Le festival

Conte de Noël "à rebours", le festival entretient une parenté étonnante, à presque dix ans d'intervalle, avec le cauchemar d'Innsmouth, et à ceci près que le déroulé du récit prend un chemin exactement inverse.

Un narrateur solitaire revient dans la cité où vécut sa famille et où se déroule, tous les cents ans, à l'époque de Noël, un rituel lié à un culte très ancien. de cet antique peuple dont il est le descendant, on ne saura pratiquement rien, sinon qu'il est issu de lieux aux connotations merveilleuses - ce qui peut étonner chez Lovecraft : des "jardins opiacés pleins d'orchidées". En cela, la nouvelle se rattache donc également à une autre parue un an plus tôt, Azathoth ; mais l'on songe également aux jardins étranges de la fille de Rappaccini...

Les deux premières pages de la nouvelle, en particulier, qui voient le narrateur entrer dans la ville délabrée et silencieuse au soir de Noël, à la nuit tombée, génèrent une atmosphère aussi étrange que belle. L'ambiance prendra vite une tonalité sordide, glauque, puis monstrueuse. Mais, plus que la découverte d'un rite malfaisant, insupportable, plus que la fuite du narrateur dans une tentative désespérée d'échapper à ses origines, plus que la question de la folie qui, peut-être, l'habite, ce texte parle de solitude. Il est d'une tristesse poignante, ce que Lovecraft a peu développé dans ses autres nouvelles. C'est ce qui lui donne toute sa beauté insolite.

Bon, pas beaucoup plus de bonheur dans cette nouvelle que dans les deux précédentes de Lovecraft. Et j'ai apprécié qu'elle soit plus courte, ce qui m'a permis de ne pas m'endormir dessus.
Le début est presque prometteur, avec de belles descriptions imagées d'un port de la Nouvelle Angleterre sous la neige, j'avais en tête les images du film "Scrooge" basé sur les contes de Noël de Dickens.
Et puis, au fur et à mesure qu'on tombe dans l'horreur, on se noie de nouveau dans une profusion d'adjectifs à la queue-leu-leu, franchement lourdingue.
Pour moi, ce n'est pas en enchaînant les mots "horrible", "épouvantable", "affreux" et "abominable" dans une même phrase que l'on réussit à susciter l'horreur, l'épouvante et l'abomination.
Et comme d'habitude, il n'y a pas vraiment d'histoire, et le peu d'histoire qu'il y a finit en queue de poisson (pourri, le poisson).

Seconde nouvelle que je lis de Lovecraft, je poursuis mon immersion dans le mythe de Cthulhu.
Un texte très court, qui reprend les ingrédients que j'avais trouvés dans La cité sans nom. Une écriture très imagée,, un personnage dont on ne sait rien, un décor particulier, qui lui aussi descend dans les tréfonds de la Terre, et la perte de repères, ici dans l'absence de visages, dans les masques d'un personnage.

J'ai aimé son aspect fantastique, toujours sur le fil entre réel et surnaturel, interrogation sur la nature des événements qui se déroulent, avec la bonne dose d'angoisse générée.
La fin est typiquement fantastique, n'apportant aucune réponse et laissant le lecteur se faire sa propre idée sur ce qu'il s'est passé dans les pages précédentes.

Pas inoubliable selon moi; je n'en garderai pas un souvenir impérissable, mais ça me permet de me familiariser avec l'auteur, son écriture, son univers, ses habitudes narratives, la structuration de ses écrits, les grandes figures de son mythe… l'occasion notamment de voir mentionné ce fameux Necronomicon, et d'avoir un aperçu de ces terribles créatures tentaculaires abyssales.

Une nouvelle plongée dans la ville lugubre, boueuse de Kingsport, aux cavernes stygiennes et aux relents de moisissures et de miasmes, où un jeune homme en réponse à l'invitation de sa famille, pénètre au coeur d'une procession étrange. Treize ans avant le Cauchemar d'Innsmouth, Lovecraft dévoile une ville par laquelle aucune rail de trailway ne passe, et dont on préfère ne jamais pénètrer les carrefours et chemins sinueux.

Le Festival est une courte nouvelle de Lovecraft fort plaisante. On retrouve encore une fois les thématiques de l'auteur ais ce qui est notable, c'est que la fin peut s'interpréter de différentes manières. En effet, plusieurs explications plausibles peuvent correspondre à la vérité... Cela apporte une certaine saveur à ce récit.