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EAN : 9782213608976
994 pages
Fayard (15/03/2003)
3.59/5   16 notes
Résumé :
Staline. Pour l'historien, l'exercice biographique n'est jamais aisé. Que dire lorsque la personnalité choisie continue de susciter des sentiments radicaux et a fait l'objet d'un véritable culte de son vivant ? Que sait-on véritablement sur Staline ? Quelles informations ne sont pas sujettes à caution sur celui qui mettait en œuvre le culte de sa propre personnalité, allant jusqu'à masquer sa date de naissance et truquer les photographies pour paraître plus grand... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (3) Ajouter une critique
Malaise…S. Bien sûr parce qu'il est difficile de rester de marbre devant ce portrait. Mais malaise aussi parce que j'ai senti que ce type de biographie avait tout du piège. Il n'est pourtant pas difficile de convaincre, avec un tel « sujet ». Et il n'est évidemment pas question de défendre un point de vue opposé ; certains le font (je pense à Ludo Martins, mais il n'est pas très convainquant à mon sens). D'autres, bien plus intelligemment, en revanche, des historiens, solides, remettent en cause, depuis plusieurs années déjà, la vision classique que Jean-Jacques Marie incarne ici dans cette biographie qui ressemble à un inventaire à la Prévert d'atrocités, d'abord, mais aussi, ce qui est tout de même bien plus surprenant pour un historien qui jouit d'une certaine renommé, d'astuces qui permettent de noircir encore un tableau (en faisant parler souvent Staline ou en tirant des conclusions non étayées par des sources ; selon ce qu'on appelle en sociologie une forme d'étiquetage : si Staline a commis ces méfaits, alors, dans les cas où on n'a pas de réponse, on peut supposer que c'est aussi lui – bref tout ce qui relève du crime vient de lui). Enfin. Parce que pour un historien qui est clairement ancré à « gauche » (très lié au PC puis au parti des travailleurs), les jugements de classe et les remarques condescendantes pour la « brutalité » ou « l'ignorance crasse » qui serait inévitablement celle des petites gens : de certaines professions ou de certains groupes ethniques donne une tonalité franchement révoltant.
Mais il y a plus ennuyeux encore : toute une historiographie, sérieuse elle aussi, très sérieuse même, travaille, réellement elle aussi, sur les archives (que Marie prétend connaître mais qu'il me semble interprèter beaucoup au gré de ses lectures et de son anti stalinisme d'ancien trotskiste). Pour le dire rapidement et à travers quelques exemples symptomatiques :
- Sur la famine en Ukraine par exemple, qu'il accorde sans contestation possible à un plan machiavélique de Staline, le travaux très renseignés de Mark Tauger, de l'University of West Virginia, anéantissent complètement cette thèse dont on sait par ailleurs qu'elle a été proposée, en premier chef par les nazis et fortement propagée par les groupes néo-nazis ukrainiens après la seconde guerre mondiale (comme le montre cette fois Doug Tottle) ;
- Sur les procès de Moscou, l'historien russe Youri Zhoukov sans faire l'analyse détaillée des activités subversives contre le Gouvernement Soviétique dans les années 1930, montre dans son livre que la lutte du secrétaire du Comité exécutif central de l'URSS A. Yenukidze contre J. Staline l'a finalement conduit à organiser un complot pour renverser le gouvernement soviétique. Parmi les participants à ce complot se trouvait le Commissaire du Peuple pour les Affaires internes (le chef de l'URSS NKVD) N. Yagoda. de même, tandis que selon Khrouchtchev Staline avec ses collègues du Politburo (V. Molotov, K. Voroshilov, L. Kaganovich) étaient les ennemis jurés des procédures démocratiques, Youri Zhoukov offre une image fort différente : Staline a bien proposé un programme de démocratisation de la vie soviétique (Molotov, Voroshilov et Kaganovich soutenant complètement Staline dans cette initiative) ; à l'inverse Yenukidze et beaucoup d'autres fonctionnaires du Parti ont été fortement opposés aux réformes démocratiques de Staline ;
- Sur la « Grande Terreur » des années 1937 et 1938, Grover Furr, archives à l'appui, démontre l'autonomie de Iejov, au point qu'il a agi contre les intentions de Staline pendant plus d'une année ;
- Sur la paranoïa de Staline, notamment contre Trotski, il est désormais là aussi possible de consulter des archives, et précisément celles de Trotski, qui démontrent que son intention était bien réellement de renverser Staline et qu'il fomentait, avec d'autres, sa mise à mort ;
- Sur le pacte germano-soviétique, pour lequel Marie laisse largement entendre qu'il est aussi (surtout ?) le résultat, dès le départ, d'une volonté d'alliance de Staline avec Hitler, cette thèse de l'alliance objective des totalitarismes et complètement battue en brèche par Geoffrey Roberts dans Les guerres de Staline (force démonstration à l'appui et non de simples assertions et petites phrases) ;
- Sur le massacre de Katyne, dont là encore J-J Marie se fait l'échos des thèses courantes sans l'ombre d'un recule, les travaux de Grover Furr, encore, ont détruit le sérieux de cette version du crime par l'Armée rouge de milliers de polonais au printemps 1940 ;
- Sur le crétinisme de Staline et son manque complet de bon sens stratégique pendant la seconde guerre mondiale, le livre de Geoffrey Roberts est un camouflet à la pensée dominante sur le sujet. de même, Domenico Losurdo dans son livre sur la Légende noire de Staline évoque nombre d'éléments qui montrent que Staline était loin d'être un idiot sur ces questions et, mieux, fut reconnu par nombre de militaires, y compris étrangers, et d'historiens de toutes nations, comme un vrai stratège.
- Sur le rapport Krhouchtev, Grover Furr, toujours (qui s'est donné une mission, semble-t-il de démontrer le caractère de propagande d'une historiographie dominante) démontre que strictement aucun des points qui le compose ne peut être pris pour une vérité.

