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Jean Touzot (Éditeur scientifique)Merryl Moneghetti (Collaborateur)
EAN : 9782841004287
652 pages
Bartillat (06/11/2008)
4.1/5   5 notes
Résumé :

Du journalisme de Mauriac on croyait tout connaître : on avait oublié une petite forme, née en septembre 1959, à L'Express, et restée dans l'ombre étouffante du célèbre Bloc-notes : la chronique de télévision, tenue durant plus de cinq ans et qui n'avait jusqu'à ce jour jamais été reprise en volume. A partir de 1961, le feuilleton s'installe au Figaro littéraire. " Téléspectat... >Voir plus
Que lire après On n'est jamais sûr de rien avec la télévision : Chroniques 1959-1964Voir plus
Critiques, Analyses et Avis (3) Ajouter une critique
J'ai découvert François Mauriac quand j'étais très jeune, avec le roman Thérèse Desqueyroux, et des années plus tard le hasard m'a emmenée à feuilleter ses chroniques régulières de télévision de 1959 à 1964. Elles m'ont fait découvrir la verve, l'humour, le pique, la culture, la curiosité, les goûts personnels du journaliste Mauriac, son regard amusé et critique sur le monde de cette époque-là.
Je cite quelques unes de ses idées sur la télévision idéale : "un merveilleux moyen de diffusion culturelle, un équilibre entre le divertissement et la culture, faite pour les hommes en tenant compte de la condition humaine y compris ses faiblesses", et non pas "au service d'une politique", et non pas "un instrument de propagande entre les mains d'un gouvernement, quelle que soit sa tendance."
La télévision connaît un succès grandissant, surtout par la transmission des événements en direct comme la passation du pouvoir de Coty à De Gaulle. Moment unique auquel tout un chacun est témoin de chez lui de son fauteuil, et les mythes y prennent naissance "Dans cette lumière glacée, les gardes républicains dont les chevaux dansaient autour de la voiture présidentielle, devenaient tout à coup ces cavaliers d'argent de notre enfance…"
Le Tour de France, fort dans le coeur des français, construit depuis le début du XXe siècle tout un imaginaire et à nouveau le monde du mythe fait croire à des histoires et des valeurs. C'était les années 60 !
Mais l'enthousiasme pour la télévision n'est pas général, il y a ceux qui doutent et qui émettent des réticences, ceux qui la rejettent carrément comme un mauvais passe-temps. Comme quoi rien et personne ne peut contenter tout le monde !
Écrivains, cinéastes, hommes politiques, le sport, l'éducation, tout est captée par la plume brillante, incisive et critique de François Mauriac dont l'humour est un fidèle compagnon "Que Pierre Bellemare se rassure, nous ne jugerons pas son Tic Tac Dou sur ce demi-ratage du 10 septembre… Dans tous les tirs de foire, les carabines font leur métier et les pipes se cassent. Peut-être n'y avait-il en France qu'une seule carabine pour rater à tous les coups et il a fallu que Pierre Bellemare tombât sur celle-là !", ou
"Michel Bouquet est un acteur que j'admire, l'un des meilleurs d'aujourd'hui, bien trop honnête pour jouer Henri III.  Seul Pierre Fresnay fût parvenu à l'être. Il devient qui il veut",
et un des plus beaux hommages à Fellini : "J'ai parlé si souvent de la Strada, que je n'ose en reparler encore. C'était la quatrième fois que je le voyais, avec toujours la même émotion qui n'est nullement liée à tout le côté Dickens de l'anecdote, mais à ce mystère capté et fixé sur l'écran de la présence et de l'éveil de l'âme dans les êtres les plus dégradés en apparence… Mais ce n'est pas le lieu de redire ici que Fellini est différent de tous les autres cinéastes et, de loin, le plus grand."
Les 195 chroniquent remplissent 600 pages à lire à la suite ou de la fin au début ou bien en diagonale avec le même plaisir de la découverte d'un style dont la liberté et la légèreté n'ont pas pris un ride, et d'une vivacité qui amuse, instruit et régale depuis un bouquet d'années déjà.
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Quoi? Mauriac, écrivain reconnu, prix Nobel de littérature, devenu télé chroniqueur? Rien que ça m'attirait, et j'avoue que l'aventure s'est révélée fort plaisante. On découvre un Mauriac qu'on imagine en pantoufles, devant son petit écran (en noir et blanc?), sans télécommande, de toute façon la deuxième chaîne n'arrive qu'en 1964. A Paris ou à Malagar, avec épouse et petits enfants pas loin.

