

Mais les choses changent quand justement elle découvre cet homme qui est venu mourir chez elle, cet homme qu'elle ne connaît pas mais dont elle va prendre soin. Elle va s'inventer toute une vie avec lui, elle va s'interroger sur ce qu'il était avant d'arriver là, comment il est arrivé aussi, après tout, ne le connaissant même pas on peut facilement se dire que c'est incongru de le trouver là, mort, chez elle.
Clarisse va lui faire sa toilette, elle va attendre de lui qu'il se réveille en quelque sorte, en tout cas qu'il revienne à la vie pour être avec elle, pour qu'elle ne soit plus seule.

Tout en étant très étrange comme situation : une femme qui trouve un homme mort chez elle et qui décide de le cacher afin le garder pour elle, on ne peut que ressentir de la compassion pour elle. Clarisse a toujours été seule de ce qu'on en sait, on ne connaît pas son passé mais pour je ne sais quelle raison, personne n'a jamais été là pour elle. Finalement, elle s'accroche à cet homme mort, elle en fait son amour inconnu, elle le transforme en cette chose qu'elle n'a jamais eue.

Ce récit très touchant et perturbant de l'intimité de Clarisse avec ce mort est dérangé par la présence d'un enfant qui revient sans cesse, un enfant dont l'on sait qu'il a coutume de venir se réfugier chez notre protagoniste. Tout comme cette dernière, nous voudrions que l'enfant s'en aille, qu'elle retourne auprès de son "homme", mais au bout du compte, cette personne qui a interrompu sa vie est bel et bien morte et il n'y a rien à trouver dans la mort, rien à aimer et bien que ce soit douloureux, Clarisse va devoir se résoudre à le laisser partir.

Lors de ma lecture de ce récit, j'avais été fasciné par le comportement de Clarisse vis-à-vis de cet homme mort, le soin qu'elle mettait dans sa toilette, pour remettre son col, pour remarquer des détails relativement insignifiants quand l'on trouve chez soi un inconnu mort, comme le fait de parler du fait qu'il porte des chaussures sans chaussettes - je ne sais pas pourquoi ça m'a marqué.
La vieille fille et le mort est une histoire très courte, même pas 100 pages, une histoire originale de cette pauvre femme qui n'a jamais vécu autrement que par le biais de l'amitié, qui n'a jamais eu personne sur qui compter, malgré le fait qu'elle semble entourée.

Mon premier Violette Leduc, je voulais commencer par un texte court, on m'avait mis en garde sur la plume authentique et parfois difficile de l'auteure et je ne voulais pas la découvrir avec le petit pavé qu'est La bâtarde.

