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sur 208 notes
"Ah ! quel ennui que de vivre ! et on vit tout de même... par curiosité. On attend quelque chose de nouveau... C'est ridicule et absurde !"

Je me souviens encore du "camarade professeur", tonnant devant le tableau noir. Il soutenait que Petchorine, le héros de ce livre, était un personnage tout à fait condamnable, l'image même d'une vie immorale, un lâche incapable de s'intégrer correctement dans la société. Et on écoutait, et ensuite on recopiait tout cela comme des ânes dans nos rédactions, parce que personne n'avait vraiment envie de lire le livre. En tant que héros de "notre" temps, celui de la "normalisation" de la fin des années 80 en ex-Tchécoslovaquie, le blasé cynique Petchorine a lamentablement failli.
Quelques années plus tard j'ai découvert la poésie de Lermontov. Elle m'a fait plus ou moins réviser l'étiquette de "l'homme inutile", que l'on collait alors systématiquement à tous les héros "byroniens" ; à tous ces individualistes poussés sans cesse par l'envie de "partir ailleurs", dégoûtés et fatigués par la société dans laquelle ils vivent. Et maintenant, après la lecture d'"Un héros de notre temps", je me rends compte une fois de plus à quel point on peut facilement se laisser convaincre par l'opinion d'un tiers, simplement parce qu'on est trop paresseux pour vérifier les faits.

Contrairement à mon camarade prof, j'étais enchantée par la franchise du héros de Lermontov, qui dévoile sans pudeur ses pensées les plus secrètes, en analysant froidement ses faiblesses et ses erreurs. Petchorine est tellement différent de tous ces héros positifs et clairement profilés de l'ère héroïque des radieux lendemains, qu'on peut difficilement considérer sa recherche et ses tâtonnements comme quelque manifestation d'inutilité et de futilité. C'est davantage une rébellion intérieure, une décision de chercher la vérité même dans cette bouse sociale censurée dans laquelle il a vécu et qui l'a largement façonné.

Lermontov a doté son Petchorine d'intelligence qu'il utilise à son avantage, et grâce à laquelle il s'élève au-dessus de son entourage. L'un de ses passe-temps favoris est de manipuler les gens, en particulier les femmes stupides, mais après un certain temps il n'y trouve plus aucune satisfaction. Il désire plus qu'un divertissement qui vide agréablement l'esprit. Mais sa nature ne lui permet plus de trouver le bonheur - même illusoire - ni dans l'amour, ni dans l'amitié. Prisonnier de son intraitable ego et de son arrogance, il commence à mépriser tout, y compris son éducation et son intelligence, le destin, l'humanité et même sa propre mort.
Il fait en effet triste figure dans la joyeuse société de la petite-bourgeoisie, dans ce théâtre tragicomique où les uns font semblant d'être sincères, et les autres font semblant de faire semblant d'être sincères.
Comme il ressemble à Onéguine de Pouchkine, ou à Oblomov de Gontcharov ! A Manfred, Heathcliff et tant d'autres. Comme il ressemble aux héros de Kundera... comme il est éternel.