"Ce soir je devais aller au TNP. J'ai mieux aimé rester dans mes pantoufles: la télévision donnait Les jeux de l'amour et du hasard et un Hitchcock. C'est la première victoire, dans ma vie, de la télévision sur le théâtre."

Mauriac se révèle beaucoup au travers de ces chroniques, choisissant les émissions un peu au hasard de ses envies et de ses loisirs. Gaulliste intransigeant et catholique ferme, mais plus ouvert que je n'aurais cru, il donne ses avis clairement, sans méchanceté, acceptant la discussion venue sans doute de courriers, ainsi que des opinions différentes, sans pour autant dévier souvent de sa trajectoire. Un poil chauvin (il est désolé quand l'équipe de football se fait laminer)

Il n'aime guère l'opéra et le théâtre filmé, les yéyés (ah quelle époque) lui font lever les yeux au ciel (mais son opinion sur Johnny Hallyday évoluera), il est baba devant Brigitte Bardot, (et en janvier 1962 elle s'indignait déjà de la façon dont on tue les veaux dans les abattoirs!) et, qui l'eut cru?, ne rate guère Intervilles (surtout les vachettes!) et aime Bonne nuit les petits!

Ces chroniques ne sont pas le Bloc Notes, il s'arrête parfois d'aborder certains sujets, mais c'est l'époque de la guerre d'Algérie, de la campagne présidentielle américaine puis de l'assassinat de Kennedy, du mariage de la princesse Margaret, du fiasco français des Jeux Olympiques (comme aurait dit De Gaulle, je ne peux pas tout faire).

Il a ses émissions chouchous (mais qui aime bien châtie bien), Cinq colonnes à la une, Lectures pour tous.

"Même reproche à l'émission L'Assistance publique, cette inconnue. On nous la montre sous de si belles couleurs que je regrette presque de ne pas lui avoir confié mes quatre enfants."

"Cette merveille s'appelle Marie Laforêt. de visage plus touchant, et qui touche jusqu'à bouleverser, je n'en connais pas. Elle jouait une pièce de Teenessee Williams que je ne raconterai pas. Mais si vous voyez un jour sur un programme ce nom : Marie Laforêt, choisissez-le de préférence à tous les autres."

"Les gitans des Saintes-maries-de-le-Mer ont dû nous jeter un sort à tous. Ah! Si on pouvait trouver du pétrole en Camargue, nous délivrer enfin de ce pittoresque forcé, dont nous crevons!"

"Quant à Reynaldo, j'ai suivi à pied, à côté de lui, le corbillard de Marcel jusqu'au Père-Lachaise." Hein? Se frotter les yeux, réaliser que oui, Mauriac est né en 1885...

"Attention à l'homme qui détruit la vie, et veillons sur l'homme qui se détruit lui-même. La destruction des forêts et des espèces animales, la pollution de l'atmosphère: on dirait que l'espèce se prépare à l'anéantissement atomique. (...)La technique au service du grand capital est une idole aveugle, dévorante, une idiote maîtresse du monde et qui l'aura jusqu'à l'os."

Faukner meurt (1962). La télévision redonne la cérémonie du Nobel. "C'est exactement ce qui s'est déroulé pour moi. (...) Et tout à coup j'imagine qu'un jour, bientôt, le petit écran encadrera la même cérémonie, dont je serai le personnage principal."

