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Ton visage demain tome 3 sur 3
EAN : 9782070125678
624 pages
Gallimard (05/01/2010)
4.12/5   13 notes
Résumé :
Avons-nous une âme capable de supporter ce que nous devons vivre ? Devons-nous toujours raconter ce qui nous arrive ? Connaissons-nous vraiment celle ou celui qui vit à nos côtés ? Pourquoi nous trompons-nous si souvent ? Connaissons-nous le véritable prix de nos erreurs ? Et si nous le connaissions, serions-nous prêts à le payer ? Conclusion idéale d'un travail prodigieux, peut-être le plus réussi d'un auteur qui compte parmi les grands d'aujourd'hui, ce troisième ... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (2) Ajouter une critique
Poison et ombre et adieu vient clore maistralement cette trilogie, ce défi littéraire, ce roman d'espionnage qui n'en est pas un. Il est à l'image des tomes précédent, Ton visage demain constitue une expérience en soi, et ce à tous les niveaux. C'est dense et touffu (beaucoup d'informations et dans un style proustien) mais, en même temps, si on l'accepte et on se laisse guider par la main de maitre de Javier Marias, on ne peut qu'en sortir étrangement et agréablement satisfait.

Le lecteur se rappellera que, dès le premier tome, Jaime (ou Jack ou Jacques), cet universitaire et traducteur espagnol, avait été recruté par une branche des services secrets britanniques. Ses tâches consistaient essentiellement à traduire et à donner son avis sur des questions touchant plus spécifiqauement les pays hispanophones. Puis, son rôle a évolué. Mais je vous préviens tout de suite, même si on assiste à des échanges musclés, quelques filatures et rixtes, on est loin des James Bond avec ses péripéties invraisemblables et ses gadgets technologiques incroyables. Ils sont capables de se montrer froids, calculateurs et implacables mais se sont surtout des intellectuels qui adorent discourir philologie, art, histoire, politique, etc.

Et ça paraît aussi dans la façon dont l'intrigue se déroule. En fait, j'aurais pu aussi bien écrire les intrigues, car au début elles semblent nombreuses et assez difficiles à cerner. J'avais l'impression de lire un long préambule. Une collègue traductrice, la jeune Pérez Nuix, demande un service personnel à Jaime. Et là l'auteur s'emballe. Toutes les actions, toutes les paroles sont analysées de mille manières. Il y a le choix des mots, qui sont une occasion pour s'interroger sur l'étymologie (impossible de se défaire du linguiste en soi !) et sur les comportements humains. Par exemple, quand quelqu'un te demande un service et que tu auras auras droit à sa reconnaissance éternelle, le pense-t-il vraiment ? Javier Marias peut disserter quatre ou cinq pages sur un sujet pareil. Mais de tels sujets sont nombreux dans ce bouquin. Personnellement, j'ai trouvé cela très intéressant mais je peux comprendre que certains puissent trouver cela un peu lourd.

D'autant plus que Jaime Deza et ses collègues, particulièrement Peter Wheeler, adorent discuter. C'est que son mentor est sur ses vieux jours, il en a des choses à raconter. Et on a l'impression qu'ils ne font que ça. Leurs échanges sur les « Careless Talks » et les Guerres mondiales, quelle érudition ! Et quand Marias y ajoute quelques documents d'époques, des affiches, des photos, ça me fait penser aux romans de G.W. Sebald.
Mais bon, je m'égare un peu. Toute l'expérience que Jaime Deza a accumulée auprès de son organisation (traduire, décrypter la vérité dans le comportement des gens, les suivre en filature et même les effrayer), tout cela, ça ne pouvait que constituer la préparation à ce qui allait venir. Mais attention, pas là où on pourrait le croire, il ne sera jamais un agent sur le terrain. Plutôt en vacances chez lui, à Madrid, il retrouve de façon impromptue Luisa, son ex-femme et mère de ses enfants, qui a un oeil au beurre noir et ses soupçons se portent sur le nouveau petit ami Esteban Custardoy. Que faire ? Il ne peut laisser une telle ordure rôder autour de ses enfants. Ce sera ça, sa grande aventure.

