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EAN : 9782262034016
480 pages
Perrin (27/01/2011)
4.04/5   14 notes
Résumé :

Comment le monde romain est-il passé du paganisme au christianisme ? Cette mutation a-t-elle été aussi complète et profonde que l'a prétendu le christianisme victorieux ? Pour répondre à ces deux questions, Ramsay MacMullen se livre d'abord à un examen critique des sources pour ensuite montrer les oppositions qu'a soulevées le christianisme, les obstacles rencontrés par les chrétiens et aussi ce qu'il... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (3) Ajouter une critique
Vraiment, un super bouquin, si ce n'est l'un des meilleurs sur le sujet (tout est résumé dans le titre du livre). Je mets cinq étoiles, car McMullen est une pointure dans ce domaine. J'adore quand c'est sourcé et expliqué de manière pédagogique, et je suis ici comblé. Peut-être parfois un peu décousu dans la formulation et les références, mais c'est ce qui fait son charme. Donc, concrètement, on a ici l'historique presque complet de la persécution du paganisme par les chrétiens (eh oui, les victimes d'hier devinrent vite bourreaux). L'auteur a une orientation humaniste et moderne, ça nous change des historiens chrétiens qui imposent toujours le même point de vue. C'est absolument fascinant de voir que les chrétiens, après avoir mis en miettes le paganisme, se sont emparés de quasiment tous les symboles du polythéisme pour façonner leur religion sans cesse changeante, en tout cas beaucoup moins figée dans le dogme qu'on a bien voulu le dire ou l'écrire. Ce n'est pas très logique comme attitude, mais l'auteur explique clairement que les chrétiens n'avaient pas le choix malgré leurs scrupules et leurs réticences : tuer tous les païens déclarés pour faire place nette était certes efficace d'un point de vue idéologique, mais pour imprégner les masses de leur religion, la seule terreur ne pouvait suffire. Il fallait donc donner aux peuples un substitut au paganisme, pour leur faire oublier ce qu'ils avaient perdu. de là découle, avec force statues et babioles, le culte des saints, des martyrs chrétiens, de la vierge marie, etc., qui n'existaient pas aux premiers temps du christianisme. Certes, l'opportunisme n'est pas le propre des chrétiens, mais je trouve que l'auteur arrive de manière convaincante à prouver comment, par un désir effréné d'assimilation, l'église catholique a accepté des formes de culte qui auraient fait se retourner dans leur tombe saint Paul et Tertullien par exemple. L'autre point fort du livre, c'est que, malgré toutes les belles phrases évangéliques sur l'amour du prochain, les chrétiens ont tué et exterminé tous les païens qui refusaient de se convertir, sous le règne des empereurs byzantins Maurice et Tibère II, qui n'ont rien à envier à Néron. Cette facette de l'histoire se devait donc d'être mise en lumière, chose faite avec ce livre devenu classique.
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Voilà un excellent livre sur la transition du monde romain païen à l'empire chrétien, aussi bien au plan des événements (conciles etc) qu'à celui de l'enquête historique et archéologique (proportion de chrétiens dans les provinces, cultes, pratiques etc...) le lecteur ne retirera pas une impression générale bien nette de cette enquête passionnante, faite d'études de détail foisonnantes et d'analyses brillantes, mais sans synthèse.
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Un indispensable lorsque l'on veut en savoir plus sur les pratiques païennes au haut moyen-age! Ramsay Macmullen est un grand spécialiste de l'avènement du christianisme en Gaule mérovingienne. Ses travaux s'appuient notamment sur les différents conciles ayant eu lieu à ce moment là et les sources "littéraires" tel que les écrits de Grégoire de Tour.
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Citations et extraits (5) Ajouter une citation
Les croyances essentielles de la communauté chrétienne dans les deux premiers siècles de son existence ne furent pas affectées par l’arrivée de nouveaux membres après Constantin. L’organisation de l’Église non plus. Mais avec les idées et les rites dont je viens de parler, des croyances et des besoins nouveaux apparurent. Augustin disait que tout le paganisme importé parmi ses ouailles était leur « mère », tandis que ce qu’il leur enseignait était « le père ». Ses ouailles devaient choisir ; c’est du moins ce qu’il espérait. Mais il ne pouvait pas les y forcer. Il concéda qu’il fallait leur laisser quelque latitude dans leur pratique. Au même moment, ou peu s’en faut, vers le début du Ve siècle, Jérôme fit la même constatation : mieux valait le culte des saints à la manière païenne que pas de culte. Il parlait des festivités dans le culte de saints ; mais à d’autres moments de l’année, les banquets dans les églises attiraient même les évêques. Ce dont les convertis avaient l’habitude et dont ils ne pouvaient pas se passer, c’était la religion vécue comme un moment de réjouissance collective et de sociabilité en compagnie du divin.