Lectures pour tous (critiques et conseils...)
Pauvres écrivains de lectures pour tous! On les a retardés d'une heure à cause d'un match de football. (...) Vous ne sauverez cette émission qu'en doublant Dumayet et Desgraupes, car ils ne peuvent tout lire, et il m'arrive de les soupçonner de ne rien lire du tout.(...) Il faudrait faire interroger les auteurs difficiles par un lecteur jeune, passionné, qui débusquerait le romancier de ses broussailles. Un auteur comme celui-là émerge d'un abîme de réflexion et les questionneurs maison n'en tireront rien. Ils ne valent que pour les romanciers qui parlent d'abondance, de telle sorte que le questionneur n'a pas besoin d'avoir lu le livre pour s'en tirer."
"Max-Paul Fouchet est une autre lecteur que Dumayet et que Desgraupes. Il ne se fie pas au 'prière d'insérer'. Il est vrai qu'il est seul sur l'écran et ne peur s'en rapporter à l'auteur pour que nous sachions de quoi il retourne." 1er décembre 1962

En général il évite certaine émission médicale; un poil trouillard?
"Je regrette d'avoir manqué l'émission scientifique d'Igor Barrère et d'Etienne Lalou touchant les articulations. J'ai des vues très personnelles sur le problème, et qui risquent de s'enrichir de jour en jour, je le crains. J'ai donc manqué ma chance de consultation gratuite."

"C'est la grève aujourd'hui à la T.V. Qui en souffre? (...)Il existe comme un charme de l'ennui que nous avions oublié. Si le temps se lève ce soir, j'aurai droit au clair de lune, puisque la T.V. est en grève."

"M. Valery Giscard d'Estaing, ministre des Finances" "Vous pouvez les appeler des technocrates, ils plaisent, la télévision les sert, les porte, et les portera Dieu sait où."

Conclusion : Un petit voyage agréable dans le passé de la télévision, où tout existait déjà, les jeux, les variétés aussi (même si peu prisés de Mauriac). Il avait déjà prescience de l'évolution possible du petit écran et quand il se sentait compétent proposait et suggérait. Il ne cherchait pas forcément des émissions élitistes, mais à ce que tout soit accessible au plus grand nombre.
Était-ce 'mieux avant'? Pas forcément, le nul existait aussi...
Quel plaisir aussi de retrouver des noms oubliés ou pas, avec le regard de maintenant (très utiles notes de bas de page!)
Et puis moi qui m'imaginait Mauriac un peu raide et réac, hé bien c'est souvent distrayant, et de plus intelligent et bien écrit.

