Politique et démocratie

Un maître mot dans ce petit essai : le vivre-ensemble…

Après avoir fait l'état des lieux, et constaté que le vivre ensemble était de plus en plus difficile à mettre en oeuvre du fait de l'individualisme grandissant et de l'hétérogénéité de notre société devenue mosaïque, et se basant sur la devise de notre République, « liberté, égalité, fraternité », Maxime Leroy (Prêtre) et Jean-Luc Deroo (Directeur d'école et militant syndical et associatif), en viennent à la conclusion que seule la fraternité pourra porter le vivre-ensemble…
Si l'Histoire à plus ou moins porté les notions de liberté et d'égalité, et même si beaucoup reste à faire, il n'en reste pas moins que la fraternité reste le parent pauvre de notre belle devise…

Une collection intitulée « pourquoi les chrétiens ne peuvent pas se taire »… Alléchant ! Surtout après un épisode législatif où il leur fut maintes fois intimé l'ordre de taire leurs commentaires au sujet des lois de la république. Voir le « mariage pour tous »… comme si les chrétiens étaient des sous-citoyens…
Déçu, cet aspect est très peu abordé… on retrouve des propositions comme ré-enchanter la politique, faire vivre la démocratie participative et d'autres notions entendues par ailleurs dans le cadre de la langue de bois du PS en campagne… Dommage… A noter que nos deux compères sont très impliqués dans la région lilloise. Ceci pouvant expliquer cela…

Merci encore aux Editions de l'Atelier et à Babélio de m'avoir permis de lire ce petit essai dans le cadre de masse critique.

J'ai accueilli ce livre « Politique et démocratie, pourquoi les chrétiens ne peuvent pas se taire », avec une pointe d'inquiétude...
Le titre pouvait laisser craindre un pamphlet obscurantiste ou une quelconque tirade de grenouille de bénitier. Et j'ai découvert un ouvrage simple, écrit avec une plume d'ouvrier plus qu'une plume d'écrivain, mais écrit avec le coeur !

Parlons un peu des auteurs.
Jean-Luc DEROO est un directeur d'école et homme politique investi dans la politique locale de la métropole lilloise. Il a exercé de nombreuses fonctions syndicales et politiques, avec une approche d'homme de terrain très éloignée des grands théoriciens pontifiants.

Maxime LEROY est prêtre du diocèse de Lille, très impliqué dans les actions auprès des ouvriers et des milieux populaires.

Le livre commence par un état des lieux de la politique locale de l'agglomération lilloise, et par extension un constat de la santé politique de la France. Désamour des citoyens, méfiance envers les hommes politiques, sentiment d'inutilité de la sphère politique qui n'est perçue que comme un groupe de prédateurs. le livre se poursuit sur la même verve, avec des constats, des exemples concrets et des situations décrites. C'est assez intéressant, mais n'étant pas moi-même lillois j'ai peiné pour comprendre certains cas !
Cependant, l'idée générale était facilement accessible et ce livre aide à se remettre en tête toutes les raisons qui nous ont poussé, petit à petit, à nous méfier du « politicard ». À tort, ou à raison ?

Diverses citations de la vie des Apôtres viennent apporter un éclairage chrétien sur les solutions proposées, généralement avec à-propos. Parfois, je me suis demandé ce que cela venait faire là mais globalement les idées étaient en corrélation. Après tout, le sous-titre du livre est « Pourquoi les chrétiens ne peuvent pas se taire » !

Le livre se termine sur un registre positif, appelant à l'espoir et à la réappropriation par les citoyens de la sphère politique. Après tout, si les politiciens « professionnels » nous en ont dépossédé, c'est uniquement parce que les avons laissé faire ! Dans un appel vibrant à se réinvestir dans les milieux syndicaux, politiques et associatifs, les deux auteurs tentent de convaincre leur lecteur non pas d'entrer en politique comme on entre en religion, mais tout simplement de ne plus déléguer à outrance ce qui fait notre quotidien : tracé des routes, espaces verts, politique énergétique...
Et, plus que tout, ce livre encourage les plus fragiles, les plus faibles de notre société (pauvres, chômeurs, parents célibataires, etc.) à prendre la parole ! À ne plus se taire en disant « ça me dépasse, je n'y peux rien ! ». Car les citoyens les plus fragiles sont aussi des électeurs, et s'ils se décident à aller voter alors gare !