C'est là que le talent de Marias est éclatant. Son personnage met à contribution tout ce qu'il a appris ces derniers mois : s'informer sur Custardoy, le suivre en filature, se procurer une arme, etc. Quand le moment opportun arrive, Jaime tient Custardoy en joue et garde le doigt sur la détente pendant presque trente pages. Une éternité ! Alors qu'on se demande ce qu'il fera, il pense à un tas de choses, à ce qu'aurait fait Tupra, à la jeune Pérez Nuix, aux tableaux qu'il a vu récemment et qui représentaient la mort, etc. Finalement, il se contentera de le menacer, de lui faire peur, ou de l'éliminer ? Quel suspense !

La trilogie Ton visage demain est une grande oeuvre, elle continue à m'habiter encore plusieurs jours après l'avoir terminée. Elle ne convient sans doute pas à tous les lecteurs et c'est dommage. Ma suggestion : armez-vous de votre courage et foncez !
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Ce livre clôt superbement la trilogie 'Ton visage demain'. C'est le tome le plus intéressant, exception faite de la révélation que nous a offerte l'auteur à propos de son père dans le premier volume.

Il faut évidemment être amoureux des phrases à la Proustienne, à ce que l'on m'a dit des phrases de Proust, que, je l'avoue, je n'ai jamais lu. Quel brio. Je ne me lasse pas personnellement.
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Citations et extraits (17) Voir plus Ajouter une citation
Étrange et incongru est le processus des nostalgies, ou des regrets, que ce soit d'une absence ou d'un abandon. Au début on croit ne pas pouvoir vivre sans quelqu'un ou loin de quelqu'un, la peine initiale est si aiguë et si constante qu'on ressent comme un effondrement sans limites ou comme une interminable lance qui avance, parce que chaque minute de privation compte et pèse, se fait sentir et nous étrangle, et on ne fait rien d'autre qu'attendre que passent les heures du jour, en sachant que leur passage ne nous mènera à rien de nouveau, rien d'autre qu'à l'attente d'une autre attente. Chaque matin on ouvre les yeux - si on a pu profiter du sommeil, qui ne permet pas d'oublier tout à fait mais qui trompe - avec la même pensée que celle qui nous a oppressés avant que nous les fermions, "Elle n'est pas là et ne reviendra pas", par exemple (c'est-à-dire me revenir à moi, ou de la mort), et on se prépare non à traverser péniblement la journée, car on n'est même pas capable de voir si loin ni de les différencier, mais les cinq minutes qui suivent puis cinq autres, [...]. Ce sont les routines découvertes qui nous soutiennent, ce que la vie a en trop, ce ton inoffensif, ce qui n'enthousiasme pas et ne nous demande ni participation ni effort, le remplissage que nous dédaignons quand tout est en ordre et que nous sommes actifs et que nous n'avons pas le temps de regretter qui que ce soit, pas même ceux qui sont morts [...]
Et puis le temps passe, et à partir d'un jour diffus nous recommençons à dormir sans nous réveiller en sursaut et sans nous souvenir dans notre sommeil, et à nous raser non plus au hasard ni à des heures indues mais le matin ; aucune bouteille ne se casse et aucun appel ne nous irrite, nous nous passons du feuilleton, des mots croisés, des routines survenues et salvatrices que nous observons avec étonnement en les quittant car nous ne comprenons même plus ou presque pourquoi nous en avons eu besoin, et même les personnes patientes qui nous ont distraits et nous ont écoutés pendant notre période de deuil, monotone et obsessives.
