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Jacques Brenner (Autre)
EAN : 9782246140825
337 pages
Grasset (06/04/1983)
3.43/5   15 notes
Résumé :
" Comédie en forme de roman ". Altesse Royale a une place à part dans l'œuvre de Thomas Mann.

C'est une histoire simple, limpide et réjouissante à première vue, comme un conte de fées. Un jeune prince tombe amoureux de la fille d'un milliardaire américain qui vient prendre les eaux dans une de ces minuscules principautés comme il en existait encore en Allemagne au début du siècle.

Il est pauvre, elle est riche, il l'épouse et peut ai... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (3) Ajouter une critique
Pourquoi ne pas se laisser aller à lire Altesse royale (Königliche Hoheit, 1909) de Thomas Mann comme un épisode divertissant écrit entre son premier grand roman, les Buddenbrook (1901) et sa célébrissime nouvelle intitulée : La Mort à Venise (1912), deux projets plus ambitieux ?
Pourquoi faire la moue, bouder son plaisir et rester dubitatif devant ce seul ouvrage de fiction de Thomas Mann qui ait une "fin heureuse" et ne soit pas porteur de tension dramatique ? Une mauvaise lecture pourrait faire croire à une "bluette", à une simple romance entre un prince assez conventionnel mais placé une principauté au bord de la faillite et la fille d'un citoyen américain fortuné et d'origine allemande. La jeune femme ne se laisse d'ailleurs pas conquérir au premier regard, mais les choses évoluent de telle façon que l'on se dirige bien, à la fin, alors que toute résistance semble vaincue (à se demander s'il ne s'agit pas d'une autre personne, tant l'évolution est étonnante), vers un "conte de fées" et que cela ressemble, en apparence, à une comédie sentimentale que le cinéma hollywoodien aurait pu transposer à l'écran.

Pourtant, même s'il est perceptible que l'auteur a cherché à se reposer de ses efforts précédents (Les Buddenbrook et Tonio Kröger) en écrivant cette "belle histoire", on y trouve toutefois quelques thèmes dans lesquels on peut reconnaître la patte de l'écrivain : Klaus Heinrich, à la tête de son grand-duché, ressemble à beaucoup des personnages imaginés et dépeints par Thomas Mann ; il a leur fragilité et ce-je-ne-sais-quoi qui le distingue de toutes les autres personnalités décrites dans l'oeuvre, même s'il n'a pas comme les autres héros de Mann le côté "esthète" qui les caractérise généralement ; les agaceries de la jeune américaine dont il s'éprend permettent à l'auteur d'exercer son humour d'une façon différente, et l'on sent qu'il s'est amusé à tracer ce portrait de jeune femme sûre d'elle-même, ce qui donne un peu de mouvement à une histoire qui pourrait paraître ennuyeuse, tout comme la vie menée par un Klaus Heinrich qui s'efforce d'être absolument fidèle aux moeurs et aux principes austères de sa caste (encore que cette rigidité soit chez lui plus un masque qu'une adhésion par tempérament).

En réalité, si l'on creuse un peu, on peut deviner chez Thomas Mann, alors que l'orage de 1914 approche, une nostalgie pour un passé mythifié, celui de petits États qui avaient fait autrefois le charme (et le malheur) du Saint-Empire romain germanique, remplacé sous Napoléon par la Confédération du Rhin et par l'empire autrichien, puis cet ensemble de minuscules, moyens et grands Royaumes ou grands-duchés satellisés par la Prusse. Comme une forme d'au-revoir à ces États de "pacotille" qui s'étaient endormis sur des lauriers depuis longtemps desséchés. Un clin d'oeil humoristique en somme, si on sait lire correctement ce livre.

François Sarindar
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Altesse royale nous entraîne au coeur d'un grand duché fictif, un de ces nombreux états qui constituaient l'empire allemand au début du siècle dernier. L'heure est aux célébrations car la princesse donne naissance à un deuxième fils, Klaus Heinrich. Toutefois, ces réjouissances tournent court car le petit garçon semble infirme, une de ses mains est atrophiée, difforme. Cette infirmité le suivra le restant de sa vie. N'empêche, il mènera une vie «normale», aussi normale qui puisse l'être celle d'un jeune prince : les déambulations dans les palais, la découverte du monde ordinaire par la rencontre de gens du peuple, les études en compagnie de nobles de son âge, etc. Puis, à l'âge adulte, viennent les responsabilités d'une vie réglée au quart de tour, sans libertés, presque ennuyeuse. Surtout que, au sommet, on est bien souvent seul. C'est la mort de son père et la santé fragile de son aîné qui le propulsera au premier rang, ça et l'amour d'une riche Américaine qui ne comprend rien à la rigidité du protocole. Mais, et si cet amour et son infirmité était ce qui allait le sauver, lui et le duché ? Ce roman est en quelque sorte un roman d'apprentissage.

