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Robert Sctrick (Traducteur)Max Gallo (Préfacier, etc.)
EAN : 9782752900562
380 pages
Phébus (25/03/2005)
4.19/5   90 notes
Résumé :
Radieuse Aurore (1910) est le plus désillusionné des romans de London. Soit l'aventure picaresque d'un chercheur d'or risque-tout et généreux qui ne craint pas de tenter le sort et devient, rentré au pays, un as de la finance ; puis un révolté ; puis une sorte de " Candide " résigné à cultiver son jardin...
Francis Lacassin, admirable connaisseur de London, n'hésite pas à voir dans ce roman injustement négligé le " chef d'œuvre inconnu " de l'écrivain - à ra... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (17) Voir plus Ajouter une critique
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Je place Martin Eden au sommet de mon panthéon littéraire. Aussi, découvrir, au hasard d'une déambulation dans une librairie, ce Radieuse Aurore fut une grande joie, d'autant plus qu'il était présenté en 4ème de couverture comme le «  chef-d'oeuvre inconnu » de Jack London .

La construction de ce roman est simple et coule avec une grande fluidité, Jack London est vraiment un formidable conteur.
La première partie est passionnante, dans la veine du Jack London attendu, et nous plonge dans le quotidien du héros, surnommé Radieuse Aurore, dans les confins du Canada, parcourant les grands espaces du Yukon, décrivant la ruée vers l'or du Klondike avec des passages sublimes sur l'humble condition de l'homme dans cet environnement extrême.
Changement de décor radical avec la deuxième partie : retour à la civilisation, à San Francisco. Cette fois, c'est le Jack London fervent socialiste qui nous livre un tableau d'une rare modernité ( écrit en 1910 !!!! ) sur les spéculations boursières outrancières et les requins qui sévissent dans le milieu des affaires.
La dernière partie est cette fois celle du retour à la terre, à la nature comme seule garante des valeurs profondes qui seules valent, une partie presque naïve qui célèbre l'amour et la simplicité de l'existence.

C'est comme si le héros Radieuse Aurore était le miroir solaire de Martin Eden. Là où ce dernier sombrait dans la désespérance et le drame crépusculaire, Radieuse Aurore fléchit, se trompe, se perd mais cet homme extraordinaire – presque un surhomme - sait où il va, il a la lucidité de savoir se retrouver et se relever.

« Le désir de dominer était si fort en lui que défier les éléments, défier les hommes, défier la chance au jeu n'était qu'une seule et même activité. (...) Au fond de lui, la Vie lui glissait à l'oreille le chant de sirène de sa propre majesté, ne cessait de murmurer et de le talonner, lui soufflant qu'il était capable de faire mieux que les autres, de gagner quand ils avaient perdu, de réussir où ils avaient échoué, de courir au succès là où ils avaient succombé. C'était la pression qu'exerçait la Vie, saine et forte, qui regarde avec superbe la fragilité comme les regrets, qui s'enivre d'une sublime suffisante, imbue d'elle-même, et comme sous le charme de son inextinguible optimisme. »

Cela en fait un personnage finalement assez monolithique, souvent arrogant malgré ses perditions passagères, donc moins attachant que le bouleversant Martin Eden, que l'inoubliable Martin Eden,

C'est en fait le personnage secondaire de Dede qui emporte tout, cette femme, LA femme qui fait revenir notre surhomme pressé à sa condition d'homme serein en accord avec la nature. En fait, ce roman s'apparente au conte, à la parabole laïque, avec une morale à la fin, voire un guide quasi philosophique qui pousse à réfléchir à sa vie et aux concessions que l'on accepte et qui ne font que ternir nos vies, à notre monde capitaliste qui gâte insidieusement nos valeurs et nos talents initiaux.

« Il n'est pas rare qu'après avoir vécu à la ville, et pas seulement pour y être né, on se réfugie à la campagne et qu'on y trouve le bonheur. le plus souvent, on doit pour y parvenir déchanter énormément. Tel n'était pas le cas de Dede et Radieuse Aurore. Nés l'un comme l'autre à la campagne, ils n'en ignoraient pas la simplicité sans apprêt et les côtés les plus primitifs. Ils étaient comme deux enfants prodigues retournant chez eux. S'ils étaient moins émerveillés par la nature, ils appréciaient les souvenirs qu'elle leur rappelait. du coup, ils commettaient moins d'erreurs que le commun des mortels : ils savaient déjà, et c'était une joie de se rappeler ce qu'ils avaient oublié. »

Un beau roman mais peut-être pas un chef-d'oeuvre à la même altitude que Martin Eden.

Lu dans le cadre de la lecture commune du groupe FB Ilestbiencelivre - janvier - " lire un livre à la couverture hivernale ".
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UN CHEF D'OeUVRE DE DÉSABUSEMENT.

