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Francis Lacassin (Éditeur scientifique)
EAN : 9782268062570
429 pages
Les Editions du Rocher (21/06/2007)
4.1/5   48 notes
Résumé :
Mal famé, Jean Lorrain est surtout connu par ses analyses sarcastiques des moeurs de la Belle Epoque.
Dans ses Princesses d'ivoire et d'ivresse, il a réussi ses histoires les plus magiques et les moins sordides, placées sous le mauvais signe de trois princesses qui ont pour nom : Cruauté, Illusion et Désespérance. Mais on n'échappe pas à son destin et Lorrain n'a pu s'empêcher de faire accoucher une reine d'une grenouille, de flétrir le corps des belles endor... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (4) Ajouter une critique
Citation :
"Par les ciels mouillés de décembre, tandis que les passants enlaidis par le froid se hâtent et se heurtent à l'angle des trottoirs, et que la bise tourmente avec des férocités de chatte les guenilleux attardés au pavé dur des routes, combien il serait doux de pouvoir redescendre le passé, de pouvoir redevenir enfant et, blotti près des braises rougeoyantes, dans la tiédeur des chambres closes, quel repos et quelle fraîcheur ce serait aux pauvres yeux éraillés par la vie à se reprendre au charme de vieux livres d'images, des vieux livres d'étrennes illustrés de jadis, et de pouvoir croire encore aux contes !"


Et pour retrouver ce plaisir du conte, du rêve, de l'évasion, Jean Lorrain en écrit à son tour. Des contes un peu étranges, tout de même. Des contes un peu cruels, où ses héros souffrent (ça c'est normal dans les contes) mais sans espoir d'une fin heureuse, et surtout pas de mariage, et beaucoup d'enfants à l'horizon. Des princesses décadentes, par trop ornées, promènent leur ennui, leur spleen, dans des somptueux palais-prison, et rêvent de mort et de tourments pour enfin avoir quelque chose à ressentir.

Et puis quelques réminiscences reviennent à Jean Lorrain, dans lesquelles il revisite certains contes qu'il a aimé, La reine des neige, Mélusine....Et les contes qu'il a entendu dans la cuisine racontée par sa nounou, et qui rappellent la Normandie de son enfance. Peut être les plus intéressants, les plus touchants, les plus authentiquement contes. Avant que l'âge adulte ne pervertisse la magie du conte, et en fasse une sorte de poème en prose décadent.
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L'atmosphère est fantastique, délicieusement archaïsante. On pense à Moreau en peinture, à Huysmans en littérature. Il y a du Baudelaire, il y a du XIXe finissant, se perdant dans des rêves antiques ou médiévaux, dont l'atmosphère délétère exhale ses derniers relents. Voici les titres des nouvelles en questions et les thèmes récurrents :

La princesse aux Lys rouges : Belle damoiselle dans un couvent, elle tue en décapitant les fleurs.
La princesse des chemins : Une belle femme errante, épousée et enfermée par un roi, regrette sa liberté. Grimaldine aux crins d'or : la beauté fatale enfermée par son mari ressemble à la vagabonde.
La princesse du Sabbat et La princesse aux miroirs : Deux femmes, deux princesses qui veulent être toujours jeunes et jolies, pétries d'orgueil. Elle se rendent chez des sorcières mais perdent leur image au sabbat.
Les filles du vieux duc : des jeunes filles fuient le palais. Tout comme Hylas. Ils s'échappent des volontés toutes puissantes pour errer sur les chemins. Légende des trois princesses est sur le même mode : fuite des jeunes femmes à la poursuite d'un amour indigne et traitre à leur patrie.
Narkiss : Un beau pharaon à l'image d'Isis, méconnaît son reflet. Enlevé et élevé dans l'oisiveté par des prêtres, il est victime, comme son acolyte grec, de son propre visage.
La fin d'un jour : Découverte d'un carnage à Constantinople.
Conte du bohémien qui refuse de chanter pour roi et émerveille le peuple : une métaphore de l'amour.
La princesse Ottilia : pauvre sourde et muette jouet des ambitieux.
La Marquise de Spolète épouse un vieux duc et se noie dans les fêtes : tout dérape le soir où avec trois amants elle joue Salomé.
L'inutile vertu : un homme refuse les plaisirs de la vie tout à la recherche d'un criminel à éliminer. Il vieillit.
Mélusine enchantée : conte de la belle femme serpent, revu et corrigé.
Mandosiane captive : une beauté de tissus, image de bannière se délite à la fin du Moyen-Age.
Oriane vaincue : la sirène vaincue par le christ.
Le Prince dans la foret : deux contes au même titre qui traitent de l'enchantement des rêves dont on ne se sort que par la douleur et de la quête du bonheur comme indifférence à la souffrance.
Conte des faucheurs : amour et mort fauchent devant Raymondin.
La princesse sous le verre : Version corrigée de la Belle au bois dormant endormie que chacun cherche à réveiller... horrible carnage et canonisation de l'endormie.
Neighilde : une reprise de la Reine des neiges.
La princesse Neigefleur : L'histoire de Blanche Neige centrée sur mauvaise reine. On retrouve le thème du miroir omniprésent dans les premiers contes.