Altesse royale est indéniablement une oeuvre du grand Thomas Mann. Sa plume est toujours aussi évocatrice, reproduisant dans les moindres petits détails la vie de château à une autre époque. Il y a bien la description du château de Grimmborg, d'autres palais aussi, même de la capitale avec l'Albrechtsplatz. Mais, au-delà des lieux, c'est tout le cérémonial, l'étiquette qui préside à la famille princière et toute la cour qui gravite autour. C'était à ce point bien décrit que j'avais l'impression de me trouver au milieu de tout ce beau monde. Par moment, le roman prenait des accents de conte de fées. « Miracle ! Fantasmagorie ! » Toutefois, le rythme est extrêmement lent et toutes les descriptions, aussi précieuses soient-elles, ne peuvent complètement compenser cette lenteur. Certains diront que, justement, c'est pour mieux se délecter de chaque mot, de chaque phrase. C'est un point de vue qui se vaut. Dans tous les cas, à défaut de me passionner, ce roman m'a émerveillé. Je me suis pris d'une nostalgie pour une époque révolue, une grandeur passée et dépassée, qui tirait à sa fin mais qui continue à faire rêver.
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Dans un Grand-duché d'opérette menacé par la faillite, Klaus Heinrich, le deuxième enfant mâle du Grand-duc nait avec une atrophie de la main gauche, au grand-émoi de la famille régnante. S'ensuit une prime jeunesse passé dans un milieu aristocratique qui protège mais qui isole aussi, où le jeune garçon prend conscience de sa différence. Puis viens le temps de l'éducation dans une pension aristocratique où il se prend d'amitié pour un professeur auxiliaire Raoul Ueberbein, personnage passionné, travailleur et qui a su "tenir tête au vent" . Au décès du souverain, son fils ainé Johan Albrecht lui succède mais il s'avère très vite que celui-ci, de santé fragile et de tempérament distant et froid, goûte modérément les devoirs et les responsabilités de sa charge; et celui-ci fait appel à son cadet le plus possible pour les cérémonies et les représentations. L'arrivée de Samuel Spoelmann et de sa fille Imma, richissimes américains, en vue de gouter aux joies de la délicieuse petite station thermale devient la petite attraction du Grand-duché qui, il faut l'avouer, en manque cruellement. Les américains, d'origine allemande, décident ensuite, d'acheter un château de plaisance du royaume et de s'y installer à demeure, ce qui provoque un grand remoud dans la population mais qui, somme toute, fait bien l'affaire du gouvernement qui y voit une véritable manne tant fiscale que pour l'économie locale. Puis au cours d'une relève de la garde dont Imma trouble la belle ordonnance, en passant à travers les rang des soldats, Klaus Heinrich pose pour la première fois les yeux sur elle. Sous prétexte de voir la collection de verrerie de Samuel Spoelman, Klaus Heinrich réussit à se faire inviter chez le milliardaire malade où il subit la mauvaise humeur et le sans-gêne positiviste de celui-ci, et la malice et l'ironie de sa fille. Ensuite, c'est lors d'une traditionnelle chevauchée durant laquelle Klaus, Emma, sa dame de compagnie la Comtesse Loewenjoul, personne originale et lunatique, lPerveval le chien colley tout aussi fou que la comtesse, font plus ample connaissance et que Klaus découvre mieux la nature et le caractère de cette capricieuse américaine. Il comprend que cette famille curieuse a développé une forme d'agressivité défensive suite à l'ostracisme dont ils ont été victimes aux Etats-Unis. Mais décidément la situation économique, fiscale et de la dette du pays est préoccupante et si sa haute-noblesse pouvait y intéresser la demoiselle, les sentiments aidant... Alors ces deux jeunes gens se mettent à étudier les arcanes de la science économique penchés sous la même lampe...Et finalement ces considérations bien plus pratiques que toutes les divagations sentimentales opèrent le miracle, Imma accepte de se rendre au bal de la cour pour être officiellement présenté au Grand-duc. Et finalement comme tout bon conte de fée le mariage morganatique est célébré en apothéose, le peuple et la presse communient avec leur souverains chéris, les caisses de l'état sont renflouées et un avenir radieux s'ouvrent pour les deux tourtereaux.

