On ne retient ordinairement de Théodose que sa soumission à la pénitence que l'évêque de Milan lui imposa, et que la loi de 392 interdisant l'exercice public des cultes païens. Cela suffit à faire de lui un empereur bigot, surtout quand cette loi de 392 devient "interdiction du paganisme" sous la plume de journalistes pressés.
L'intérêt du livre de Pierre Maraval est donc évident : cet historien connu de l'Antiquité tardive restitue une figure complexe, dans laquelle la dimension spirituelle ne suffit pas à tout expliquer, ni à juger. le règne commença avec le difficile problème posé par des migrants goths invités dans l'empire sans la moindre condition, ces mêmes Goths qui vainquirent et tuèrent ensuite son prédécesseur Valens et avant d'aller saccager Rome en 410. Agissant sur ce front-là, sur celui des usurpations romaines sans cesse renaissantes, et sur tous les fronts ouverts par la situation politique de la fin du IV°s, Théodose est donc plus qu'un chrétien, c'est un empereur fort occupé, un stratège, un administrateur, qui laissa un souvenir positif même parmi les élites païennes dont il avait neutralisé la dernière tentative de prise de pouvoir.
Au-delà des simplifications et de l'apologétique, on lira ce livre avec plaisir, car il restitue une période historique riche et passionnante.
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J'avoue ne pas avoir trop accroché sur cette biographie, non pas par manque de talent de l'auteur, bien au contraire, mais tout simplement par ce que sous Théodose Rome n'était plus Rome; je me reconnaissais plus dans cet "Empire"
Un monde était né qui m'était étranger!
Je comprends mieux le peu d'Intérêt depuis Fléchier: La filiation est coupée
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Même si le chrétien Théodose considère que les intérêts de l'état et ceux du christianisme sont liés, on ne peut dire qu'il y ait eu sous son règne proclamation d'une religion d'état, moins encore soumission de celui-ci à celle-là. (...) Lui-même a gardé d'excellentes relations avec de nombreux païens -Thémistios, Libanios, Symmaque, Pacatus et bien d 'autres. Aussi les païens contemporains l'ont-ils toujours hautement estimé et considéré comme l'empereur de tous les Romains, païens ou chrétiens. Libanios, dans les discours qu'il lui adresse, le considère visiblement comme tel.
p. 306
Peut-être espérait-on que, comme d'autres Barbares installés en Asie Mineure ou en Italie, les Goths finiraient par devenir des citoyens à part entière, qu'ils seraient bientôt, selon le voeu de Thémistios, "compagnons de libations, compagnons de table, compagnons de combat, compagnons de charges". Mais était-il encore possible de les romaniser ? En réalité, pour la première fois, les membres d'une nation germanique s'installaient à l'intérieur des frontières non plus comme des sujets, mais comme des alliés indépendants ; d'autres les suivraient dans les années à venir qui, loin de s'assimiler, s'affranchiraient totalement de la tutelle romaine.
p. 53
Si ce n'est pas lui [l'empereur] qui a défini la doctrine, c'est lui qui a choisi celle qui sera désormais la seule tenue pour orthodoxe, avec pour conséquence que les doctrines dissidentes seront tenues pour hérétiques et leurs partisans soumis, au moins en principe, aux rigueurs de la loi. ((p.126)
Cette politique (religieuse de Théodose) est dans la continuité de celle de Constantin: elle affirme son soutien à la religion chrétienne, qui à son époque a pris un essor auquel même l'empereur Julien n'a pu faire obstacle et dans laquelle il voit facteur d'unité pour son empire. (p.318)
Trois préoccupations principales inspirent la politique des empereurs romains: Affirmer leur propre légitimité, assurer la sécurité aux frontières, maintenir l'ordre public. (p.310)