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EAN : 9782823600599
205 pages
Editions de l'Olivier (06/02/2014)
3.02/5   31 notes
Résumé :
Adam Gordon est un jeune poète américain en résidence d'écriture à Madrid. Mais il écrit peu : il fume, déambule, lit, drague Isabel, courtise Teresa et s'invente une vie.

Dans ses récits tissés de mensonges, sa mère est malade et son père fasciste. Spectateur fasciné de sa fausse existence, Adam navigue au sein d'un univers fait de littérature, d'art et d'intrigues amoureuses. Mais quand un attentat frappe la gare d'Atocha, la réalité vient troubler... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (9) Voir plus Ajouter une critique
Un premier roman. J'ai choisi de l'emprunter à la bibliothèque à cause de son titre. Je souhaitais évoluer dans Madrid dans les pas de l'auteur. Oui mais voilà, je ne me reconnais absolument pas dans le héros du roman, jeune poète américain en résidence à Madrid. Je l'ai suivi dans ses déambulations dans la ville, mais surtout au travers de ses mensonges, de ses impostures, de ses prises d'alcool et de sa consommation de joints. Un milieu qui m'a déplu. Aucune émotion n'est passée même lorsqu'il évoque le monstrueux attentat de la gare d'Atocha. Je me suis ennuyée du début à la fin du roman. Ce livre ne m'a rien apporté en dehors des quelques noms de lieux que j'ai retrouvés, ce qui est bien mince. Un rendez-vous manqué.
Lien : http://araucaria20six.fr/
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« Au Départ d'Atocha » de Ben Lerner, écrit en 2011 et traduit par Jakuta Alikavazovic. (2014, Editions De l'Olivier, 205 p.),

Pourquoi parler des romans de Ben Lerner et de ses poèmes. Pour moi, ce sont les années du « Clavier Cannibale » de Christophe Claro qui m'ont fait connaitre cet auteur américain, récompensé également par « The Believer Book Award » en 2012 pour son « Leaving the Atocha Station ». La revue « The Believer » fondée en 1998 par Dave Eggers, et publiée par McSweeney's, a été le flambeau de la presse indépendante. Elle a connu une éphémère traduction en français, a été une source importante et fiable de titres et d'auteurs américains.
« Au Départ d'Atocha », c'est l'histoire de Adam Gordon, un jeune poète américain en résidence d'écriture à Madrid pour écrire sur l'état du pays dans une ère post-franquiste. C'est ce que fut Ben Lerner en 2003 lorsqu'il obtient une bourse Fulbright.
Adam Gordon écrit peu. Il fume, déambule, lit, drague et s'invente une vie. Une vie faite de ses récits ou plutôt de mensonges, avec une mère malade et un père fasciste. Très vite sa fausse existence le fascine. La réalité vient troubler sa fiction lors de l'attentat qui frappe la gare d'Atocha. Peu de réaction émotionnelle pourtant au terrorisme. Au bout, c'est le portrait d'un jeune, soit-disant poète, mais perdu et au talent douteux, en mal de repères. Société essentiellement occidentale post-moderne très individualiste, avec un matérialisme d'une « culture » décadente. L'imposture de Adam finit même par agacer, et même faire pitié. Un peu triste tout cela. Il manque une note d'espoir.
Atocha, pour moi c'est la gare de Madrid d'où partent les trains rapides espagnols AVE vers le Sud. C'est la plus grande gare de Madrid, livrée en 1892 par Alberto del Palacio Elissagne en collaboration avec Gustave Eiffel. C'est une immense verrière posée sur des murs de briques rouges. A l'intérieur, un jardin tropical de quatre mille mètres carrés, véritable forêt exotique d'intérieur où la température est constante à 24°C. Une attaque terroriste le 11 mars 2004 fait 191 morts et 2057 blessés.