Lien : http://enlisantenvoyageant.b..
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Entre 1959 et 1964 l'écrivain François Mauriac (1885-1970) a tenu une rubrique « télévision » dans L'Express puis Le Figaro. C'est l'intégralité de ces petits textes qui sont ici réunis dans un livre passionnant pour ceux qui ont vécu comme moi les premières heures de la télévision. D'abord c'est l'occasion de se remémorer des émissions oubliées (L'Homme du XX siècle, La vie des animaux, La piste aux Etoiles etc.) des feuilletons passés (Rocambole) et des acteurs (Denise Gence, Jean Topart, René Dary, la liste est sans fin) qui sont l'univers de ma jeunesse. A cette époque il n'y a qu'une seule chaîne de télévision, la seconde chaîne naît en 1964, et les émissions culturelles sont nombreuses. Les textes doivent être remis dans leur contexte de l'époque et lus avec en mémoire le fait que Mauriac est un écrivain catholique fervent, par exemple une émission médicale d'Igor Barrère et Etienne Lalou, traitant d'obstétrique, le choque. D'ailleurs il n'aime pas trop ces émissions médicales où les chairs s'ouvrent. Par contre ses chroniques sur les pièces de théâtres, les écrivains et les livres présentés, forcent l'admiration pour sa culture. Et en même temps on reste étonné de le voir apprécier Bonne nuit les petits avec Nicolas, Pimprenelle et surtout le gros nounours ! Il aime aussi beaucoup Brigitte Bardot avec des mots choisis tout en retenue. L'intellectuel catholique et Gaulliste dont j'avais une image pesante et chiante (disons-le) devient plus humain, presque « monsieur tout le monde » quand il est devant son poste. Il s'insurge quand une émission littéraire parle d'un écrivain ou de son oeuvre par allusions, car tous les téléspectateurs ne pourront pas suivre. Lui qui dit ne pas s'y connaître en musique, se régale et nous régale, quand il évoque un récital de piano ou un concert diffusé par la télévision. Il ne se passionne pas beaucoup pour le sport mais quand les footballeurs français prennent une volée, il est accablé.
Certaines de ses remarques sont encore d'actualité, par exemple quand dans Cinq colonnes à la une il voit un condamné à mort américain donner une conférence de presse « et pourquoi un des journalistes présents ne demanderait-il pas à ce condamné s'il est partisan de la peine de mort ? Et c'est précisément cette question qui lui a été posée ! »
Un excellent bouquin pour ceux qui ont connu ces années et vu ces émissions de télévision qui dans nos mémoires côtoient la date de la bataille de Marignan, le Gaulois Vercingétorix et les textes du Lagarde et Michard.
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Citations et extraits (13) Voir plus Ajouter une citation
Les belles étrennes ! Le joli cadeau ! Le plus cher, le plus rare, le plus troublant : c’est B.B. en chair sinon en os [...] Et voilà que la belle poupée parle tout à coup [...], la poupée parle, et même elle prêche. Elle s’indigne de la manière cruelle dont on tue les veaux dans les abattoirs. Elle recommande l’usage d’un pistolet à répétition à deux énormes tueurs de la Villette aux cheveux calamistrés et qui, comme nous tous, bien sûr, dévorent B.B. des yeux ; mais eux, ils n’en sont séparés par rien. Nous tremblons un peu. Nous sentons qu’ils n’en feraient qu’une bouchée. Eh bien, elle ne paraît pas ressentir la moindre peur. En revanche, les tueurs calamistrés ont l’air inquiet et circonspect de deux énormes molosses devant une chatte qui va cracher.
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Quelle surprise ! Voici une Françoise Sagan telle que je l’avais jamais vue, tirée à quatre épingles, ma parole ! sans cet air battu de l’oiseau que j’aime tant. Je cherchais en vain ce désordre vague et charmant d’une jeune femme un peu hagarde, qui a passé la nuit dans un train où il n’y avait plus de sleeping… Du moins ai-je retrouvé le meilleur de ce qui la rend si plaisante. On ne saurait être moins femme de lettres qu’elle ne l’est. Françoise Sagan en sait moins que nous sur ses personnages et n’a qu’une idée : se débarrasser au plus vite de l’ennui de répondre à des questions. Ah ! en voilà une qui ne joue pas le jeu !
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À Paris, les blousons noirs des Batignolles : ce sont des fils à demi repentis. Mais ils gardent des figures d’anges méchants. Ces petits mâles capables de tout, et pourtant si démunis, si faibles, d’avance vaincus, cette vision serre le cœur. Rois pour un peu de temps, mais ils ne savent pas de quel royaume. L’adolescence finira vite, elle est déjà brûlée, déjà morte. Ces charmants visages, une vague flétrissure les vieillit, de cette vieillesse qui tient à l’âme. Et pourtant tout est possible encore pour eux.
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Une biche forcée ? C’est Brigitte Bardot. Toute l’infamie d’une époque est manifestée par cette meute de photographes et de reporters autour du refuge où elle s’est abattue. Cette histoire n’apprendra rien à personne. J’ignore si les garçons et les vierges de la Crète se réjouissaient d’être mangés par le Minotaure. Les metteurs en scène continueront de jeter dans la gueule du cinéma les plus beaux garçons de France et les plus belles filles, et pour dessert, on lui servira des nymphettes, des Lolita et des Zazie. Oui, l’une des plus basses époques de l’espèce humaine.
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Il s’appelle Brassaï. C’est un photographe fameux, qui ne ressemble à aucun autre, un peintre en réalité, un sculpteur, qui a préféré la photographie à la sculpture et à la peinture pour de profondes raisons qu’il nous donne et qui à elles seules pourraient être l’objet d’une sérieuse étude. Mais d’abord il y a l’homme et il y a ses yeux, des yeux comme monstrueusement développés par l’usage qu’il en fait. Ils sont énormes, exorbités, prêts à sauter sur l’objet, sur la proie : à la lettre, il dévore des yeux les choses et les êtres.
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