Asclé, tome 4 : Le Trésor

Elle rangea son cellulaire dans sa poche. Étienne regarda Asclé. Il sortait avec elle depuis environ neuf mois et ne se lassait pas de l’observer. Il admirait sa détermination et son courage. Elle lui sourit. Il l’aimait tant qu’il l’aurait suivie en enfer. Et si on y réfléchissait bien, c’était un peu ce qu’il s’apprêtait à faire.
— Je ne saute pas de joie, bougonna-t-il en émergeant de sa rêverie.
— Tu n’étais pas obligé de venir, lui fit remarquer Asclé en plissant le nez pour le taquiner. Ce voyage est un cadeau pour nous remercier, pas pour nous torturer.
— Chacun était libre de refuser, rétorqua Marianne.
— Ça va, les filles ! N’en faites pas un plat ! Ça ne vous arrive jamais de vouloir avoir du plaisir, tout simplement du plaisir ? Jouer au volley-ball sur la plage, par exemple, ou faire du camping sans vous soucier des dangers. Étienne faisait allusion aux retours d’Asclé dans ses vies antérieures. L’avion dans le ciel fit une boucle. Les filles levèrent les yeux quelques instants.

Asclé arriva sur le pont. Marianne en profita pour la prendre en photo.
— Que fais-tu ? demanda Asclé.
— Mais je prends une photo ! De quel pays venez-vous, Étienne et toi ? On dirait que vous ne lisez aucun magazine et que vous ne sortez jamais !
— Je ne lis aucun magazine abrutissant, se moqua Étienne.
— C’est pour ça que tu n’es pas un abruti…, répondit Marianne.
— Merci, Princesse !
— Je n’avais pas fini ma phrase : mais c’est aussi pour ça que tu restes idiot !
— Bon ! Je viens vous transmettre les directives du capitaine ! fit Asclé pour mettre un terme à cet aimable échange. Nous commencerons l’embarquement des passagers d’ici une demi-heure. Voici vos horaires de travail. Il y aura une chasse au trésor pour faire connaître le bateau aux gens qui le désirent. Naturellement, Étienne, tu te tiendras à la piscine et Marianne au restaurant. Je suis réellement excitée, et vous ?
Marianne ne répondit pas. Elle n’était plus vraiment certaine d’être heureuse de son choix.

— Cesse de te plaindre !
— Dans quelques heures, Princesse, nous nous retrouverons en plein centre du triangle des Bermudes, aussi connu sous le nom de triangle du Diable.
Marianne frissonna. Elle avait entendu quelques histoires relatant les disparitions mystérieuses de navires et d’avions dans le triangle des Bermudes, mais elle ignorait où se trouvait exactement ce lieu.
— Es-tu certain qu’on passe à l’intérieur du triangle des Bermudes ?
— J’en suis sûr ! Le triangle est délimité par Miami, les îles des Bermudes et Porto Rico. Les Bahamas se trouvent à l’intérieur, Princesse. La jeune fille rangea sa revue et sortit sa brosse. — Comment sais-tu tout ça ? questionna-t-elle en se brossant vigoureusement les cheveux.
— Mon grand-père était fasciné par cet endroit. Une carte géographique était piquée sur le mur de sa chambre. Il m’a souvent raconté une histoire que son père lui contait.

— C’est vrai, pourquoi me ferais-je du souci ? dit-il en se tapant le front. Depuis le temps que nous risquons de nous faire tuer. Je devrais y prendre goût. Mais non, que dis-je… Après tout, les pirates ont une réputation de bons garçons... À ces mots, Asclé régressa quelques centaines d’années en arrière.

Asclé naviguait avec sa famille depuis quelques mois sur une flûte hollandaise, un bateau de marchandises de trois cents tonneaux à la poupe arrondie et au fond plat. Elle était l’aînée d’un riche marchand. Pour passer le temps entre les corvées, elle s’amusait à se cacher derrière d’énormes barils de riz et de sel dans la cale avec son frère et sa sœur.
— Où vous cachez-vous, petits chenapans ? Je vais vous attraper !
— Tu ne nous trouveras pas, crièrent les enfants qui se mirent à rire, dévoilant ainsi leur cachette.