Radieuse Aurore... Soyons honnête : nous ne savions presque rien de ce roman, long texte - plus ou moins aussi long que Martin Eden auquel il succède d'une année -, l'avant dernier traitant de ses thèmes de prédilection liés le grand nord canadien : le froid saisissant, le silence blanc, des hommes rudes mais solidaires, leur humour viril mais sans malice, la soif de l'or et sa quête, le goût du jeu de la vie, l'expérience de la mort, la vérité et le mensonge, la dignité des femmes, même les plus apparemment légères, leur force d'amour, la fidélité rude des chiens de traîneau et leur incroyable vaillance. L'Amour de la vie, encore et toujours, ainsi que le clame haut et fort l'un des recueils de nouvelles, le premier traduit dans notre langue, qu'il a déjà publié... Tout cela, et d'autres thèmes, la première partie de ce texte surprenant et irrésistible en est riche. Or, là ne réside pas l'originalité de Radieuse Aurore qui fut alors demeuré un texte certainement fort agréable, parmi d'autres, dans l'oeuvre si étonnante de Jack London mais guère plus. Son originalité tient toute entière dans la délocalisation de son personnage principal, dans sa migration, au sens propre du terme, des rives glacées du Yukon vers les côtes a priori hospitalières de l'Océan Pacifique aux alentours de ce San Francisco que l'auteur connaissait si bien. Nous sommes en 1910 et, il faut bien l'avouer, les plus grands chef-d'oeuvres de Jack ont, semble-t-il, déjà été créés...

... Mais reprenons depuis le début. Et ce commencement-là, c'est bel et bien dans ce froid sibérien - du moins, manière de parler - qu'il se déroule. Nous sommes peu de temps avant la véritable ruée vers l'or - qui
débutera en 1897 -, au Tivoli, le saloon- salle de jeu - salon de danse, lieu Ô! combien attractif de Circle City et des environs où, il faut bien l'admettre, il n'y a guère d'autre lieu où s'amuser et de dépenser sa poudre d'or durement gagnée. Ce soit-là, pourtant, et malgré le mauvais temps interdisant tout vrai travail, on s'ennuie ferme. Vraiment ferme. Jusqu'à ce qu'une véritable tempête entre, ébouriffée, ébouriffante dans ce haut lieu du vice et de la rigolade. Cette tempête à un nom, d'ailleurs d'autant peu utilisé par ses compagnons que la plupart ne l'on jamais entendu : Elam Harnish, mais surtout, ce vent de douce folie, ce monstre d'énergie et de bonne humeur, cet ours débonnaire à un surnom, et quel : Radieuse Aurore (Burning Daylight en anglais) ! Tout un programme. Et le lecteur de se trouver embarqué par ce pur maelström de vie, de joie, de bonne humeur, de force sans volonté de puissance, sans malice ni vice. C'est à peine s'il boit, se méfiant des méfaits de l'alcool ; c'est à peine s'il s'inquiète de gagner ou de perdre aux jeux d'argent : il en a trop vu y laisser leur santé d'avoir seulement voulu gagner, mais perdre autant comme autant ; plus encore, s'il plait aux dames, qu'il veut bien une nuit d'effusion ici ou là, il les craint comme la peste, bien qu'il demeure à jamais le plus galant des hommes, et le obligeant, le plus délicat et le plus attentionné lorsqu'il se retrouve à danser avec l'une de ces dames. Mais il refuse de se laisser prendre à la terrible loterie de l'amour : il en a vu tant d'autres y abandonner leur chemise, leurs rêves, parfois même leur peau. Mais à part cela, il vit, le bougre, et pas qu'un peu ! Et plus encore en cette soirée où il faite ses trente ans, alors ce soir là, c'est SA soirée, dut-il abandonner tout ce qu'il avait gagné à la sueur de son front au cours d'une partie de poker complètement folle ! Tout perdre sur des cartes incroyables, tout perdre, mais vivre, bon dieu oui ! Vivre ! Et repartir dès le lendemain à l'aventure, dans une course insensée et folle après le temps, après la glace, après un pari, parce que la vie est un immense tapis de jeu, et que le courrier n'attend pas, n'attendra pas deux mois, juré, craché, cochon qui s'en dédie !

C'est sur un rythme fou que Jack London nous entraîne à la suite de son Radieuse Aurore, du sud au nord de cette terrible région du nord Canada, c'est sur le même rythme que nous voyons notre héros s'enrichir, pas sur un coup de tête, non, surtout pas, mais dans un jeu à qui tente gagne. Et pour gagner, ça, il va gagner : des dizaines de millions de dollars ! Et sans s'user la santé à remuer la moindre battée, sans creuser la moindre mine, sans avoir à plonger les cuisses dans la bouillasse, non ! C'est parce qu'il est malin, et qu'il a plusieurs réflexions d'avances que Radieuse Aurore va s'enrichir incroyablement. Il va littéralement sentir la ruée vers l'or prochaine, acheter tous les terrains possibles dans les endroits propices à la construction du futur lieux d'accueil de ces centaines de milliers de prospecteurs qui ne vont pas manquer d'arriver à partir de la fameuse années 1897. Et revendre, revendre encore toutes ces terres patiemment collectées, faire la culbute, comme on le dit. Puis, lorsqu'il aura estimé avoir fait le tour, lorsqu'il sentira, de la même manière, la fin de la manne, il prendra ses cliques et ses claques, mais en fanfare, sinon ce ne serait plus Radieuse Aurore, et partir vers l'inconnu, vers ce pays totalement sauvage pour lui : le Sud-Ouest américain.