Je me souviens d'un Madrid-Cordoba en plein été, où il m'a été servi une « rabo de toro » (queue de boeuf) délicieuse. Puis le lendemain, dans la ville où il y avait grande procession. Peut-être était-ce le 15 Août. J'ai recroisé la procession plusieurs fois, et j'en ai profité pour entrer avec elle dans la cathédrale, ancienne mosquée (« Mezquita de Córdoba »). Foule pieuse, et tous qui chantaient. A la sortie un dernier tour dans la « Juderia » et salut à la statue de Maïmonides. Avant de repartir pour Sevilla et huit jours de « pidgin english » à ergoter sur des viscosités de magmas silicatés ou autres rapports isotopiques. Heureusement, il y avait une collègue catalane, avec le prénom d'une diva célèbre, qui m'a permis de rafraichir mon « castellano ».
Adam Gordon est donc un jeune poète américain brillant, mais très peu fiable en fait « menteur violent, bipolaire et compulsif. J'étais un vrai américain ». Il est toutefois bénéficiaire d'une bourse prestigieuse à Madrid. Son problème est de pouvoir établir son sens de soi et sa relation à l'art. vaste programme, diront certains. « Mon intérêt pour l'art était indissociable de la rupture entre mon expérience personnelle des oeuvres et les propos qu'elles suscitaient ; le constat de cet écart – voilà sans doute mon expérience esthétique la plus intense, ou du moins ce qui s'en rapprochait le plus : l'expérience profonde de l'absence de profondeur ».
Surtout qu'il perçoit le réel à travers une projection d'expériences médiatisées par la technologie, le langage et quelquefois des addictions à des drogues diverses. « le langage de la poésie est l'exact opposé du langage des médias de masse ». Résultat, il sur interprète tout et confond les pensées alambiquées, voire tordues, avec des idées puissantes. Il en vient à se fabriquer une autre vie, un père fasciste et « une mère mourant d'un cancer », ou « morte pour obtenir sa sympathie ».
De deux poèmes qu'Adam Gordon prétend avoir écrits. L'un provient du livre de Ben Lerner « The Lichtenberg Figures » (2004, Copper Canyon Press, 96 p.). le deuxième poème est ce qu'Adam lit à la galerie. Ce poème est composé de vers du roman lui-même. C'est un poème virtuel dans le sens où c'est une impossibilité structurelle pour Adam d'avoir à sa disposition le langage d'un roman non encore écrit.
Il est vrai qu'il passe son temps à Madrid au Musée du Prado, en contemplation de « La Descente de Croix » (1435) de Rogier van der Weyden. « Un matin, ma place devant le van der Weyden était prise. L'homme se tenait à l'endroit exact où je me plaçais et ma première réaction fut la surprise, c'était comme de me regarder en train de regarder le tableau, bien que l'intrus soit plus mince et plus brun que moi. Je voulais qu'il s'éloigne mais il ne bougea pas ». Etait-ce une méditation prolongée devant l'oeuvre ou une incertitude quant à sa signification. Pourquoi les artistes peintres de cette époque, flamands ou rhénans, comme van der Weyden ou Matthias Grünewald barrent ils les descentes de croix, essentiellement verticales, par des personnages qui strient le tableau en oblique. « Vivait-il une profonde expérience esthétique ? » s'interroge Adam, qui ne comprend rien à rien.
Il est à Madrid en train d'essayer de draguer deux Espagnoles, Isabel et Teresa. « Ma détresse à propos d'Isabel et de Teresa, associée à ma culpabilité à propos de mes parents, a ouvert des questions plus larges sur ma fraude. ; que j'étais un imposteur n'avait jamais été mis en doute – qui ne l'était pas ? ». Jusque-là, tout va bien, ou presque. Mais vient maintenant « Accroupie dans l'une des rares positions de sujets préfabriquées offertes par le capital ou peu importe comment vous voulez l'appeler, mentant à chaque fois qu'elle disait « je » ; qui n'a pas été un peu joueur dans une infopublicité en boucle pour une vie sacrifiée ? ». On dirait du Gloubi-Boulga transcrit en phonétique et traduit ensuite par un traducteur automatique.
Teresa est intelligente et belle, tout le raffinement des élites. Une fois elle lui dit qu'il ressemble à Jack Nicholson dans « The Passenger ». « Manque de chance « Je n'avais pas vu « The Passenger », un film dans lequel j'ai joué ». Toujours l'ambivalence des propos, qui marquent surtout la vacuité des propos.
