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Clarisse Francillon (Autre)Jean-Roger Carroy (Autre)
EAN : 9782070297771
266 pages
Gallimard (29/01/2004)
3.64/5   21 notes
Résumé :

Tout est rencontre, signe, et tout est signe de tout. Ultramarine, le titre est significatif : il nous avertit de ne pas prendre le livre pour ce que, de prime abord, il semble être, un simple roman maritime. Il s'agit en fait d'une fable où la mer, le bateau ne sont constamment évoqués que comme deux symboles majeurs susceptibles d'exprimer, au mieux, le tourment de l'homme en proie au conflit et aux ambiguïtés de l'Ordre et... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (1) Ajouter une critique
« Ultramarine » est le premier roman écrit (1933) par Malcolm Lowry, traduit par Clarisse Francillon et Jean-Roger Carroy (1965, Denoel, 266 p.). Roman en partie autobiographique, suite à un embarqement du jeune Malcolm, avant d'entrer à Cambridge.
Eugene Dana Hilliot, jeune intellectuel bourgeois nourri de littérature veut se confronter à l'univers des marins, univers auquel ses lectures ont conféré une aura mythique.
On suit un jeune homme à bord d'un bateau à vapeur au nom prédestiné, l' »Oedipus Tyrannus » au début du XXeme siècle et ses efforts pour se faire accepter par ses coéquipiers. Lowry a remanié le roman jusqu'à sa mort, l'adaptant également pour le mettre en phase avecson deuxième roman, « Under the Volcano » (1947).
Le voyage initiatique d'Hilliot se présente donc comme une quête d'expérience, une quête de verticalité, de moments de vision qui font entrevoir au protagoniste le chaos au coeur du monde et finiront par lui faire renoncer à la fuite. La simple répétition monotone des mêmes questions posées aux marins lors de leur embarquement qui s'engagent à bord du bateau fait surgir la différence d'Hilliot. Souvent plus jeune, d'une dizaine d'années, né à Oslo, originaire de Port Sunlight, village industriel au sud de Liverpool, dans le Merseyside au Royaume-Uni, alors que les autres sont de Liverpool même.
Ses réponses, même, le distingue de ses compagnons. Ceux-ci sont Andersen Marthon Bredahl, cuisinier ou Norman Leif, aide de cuisine, tous deux nés à Tvedestrand, tous deux résidant « Great Homer Street, Liverpool », près du marché, quartier industriel avec la manufacture de tabacs. Quant à Hilliot, il vient de quitter l'école méthodiste « The Leys », n'a pas encore travaillé et n'a pas de métier, il va entrer à l'université. de plus, il a promis de rester fidèle à Janet, sa jeune fiancée pure et innocente. Devra t'il, comme l'y enjoignent ses compagnons marins, faire l'expérience de la sexualité avec les prostituées, pour être ainsi adopté. Alors que pour lui, le mot prostituée est naturellement associé à la syphilis par une sorte de phobie. Phobie renforcée par ses conversations avec Andy, l'homme à femmes et à la maladie. Il va même en s'imaginant vieux et malade. « Voyez-le si vous voulez par vous-même, Dana Hilliot, le syphilitique, alors qu'il se promène avec détermination dans Great Homer Street. Regardez! Comme tous ceux qu'il touche sont frappés par la terrible maladie. C'est juste un petit mot, le mot qui tue. Maintenant tout est gâché. Dies Irae. Ils sont tombés de cendre et sont gris. C'est l'enveloppe humaine, la feuille de cendre, cendre en cendre et poussière en poussière ».
Le roman tourne vite au dilemme : faire l'expérience de la vie, l'éprouver, au sens fort du terme, ou bien rester prisonnier de ses représentations intellectuelles, du bagage traditionnel de l'écrivain romantique. Pas évident en prime abord. « t'es rien qu'un nom de dieu de poison ».
Avec en supplément la répétition fastidieuse des tâches quotidiennes, les reproches constants du bosco et d'Andy en plus des sarcasmes de ses compagnons. En réalité, Hilliot doit abandonner les stéréotypes qui sont les siens. Janet, en type de la jeune fille innocente et pure, figure du féminin, opposée au marin, coureur de jupons, figure du masculin. Tout pour entrevoir ce qui ne rentre pas dans les catégories préétablies, c'est-à-dire tout son entourage. C'est le quartier-maître, homosexuel, ou Olga, la jeune prostituée qui refuse de se laisser identifier à Janet, sans être pour autant son antithèse.
Le roman est donc essentiellement autobiographique et risque de devenir un débordement de sentiments, sauf à canaliser les sentiments et de les organiser suivant le modèle de « Blue Voyage » de Conrad Aiken. C'est aller vite en besogne. Pour Conrad Aiken, le roman devient un outil pour apprivoiser les problèmes qui l'affligeaient « Voici l'artiste-héros-serviteur dans une nouvelle situation difficile : il pouvait comprendre sa névrose, d'une part, puis procéder à la création, tandis qu'il analysait à la fois la névrose et lui-même loin en relation avec l'autre ». Cependant, dans « Ultramarine », la technique est un outil d'analyse qui donne lieu aux névroses qui rongent son coeur. Lowry essaie bien les dialogues entre mains. Tout comme les scènes du fumoir du « Blue Voyage » avec des conversations juxtaposées, qui ne se répondent l'une l'autre que de façon très oblique. On en retire l'impression que l'impression gagne du terrain que Malcolm Lowry est plus à l'aise dans l'exploration des processus mentaux que dans la représentation de la réalité extérieure
Tout démarre avec la limousine paternelle, c‘est un riche lainier de Liverpool. Rien de plus discret que de poser le fils au bas de la passerelle, au vu du reste de l'équipage. Tout le monde du bateau sait donc qu'il a été conduit au port dans la limousine de son père le 1er jour. Il y a donc un clivage de classe considérable entre Dana et le reste de l'équipage. Les autres membres de l'équipage n'ont jamais choisi de devenir marins. C'est faute de mieux, ou de pire, qu'ils le sont devenus. Ilst ne peuvent donc pas comprendre que quiconque ayant des possibilités autres puisse éventuellement vouloir travailler dans la marine marchande. Surtout qu'ils y sont depuis un certain temps, donc avec peu de possibilité de changer de vie.
Résultat, pendant la majeure partie du livre, Dana Hilliot réfléchit sans cesse à son incapacité à s'intégrer au reste de l'équipage. Il faut reconnaitre qu'il ne fait pas grand-chose pour. le thème de l'amour perdu et du désir sentimental est lui aussi présent tout au long du roman. C'est à se demander pourquoi il a quitté l'Angleterre. « Tous les jours étaient pareils […] Aujourd'hui, ou est-ce hier ? […] Non, il ne restait plus grand-chose de sens à cette vie qui s'était si étonnamment ouverte devant lui ». C'est aussi ce que dit un marin allemand. « Mais partout c'est pareil ».ou un autre marin, en termes plus imagés. « Un homme qui irait en mer pour le plaisir irait en enfer pour un passe-temps ».
Même à Tsang-Tsjang, en Chine, après Shanghai, il reste à bord lorsque le navire est au port. Tout cela pour éviter d'avoir à prendre une décision. En vérité, Dana Hilliot a « peur de vivre, peur de la virilité ». Quant au quartier-maitre, Quant à l'intendant, il suggère assez ouvertement une liaison homosexuelle. Finalement, il se décide, il ira à terre et s'amusera. Peu lui importe alors. Il veut devenir « un homme, un sacré type comme Andy », et estime que « Janet ne s'en soucierait pas ».
Ce sera l'épisode japonais. Hilliot descend à terre et rencontre un marin allemand. Ils passent une bonne partie de la nuit à parler anglais et allemand, surtout à boire et à s'enivrer. Quant aux japonais, « Un indigène est venu de derrière le comptoir comme une araignée de sous sa feuille ». Puis ils vont au bordel où il danse avec Olga, prostituée qui se prétend réfugiée russe. Désabusé, il sort prendre l'air et lire une lette de Janet, lettre qu'il a donnée à l'allemand. Retour au bordel où il trouve Olga dansant avec Andy. le charme est rompu.
Le livre se termine sur « Mais, Ô Janet, la pire souffrance est celle dont il ne reste rien ».