La nouvelle, très agréable à lire, a été écrite entre 1838 et 1840.
Cinq chapitres presque indépendants, liés seulement par le personnage de Petchorine (tantôt on l'évoque dans des souvenirs, tantôt on lit son journal), se déroulent dans de luxueuses stations thermales caucasiennes au milieu de la haute société militaire et civile, mais aussi dans des coins reculés et sauvages de la montagne. Lermontov connaissait bien ces paysages et les habitants du Caucase. Il y avait passé ses années d'exil, après avoir écrit un poème en l'honneur de la mort tragique de Pouchkine ; il n'est d'ailleurs pas sans intérêt de comparer la fin de Pouchkine avec celle de Lermontov, à vingt-six ans seulement !
Lermontov a choisi le nom de son héros encore en hommage à Pouchkine : tout comme Onéguine était créé d'après la rivière Onega, Petchorine est né de la rivière Petchora.
En comparant la vie de Lermontov au livre, on ne peut pas chasser l'impression que nous lisons une sorte d'autobiographie voilée de l'auteur.
"Un héros de notre temps" est véritablement un portrait, mais pas d'une seule personne. C'est un portrait composé des défauts de toute une époque. Vous pourriez argumenter que l'homme ne peut pas être aussi mauvais, mais si on est capable de croire en la véracité des malfrats tragiques et romantiques de toutes sortes, alors pourquoi ne pas croire en Petchorine ? Pourquoi nous est-il si difficile de l'absoudre ? Il contient peut-être plus de vérité qu'on n'aurait souhaité...?
L'abus de sucreries dérange l'estomac, et le remède est amer. Lermontov ne prétendait jamais vouloir devenir un prêcheur contre les vices humains, son esprit était bien trop large, pour cela. Il a seulement pris plaisir à peindre un homme tel qu'il le comprenait, et tel que, malheureusement, il le rencontrait trop souvent. Il a détecté la maladie, comment la guérir - Dieu seul le sait.
J'ai été convaincue de la sincérité de l'auteur, qui a si impitoyablement révélé ses propres faiblesses et défauts. L'histoire d'une âme humaine, même si cette âme semble ignoble , est peut-être encore plus intéressante et utile que l'histoire de toute une nation, surtout quand elle est le résultat d'une introspection profonde, et quand elle n'est pas écrite dans un désir ambitieux de provoquer la pitié ou l'admiration.

Quant à mon opinion définitive sur le personnage de Petchorine, je réponds par le titre de ce livre. "Mais c'est une cruelle ironie !", me diriez vous. Je ne sais pas. 5/5
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Loin de Moscou et de St-Petersbourg se trouvent les postes frontaliers, aux confins des régions les plus sauvages et les plus inconnues du continent, à la lisière de l'Europe et de l'Asie. Et c'est dans l'une de ces régions, le Caucase, entassé entre la mer Noire et la mer Caspienne, que s'ouvre le roman Un héros de notre temps, écrit par Mikhail Lermontov.

Le narrateur, qui voyage entre l'Ossétie, la Géorgie, l'Arménie et d'autres petites contrées sous contrôle russe, traverse les montagnes, les cols et les défilés de cette étroite bande de terre. En route, il rencontre Maxime Maximitch. Ce militaire est de bonne compagnie et lui raconte une des aventures de Grigori Alexandrovitch Pétchorine, un homme de sa connaissance. Un héros plus grand que nature, qui ne craint ni les balles des montagnards hostiles ni les duels des nobles russes.

En effet, Pétchorine, pour se divertir, sème la zizanie entre Tchétchènes, Tatars, Circassiens. Il promet le magnifique cheval de l'un contre Bella, la soeur d'un autre. Lorsqu'il parvient finalement à se faire aimer de sa nouvelle femme, arrachée à sa famille, il s'en lasse tout comme il s'ennuie de la compagnie de ses semblables. Rien dans ce bas-monde ne s'élève aux idéaux auxquels il aspire. La mort tragique de Bella semble l'affecter un moment mais la fatalité le destine à d'autres aventures. Bref, il souffre de spleen bien avant qu'on ne commence à parler de ce phénomène…

Loin des bals et des raffinements de la capitale et des grandes villes, on découvre la rude vie des militaires, leur éternel combat contre les contrebandiers, les peuplades montagnardes soumises mais hostiles, etc. le tout dans un paysage caucasien merveilleusement dépeint. Les monts Elbrouz et Krestovoï, la rivière Tchertovaïa, le col du Diable, etc. Des habitants déguenillés mais fiers, des sauvagesses envoutantes, etc. Bref, une Russie assez peu évoquée dans la littérature classique.

C'est dans ce décor que Pétchorine, dans une partie du récit où il devient le narrateur, développe une relation amoureuse avec Véra, se lie d'amitié avec Grouchnitzky, puis fait la cour à la princesse Mary pour contrarier son nouvel ami intéressé par elle. Il s'ensuivra bien des complications et un duel. Après tout, ces petites gens ne sont-ils pas des pions pour lesquels il ne peut que devenir un ennemi implacable, voire vicieux? Qu'est-ce qu'un homme blasé ne ferait pas pour s'amuser un peu, faire valoir sa supériorité, se prouver qu'il est vivant ? Se lancer vers d'autres aventures !