Il reconnait par ailleurs qu'il « n'a jamais vraiment eu de relations sexuelles avec elle ! ». Ce qu'il met sur le compte de sa méconnaissance de la langue. Comme si c'était le plus important. Lorsqu'elle lui demande à ce propos « Quand allez-vous admettre que vous pouvez vivre dans cette langue ? », il n'est pas sûr qu'il puisse réellement « vivre » dans n'importe quelle autre langue. Il craint que « tout langage ne soit une trahison de l'expérience, et qu'il soit même impossible d'appréhender la réalité dans le monde réel ». Une autre fois, à Barcelone, il visite la ville avec Teresa, et sort un moment acheter un café. Il se perd dans les rues et erre dans la ville douze heures durant. Lorsqu'il retrouve leur hôtel, il abreuve Teresa avec une suite de mensonges car il pense que la vérité serait trop incroyable.
Il raconte à propos de sa relation avec son autre petite amie, Isabel « Mon espagnol s'améliorait, malgré moi, et j'éprouvais, avec la force de la révélation, une évidence évidente. Notre relation dépendait largement de ce que je ne parvenais jamais à parler couramment, de ce que j'avais une excuse pour ne parler qu'en fragments énigmatiques ». Comme on le dit si bien en anglais Adam est « lost in translation ».
Les rapports maintenant avec l'attentat de la gare d'Atocha ? Il n'y en a pas. Atocha est cependant la gare de Madrid où des terroristes islamiques ont fait exploser des bombes alors que les trains chargés de banlieusards se rendant au travail entraient en gare. Environ 200 morts et 2000 blessés, le 11 mars 2004. Cela rappelle Fabrice parcourant le champ de bataille de Waterloo se demandant s'il a vraiment combattu, s'il y a vraiment été et s'il fait réellement partie de l'histoire. « Vous ne voyez donc pas l'Empereur. [] Les longues crinières pendantes que portaient à leurs casques les dragons de la suite l'empêchèrent de distinguer les figures. Ainsi, je n'ai pu voir l'Empereur sur un champ de bataille ». Par contre, il croise celui qui pourrait être son père biologique. « Ce général n'était autre que le comte d'A… le lieutenant Robert du 15 mai 1796. Quel bonheur il eût trouvé à voir Fabrice del Dongo ! »

« Si j'étais poète c'était parce que, de toutes les pratiques, la poésie était celle qui pouvait le moins ignorer son anachronisme et sa marginalité et elle validait ainsi ce que j'avais de grotesque ».
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Au départ d'Atocha
Ben Lerner
L'Olivier, 206p, 2011
premier roman
traduit de l'anglais (E.-U.) par Jakuta Alikavazovic, 2014


le roman commence bien. On croit suivre une intrigue. Au Prado, un homme sanglote devant La Descente de Croix de Rogier van der Weyden. C'est le narrateur qui voit cette scène déconcertante. le narrateur est un jeune Américain, Adam Gordon, surnommé El Poeta, parce qu'il écrit de la poésie, le plus mort de tous les genres littéraires selon lui. Il est en résidence à Madrid sous prétexte d'étudier les poètes espagnols de la Guerre Civile, qu'il ne lit pas, à part Lorca un peu. Chaque matin il se rend au Prado. Adam est dépressif, facilement angoissé. On se demandera au fil du roman si l'homme qui pleure n'est pas lui-même, parce qu'il penserait ne pas pouvoir atteindre l'art, ou l'amour, ou s'assumer ? le grand artiste est-il celui qui remue jusqu'au tréfonds celui qui voit son oeuvre ? Mais l'intrigue tourne court. Il n'est plus question de cet homme bouleversé.
Et le récit devient ennuyeux. Adam va en boîte. Il boit beaucoup d'alcool. Il drague les filles et leur ment à propos de sa famille, sans trop savoir pourquoi, et se sent coupable vis-à-vis de ses parents. Il voyage avec elles, Isabel à Grenade, où il ne voit pas l'Alhambra, parce qu'elle lui a parlé de ses relations avec Oscar, mais ce personnage existe-t-il?- et Teresa, à Barcelone où il se perd. Il déprime. Il prend des petites pilules blanches.
de même il ment à son ami américain Cyrus avec qui finalement il chate. Cyrus lui fait part d'une excursion tragique, où il a une part de responsabilité. La communication ne se fait pas bien , ce qui cause un décalage entre les questions et les réponses. Et c'est exactement ce qui se produit avec le narrateur. Il est toujours décalé. Parce qu'il est dans la posture pour se donner une contenance. Parce qu'il est convaincu de ne pas maîtriser l'espagnol, et du coup il ne comprend jamais tout à fait de quoi il retourne, le lecteur non plus.