Mon propos n'est pas de réhabiliter Staline, loin s'en faut. Mais bien de dire que cette biographie, à quelques exceptions près (le nombre de morts dans les goulags par exemple), s'inscrit pleinement, conforte et renforce une vision très manichéenne du personnage, et de la vie en URSS digne de cette escroquerie écrite sous la direction de Courtois : le livre noir du communisme. Bref, c'est un bon bourrage de crâne, dont on ressort essoré vu la litanie de crimes et procès d'intentions faits à Staline (si on en retient 10% on peut s'estimer heureux), mais sûrement pas une bonne biographie.
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Du temps de Staline, on passait allègrement de Kiev à Rostov-sur-le-don. Ce n'est pas Victor Nékrassov qui me démentira. Et même dans les tranchées de Stalingrad, la solidarité et la fraternité étaient totales. Ce n'est qu'au retour à la vie civile que le combattant trouvait mièvre la vie en société, quand ce n'étaient pas mesquineries et égoïsmes bourgeois à le dégoûter à tout jamais.
C'est irrationnel et c'est ainsi.
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Le 5 mars prochain, on « célèbrera » les soixante ans de la mort du pire dictateur que la terre ait connu, au règne sans doute encore plus sanglant que celui d'Hitler, la fin par attaque cérébrale de Joseph Staline (1878 - 1953).
La biographie de référence est semble-t-il toujours celle de Jean-Jacques Marie, spécialiste de l'ex-URSS, publiée en 2001 chez Fayard.
Au-delà de la fascination exercée par ex-séminariste battu comme plâtre par son père alcoolique (tout comme Hitler …) sur les peuples de l'empire russe et de son effroyable bilan, je reste encore plus étonnée, rétrospectivement, devant l'idolâtrie dont il fut l'objet de la part de toute une foule d'intellectuels français au lendemain de la guerre. Et de cela, je me souviens très bien car j'entendais à la maison une version en tous points différente.

Mon père était courrier diplomatique : chaque trimestre, il accompagnait la « valise » diplomatique, qui pouvait être « légère », ou « lourde ». C'est dire qu'en plus de la sacoche attachée au poignet durant tout le voyage qui passait par Helsinky et Léningrad, une énorme quantité de colis bénéficiant du statut diplomatique transitaient entre le Département (ainsi parlait-on du Ministère des Affaires Etrangères) et l'Ambassade de France à Moscou, bourrés de trucs anodins mais totalement impossibles à trouver derrière le rideau de fer, destinés aux diplomates de petite comme de moindre importance.

J'écoutais hier après-midi l'émission historique de Franck Ferrand entre 13 et 14 heures sur Europe 1, consacrée à Staline et à laquelle participait Jean-Jacques Marie, où il était mentionné que ce sont les services d'écoute français qui avaient eu l'annonce en primeur de la mort du dictateur. J'ai une version un peu différente : c'est le journaliste français en poste à l'Agence France Presse à Moscou, Jean Nau, un très bon ami de mon père, qui eut le scoop. Il écoutait la radio soviétique en pleine nuit d'insomnie (ou de beuverie, c'est selon) et soudain, la musique classique remplaça les programmes, avant que l'annonce du décès du camarade Staline ne soit lancée. Il câbla immédiatement cette incroyable nouvelle à Paris. Rendons donc à César …

Ce livre est une excellente biographie, à nuancer lorsqu'on sait que son auteur s'est aussi attaché à l'histoire du trotskysme et à celle de Léon Trotsky (en 1984), et donc, sans aucune indulgence. Mais elle est bien écrite, fort documentée à des sources jusque-là inédites (J'ignore cependant si d'autres archives ont révélé depuis lors de nouveaux éléments). Je l'ai lue dans la foulée des biographies de Hitler, Lénine et Castro pendant mes séances de chimiothérapie de cancer du sein voici une dizaine d'années : un excellent moyen de se dire que tout ne va pas si mal …. Puisque je suis toujours là. Mais c'est aussi un moyen de se mettre à l'esprit combien la barbarie humaine peut aller loin, malgré le vernis de la civilisation.
Lien : http://www.bigmammy.fr/archi..
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Vidéo de Jean-Jacques Marie
Pour un ultime coup de pied au culte du camarade Staline .À partir du l'essai de Jean-Jacques Marie, ?Staline 1878-1953. Mensonges et mirages?, montage un rien iconoclaste réalisé pour Mediapart par Antoine Perraud, à l'occasion des 60 ans du trépas de Joseph Staline...
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