Lire Un héros de notre temps fut également une aventure : les changements de narrateurs agacent. On passe du voyageur (dont le nom demeure inconnu) à Maxime Maximovitch, on retourne au voyageur pour passer à Pétchorine, mais en plus tous racontent à la première personne. Confusion à l'horizon. Heureusement, le lecteur ne s'attaque pas à un roman fleuve comme les Russes avaient l'habitude d'en écrire !

Ceci dit, les décors pittoresques, les voyages dépaysants, les aventures rocambolesques, les élans amoureux, les intrigues rebondissantes… enfin tout ne peut que compenser et plaire. Mikhail Lermontov a pondu une oeuvre qui a influencé des générations de Russes et qui continue sans doute à émerveiller des lecteurs partout à travers le monde.
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Formidable roman d'une grande richesse qui m'a captivée de A à Z. Peut-être n'est-ce pas la meilleure des traductions, mais elle est fluide et facile à lire. C' est un chef d'oeuvre, en tant que tel et non pas parce qu'il aurait inspiré d'autres écrivains russes par la suite.
Ce livre n'est pas seulement un roman psychologique. C'est d'abord, dans la première partie, un roman d'aventures, un genre de western caucasien avec, enlèvements de femmes, rebondissements invraisemblables, courses poursuites à cheval, duels au soleil, dans des paysages à couper le souffle. Ensuite, toujours dans la première partie c'est un faux roman sentimental avec clins d'oeil du narrateur ou de l'auteur. Petchorin est un héros à la Byron, qui séduit avant de larguer. Sa conquête n'en est pas dupe du tout, car c'est toujours mieux que d'être mariée à un Tatare...Le personnage sentimental est Maxime, c'est lui la victime de la première partie.
Dans la deuxième partie, on découvre Petchorin de l'intérieur. Il porte sur lui-même et sur ses aventures un regard plein d'ironie. Le personnage est détestable car il est rempli d'arrogance à l'égard de son prochain et terriblement franc. Il fait tout pour qu'on le déteste mais il nous montre aussi les coulisses du théâtre mondain aristocratique. Le récit intitulé "La Princesse Mèré" (ou Marie), s'apparente à un mélodrame en trois actes, tournant autour d'un duel complètement truqué.
Le dernier récit, très cruel, fait froid dans le dos. On joue à la roulette avec sa vie. Il est significatif du profond ennui de ces officiers rebelles et déchus, envoyés dans le Caucase. Ils n'ont d'autre occupation que de boire, de se provoquer en duel, de jouer avec la mort. Aucun courage là-dedans mais un profond mépris de la vie. Lermontov a tracé le portrait d'une génération perdue complètement anti-héroïque.
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Un héros de notre temps est, sans conteste, un classique de la littérature russe puisqu'il est intimement lié à un des épisodes les plus connus de l'Histoire de la Russie, je veux bien entendu parler de la mort de Pouchkine.

Lermontov composera le sulfureux poème « La mort du poète » en l'honneur de Pouchkine mais surtout à charge contre le pouvoir en place. Cela lui vaudra illico presto un exil forcé dans le Caucase russe où il mettra un point d'honneur à finir le roman dont il est question ici: Un héros de notre temps.

Il s'agit, pour moi, d'une oeuvre hybride couvrant une multitude de styles: Roman, conte, nouvelle, poésie, chant, journal de bord, lettre, etc.
Le livre de Lermontov se compose de 5 parties qui peuvent se lire indépendamment les unes des autres (j'avais d'ailleurs lu Taman dans un recueil de nouvelles russes avant de savoir qu'il s'agissait d'une partie d'un roman de Lermontov).

La première partie concernant Bèla m'a fait pensé à Rouslan et Ludmila en plus rugueux où la femme est reléguée au rang de princesse-objet. Sans doute, cela représentait-il l'idéal amoureux de cette époque dans cette région du monde.

La partie la plus intéressante est sans doute celle où le caractère de Petchorine (le personnage principal) est passé au crible. Séducteur-manipulateur usant de cynisme pour arriver à ses fins, il m'a souvent fait penser à un certain Valmont des Liaisons Dangereuses ou à une version inavouée de... Lermontov lui-même.