Jack London ne nous a laissé aucun répit jusqu'à cette cent trente-huitième page fatidique (NB : dans la version de poche des éditions libretto). C'est pourtant l'avant dernière fois où il nous fera rêver de forêts de pin, de fleuves gelés, de dégel et de bruits furieux de débâcle, de trappeurs futés ou de mineurs malingres, d'hommes et de femmes aussi proche de leur nature sauvage profonde que de l'enrobage de civilisation qu'ils ont reçus, à des degrés divers, dans leur enfance. Une sorte de peuplade primitive, à leur manière, bien plus proche des indiens qu'ils côtoient, parfois pour le pire, parfois pour le meilleur, souvent comme deux "races" qui s'acceptent, s'apprécient diversement, sans trop chercher à se mélanger, sauf pour les femmes, bien plus proche, donc, que tous ces messieurs des villes dont ils ne sont, au bout de quelque temps, qu'un vague souvenir. A les regarder vivre, à les voir se débarrasser des surplus de civilisation, on irait jusqu'à penser que tous ces êtres-là ont pratiqué une manière de retour à ce bon sauvage tant décrit par nos philosophes des lumières, Jean-Jacques Rousseau en tête. A bien y regarder, oui, ils ont un peu de cela dans les veines, dans les tripes, ces hommes bourrus mais francs. L'ultime retour de London dans ces parages septentrionaux, ce sera pour une énorme, hilarante et décapante farce intitulée Smoke Bellew... Mais nous n'en sommes pas encore à cette étape : la seconde, dernière, et déséquilibrée partie de l'ouvrage s'ouvre sur l'arrivée de notre homme d'affaire rugueux à San Francisco. Rien, absolument rien ne pourra plus être comme avant. Ni dans l'existence de papier de Radieuse Aurore, ni dans l'oeuvre de Jack l'aventurier...

Vous vous souvenez que notre homme était plutôt bel homme, attirant, jovial, généreux avec ses semblables. Nous aurions pu aussi préciser qu'il était d'une force peu commune, d'une musculature toute en finesse et en puissance, d'un caractère souple et chaleureux, facilement prompt au rire, aux défis fous, à la franche camaraderie, d'une honnêteté irréprochable et d'un sens de l'honneur digne de celui accordé au siècle précédent aux aristocrates français. Nous avons omis de préciser que peu s'en est fallu qu'il meure et que son goût pour la vie s'en est encore trouvé accru. Bourru, aussi, mal dégrossi par de nombreux aspects, parlant un anglais très approximatif et gouailleur, peu enclin à faire des ronds de jambe tant cela lui semblait superflu et risible, mais voyant chez autrui sinon son semblable, du moins un être digne d'être respecté, pourvu qu'il ne fut ni truand, ni voyou, ni menteur, ni tueur. Hélas... A peine en plein coeur de la ville, de la civilisation dans ce qu'elle a, admet-on, de plus avancé, notre Radieuse Aurore va déchanter. Lui qui songeait seulement jouer avec son argent comme il l'a toujours fait, c'est à dire sans se prendre la tête mais en respectant les règles non-écrites communément admises dans le grand nord, il va très vite se rendre compte qu'il n'en est rien quelques milliers de milles plus au Sud. Et déchanter. Et s'adapter, très vite et contre toute attente. Il va ainsi comprendre qu'il est entouré d'une bande de requins, de profiteurs, d'arnaqueurs de vol plus ou moins élevé, d'agioteurs, de truqueurs, de voyous inaccessibles car protégés par des lois qu'ils ont contribué à faire voter, par leurs propres campagnes de presse, par leurs dessous de table auprès de politiciens véreux. Il va comprendre à une vitesse incroyable - et après s'est fait avoir, d'abord, par du menu fretin puis par trois spéculateurs sans âme ni honneur, véritables brigands officiels et juridiquement inattaquables - que s'il veut non seulement survivre dans ce monde de pirates de la finance mais même développer ses investissement, s'enrichir et surtout, avant toute autre chose, continuer à jouer, mais cette fois avec des sommes colossales, il lui faudra adopter les mêmes ruses, devenir inflexible, cacher ses sentiments, s'avérer un être froid et sans morale (sans devenir pour autant immoral), profiter de la moindre faiblesse adverse, rendre coup pour coup et même, si possible, mettre à terre, définitivement, celui qui aura eu l'idée saugrenue de s'en prendre frontalement à lui, de le trahir, de jouer double jeu. Avec ces derniers, ils sera sans pitié, dut-il y risquer sa propre ruine !

