Bernard Lonjon dans son dernier ouvrage présente dans une même biographie deux personnages aussi différents l'un de l'autre que
Jean Cocteau et
Edith Piaf. L'idée est originale, la vie de chacun est connue mais la rencontre dans une même étude l'est-elle ? Dans la tradition de
Chateaubriand l'auteur nous dresse un portrait opposé de chacun des deux, Les origines de l'un sont bourgeoises et dilettantes dans un milieu raffiné qui cultive Stravinski et le Jazz ; celles de l'autre relèvent de la rue ou des maisons closes.
Cocteau, dès ses débuts, croise tous ceux qui façonneront le siècle littéraire, artistique et musical. de vingt-six ans sa cadette, la môme chante dans les rues en suivant un père illusionniste et contorsionniste jusqu'à l'assassinat de son mentor Louis Leplée : « un passé pesant et encombrant » écrira
Cocteau avant qu'elle ne devienne la chanteuse célébrée dans le monde entier.
Au fur et à mesure du déroulement de leur vie et des succès, un fourmillement de personnages grouille autour de l'un et de l'autre, dans la fumée de l'
opium et, en ce qui concerne le poète, dans des situations que la loi Taubira aurait pu régulariser. Les lecteurs rencontreront des boxeurs célèbres comme al Brown, amant du poète et
Marcel Cerdan celui de la chanteuse. Défilent aussi les paroliers qui seront tour à tour les amants « uniques » d'Edith. Surgissent des noms d'artistes qui appartiennent au passé d'avant-guerre ou de l'après-guerre. Les bons mots de l'époque, généralement méchants, donnent du piment à la lecture. Leur époque dans ses sonorités se suit sur Internet. Par exemple en appelant Parade d'Erick Satie qui fut créé sur le poème de
Cocteau en 1917 par Serge Diaghilev, ou le sang d'un poète (1930) et retrouver aussi des chanteuses oubliées comme Mariane Oswald ou Marine Dubas.
Jean Cocteau et
Edith Piaf se rencontreront en février 1940.
Edith Piaf sera l'héroïne de la pièce de
Jean Cocteau le bel indifférent « monologue à deux personnages » dont
Paul Meurisse. l'amant du moment, sera le muet interprète (1). de cette période datent les relations étroites d'amitié entre ces deux que la mort, le 11 octobre 1963, entraînera dans une séparation définitive a quelques heures d'intervalles. Dans un rythme soutenu
Bernard Lonjon nous amène à une époque qui fut celle de notre jeunesse.
Cocteau s'illustre avec ses films La belle et la bête et
Orphée quant à Edith Piat elle lance la carrière de son jeune amant
Yves Montand ; un autre le remplacera,
Georges Moustaki qui lui fera chanter Allez, venez Milord ! Enfin avec Charles Dumont elle chantera Non je ne regrette rien.
Pourrait-on demander à
Bernard Lonjon, lors d'une Saint-Charlemagne de jeter un regard plus critique sur l'ensemble et le détail de l'oeuvre de
Cocteau ou de s'interroger sur la survie des chansons d'
Edith Piaf cinquante ans après leur mort ?
(1) Une interprétation filmée de 1953 est donnée en partie sur Internet, ainsi qu'une autre avec des images fixes.
Christian de Seauve