Alors, à qui est destiné ce livre?

Aux amateurs de nouvelles, du Caucase, de l'Histoire de la littérature russe qui n'ont pas peur de se plonger dans une réalité révolue, celle des duels à bout portant !

« Nous allons tirer au sort celui qui fera feu le premier ... Je vous déclare pour conclure qu'autrement, je ne me bats pas. »

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Plus risible que les femmes qu'il dénigre (« La race est chose très importante chez la femme, de même que chez les chevaux »), Pétchorine figure le modèle d'un héros de notre temps –à condition que « héros » se confonde ici avec « bouffon ». La comparaison est implicite, elle ne tardera toutefois pas à se révéler au fil des différentes parties qui constituent ce roman.


Les points de vue autour de Pétchorine s'enchaînent ainsi pour constituer un portrait morcelé, qu'il faudra reconstituer au-delà des failles chronologiques et des doutes véridiques que nous inspirent la narration des témoins invoqués. L'imbrication des récits ne permet pas toujours de faciliter la compréhension des événements lorsqu'elle n'empêche pas carrément de suivre correctement le déroulement de l'histoire. le roman, rabiboché de bric et de broc, semble avoir été composé dans l'hésitation, comme si Lermontov, ne sachant pas quel point de vue choisir pour décrire Pétchorine de la manière la plus convaincante, avait finalement décidé de garder tous ces brouillons et de les unir par un fil conducteur qui convainc surtout par son caractère artificiel. le thème des amours désillusionnés, de l'individualisme naissant d'une génération, de la quête existentielle impossible à mener sans l'illusion d'une gloire proche, semblent hanter Lermontov qui développe ici les mêmes thématiques que celles qui apparaissaient déjà dans la Princesse Ligovskoï, qu'il avait commencé à rédiger quatre ans auparavant sans réussir à en achever la rédaction. le héros porte d'ailleurs le même nom –pour un peu, il aurait suffi que la Princesse Ligovskoï trouve une conclusion pour que son histoire constitue un nouveau volet des aventures d'un Héros de notre temps.


Bien sûr, l'écriture enchante par son ton mordant, ses descriptions acerbes et sa verve ironique, et il n'est pas déplaisant de lire six fois de suite la variation d'une même histoire –mais il faut quand même avouer que dès la troisième redite, on commence à espérer une évolution du personnage de Pétchorine. Ce n'est pas le cas et le vaillant guerrier de l'amour, séducteur par fatalité plus que par désir, reste buté du début jusqu'à la fin. S'il s'agit d'un autre des ressorts comiques déployés par Lermontov, il entraîne toutefois davantage de désagréments que de véritables réjouissances. le bouffon rigolo vire en ennuyeux chantre du désenchantement et ne parvient même plus à convaincre de l'inanité des passions terrestres. Autour du personnage de Pétchorine, la perfection aurait été atteinte si Lermontov avait su allier l'unicité du récit de la Princesse Ligovksoï à la possibilité d'une conclusion à la manière d'un Héros de notre temps.