Peu à peu, Radieuse Aurore va ainsi oublier totalement qui il fut. Il va s'empâter, devenir triste et totalement solitaire, fuir la compagnie des hommes, sauf lorsqu'ils sont indispensables à la progression ses affaires. Lui qui ne buvait pas - ou si peu, et uniquement dans des circonstances joyeuses, amicales - il va lentement mais surement s'avancer vers les rivages nauséeux d'un alcoolisme nocturne et solitaire, trouvant dans les mauvaises vapeurs de la boisson un dérivatif au mal être qui l'étreint de plus en plus, sans jamais parvenir à percevoir qu'il est en train de crever de tous ces excès, de tous ces reniements. On ne peut pas, bien évidemment, s'empêcher de songer aux confidences que l'auteur lui-même fera, quelques années plus tard, dans son "autobiographie d'un alcoolique", tel qu'il surnommait son livre confession, le terrible "John Barleycorn", dans lequel il en appelait même à la prohibition comme seul moyen de lutte contre cet infernal vice... Lentement, il va oublier tout ce qui faisait de lui un brave homme tout autant qu'un homme brave. Justifiant ses affaires toujours plus monstrueuses, il se justifie sans vergogne en ce qu'il veut «voler les voleurs», les arnaqueurs, les prévaricateurs, les agioteurs. Il se voile royalement la face en estimant que ses affaires n'attaquent que les supposés forts, ceux qui engraissent sur le dos des faibles, ceux qui doublent, triplent la mise en faisant trimer les castes inférieures à leur place. Lui qui était toute bonté, générosité, optimisme, refuse de voir que sa manière de faire des affaires contribue à appauvrir ceux qui n'ont déjà que le minimum, même si c'est de manière indirecte. Sa vision du monde est qu'il est mauvais. Et il sombre pas à pas dans cette idée funeste. le lecteur attentif à l'oeuvre du californien songe dès lors, à la lecture effrayante de ces pages mortifères, que le destin de cet homme ne peut être, à brève échéance, que celui connu par Martin Eden, même si c'est pour des motifs autrement divers. Pages terribles aussi, parce que London donne à découvrir un monde infect, putride, malsain du capitalisme dans ce qu'il a de plus destructeur, de plus vain, de plus amoral ; on pénètre, tout à la fois fasciné et ulcéré, ce monde de manoeuvres, de stratégies, de magouilles, de tractations infinies et byzantines que les dévots du Veau d'Or pratiquent au quotidien, et presque comme si tout cela était juste et bon, tandis qu'il s'agit rien moins que d'engraisser éhontément sur le dos de la bête.

Mais Jack London se refuse encore à écrire un roman qui serait intégralement noir et désespéré - ce roman à venir existe, mais il ne paraîtra qu'en 1914. Il est terrible et méphitique à divers degrés. Ce sont les futurs "Mutinés de l'Elseneur". -. On sent aussi que Jack est trop proche de son Elam, qu'il a encore trop de ressources, de rêves, d'idéaux pour le laisser tomber de cette manière sordide. Un Martin Eden suffit ! Alors, c'est l'auteur émouvant de "L'Amour et rien d'autre", ce troublant roman épistolaire à quatre mains, qui resurgit. London se remémore cette idée phare (et trop souvent oubliée de ses biographes ou de ses lecteurs), qu'il couchera sur le papier de manière tellement éclatante dans l'autre de ses chef-d'oeuvres par trop méconnu, le Vagabond des étoiles, à savoir que «l'histoire d'un homme, c'est l'histoire de l'amour de la femme» ! Ainsi, c'est une femme qui va sauver Radieuse Aurore de lui-même et du nihilisme existentiel dans lequel il se regarde sombrer sans rien pouvoir y faire. C'est une femme, et quelle !, qui va faire prendre conscience à Radieuse Aurore à quel point point il se fourvoie, à quel point il est devenu aussi mauvais, si ce n'est plus (par son aveuglement frelaté), que ces adversaires qu'il déteste et qu'il plume sans remord ni regret. Elle va le ramener à des choses plus simples, saines, viriles. Elle va lui ouvrir les yeux, aussi, sur ce que peut être réellement une femme, ce qu'elle veut ou refuse, ce qu'elle aime ou déteste. Par sa droiture, Dede Mason - c'est son nom -, par son courage aussi, son indéfectible fidélité, son goût pour la vie, mais une vie vraie, pas une existence entravée par des obligations malfaisantes, néfastes, encombrantes, Dede va remettre notre garçon bourru et perdu sur les rails justes de la destinée. Cela ne sera pas sans mal. Ce sera même à deux encablures d'un échec retentissant, Radieuse Aurore ne comprenant d'abord pas pourquoi sa fortune colossale et son goût inépuisable pour les "affaires" ôte à Dede toute envie de céder sa propre liberté contre l'esclavage des apparences et le risque d'avoir comme maîtresse dévorante ce fameux "business".

«Ce que femme veut, Dieu le veut !» prétend le dicton. C'est, assez justement ce qu'il va advenir de la volonté infatigable mais humble et modeste de cette femme - un des plus magnifiques portraits de femme que compte l'oeuvre de London. Un des plus beaux de toute la littérature, à n'en point douter -, d'une femme résolument moderne, même encore aujourd'hui, par bien des aspects, d'une femme bien qu'éminemment amoureuse, refuse d'abandonner sa simple existence de secrétaire -simple mais autonome et libre - pour le servage de l'argent. Il est fort probable que Jack London pensait à sa seconde épouse Charmian en dressant les traits de Dede, mais il n'empêche que sans ce personnage clé de la seconde moitié de ce roman, ce dernier se fût dérobé à l'humanité sincère et profonde que l'auteur souhaitait exprimer et il se serait enfermé dans une redite épouvantable, le suicide, qui fait pourtant de Martin Eden un texte majeur de la littérature mondiale.

