« Tout était peut-être déjà écrit dans la nuit des temps, lors de la création des contes. Jonathan avait peut-être déjà été choisi pour sauver Orvar et la Vallée des Eglantiers. Nos pas avaient peut-être été guidés, à notre insu, par quelques génies de conte inconnus. » p. 241
Avec ses personnages de Fifi Brindacier et Emil, Astrid Lindgren nous a habitués à des histoires pleines de rires et de jeu, au ton léger. Ici le ton tranche nettement: on reste sur un texte destiné aux plus jeunes donc la part de jeux et d'amusements est toujours présente, cependant on aborde des sujets plus délicats comme la mort, le bien et le mal, l'oppression et l'esclavage.
C'est donc un texte plein de sensibilité, émouvant, prenant.
Karl Lion, moins de 10 ans, vit avec sa mère et son grand-frère Jonathan. Il est malade et constamment alité dans la cuisine, pris de quintes de toux avec des difficultés pour se déplacer. Il vit par procuration les jeux avec les enfants du quartier et l'école : Jonathan lui fait un compte rendu quand il rentre. Il lui raconte également beaucoup d'histoires, souvent sous forme de contes.
Le jour où Karl demande à Jonathan si c'est vrai qu'il va bientôt mourir, Jonathan lui parle de Nanguiyala, le pays où ils se retrouveront une fois morts.
Quelques temps après, ce n'est pourtant pas Karl qui décède mais Jonathan…
Le récit est à la première personne (Karl) et n'en est que plus touchant. le jeune garçon éprouve une admiration et un amour pur pour son grand-frère. Quant à Jonathan, il est plein d'affection et de tendresse pour son jeune frère sans rien attendre en retour.
Le ton est assez onirique, renforcé par le regard naïf et neuf de Karl qui ne sortait jamais de chez lui et découvre maintenant tout un monde autour de lui. le texte devient un véritable roman initiatique empli de légendes et de contes au décor fabuleux. Mais il y a aussi les contes cruels que Karl va devoir découvrir malgré tout.
« Mais tu comprends, Biscotin, l'ultime combat ne sera rien d'autre qu'un conte cruel dont le thème sera la mort, rien que la mort. C'est la raison pour laquelle c'est Orvar qui doit mener cette lutte, et pas moi, car je suis incapable de tuer quelqu'un. » p . 223
Jonathan est le héro absolu qui sait comment réagir, trouve les solutions, fait preuve d'un grand courage, alors que Karl est l'anti-héro par définition, celui qui se fige et reste muet devant un danger.
Les illustrations de Ilan Wikland, parfois en pleines pages, apportent un plus à cette lecture où la part d'imagination est grande.
La fin est tragique, troublante à souhait, et me fait me poser bien des questions. On s'éloigne alors des contes de fées où tout est bien qui finit bien. Ici la réalité semble prendre le pas… mais je reste surprise du choix final.
Une lecture splendide, bouleversante. Une lecture à faire, absolument !
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Ce livre pour enfant est en fait... une réflexion sur la mort assez perturbante. le récit est encadré par la mort des deux jeunes héros: une première fois au début, ce qui les amène au pays de "Nangijala", où se déroule alors une intrigue assez classique impliquant un méchant tyran et un dragon, et une deuxième fois à la fin.
Ce qui est vraiment traumatisant c'est que la deuxième mort, censée mener elle aussi vers un pays idyllique imaginaire, est en fait un suicide: les deux frères se jettent dans le vide pour échapper à la souffrance et pour retrouver leur grand-père adoptif, mort au combat.
C'est donc un livre très beau et original par ce cadrage, et qui évoque la mort de façon très poétique, mais aussi de façon un peu dérangeante parce que la mort est aussi ici une fuite en avant de la réalité. Je pense qu'il ne faut pas mettre ce livre dans les mains de n'importe quel enfant, en effet on peut aussi y voir une glorification de la mort et du suicide...
PS: je précise que je l'ai lu en allemand et au vu des autres critiques je me demande si la version française n'a pas été un peu édulcorée: en allemand la fin est vraiment traumatisante.
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Ce livre pour enfants a longtemps été négligé en France, où il a été perçu comme très sombre: en effet, l'aventure commence après la mort des deux petits héros, qui se retrouvent dans un monde un peu médiéval, avec méchant dragon etc.
Si en effet, le sujet de la mort est évoqué, elle n'est en fait qu'un prétexte pour transposer les enfants dans un nouvel univers, qui n'a strictement rien de morbide.
Il serait vraiment dommage de priver ses enfants de ce fantastique roman d'aventures, immense succès dans d'autres pays!
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Je ne sais pas très bien à quel endroit du corps on ressent le bonheur, mais j'avais l'impression qu'un éclat de rire avait envahi mon âme tout entière.
p. 139
- Merveilleux ! je lui ai dit. Tu trouves ça merveilleux, toi, d'être mort et couché sous la terre !
- Mais non, c'est seulement ce qui t'entoure, un peu comme ton enveloppe, qui sera sous la terre. Toi, tu t'envoleras vers un tout autre endroit.
- Où ça ? je lui ai demandé, parce que j'avais du mal à le croire.
- A Nanguiyala.
Je vais vous parler de mon frère, Jonathan Coeur-de-Lion.
Je vais vous raconter son histoire. Ça ressemble à un conte, et un petit peu aussi à une histoire de fantômes et pourtant tout est vrai. Mais nous sommes les seuls à le savoir, Jonathan et moi.
Retour dans le petit monde de Jefferson pour un polar entre amis. Conteur hors pair, Jean-Claude Mourlevat, Prix Astrid Lindgren 2021, nous emporte dans une aventure trépidante, où la drôlerie n'exclut ni la tendresse, ni l'importance des sujets.