Lien : http://colimasson.over-blog...
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Je n'ai pas les connaissances suffisantes pour placer Lermontov dans la littérature russe, et surtout voir l'importance de son personnage. Mais je peux le situer par rapport à la littérature européenne. Il est "de son temps", mais un peu anachronique aussi, entre le XIX ème romantique et le XVIII ème siècle libertin.
Petchorine ressemble en effet beaucoup à de nombreux personnages - et à de nombreux auteurs eux-mêmes - du romantisme. Ces auteurs souffrent du "mal du siècle", ils se considèrent comme nés trop tard, dans un monde où les armes semblent s'être tues. C'est la génération De Musset, Hugo, Vigny, Dumas... Leurs pères ont fait la guerre, leurs pères ont servi l'Empereur, mais, pour eux, seule la littérature peut être un moyen d'acquérir la gloire.
Ainsi, Petchorine peut sembler avoir des prétentions à l'écriture. Après tout, on lit son journal. Il le dit, il écrit pour lui, comme simple souvenir - mais il s'analyse beaucoup trop, il réfléchit trop à ses actes et à ses sentiments, pour n'écrire que pour lui. Petchorine pourrait se rêver poète. Petchorine manie ainsi l'ironie voire le cynisme de lord Byron, il se sent incapable d'aimer vraiment et multiplie les conquêtes comme Julien Sorel - tout en ayant une passion au coeur. Il séduit sans s'attacher, tel un comte De Valmont un peu anachronique. Il mène une carrière militaire, mais sans véritablement se battre ; en tout cas, il accorde plus d'importance au brillant de ses épaulettes, à la blancheur de son uniforme et au vernis de ses bottes qu'à ses entraînements et à ses armes.
Il pourrait sembler fat, et vite insupportable. Après tout, il est beau, riche, vaniteux et imbu de lui-même, persuadé que toutes les femmes sont folles de lui, ayant des prétentions de séduction et d'esprit. Il nous est d'ailleurs présenté en premier par un récit externe, par les mots de son ancien officier. Il apparaît alors très antipathique, froid, calculateur, individualiste. Il séduit une femme parce qu'il s'ennuie et la désire, mais que pour un temps.
En lisant son journal, avec une focalisation interne donc, il se révèle plus complexe. C'est un homme qui s'ennuie, qui ne vit pas par passion mais par curiosité. Il se révèle à nouveau comme un homme "de son temps", le romantisme, par ses voyages, aux du monde civilisé. Pour Byron, c'était la Grèce qui représentait déjà une forme d'exotisme. Pour un Russe du XIX ème siècle, c'est le Caucase, la Mer Noire et ses villes d'eaux. On sent que ce n'est pas tout à fait Saint-Pétersbourg et Moscou, mais un autre monde, moins civilisé - les modes ne sont pas les mêmes, les moeurs non plus. Ce sont les descriptions de ces sociétés et de ces peuples de marge que j'ai appréciées, même si trop rapides à mon goût. J'aurais aimé en savoir plus sur cet aveugle contrebandier, ou sur le mode de vie des Caucasiens.
Dommage finalement, la forme même de l'oeuvre, plusieurs chapitres comme plusieurs fragments de vie, ne permet pas de développer en profondeur les cadres des récits successifs.
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UN HÉROS DE NOTRE TEMPS de MICHAÏL LERMONTOV.
Lermontov a eu une vie bien courte, 1814/1841, poète et romancier, officier de hussards, il porte sur le monde un regard distancié, ironique et il s'ennuie beaucoup. Les duels vont l'occuper et il finira par y laisser sa vie, tout comme Pouchkine dont il est contemporain, qui mourra en 1837 et pour lequel Lermontov écrira un poème célèbre qui lui vaudra d'être envoyé sur le front du Caucase. Et c'est justement sur ce front que l'on retrouve le héros de ce roman, Petchorine. Voyageant dans le Caucase pour rejoindre son régiment, le narrateur rencontre un capitaine qui va lui parler de Petchorine, de la façon dont il va tenter de séduire une Tcherkesse, Bella, puis, une fois marié, l'abandonnera. Dans la seconde partie du roman, c'est l'aspect psychologique de Petchorine que l'on découvre à travers son journal intime. Fin dramatique pour le héros qui, de façon prémonitoire peut être, périra très exactement comme Lermontov.
Écriture assez traditionnelle de cette époque mais aussi un des premiers romans psychologiques qui annoncent les Dostoïevski, Gontcharov et Tolstoï entre autres. Un autre intérêt de cette lecture est l'histoire en filigrane du Caucase et de ses républiques montagnardes, Tchétchénie, Ossètie, Ingouchie ou Daghestan dont on parle très régulièrement de nos jours. C'est la période pendant laquelle la Russie a voulu soumettre tous ces peuples caucasiens, histoire qui a perduré une cinquantaine d'années.
L'édition que j'ai eu la chance de lire, est illustrée de dessins de Jean Traynier. Superbe.