Fort heureusement, il n'en est rien ici et cette femme, ainsi que le souvenir de quelques rencontres fortuites dont nous vous passons le détail ici, va faire prendre conscience à notre héros en perdition de la valeur profonde des choses vraies, de celles que l'on bâti de ses propres mains, pour lesquelles on prend le temps d'économiser - et son temps, et son or -. Tant pis si, dans la première partie de son destin, il a proclamé que la vie n'était qu'un jeu de dupes dont il fallait être le maître, Radieuse Aurore va reprendre goût à cette nature sauvage et généreuse, pour peu qu'on y mettre les mains - qu'il a tant dénié dans l'isolement crasse de la vie citadine. C'est ainsi qu'après avoir organisé sa propre faillite financière pour l'amour de sa belle - sans léser aucun de ses anciens partenaires -, il va revivre les joies d'une vie simple, pastorale, frugale, immédiate et saine dans un petit ranch acheté quelques temps plus tôt, mis au nom de sa jeune épouse et, confirmant d'une certaine manière les ultimes mots du Candide de M. de Voltaire, lui et sa fière bien-aimée apprivoisée vont tranquillement cultiver leur jardin. Max Gallo, préfacier de l'édition Phébus/Libretto de ce texte bouleversant en donne d'ailleurs une conclusion toute biblique, faisant incidemment de ce couple sauvé de tout enfer par la femme, une manière de Jardin d'Eden recueillant ces nouveaux Adam et Ève. L'interprétation en est sans doute un peu excessive mais, à y bien regarder, s'avère d'une intelligence fine.

[NB : Suite et fin dans la partie "commentaire".]
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Quel bonhomme, mais quel bonhomme ce Radieuse Aurore! Une telle force de la nature, un tel concentré de vitalité primale, fonceur, dominant, il n'y a que ce cher, très cher Jack London pour nous l'inventer.
Pourquoi Radieuse Aurore? Parce qu'ainsi l'ont surnommé ses compagnons d'aventure du Klondike quand, trentenaire débordant de vigueur et de bonté solaire, il les extirpait chaque matin de leurs lits comme un ouragan rayonnant pour les appeler à profiter du radieux jour qui se lève.
Mais Radieuse Aurore , fort de sa force, est fondamentalement un joueur, et le Klondike n'est qu'une étape sur son chemin d'apprentissage de la vie, dont il découvrira pied au plancher les pires ombres et les plus vives lumières.

Comme d'autres lecteurs, je ne peux m'empêcher d'établir un lien avec Martin Eden, dont Radieuse Aurore est un savant contrepoint. Mais ce qui me frappe plus encore est le parallèle de cette double lecture avec cette autre, composée de Croc Blanc et L'appel sauvage, également écrits à un an d'intervalle. Deux séries formant en somme deux tautologies à huit pattes dans un cas et quatre dans l'autre, Radieuse/Martin déclinant sur l'homme la double exploration des faces sombres et lumineuses de la force vitale et de la société des hommes là où les précédents filaient la métaphore animale pour interroger la liberté.
Dans chacun de ces quatre cas la plume est trempée dans le sel de la vie, ce nectar rare que seuls des hommes de l'envergure de Jack ont goûté, et peut-être plus viscérale encore dans Radieuse Aurore qui irradie littéralement de sève, d'authenticité et d'énergie brute.
Autant dire que Radieuse Aurore mérite bien plus de reconnaissance qu'il n'en a, et j'invite tous les amateurs de London à le découvrir!
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Jack London revêt une importance particulière pour moi. Je vous en avais déjà parlé là, avec Martin Eden, un chef d'oeuvre. Comment expliquer le bouleversement politique et philosophique qu'a pu créer en moi cet homme… Ses romans, comme ses essais, racontent l'Homme dans ses errements, les injustices, la beauté et le savoir comme ultime refuge. C'est ce qui m'a le plus marqué chez lui : cette façon qu'il a eu d'élever l'amour du Beau et du Savoir au rang de nécessité vitale pour chacun d'entre nous.

Burning Daylight ou Radieuse Aurore, possède la même force tragique que Martin Eden, avec une issue un peu plus heureuse toutefois. le résumé de l'éditeur indique que c'est l'oeuvre la plus désillusionnée de London. Je ne suis pas d'accord. C'est au contraire la plus optimiste peut-être. Curieusement, elle présente une gaieté totalement absente dans Martin Eden.