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Les gens le disent trop. "Tu auras ma reconnaissance éternelle" est une des phrases les plus vides qu'on puisse entendre, et pourtant on l'entend souvent, toujours avec cette épithète invariable, toujours la même et irresponsable "éternelle", indice supplémentaire de son manque absolu de valeur concrète, de vérité et même de signification, et en plus il arrive qu'on ajoute : "Quoi que je puisse faire pour toi, maintenant ou plus tard, tant que je vivrai, tu n'auras qu'à me le demander", alors que ce qui est sûr, c'est que personne ou presque ne demande rien sur le moment - cela ressemble alors à un do ut des, à la volonté d'en profiter - , et si on le fait plus tard, la phrase creuse est oubliée depuis longtemps et en plus on n'y a pas recours, il est rare que quelqu'un rappelle à quelqu'un d'autre : "Il y a quelque temps, tu m'as dit que..." ; et s'il s'y hasarde, il est possible qu'il se gagne cette réponse : "Je t'ai dit ça? Je ne sais pas, c'est curieux, j'en doute, je ne me souviens plus", ou bien "Tout sauf ça, pas ça, c'est la seule chose impossible, c'est la pire, ne me demande pas ça", ou bien "Comme je regrette, je ne demanderais pas mieux, je ne peux pas, si seulement tu était venu me trouver il y a quelques années, maintenant ce n,est plus comme avant." Si bien que celui qui veut simplement qu'on lui rende son vieux service finit par en demander un nouveau, comme s'il n'y avait pas eu d'histoire, et peut-être même en suppliant ("S'il te plaît, s'il te plaît. S'il te plaît, s'il te plaît").
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"Aujourd'hui on s'épouvante de rien et les gens sont très peu libres dan leur vie personnelle, et de moins en moins dans l'éducation de leurs enfants. Avant, on apprenait beaucoup de choses aux enfants dès qu'ils avaient l'âge de raison, ce n'était pas pour rien que ça s'appelait comme ça. Des choses qui pourraient leur être utiles quand ils seraient grands, parce qu'on ne perdait jamais de vue qu'un enfant finissait par devenir grand. Pas comme maintenant, où ce qu'on cherche, plutôt, c'est que les adultes continuent à être des enfants jusqu'à leur vieillesse, et des enfants idiots et pusillanimes, en plus. C'est pour cela qu'il y a partout tant de bêtise."
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John Kennedy autant que Jayne Mansfield auraient souffert de leur propre complexe, K-M, comme nous l'appelons, s'ils avaient deviné où redouté leurs morts respectives. Bien entendu, il y en avait bien d'autres, que sais-je, de James Dean à Abraham Lincoln, de Keats à Jésus-Christ. La première chose que tout le monde se rappelle d'eux, presque la seule, c'est leur fin frappante ou hors normes, ou trop précoce, ou extravagante : Dean mort à vingt-quatre ans dans un accident de voiture, alors que s'ouvrait à lui une incroyable carrière de star et que le monde entier l'adorait ; Lincoln assassiné par John Wilkes Booth, très théâtralement, dans une loge, peu après avoir gagné la guerre de Sécession et avoir été réélu ; Keats décédé à Rome, de tuberculose, à vingt-six ans, la littérature a perdu tant de poèmes ; le Christ sur la croix, un adulte parfait pour l'épique, un homme accompli quoiqu'un peu tardif dans ses œuvres, mais infortuné, jeune sans l'être, du point de vue de notre époque si lambine et si vieille.
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La bureaucratie financière est irrationnelle, contre-productive, absurde, elle n'aide en rien, c'est un poids mort, et entre ces agents le mécontentement finit toujours par se répandre, ils ont l'impression d'en faire plus qu'on ne leur reconnaît, de se salir les mains et souvent de mener une vie de chien pour protéger une société qui ignore non seulement leurs sacrifices et leurs actes de bravoure ou de sauvagerie occasionnels, mais, par définition ou par principe, jusqu'à leurs noms.
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Vidéo de Javier Marías
Javier Marias parle de son livre 'Comme les amours' au festival Passa Porta en 2012.
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