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Critique de clemia


Après avoir terminé l'année en milieu carcéral avec "Nos jours heureux", de Gong Ji-young, c'est reparti avec le roman de Lee Jung-myung, "Le garde, le poète et le prisonnier". le roman commence en 1944, au pénitencier de Fukuoka. le gardien Sugiyama, connu pour ses accès de violence, est retrouvé mort, les lèvres cousues. Bien que la scène soit un choc, elle n'est toutefois pas une surprise. Sugiyama était détesté, méchant et même cruel. En particulier avec les prisonniers Coréens, logés dans le pavillon 3, vus comme une bande de rats et de terroristes dangereux sans pitié. le meurtre est d'ailleurs sans doute l'oeuvre de l'un d'entre eux. le narrateur, le gardien Watanabe est alors chargé de l'enquête. Jeune, animé par une volonté de rendre justice, il se lance dans cette enquête avec diligence.

Pourtant, au fur et à mesure que ses recherches progressent, son regard sur Sugiyama, sur les Coréens, sur la guerre, sur la prison dans laquelle il travaille va changer. En particulier grâce à une rencontre. Yun Dong-ju, jeune Coréen épris de lettre et lui-même poète, semble avoir connu un tout autre Sugiyama. Un homme blessé touché par les mots de ce jeune homme, par sa poésie. La réalité de la mort du gardien serait donc bien plus complexe...

Watanabe interroge les prisonniers et cherche à retracer la vie de son prédécesseur mais aussi celle de Yun Dong-ju pour comprendre l'amitié qui les a liés, miroir de celle qui commence à éclore entre lui et le poète. Lee Jung-myung rend avec beaucoup d'émotions et dans un contexte extrêmement douloureux les terribles réalités de la guerre, mais aussi du traitement des Coréens pendant l'occupation japonaise, alors privés de leur langue, de leur nom, de leur identité et de leur dignité.
L'auteur rend un hommage lumineux à un l'un des poètes Coréens les plus connus, Yun Dong-ju en proposant une réécriture de ses dernières années dans cette prison. Torturé, blessé, assassiné à petit feu, le poète a réussi jusqu'au bout à insuffler humanité, réconfort, lumière et soif de liberté aux prisonniers Coréens mais aussi aux deux Japonais avec lesquels il aura lié une véritable amitié, née dans la découverte et l'amour de la littérature, la poésie et la musique. Voir bourgeonner ces amitiés hésitantes, synonymes de trahison a quelque chose de très beau. Comprendre les coeurs de ces hommes, et les voir regagner une sensibilité au monde et aux autres grâce à la poésie m'aura émue de bout en bout.

Bien que cette édition française soit une traduction d'une traduction, ce roman reste selon moi à lire pour son histoire, la brutalité et les horreurs racontées mais aussi pour la transcendance dont font preuve les personnages et l'appréhension du monde exacerbée par le pouvoir des mots.
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