En résumé, le héros, Burning Daylight, est un homme du grand nord, un aventurier, un chercheur d'or, un homme qui risque tout et ne craint rien de perdre. oueur dans l'âme et tenace, Burning Daylight fera sa fortune grâce à une mine d'or, et contre toute attente deviendra un homme d'affaire prospère et millionnaire à New-York, puis San Francisco. Mais le milieu de la finance et son absence de valeurs et de morale, auront sur lui un effet pervers. Peu à peu il perd sa bonté, sa générosité et sa compassion. Il devient froid et impitoyable, à l'image du monde qu'il côtoie depuis sa fortune faite. Il faudra le hasard de sa rencontre avec une de ses employées, Dede Mason. Celle-ci va rester à ses côtés pendant de longs mois et l'observer, pendant que lui va tomber amoureux d'elle. Et c'est en voulant l'épouser qu'il découvre à travers ses yeux l'homme qu'il est devenu, si loin du Burning Daylight qu'elle aimait au début.

Il y a une réflexion très intéressante sur la façon dont l'argent et le pouvoir transforment immanquablement les hommes les plus purs. Burning Daylight sera ébranlé par le portrait que fera Dede de lui, de ce qu'il était, de ce que le pouvoir et l'argent ont fait de lui. Et il en tirera la meilleure conclusion qui soit pour sa santé morale et mentale.

Je trouve ce roman autrement plus optimiste que ce qu'en disent les critiques, au sens où le héros saura trouver sa propre absolution, pour renaitre à l'homme qu'il était. Et là où Martin Eden perd foi en l'Homme et préfère quitter ce monde, Elam Harnish retrouve le chemin de l'aurore radieuse.

Tous les bouquins de London me font cet effet : une montagne russe entre espoir et désespoir… Et le questionnement qu'il propose aux lecteurs trouve toujours un écho dans ma propre vie. Nos choix font de nous ce que nous sommes…

C'est un roman que je recommande les yeux fermés (si je puis dire) et puis on a l'occasion aussi de découvrir les décors de la ruée vers l'or dans le grand nord, cette nature si chère au coeur de Jack London !
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C'est un roman écrit en 1910 un an après le célèbre Marti Eden. Celui-ci reste pourtant assez méconnu , alors qu'il n'a rien à envier à ses plus célèbres . On retrouve dans celui-ci beaucoup de thèmes que l'auteur a explorés dans sa vie ,le grand nord , la fièvre de l'or, le jeu, l'alcool , le combat d'un être sur ce monde qu'il déteste, celui des plus forts sur les faibles, celui des puissants sur les petites gens. Pas de place pour les faibles, telle est la devise de Daylight qui durant tout ce récit va se battre avec les plus puissants de cette nouvelle Amérique qui se profile, celle de l'industrialisation. C'est dans ce contexte violent et si déshumanisé, qu'il va rencontrer une personne aussi forte que lui mais avec une tout autre philosophie.Ceci l'amènera à se poser les bonnes questions ,sur lui, son existence, ses désirs et sur ce qui est de plus fondamental à tout être.