Mais un attentat frappe la gare d'Atocha. Il retrouve Teresa, participe aux manifestations sans réelle motivation.
Parce que sa seule motivation, c'est la poésie. le frère de Teresa tient une galerie d'art, dans laquelle il est invité à lire certains de ses poèmes. Succès. Snobs qui parlent de poésie. Pour Adam, le vrai mérite de la poésie est de rendre le monde supportable. Cependant, il distingue sa voix dans ces fragments de traduction approximative et de télescopage de sonorités .
Les pilules blanches lui permettent d'écrire constamment. Les poèmes  ne parlent de rien, dit Gordon. Les poèmes peuvent-ils faire advenir quelque chose ? La preuve que non en est donnée par l'attentat d'Atocha. Alors qu'il est seul et se drogue, il comprend l'incommensurabilité du langage et de l'expérience, qu'il y a des choses qui ne peuvent être dites, d'autres qui ne peuvent être vécues. Il réfléchit à la lecture -il lit beaucoup Tolstoï- au fait que chaque phrase trouve son actualisation dans le présent du lecteur. Il rêve contradictoirement d'écrire des poèmes qui agiront sur le monde, et lui donneront l'amour d'une fille. le grand artiste du Prado ne bouleverse-t-il pas entièrement le spectateur ? Il écrit, donne ses textes, ils sont traduits, ils sont écoutés avec intérêt.
Il est convié à une table ronde sur ce qu'est la littérature aujourd'hui. Il prépare vaguement son intervention en pompant des phrases toutes faites. Nouveau succès. Teresa, poète et traductrice, participe à la conférence.
le récit est accompagné de six photos. Qu'ajoutent-elles au texte ? Est-ce pour rappeler Sebald ou Breton ? Il est aussi accompagné de deux poèmes de John Ashbery que Gordon tient pour un poète majeur, et pour qui le poème ne peut exister ; demeurant caché et hors d'atteinte, écrit au verso du miroir, il n'est que le reflet du poème qu'on lit, un poème fantôme. N'est-ce pas le portrait de Gordon ?

Que dit au fait le texte ? Un jeune poète se cherche. Il est peu sûr de lui, tout l'effraie, et cette peur se focalise sur la non-maîtrise totale de l'espagnol, et lui fait s'inventer une vie. Ce à quoi il tient vraiment est la poésie, la sienne aussi, alors qu'il connaît l'échec du langage à dire les potentialités qu'il contient. La table ronde va donner le départ, et quel départ, puisqu'il se fait dans l'imposture, de sa carrière, et contrairement à ce qu'il avait dit, il (si le narrateur est un double de l'auteur) écrira un roman.
le roman de Lerner a suscité l'enthousiasme de Franzen et d'Auster qui le trouvent, pour le premier, intelligent, hilarant (sans doute pour la description du public de l'art, les critiques reçues à entendre les remarques vaseuses du narrateur sur l'engagement en poésie, les débuts d'un poète) vif (c'est vrai) et original (vrai encore) et pour le second, inoubliable de par le personnage singulier (toujours à se mettre dans de mauvais draps). Je ne suis pas ces deux auteurs, le livre m'a laissée perplexe ; le processus d'écriture poétique, par la rêverie, les approximations à partir de mots traduits, l'écriture sous l'emprise de la drogue, me font me poser des questions, même si je fais la part des mensonges et des postures affichés d'un aspirant à la poésie, et de quelqu'un qui se révèle poète, et se surprend à parler espagnol sans problèmes.
Je me demande alors si je sais lire. En tout cas j'ai compris, mais je le savais déjà, que la poésie est amour.
Et je vais lire du même Lerner La haine de la poésie.
