« Espèce de catin » ! Quelle injure, n'est-ce pas ? Et bien, c'est comme cela que les prostituées étaient appelées de façon courante et naturelle au 15e siècle. Mises au ban de la société, obligées de porter des rubans jaunes pour se signaler en tant que telles – car malheur si des dames vertueuses et des beaux messieurs croisent ces femmes dépravées et promises aux feux de l'enfer -, elles sont très souvent humiliées, battues, violées. Et pourtant, ces messieurs du Moyen-Age en ont tellement besoin...
La jeune, très jolie et très vierge Marie, elle, n'était pas promise à ce destin infamant. Mais elle y a été obligée ! Humiliée, battue, violée...AVANT de devenir « catin », par la force des choses. Victime d'un riche prétendant (avocat !) malhonnête et cupide, sa vie a basculé la veille de ses noces, car les complices de son promis l'ont accusée de prostitution, et elle a été conduite par la force des choses en prison, où, toujours par la force des choses, elle a été violée. Et puis jugée, flagellée, bannie de sa ville, Constance, obligée de se prostituer puisqu'elle n'avait plus le droit de vivre comme une femme honnête. Mais immense est la force de son caractère, immense est son désir de vengeance ! Recueillie par une autre prostituée itinérante, elle s'en ira de ville en ville à la recherche d'hommes qui pourront au fil des années lui procurer un petit pactole dans le but de faire assassiner ses tourmenteurs. Les rencontres diverses, heureuses ou malheureuses, émailleront sa vie et la redirigeront tout doucement vers Constance et son destin.
En toile de fond :
- la chrétienté, incontournable, avec le concile de Constance, les trois papes, Jan Hus ...mais aussi une foule de moines dépravés qui ne pensent qu'à ce qu'ils ont entre les jambes
- Les batailles pour la conquête de territoires dans ce saint empire romain de la nation germanique, donc des soldats et des mercenaires qui ne pensent qu'à ce qu'ils ont entre les jambes
- le statut des femmes, qui n'ont rien à dire, qui doivent se comporter de façon vertueuse sous peine d'être flagellées, ne pas sortir seules en ville, et obéir à leur père, seigneur et maitre ; et le statut de ces femmes qui justement ne se comportent pas de façon vertueuse, qui ouvrent les jambes pour ne pas mourir de faim, obligées de supporter l'hygiène déplorable de la plupart de ces hommes du 15e siècle
Des bords du Rhin à la Forêt-Noire, des maisons bourgeoises aux châteaux-forts en passant par les cabanes pour les porcs,
Iny Lorentz nous promène dans cette Allemagne en devenir, ballottée par les rivalités de toutes sortes, entre personnes de toutes conditions, avec toujours, comme trait d'union, la « catin ».
Dégoûtée par le viol collectif du 1er chapitre, j'ai quand même suivi les aventures de Marie et me suis, non pas passionnée pour son sort, mais intéressée par le sort de ces femmes rejetées officiellement mais dont tout homme de l'époque ne peut se passer officieusement.
La psychologie n'est pas très fouillée, et le récit parfois tourne en rond, mais il nous renseigne assez bien sur la vie de ces gens si lointains de nous et pourtant si proches à bien des égards...
Il y a une suite à ce premier volume, je compte sur les babéliotes pour la présenter, parce que moi, je m'arrête là.