Si vous aimez jack London , je vous laisse donc le découvrir. Vous ne serez pas déçu tellement les personnages de ce roman sont forts et attachants.
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Citations et extraits (36) Voir plus Ajouter une citation
- J’aimerais vraiment vous épouser, mais j’ai peur. Qu’un homme comme vous s’intéresse à moi me rend à la fois fière et humble. Mais vous êtes trop riche. C’est là que mon abominable bon sens l’emporte. Même si nous nous marions, vous ne serez jamais l’homme qui m’appartiendra – comme amant, comme mari. Vous appartiendrez à votre argent. Je suis une femme stupide, je sais, mais j’entends que celui que j’épouse soit à moi seule. Vous ne seriez pas libre pour moi. C’est votre argent qui vous possède, vous prend votre temps, vos pensées, votre énergie, tout. Il vous commande d’aller ici, d’aller là ; de faire ceci, de faire cela. Vous comprenez ? C’est peut-être pure sottise, mais je sais que je peux aimer beaucoup, donner beaucoup – donner tout ; et, en retour, si je ne désire pas tout, je désire beaucoup – beaucoup plus en tout cas que votre argent ne vous permettra de me donner.
» Votre argent vous détruit : avec l’argent, vous êtes de moins en moins gentil. Je n’ai aucune honte à vous dire que je vous aime, puisque je ne vous épouserai jamais. Et je vous aimais quand je ne vous connaissais pas du tout, que vous êtes venu de l’Alaska, que je suis venue au bureau pour la première fois. Vous étiez mon héros, vous étiez le Radieuse Aurore des mines d’or, le voyageur audacieux, l’homme des filons. Tout en vous montrait que vous l’étiez.
» Je me demande s’il existait alors une seule femme qui, rien qu’à vous regarder, ne tombait pas folle amoureuse de vous. Mais vous n’êtes plus cet homme-là.
» Je vous en supplie, pardonnez cette blessure que je vous fais. Vous vouliez du parler-vrai, en voilà. Depuis quelques années, vous menez une vie contre nature. Vous, l’homme des grands espaces, vous vous êtes confiné dans les cités avec tout ce que cette vie implique. Vous n’êtes plus du tout le même, et votre argent est en train de vous mener à votre perte. Vous changez, on vous voit devenu moins sain, moins net, moins plaisant. Votre argent, la vie qui est la vôtre, ne cherchez pas plus loin les coupables. Vous le savez. Jusque physiquement, vous êtes un autre. Vous avez forci – de la mauvaise graisse, oui !
» Avec moi, vous affichez gentillesse et bonne humeur, je sais bien, mais avec les autres vous n’avez plus ces qualités comme autrefois. Vous êtes devenu dur, méchant. Je le sais bien, allez ! Figurez-vous que je vous ai observé six jours par semaine, pendant des mois, depuis des années ; et, sur certains détails infimes de votre personnalité, j’en sais plus long que vous sur l’essentiel de mon caractère... Cette méchanceté ne se contente pas de loger dans votre cœur et votre cerveau, on la voit sur vos traits, où elle a inscrit ses lignes. Je les ai observées qui venaient, qui les envahissaient. Je vous le redis, c’est votre fortune et l’existence qu’elle vous oblige à mener qui en sont responsables. Elles vous ont ravalé au rang de la brute, elles vous ont dégradé. Et cette dégringolade ne peut que continuer jusqu’à ce que vous soyez perdu sans recours.
[...] - Ne croyez pas que je ne fasse que penser à moi. Après tout, l’amour c’est donner, pas recevoir. Mais je pourrais vous donner tant et plus, ça ne vous ferait ni chaud ni froid, cela me crève les yeux. Vous avez une sorte de maladie. Vous ne jouez pas le jeu des affaires de la même façon que les autres. Vous y mettez votre cœur, votre âme, tout votre être. Vous pouvez toujours dire ou croire ce que vous voulez, une épouse ne serait pour vous qu’une brève diversion. Regardez Bob, cette bête splendide, ronger son frein tout seul dans son écurie. À moi, vous achèteriez un château princier, et vous m’y abandonneriez, à ronger mon frein tout pareil, ou à pleurer toutes les larmes de mon corps, désespérée par mon impuissance à vous sauver. Le virus des affaires vous rongerait et vous gâterait jusqu’à la moelle. Vous jouez ce jeu-là comme tous ceux que vous avez toujours joués, y compris quand vous jouiez votre vie sur les pistes, dans l’Alaska. Personne ne pouvait voyager à votre vitesse, travailler avec votre endurance, ou s’éreinter autant que vous. Rien ne vous faisait reculer ; vous vous jetiez à corps perdu dans tout ce que vous entrepreniez.

(p. 306-308)
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Les nouveaux venus, en quête de héros, assuraient que Radieuse Aurore était un homme ignorant la peur. Mais s’ils voulaient faire allusion aux femmes, que non ! Bettles, Dan MacDonald et d’autres vétérans hochaient alors la tête en riant. Ils avaient raison. Elles lui avaient toujours inspiré de la crainte depuis l’âge de dix-sept ans, quand il avait dû subir les avances outrées et ridicules de la « Reine Anne », de Juneau. Il ne connaissait rien aux femmes. Élevé dans un camp de mineurs, où le peu qu’il y en avait se cachait, n’ayant pas eu de sœurs, privé de mère dans sa prime jeunesse, il n’avait pas eu de contacts avec le beau sexe. À dire vrai, après avoir pris ses jambes à son cou dans l’histoire de la Reine Anne de Juneau, il avait fait, des années après, des rencontres dans le Yukon et même fréquenté de celles qui traversaient les passes à la suite des pionniers et des premiers chercheurs d’or. Mais jamais un agneau n’avait cheminé au côté d’un loup plus effrayé, plus tremblant.
[...] Mais il fut donné à la Vierge de porter le coup final à sa terreur. Un matin, dans sa cabane, on la trouva morte, d’un coup de revolver qui lui avait brûlé la cervelle. Elle n’avait laissé ni lettre ni le moindre mot d’explication. [...] La rumeur publique, plus ou moins, s’emparant de l’histoire, la mit sur le dos de Radieuse Aurore : c’était sa faute si elle s’était supprimée.
[...] Le pire, c’est que c’était vrai, comme Radieuse Aurore le savait. Il se souviendrait toujours du dernier soir où il l’avait vue. Il était loin de se douter de rien. Rétrospectivement, chaque détail le hantait. À la lumière de la tragédie, il pouvait tout expliquer : le calme qu’elle montrait, la certitude tranquille où elle était, comme si toutes les questions vitales qui la taraudaient, miraculeusement évanouies, ne se posaient plus, et aussi cette douceur angélique qui auréolait chacune de ses paroles, chacun de ses gestes, lesquels en acquéraient une dimension presque maternelle.
[...] Ah ! elle l’avait bien dupé, le triple sot qu’il avait été ! Il avait même pensé, ce soir-là, que ses sentiments envers lui étaient de l’histoire ancienne, et il s’était réjoui à cette pensée, allant jusqu’à se délecter de leur amitié à venir, une amitié qu’ils pourraient cultiver dès lors que l’amour, ce fauteur de troubles, aurait disparu de leur chemin.
Et puis, quand il était à sa porte, le chapeau à la main, à lui souhaiter bonne nuit. Il avait été frappé sur le coup par un détail amusant et embarrassant : elle s’était penchée pour lui baiser la main. Il en était resté tout bête, mais, pour l’heure, il frissonnait encore en revivant cet instant et en sentant toujours sur sa main le contact de ses lèvres. C’était adieu qu’elle lui disait, un adieu pour toujours, et qu’il n’avait pas saisi le moins du monde. À cet instant précis, où se ramassaient tous les moments de la soirée, froidement, de façon déterminée, elle avait, fidèle à elle-même et à sa manière qu’il reconnaissait bien là, pris la résolution de mourir. Ah ! si seulement il avait été plus clairvoyant ! Même étant indemne de cette maladie contagieuse, il l’aurait épousée malgré tout s’il avait eu le moindre soupçon de ce qu’elle tramait. Et pourtant il savait, d’autre part, qu’elle avait en elle un orgueil d’une raideur insensée qui l’eût empêchée d’accepter un mariage offert comme une charité. Dans ces conditions, il ne pouvait réellement pas la sauver, après tout. Le microbe de l’amour l’avait frappée, elle était destinée d’emblée à ne pas en réchapper.