Un recueil délicieux, poétique mais souvent peu riant. Ne vous attendez pas à un happy end, car la pourriture, le poison, le temps viennent tout détruire. Il y a un peu de la mort du grand Pan, des civilisations disparues et des maléfices anciens dans ces oeuvres. C'est beau, souvent d'une intense pureté, je me demande à quel point Silhol s'est inspirée de ces textes, de cette plume...
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Ecrin sombre d'argent terni... Une lecture nocturne et savoureuse, proprement ensorcelante, découverte grâce à la superbe chronique de Psyché, à propos de la princesse sous verre mais aussi (donc) du présent ouvrage, dans le lien ci-dessous :
Lien : http://psycheinhell.wordpres..
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Un livre de conte classique qui est très bien écrit. Malgré le temps il a su me captiver, les histoires sont très jolies. Rien a envier aux contes d'aujourd'hui. Je remercie l'amie que me l'a offert et le conseil aux amoureux du genre.
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Citations et extraits (6) Voir plus Ajouter une citation
Il n’est pas au monde émotion un peu délicate qui ne repose sur l’amour du merveilleux : l’âme d’un paysage est tout entière dans la mémoire, plus ou moins peuplée de souvenirs, du voyageur qui le traverse, et il n’y a ni montagnes, ni forêts, ni levers d’aube sur les glaciers, ni crépuscules sur les étangs pour qui ne désire et ne redoute à la fois voir surgir Orianne à la lisière du bois, Thiphaine au milieu des genêts et Mélusine à la fontaine. (…)
Il faut donc aimer les contes et d’où qu’ils viennent, de Grèce ou de Norvège, de Souabe ou d’Espagne, de Bretagne ou d’Orient. Ce sont les amandiers en fleur des jeunes imaginations ; le vent emporte les pétales, dissémine le rêve, mais quelque chose est resté qui, malgré tout, portera fruit et ce fruit-là parfumera tout l’automne. Qui n’a pas cru enfant ne rêvera pas jeune homme ; il faut songer, au seuil même de la vie, à ourdir de belles tapisseries de songe pour orner notre gîte aux approches de l’hiver ; et les beaux rêves même fanés font les somptueuses tapisseries de décembre.
Il faut donc aimer les contes, il faut s’en nourrir et s’en griser comme d’un vin peu dangereux et léger, mais dont la saveur âpre sous un faux goût de sucre insiste et persiste, et c’est cette saveur là qui, le repas fini, enchante le palais et permet au convive écoeuré de la table parfois d’y demeurer.
Pour moi, je l’avoue, je les ai adorés et d’une adoration presque sauvage, les contes aujourd’hui proscrits et dédaignés ; et c’étaient des contes brumeux, trempés de lune et de pluie, semés de flocons de neige, des contes du Nord, car je n’ai connu, moi, que très tard dans la vie l’enchantement ensoleillé du Midi.

["Les Contes", préface]
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Le lendemain, aux premiers rais de l'aube, les prêtres d'Osiris trouvèrent le petit Pharaon mort, enlisé dans la boue, au milieu des cadavres et de l'immense pourriture amoncelée là depuis des siècles. Debout dans la vase, Narkiss avait été asphyxié par les exhalaisons putrides du marécage mais, enfoncé jusqu'au cou dans le cloaque, il dominait de la tête les floraisons sinistres écloses autour de lui en forme de couronne; et, telle une fleur charmante, son visage exsangue et fardé, sa face adolescente au front diadémé d'émaux et de turquoises se dressait droite hors de la boue et sur ce front mort des papillons de nuit s'étaient posés, les ailes étendues, et dormaient.
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Cependant il devenait de plus en plus faible, et il comprit qu’il ne tarderait pas à mourir s’il ne prenait point quelque nourriture. Il avoua à l’une des fées l’état où il se trouvait, osa même lui demander à quelle heure on souperait. “Eh ! quand il vous plaira !” dit-elle. Elle donna un ordre, et voici qu’un page, qui était un gnome, apporta au prince, pour potage, une goutte de rosée sur une feuille d’acacia. Ah ! l’excellent potage ! Le convié des fées déclara qu’on ne saurait rien imaginer de meilleur. On lui offrit ensuite pour rôti une aile de papillon dorée à un rayon de soleil, – une épine d’aubépine aurait servi de broche, – et il la mangea d’une seule bouchée, avec délice. Mais ce qui le charma surtout, ce fut le dessert, la trace d’un baiser d’abeille sur un pétale de rose. “Eh bien, dit la fée, avez-vous bien soupé, mon enfant ?” Il fit signe que oui, extasié, mais, en même temps, il pencha la tête et mourut d’inanition.

In « Le mauvais convive »
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Et très perplexe, elle allait prendre au fond d'une armoire une tête desséchée de pendu, qu'elle consultait dans les grandes occasions, et, l'ayant posée sur un grand livre ouvert au milieu d'un pupitre, elle allumait trois cierges de cire verte et s'abîmait dans des pensées sinistres. ("La princesse Neigefleur")
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Une poétique de la putrescence et de la charogne s'installe [dans les contes de Lorrain], instaurant une forme encore plus subtile de cruauté qui se plaît à décrire les ravages de la mutilation ou de la décrépitude sur la beauté des corps. (Extrait de la préface de Jean de Palacio.)
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