Si les 141 pages du livre ne m'ont pas toutes passionné (Surtout les passages avec plusieurs cas concrets... le trop-plein d'exemples tuerait-il l'exemple ?) j'ai malgré tout apprécié l'implication et la conviction que l'on sent sous-jacents dans tout l'ouvrage. Je l'ai dit en introduction, ce n'est pas un livre d'écrivain ! C'est écrit « au naturel », avec le coeur ! N'espérez pas une plume à la Molière ou à la Zola, mais si vous cherchez un livre simple et honnête, tentant d'apporter aux gens le désir de se réinvestir dans leur vie quotidienne, de ne plus être des pions sur un échiquier trop grand, alors ce livre pourra vous plaire. Je le recommanderai à des connaissances investies dans leur commune ou dans le monde associatif !
Le caractère « chrétien » du texte sait rester suffisamment discret pour que l'on puisse le lire sans être forcément membre de cette religion.

En conclusion, je ne conseillerais pas du tout ce livre pour lire dans un train ou entre deux rendez-vous ! Il faut le lire au calme, y revenir plusieurs fois, pour en tirer quelques bonnes idées et, il faut bien le dire, commencer à se dire « ça suffit ! Moi aussi, j'ai une voix ! »

À lire si vous avez envie de prendre votre vie en main, avec conviction et dévouement...

« Politique et démocratie » est publié par les éditions de l'atelier dans sa série « pourquoi les chrétiens ne peuvent pas se taire ». Jean-Luc Deroo et Maxime Leroy respectivement directeur d'école et prêtre partagent depuis de nombreuses années un engagement terrain militant. Ils ont rédigé cet ouvrage à deux mains.
Tandis que 2014 s'annonce comme une année électorale, la probable forte abstention à ces scrutins locaux et européens et la poussée des votes extrêmes devraient valider le diagnostic établi par les auteurs dans le premier chapitre. La politique vit une crise, qu'il s'agisse des institutions représentatives prises en otage par la finance, des corps intermédiaires ou du citoyen dont le « ras-le-bol de l'instant » lui fait perdre et confiance et l'envie de s'impliquer dans la vie politique.
Ils illustrent leur propos par des exemples concrets en abordant les tenants de la parole politique, le rapport à l'histoire des partis ou des organismes représentatifs et défendent leur vision optimiste d'un avenir lieu d'épanouissement du frémissement qu'ils perçoivent dans certains comportements récents. « Faire de la politique, c'est savoir se mettre dans la durée et travailler sur le fond des choses sans être constamment dans la communication et la provocation ».
La fin de l'ouvrage expose leur conviction qu'un changement intégrera nécessairement la parole des pauvres, qu'un renouveau d'une démocratie enfin et réellement participative se fondera sur « un désir de fraternité et la volonté de le mettre concrètement en oeuvre comme source du vivre ensemble ».
Une partie de leur démonstration résonne comme certaines phrases de l'Évangile quelques fois cité et commenté. Cela m'a gêné (je suis chrétien) et de mon point vu, ce choix affaiblit l'universalité du message, même si émanant d'un homme d'Église et publié dans la série citée en introduction, il ne faut pas s'en étonner. J'aurais souhaité des arguments strictement oecuméniques, détachés de considérations spirituelles que les contempteurs taxeront de partisanes…
Au final, seul le retour de l'utopie en politique la sauvera du désenchantement qu'elle connait et en fera un véritable outil au service de tous. Cela suppose un retour de la foi en la capacité de la politique à se réformer, « aux structures de cesser d'agir avec un tel aveuglement et une telle surdité », aux citoyens de retrouver une espérance collective....