(p. 126-130)
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Il se montrait inflexible parce qu'il n'avait que mépris pour ses partenaires. Il professait que pas un sur cent n'était foncièrement honnête. Et les honnêtes joueurs ne pouvaient se sortir d'un jeu aussi tordu qui, à terme, les mènerait droit au désastre. L'expérience de New-York lui avait dessillé les yeux. Il avait appris à dépasser les apparences et à voir dans la vérité nue le monde des affaires. Une vision qu'il étendit à l'industrie et à la société en général, de la façon suivante :

La société en tant que système visible n'était qu'un vaste jeu de dupes. Elle comptait en grand nombre des incapables congénitaux : des humains qui n'étaient pas assez faibles pour être enfermés ni assez forts pour être employés à autre chose qu'à la taille des pierres et au portage de l'eau.

Là-dessus venaient les idiots qui prenaient au sérieux ce jeu de dupes organisé, l'honoraient, le respectaient. Ils devenaient une proie facile pour les autres, qui ne s'en laissaient pas compter, et prenaient le jeu de dupes pour ce qu'il était en réalité.

Le travail, le vrai travail était la seule source de richesse. Que ce fut un sac de pomme de terre, un piano ou une grosse automobile, tout était le produit d'un labeur. Mais l'injustice présidait à la distribution de ces produits du travail et l'on ne voyait pas de paysan aux mains calleuses disposant d'un piano à queue ou se déplaçant en automobile. Pourquoi ? À cause du jeu de dupes. Des centaines de milliers d'individus s'évertuaient jour et nuit à s'interposer entre le travailleur et le produit de son travail. Ces intermédiaires étaient les capitalistes qui s'emparaient d'un gros morceau dont la valeur n'était fixée à rien, sinon par leur force brutale et leur abjection. «Il faut en tirer le maximum», tous les hommes d'affaire appliquaient cet adage.
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Tout écrivain porte, avec lui et après lui, un chef-d’œuvre méconnu.
Voici celui de Jack London : "Radieuse Aurore"
Un roman digne de figurer aux côtés des chefs-d’œuvre reconnus : "Martin Eden", "Le loup des mers". Il les égale par l'écriture et les dépasse par son étonnante actualité. Écrit, il y a plus de soixante ans, il est placé par son sujet et son message au coeur des problèmes de notre temps.
Roman d'un écrivain surtout célèbre par des nouvelles inspirées par l'or, le froid et les indiens, "Radieuse Aurore" a été composé un peu comme André Gide s'était libéré des "Nourritures terrestres" : au terme d'une étrange maladie tropicale. Assez douloureuse, dans le cas de London, pour interrompre la croisière de son yacht "Le Snark" et pour obliger le romancier à séjourner à l'hôpital de Sidney (Australie) de novembre 1908 à avril 1909...
(extrait de la préface "un voyage initiatique : des glaces polaires à la civilisation concentrationnaire" signée Francis Lacassin et insérée en début de l'édition parue chez "10/18" en 1973)
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Une nouvelle vision l'éblouit. Il vit la fébrile cité de ses rêves, la plus septentrionale métropole de l'or surplombant le Yukon du haut d'une rive élevée, occupant de larges espaces. Il vit, alignés sur trois rangs, les vapeurs mouillant dans le port fluvial. Il vit de bruyantes scieries qui fonctionnaient, de longues files de chiens attelés à des doubles traîneaux chargés de provisions pour les prospections. Plus loin, il vit les maisons de jeu, les banques, les marchés financiers, les bons, jetons, mises, chances et occasions à saisir d'une partie qui dépassait infiniment toutes les parties qu'il avait jamais vu jouer. Qu'est-ce que l'enfer pouvait bien être d'autre, songea-t-il, que de sentir monter en soi la bonne idée, que de savoir le filon à portée de main, et de rester en dehors du coup ? A cette pensée, la vie frémissait en lui, s'agitait, et recommençait à lui servir ses anciens mensonges.
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Vidéo de Jack London
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