Mon avis est en intégralité sur le blog :
Lien : http://allaroundthecorner.bl..
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Ce court roman (ou nouvelle) date de 1958. L'histoire est celle de Clarisse, une femme qui tient un café épicerie, qui un jour trouve un homme mort chez elle. Mais au lieu de donner l'alerte, elle observe et prend soin de cet homme, pour qui elle éprouve de l'empathie, pendant environ 24h. Dit comme ca, le concept est glauque mais Violette Leduc arrive a transmettre émotion et empathie dans cette histoire originale et ce notamment grâce aux personnages secondaires, tous des abandonnés: un enfant livré à lui-même, une vieille paysanne, et Clarisse elle-même, qui est restée célibataire.
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Une vieille femme qui tient un bar trouve un mort sur le pas de sa porte.
Qui est-il? Quels étaient ses désirs?
Autant de questions ajoutées à la solitude de cette femme et de mystères qui font que cette femme va fortement s'attacher à ce mort.
Un style assez rude, sec, proche de Duras qui m'a laissé loin en terme d'émotion.
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Citations et extraits (8) Voir plus Ajouter une citation
Elle alluma dans le café pour revoir et pour vérifier, elle éteignit. La lumière était cruelle. Elle l’hébergeait, elle lui devait de l’intimité. IL était mort, ce n’était pas une raison pour sonner le tocsin. Il l’avait presque choisie en choisissant sa maison. Il ne se reposait pas aux environs du silo, la plaine avec le vent entrant par les trous de ses chaussures ne glaçait pas ses chevilles. « Ah non ! » dit tout haut Clarisse. Elle le dérobait aux rafales, aux coups de vent. La respiration est capricieuse. Un estivant qui venait en vacances dans le village, qui décousait et recousait les morts dans les amphithéâtres le lui disait. Elle lui a repris les pieds de la table. Il le lui reprochera s’il s’éveille. On le fouillera, on cherchera ses papiers. On ne lui essuiera pas le filet de sang si elle le déclare.
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La femme prolongeait un baiser sage sur la paupière de l’homme. Il n’y a que ceux de la ville pour se recueillir ainsi. Elle les servait, elle oubliait de leur dire merci pendant qu’ils payaient. Le luxe des sentiments la rendait baroque. Cet homme pieds nus dans ses chaussures a-t-il une femme qui choie ses paupières ? Il faut calmer les paupières avec des baisers étudiés.
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« Vous n’êtes pas d’ici. Je peux vous parler. J’avais le temps pour ami et pour amant pendant mes insomnies. C’est l’aube qui a blanchi mes cheveux. Les hommes ne m’ont pas fait vieillir. Je les aimais d’amitié sans en aimer aucun. Les saisons revenaient, je désappointais mars, avril, mai. Le printemps n’éclate pas sur un marbre de cheminée. Les saisons me punissaient : le chaume me blessait les mains, les épis se détournaient, les bleuets grisonnaient, la cage de la tourterelle se voilait. »
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De nouveau, elle lui reprit ses mains, elle souffla sur elles. Donnez-moi quelque chose, ne partez pas gémissait Clarisse. Ce qu’elle lui demandait, ce qu’elle lui disait, ce n’était que le son de sa voix qu’elle entendait comme elle ne l’avait jamais entendu. Clarisse n’osa plus regarder. Un mort c’est un dernier miroir. Elle plissait le tissu de l’imperméable, elle se perdait avec les sillons, elle espérait qu’il lui donnerait un grain de blé : le grain de blé de ses douleurs et de ses fatigues. Les plis se défaisaient aussitôt formés. Le mort lui échappait. Il ne voulait rien lui donner.
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Elle rêvait pour deux, elle s’épuisait. Elle met ses mains devant ses yeux. La cicatrice qu’elle revoit en pensée, le silence entre les grognements au plafond veulent ce qu’elle veut. Est-ce que je sais ? dit Clarisse à voix haute, en enlevant ses mains de ses yeux. Elle revient au visage comme nous revenons à la tendresse. Pleurait-il avant d’entrer chez elle ? Ses lèvres étaient pleines de larmes.
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Videos de Violette Leduc (11) Voir plusAjouter une vidéo
Vidéo de Violette Leduc
Lecture par Mathilde Forget & Laura Vazquez Festival Paris en toutes lettres
En 1955, les Éditions Gallimard publient une édition censurée de Ravages de Violette Leduc. Un drame personnel et littéraire pour l'autrice, qu'elle décrit encore vingt ans après comme un « assassinat ». Cette année, une nouvelle édition propose enfin une structure revue et augmentée des passages censurés, au plus près de l'entreprise romanesque et autobiographique de Violette Leduc. Mathilde Forget qui a écrit l'une des deux préfaces, propose une soirée mêlant archives, lectures et chansons, accompagnée par la poétesse et romancière Laura Vazquez, pour fêter ensemble cet événement littéraire.
« Mon baiser est intègre lorsque j'embrasse indirectement la peau. La bouche s'épuise, la faim persiste. » Violette Leduc, Ravages
À lire – Violette Leduc, Ravages (édition augmentée), coll. « L'imaginaire », Gallimard, 2023. Mathilde Forget, de mon plein gré, Grasset, 2021. Laura Vazquez, le livre du large et du long, éditions du sous-sol, 2023.
Son : Lenny Szpira Lumière : Hannah Droulin Direction technique : Guillaume Parra Captation : Claire Jarlan
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