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Citations et extraits (4) Ajouter une citation
 
 
Le bateau s'élevait lentement, porté par les lentes lames bleues,
une tonne d'écume déferla sous le vent, et toute la joie du ciel, cette
autre mer, resplendit au-dessus du pont pour les soutiers comme
pour les matelots, tandis qu'une petite barque de pêche japonaise
luisait, blanche, contre la côte sombre. Ah ! qu'il était merveilleux,
malgré tout, d'exister !
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Tout à coup, l’un après l’autre, les lampadaires de la rue explosèrent, leurs globes s’enlevèrent au ciel et la rue se peupla d’yeux : des yeux largement sur dilatés, dégoûtant de pellicules sèches, ou englués de poix visqueuse, des yeux qui contenaient l’éternité dans la fixité de leur regard, des yeux qui tremblotaient, qui s’étiraient puis, s’amenuisant prestement, étaient catapultés d’est en ouest ; des yeux qui étaient les carcasses des fenêtres d’une cathédrale noircie, vacuité du cerveau, et, à travers, des chauves-souris et des corbeaux tourbillonnaient, énormes déchets de cuir drossés par les vents arides ; mais un des yeux fit un bond hors du marécage, se braqua sur lui, le fixa sans le moindre clignotement. C’était l’œil d’un pigeon, humide, unique — et noyé de larmes. Où mourrait-il ? En mer. Son corps flottés, soutenu par de lentes pressions, poussé vers les fraisiers de mer, les éponges, les crabes-appelants. Roulé et soulevé, bruissant, poursuivant sa chute. Humus pour les poulpes, pour le béhémoth de l’océan, fomentateur d’orages.
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Par sa seule, énorme cheminée, l’Oedipus Tyrannus crachait une fumée violente, noire, méphitique ; il plaquait sur la mer, jusqu’à l’horizon, son ombre étale, oblique et noire, unique souillure dans le champ d’une bienheureuse sérénité.
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Oh vous qui fîtes mes yeux de la glauque vêture des étangs, qui fîtes toutes choses, et le faible et le fort, le tendre et le cruel, le juste et l’injuste, prenez en pitié ses chétives impulsions de luxure et voyez combien peu de beauté est enclose en sa vie qui bientôt sera dissoute dans le vert ressac de là contre-marée...
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