Voici un résumé plutôt qu'une critique de cet ouvrage, que l'auteur qualifiait de "comédie en forme de roman", ouvrage où perce une certaine drôlerie mais qui laisse perplexe eu égard aux chefs-d'oeuvres de Mann tels que "Les Buddenbrook : déclin d'une famille" (qui lui antérieur de 8 ans) ou "La Montagne Magique".
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Citations et extraits (3) Ajouter une citation
Dorothéa avait vieilli, sa perfection froide et sévèrement soignée, sa beauté célèbre, acclamée, s'était flétrie avec une telle et si constante rapidité au cours des dernières années que la femme en elle n'avait pu tenir pied à cette métamorphose. Rien, ni l'art ni les remèdes, pas mêmes les plus pénibles et les plus répugnants, qu'elle avait employés à combattre sa déchéance, n'avaient pu empêcher de s'éteindre le doux éclat de ses yeux bleu sombre, de se former au dessous d'eux des poches de peaux flasque et jaunâtre, tandis que les merveilleuses fossettes de ses joues se creusaient en rides qui faisaient paraître d'autant plus dure et maigre la bouche fière et hautaine. Mais comme son coeur avait été aussi sévère que sa beauté et uniquement attaché à la conservation de cette beauté, comme sa beauté lui avait tenu lieu d'âme et qu'elle n'avait rien aimé ni voulu que l'effet exaltant de cette beauté, comme son coeur n'avait jamais battu pour rien ni pour personne, elle se trouvait à présent décontenancée et appauvrie, incapable de trouver en elle-même la force de se résigner à un nouvel état, et son équilibre mental en fut affecté.
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Klaus Heinrich était expert dans l'art de visiter, de s'informer et de manifester hautement Son estime. Aussi fut-il en état de réfléchir en même temps à la façon dont s' exprimait Imma Spoelmann, à ce langage bizarre qui le préoccupait douloureusement. Que ne disait-elle pas, avec la moue de ses lèvres avancée! Quels mots que ceux qu'elle prononçait avec désinvolture! "Passion", "vice". Comment était-elle arrivée à en user si audacieusement? La comtesse Loewenjoul qui, elle aussi, parlait confusément de ces choses et qui devait avoir fait de terribles expériences, ne l'avait-elle pas qualifiée de complètement ignorante? C'était exact à n'en pas douter : n'était-elle pas de naissance un être d'exception comme lui, élevée avec délicatesse et pureté, à l'écart du mouvement de la foule et en dehors des brutalités qui correspondent, dans la vie réelle, à ces grands mots sinistres? Mais elle s'était emparée de ces mots et les introduisait par moquerie dans des propos soignés. Oui, c'était cela : cette créature piquante et suave, dans sa robe rouge et or, vivait au milieu de formes verbales, ne connaissant de la vie que les mots. Elle jouait avec les plus graves et les plus redoutables d'entre eux comme avec des pierres de couleur et ne comprenait pas, quand elle faisait scandale. Le coeur de Klaus Heinrich, à cette idée, était plein de compassion.
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- Tu crois? Tu te trompes. Je ne suis pas un aristocrate, je suis tout le contraire, par raison et par goût. Tu m'accorderas que si je décline les vivats du peuple, ce n'est pas par orgueil, c'est parce que j'ai le gout de l'humanité et de la bonté. La grandeur humaine est une chose misérable et souvent il me semble que les hommes devraient le reconnaître, se conduire humainement et avec bonté et ne pas chercher à s'humilier ou à s'avilir les uns les autres. Pour supporter d'être l'objet des simagrées qui entourent cette grandeur, il faut avoir le cuir épais. Je suis un peu fragile de nature. Je ne me sens pas à la hauteur du ridicule de ma situation. Le moindre laquais planté devant une porte et qui s'attend à me voir passer sans lui donner plus d'attention ou de respect qu'au chambranle de la porte, me met dans l'embarras. C'est ma façon à moi d'aimer le peuple...
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