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Adam est un jeune poète fumeur et un peu fumiste également. Américain d'origine, il quitte son pays pour un voyage à Madrid dans le but d'y étudier son Histoire - notamment la période franquiste – et ses poètes. Mais finalement ce qu'il préfère c'est fumé des joints, et même s'il paraît que les plus grandes oeuvres artistiques sont nées sous l'effet des drogues, ce n'est pas vraiment le cas d'Adam qui préfère se laisser vivre, au moins un temps, et s'inventer une vie auprès des gens, des femmes qu'il rencontre. Une vie dans laquelle sa mère serait morte, puis gravement malade et son père fasciste.

Entre mensonges et réalité, Adam s'y perdra et s'y amusera jusqu'au jour où l'attentat d'Atocha viendra bousculer son petit monde préfabriqué.


Ben Lerner à travers ce roman nous dresse le portrait d'un personnage vraiment atypique, quelque peu bipolaire, jamais sans ses petites pilules qui le calment d'éventuelles crises d'angoisse. Un homme qui a à la fois peu et trop confiance en lui, une sorte d'artiste des temps modernes imbu de sa personne mais aussi terrifié par un manque de savoir. Peu productif, il ne semble pas attacher beaucoup d'importance à l'Histoire, la culture du pays ni même aux gens qu'ils rencontrent. Difficile, dans ce contexte de cerner les sentiments de ce personnage brumeux et de s'y attacher.

Si la personnalité d'Adam est peut-être trop singulière pour l'apprécier, le lecteur peut néanmoins se laisser transporter par l'art qui tient une grande place dans ce périple. Il sert de point central à l'apprentissage de la vie, met le doigt sur les attentats d'Atocha et le terrorisme, pose débat sur l'Amérique de Bush, la poésie contemporaine et l'identité. le tout mis en exergue par une écriture soignée et un rythme lent, dans lesquels on reconnaît sans conteste l'influence du poète, et par des images, des références qui viennent ponctuer le récit. Et bien que ce roman soit une fiction de nombreux éléments collent à la vie de l'auteur comme sa ville d'origine Topeka au Kansas, son métier ou encore le fait qu'il ait lui-même vécu à Madrid, période durant laquelle sa mère était malade. Ben Lerner aurait-il cherché par ce biais à exorciser ou du moins se libérer d'une partie de son passé ? En tout cas cela en fait une jolie réussite où le lecteur oscille à la fois entre l'invention et la réalité du personnage mais également de son auteur.

Et que dire de l'atmosphère... Tout au long de cette lecture, on se sent habiter par Madrid, sa vie colorée, ses nuits festives. On visite avec Adam les quartiers de la capitale, ses galeries d'art et ses cafés. L'ambiance qui s'en dégage et la personnalité des différents protagonistes ne sont pas sans rappeler L'Auberge espagnole de Cédric Klapisch. Ils ont en effet en commun cette découverte de soi et des autres, cette insouciance mêlées à la barrière linguistique et au choc culturel.
On regrettera néanmoins que sur ces deux cents pages, finalement peu d'entre elles ont été consacrées à l'attentat d'Atocha et aux conséquences sur la vie des différents personnages. En définitif, tout ne semble être que passager dans la vie de ce jeune poète : ses sentiments, ses actions mais aussi les événements marquants qu'il aura pu vivre. Ainsi, Au départ d'Atocha, dont le titre est emprunté à John Ashbery, reste un roman contemplatif sur les errances d'une jeunesse artistique en quête de reconnaissance.
Lien : http://livresselitteraire.bl..
