Découpages, théories, études, traductions de textes : tout l'ensemble est remarquable et éclairant. La difficulté de la langue latine, surtout aujourd'hui, ne doit pas faire oublier les splendeurs de la littérature que les Romains nous ont léguées : leur étude conduit naturellement à mieux comprendre notre propre littérature, qui s'est construite sur le modèle de celle-ci. Les réflexions sur les genres, les traductions proposées, les textes, tout est d'une grande qualité.
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Les Métamorphoses apparaissent par excellence comme le type même de ce qu'Umberto Eco appelle une "œuvre ouverte", au même titre que, par exemple, les romans de Kafka, dont les diverses interprétations "n'épuisent chacune qu'une partie des possibilités de l’œuvre". Éviter qu'une interprétation unique ne s'impose au lecteur, tel a été probablement le projet conscient d'Apulée - et il est peut-être significatif que l'Âne d'or occupe, dans l'ensemble de la production apuléienne, une place tout à fait analogue à celle qu'occupe le Nom de la Rose (autre titre énigmatique !) dans la production du théoricien de l’œuvre ouverte : il est des ressemblances qui méritent qu'on y réfléchisse.
Ils cheminaient, obscurs, sous la nuit seule, en l'ombre,
dans les vides palais de Dis, les vains royaumes :
ainsi par incertaine lune et par clarté
douteuse on marche dans les bois, quand Jupiter
enfouit le ciel dans l'ombre où meurt toute couleur.
Aux abords de l'Orcus, avant qu'on y pénètre,
les Deuils et les Soucis ont installé leurs lits ;
les pâles Maladies et la triste Vieillesse
et la Peur et la Faim, mauvaise conseillère,
spectres affreux à voir, et l'ignoble Misère ...
T. 1, p. 55
C'est un fait, d'ailleurs, que le roman apuléien est une des rares œuvres de l'Antiquité qui puisse se lire comme on lit un roman moderne - presque un livre à lire dans le train, comme ceux de Simenon, ou de James Hadley Chase.