C’est le même besoin qui dicta l’invention de beaucoup de célébrations durant l’année, puisque le clergé ne parvenait pas à contrôler la présence des chrétiens à des fêtes comme les calendes autrement que par la concurrence (et ces fêtes restèrent d’ailleurs très vivaces jusqu’au XVIe siècle et après, en Occident comme en Orient). Un évêque syrien du XVIIe siècle explique : « La raison qui a poussé les pères de l’Église à déplacer la célébration [de l’Épiphanie] du 6 janvier au 25 décembre est la suivante, d’après eux : les païens avaient coutume de célébrer en ce même 25 décembre l’anniversaire du Soleil, ils allumaient des cierges en l’honneur de ce jour et ils invitaient volontiers les chrétiens à participer à ces rites. Lorsque les maîtres de l’Église virent que les chrétiens prisaient cette coutume, ils mirent au point une stratégie : ils fixèrent la célébration du vrai lever de soleil en ce jour, et ordonnèrent de célébrer l’Épiphanie le 6 janvier : cet usage s’est maintenu jusqu’à nos jours avec l’allumage des lumières. »

Grâce à des inventions similaires, d’autres célébrations païennes populaires furent battues en brèche par le christianisme. On a mentionné la Saint-Jean ainsi que la fête de la chaire de saint Pierre ; on pourrait mentionner aussi les Robigalia du 25 avril, pour protéger les récoltes contre la rouille, qui continuèrent dans le même but et à la même date sous le nom de Laetania Maior. Il existe bien d’autres exemples du procédé. (pp. 211-212)
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La vieille religion convenait très bien à la plupart des gens, ils l'aimaient, lui faisaient confiance, ils s'y épanouissaient, et donc ils résistaient au changement, qu'il leur fût imposé par la parole ou par la violence. Livrés à eux-mêmes par le recul de l'autorité impériale et ecclésiastique, ils s'éloignèrent de l'Eglise en Angleterre ainsi qu'en Espagne. (...) Au cours des années 580, dans une région de Provence pourtant évangélisée depuis longtemps et couverte d'églises, un homme qui s'embarquait pour l'Italie pouvait trouver "une grande foule de païens qui s'embarquaient avec moi, et parmi tous ces campagnards j'étais le seul chrétien." (Grégoire de Tours) L'incident est très révélateur, ne serait-ce que pour le ton banal du récit. (p. 111).
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Le deuxième point à remarquer dans ce chapitre concerne les difficultés auxquelles se heurtèrent les forces ecclésiastiques et laïques conjointes pour achever le processus de conversion. Ces difficultés ne peuvent être que symptomatiques d’un vide, appelons-le comme ça, ou de carences, dans le christianisme lui-même. Par conséquent, quiconque trouvait ailleurs une meilleure réponse à ses besoins particuliers et ne répondait pas aux incitations sociales et économiques offertes par l’ « Empire chrétien », ni aux arguments et aux démonstrations prouvant la justesse du christianisme, devait être persuadé par d’autres moyens. L’impératif ressenti par l’Église apparaît de manière très significative dans l’idéal que les récits des entreprises missionnaires proposent à l’imitation : des héros capables d’enfermer à vie un vieillard dans quelque prison privée, ou de faire brûler vif un prêtre païen. Le gouvernement aussi, poussé par les évêques, brandissait la menace et plus : amendes, confiscations, exil, emprisonnement, fouet, torture, décapitation et crucifixion. Qu’imaginer de plus ? Rien. On faisait pression de toutes les manières possibles et imaginables, même les plus extrêmes. C’est ainsi que l’on se fit obéir au bout de plusieurs siècles et que l’Empire fut véritablement rendu chrétien. (p. 105)
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... L'essor soudain du culte des martyrs commença une génération avant Julien, c'est-à-dire dans les dernières années du règne de Constantin, au moment même où le nombre de convertis augmentait considérablement. C'était plus qu'une coïncidence. Il y avait une relation de cause à effet. Les convertis avaient évidemment besoin de ce qu'ils avaient abandonné ou de quelque chose qui y ressemblait de très près.

En effet, par leur propre faute, ils se retrouvaient sans dieux...

p. 187
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En l'espace de trois siècles, il (le christianisme) parvint à capter un dixième peut-être de la population : dans les trois générations suivantes, plusieurs fois ce nombre. Ce contraste indique le rôle joué par l'appui séculier, qui lui permit de revendiquer la moitié ou presque de la population au début du V°s.

p. 116
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