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Roman composé de plusieurs histoires autour du personnage de Petchorine, le héros "romantique?".
J'ai beaucoup aimé les premières parties, entre roman d'aventures et conte oriental se déroulant dans les montagnes caucasiennes. Chevaux, chevauchées, coutumes circassiennes ou tatares....montagnes enneigées qui me font rêver. Petchorine n'intervient que peu.
Puis il se dévoile, très antipathique, cynique, peu fidèle en amitié. Caricature?
La suite du roman se passez dans une ville d'eaux. Mondanités et ragots. Certes l'analyse psychologique a fait que ce roman soit qualifié de "premier roman psychologique russe". mais mondanités et ragots m'nnuient. Attitude cynique envers les femmes. La princesse sera-t-elle séduité? La vieille maîtresse regagnera-t-elle son amour? même lu au deuxième degré, celui de l'ironie ou de la satire, il n'a pas le carme du début et je me suis un peu ennuyée avec ce Byron (cité à plusieurs reprises) de garnison.
Lien : http://miriampanigel.blog.le..
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Ce livre "un héros de notre temps" (Герой нашего времени) a la réputation d'être le premier roman psychologique russe. C'est le seul roman de fiction que son auteur, Lermontov, ait mené à son terme. Ecrit de 1837 à 1839, c'est un recueil de cinq nouvelles, dont chacune peut se lire de manière autonome. Trois narrateurs différents interviennent dont le dernier est le héros de l'histoire: Petchorine, (dont le nom est formé à partir du nom de deux rivières du nord de la Russie: l'Onéga et la Petchora); Petchorine est un officier en exil dans le Caucase, au moment où cette région s'embrase, tout comme Lermontov lui-même a été exilé dans le Caucase. Ce récit nous permet de découvrir toute une mosaïque de peuples décrits par un connaisseur.
Le thème qui revient au fil de ces nouvelles est celui de la prédestination, du destin inéluctable, qui accompagne chaque rencontre, chaque coïncidence, chaque action du héros. Un héros complexe, ambigu et dans la lignée romantique: sa cruauté et son cynisme vont de pair avec un grand courage et il peut être capable d'attendrissement et d'amour authentique. Lumière et ombre, Petchorine est un personnage très intéressant , dédoublé et tiraillé entre deux extrêmes. Un héros qui séduit mais pour assurer la domination de l'âme..
Un grand classique à découvrir et redécouvrir..
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A mon avis cette histoire dont le héros se nomme Petchorine est curieusement agencée. Elle est divisée en deux parties très différentes.
La seconde partie, qui dans la chronologie de l'histoire se situe juste avant la première, est la meilleure. Petchorine raconte dans son journal une histoire de rivalité et de séduction entre lui et une princesse, une mauvaise plaisanterie qui tourne au tragique. L'histoire se passe dans une station balnéaire du Caucase, dans le milieu clos et formel de l'aristocratie, avec des bals, des hypocrisies et un dénouement à la russe. Tout cela est passionnant à lire et typique de la littérature russe du dix-neuvième siècle, mais c'est surtout dans cette partie qu'on apprend à faire la connaissance de Petchorine, alors qu'il était resté énigmatique et plutôt inintéressant jusque-là. La perception qu'on avait de lui change complètement.
La première partie est plus originale, mais elle ne capte pas suffisamment l'attention. L'originalité c'est que le point de vue n'est pas le même, avec un narrateur qui raconte des épisodes de la vie de Petchorine, toujours dans le Caucase, postérieurs à la seconde partie. Il y a de quoi se demander pourquoi le narrateur est curieux de connaître ce personnage fat et brutal, qu'il ne fait que croiser à la fin, alors qu'il s'échappe encore plus loin de sa Russie natale, vers la Perse. L'ambiance est plus sauvage que la seconde partie, avec de très belles descriptions des paysages montagneux et le milieu social n'est pas celui de l'aristocratie mais des peuples du Caucase, bien moins civilisés.
L'épilogue, la morale de l'histoire, est très intéressante à lire sur la fatalité et la prédestination ; la roulette russe trouve-t-elle ses origines dans cet épilogue ? Associé au fait que Lermontov a voulu créer un personnage romantique atteint du « vague des passions », matérialiste et cynique, tout cela fait réfléchir quand il écrit à la fin de la préface que « la maladie est indiquée, mais comment la guérir ? Dieu seul le sait. » Non, c'est un excellent roman en fin de compte, et je pèse mes mots, il faut le lire si on aime la littérature russe, malgré tout je trouve la première partie superflue et bien inférieure à la seconde.
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