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Sentiments mélangés à la lecture ce roman quasi autobiographique, parions-le. La recommandation de J. Franzen en couverture était pourtant alléchante : la lecture de Freedom et des corrections était des plus passionnantes. On oscille à grande fréquence entre agacement et empathie pour Adam, qui surjoue parfois le rôle du poète maudit, en faisant de sa propre vie une sorte de mise en scène dramatique. L'écriture rythmée révèle pourtant un talent certain, et les envolées narcissiques sont contre-balancées par un humour passablement cynique et mordant, qui n'épargne personne, à commencer par le narrateur lui-même, qui manie l'auto-dérision avec brio. On comprend que sa bipolarité (anciennement appelé maniaco-dépression), une maladie de plus en plus populaire, n'est pas pour rien dans les errements de notre anti-héros. Certes, il en fait peut-être parfois une excuse intime pour se comporter de manière douteuse avec autrui. Mais que celui qui n'a jamais menti par désir de plaire lui jette la première pierre !.. On se dit qu'Adam est peut-être assez représentatif d'une jeunesse talentueuse un peu perdue, en mal de repères, au sein d'une société occidentale post-moderne affectée par l'individualisme, et le matérialisme d'une "culture" décadente, où toute les idéologies se valent sans qu'aucune n'ait d'importance. Si c'est le cas, malgré cette expérience lucide et désabusée, je trouve qu'il manque une note d'espoir dans ce livre...n'est-ce pas ce qu'on peut souhaiter à notre époque, en entamant la lecture d'un roman ?
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critiques presse (1)
LaPresse
10 juin 2014
Jeune poète américain en résidence d'artiste à Madrid pour écrire sur le franquisme, Adam ignore tout de la guerre civile, comprend très mal l'espagnol, et passe son temps à flâner, fumer du pot et lire Tolstoï entre deux siestes.
Lire la critique sur le site : LaPresse
Citations et extraits (12) Voir plus Ajouter une citation
J'éprouvais une grande méfiance envers ceux qui m'affirmaient qu'un poème, un tableau ou un morceau de musique avait "changé leur vie", d'autant qu'en général je les avais connus bien avant leur supposée révélation, sans pourtant déceler le moindre changement.
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Un matin, ma place devant le Van der Weyden était prise. L'homme se tenait à l'endroit exact où je me plaçais et ma première réaction fut la surprise, c'était comme de me regarder en train de regarder le tableau, bien que l'intrus soit plus mince et plus brun que moi. Je voulais qu'il s'éloigne mais il ne bougea pas. Je m'interrogeai : m'avait-il observé devant la Descente? S'était-il posté là dans l'espoir de voir ce que j'avais dû, moi remarquer? Agacé, je tentai de reporter mon rituel matinal sur une autre toile mais j'étais trop habitué à celle-ci, à ses dimensions et ses nuances de bleu, pour accepter toute substitution. Je m'apprêtais à déserter la salle 58 quand l'homme éclata en sanglots, secoué de hoquets sporadiques. Faisait-il ainsi face au mur pour mieux dissimuler son visage et un chagrin antérieur à sa visite? Ou vivait-il une profonde expérience esthétique?
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Ma mère, à chaque visite au musée, me disait que la peinture semblait s'être développée à rebours ; que si un extraterrestre débarquait aujourd'hui, il penserait que les tableaux abstraits venaient d'abord, des centaines, voire des milliers d'années avant ceux de la Renaissance. Sauf si l'extraterrestre en question ressemblait à un triangle jaune sur fond bleu.
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Est-ce que je pouvais fumer ? Question idiote, elle me désigna le cendrier et vint s'asseoir à mes côtés. Puis, sans lâcher sa cigarette ni son verre, elle se dirigea vers une armoire et, je ne sais comment, réussit à se changer devant moi sans cesser de fumer ni de boire, sans rien brûler ni renverser et sans donner l'impression de se livrer à un strip-tease.
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Faisait-il ainsi face au mur pour mieux dissimuler son visage et un chagrin antérieur à ma visite ? Ou vivait-il une profonde expérience esthétique ?
La vacuité ineffable de mon projet éclaterait au grand jour et je devrai rentrer à la maison toute honte bue.
(...)
Mes traits communiquaient une incrédulité blasée, un ennui que seul un vague intérêt anthropologique venait relativiser.
(...)
Si j’étais poète c’était parce que, de toutes les pratiques, la poésie était celle qui pouvait le moins ignorer son anachronisme et sa marginalité et elle validait ainsi ce que j’avais de grotesque.
(...)
Ma voix sonnait faux, maniérée, et je craignais qu’elle ne dépare, qu’elle ne se fonde pas dans les autres.
(…) pas d’imposture ailleurs que dans [son] sentiment d’imposture
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Vidéo de Ben Lerner
Le 19.11.18, chronique du ?Cavalier polonais? de Ben Lerner dans l'émission ?Des poches sous les yeux? (Radio Béton).
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