AccueilMes livresAjouter des livres
Découvrir
LivresAuteursLecteursCritiquesCitationsListesQuizGroupesQuestionsPrix BabelioRencontresLe Carnet
>

Critique de AMR_La_Pirate


Quelle belle découverte avec Hématome, le premier roman de Maud Mayeras, publié en 2006, sans doute pour moi le début d'une addiction à cette auteure de polars noirs...

Noir, parce que c'est noir en effet, depuis le titre jusqu'à certains développements particulièrement réalistes pour les âmes sensibles…
La métaphore de l'hématome sert de noeud thématique : cette tache causée par une hémorragie à l'intérieur des tissus, douloureuse et colorée, symbolise le souvenir et les traces de l'agression subie par l'héroïne ; l'éventail des couleurs prises par ce type de contusions illustre l'évolution physique et mentale de l'état de la victime entre douleur corporelle, troubles psychiques, rappels de la mémoire. Un hématome met toujours beaucoup de temps à se résorber… Il y a aussi un double sens autour du prénom du personnage principal, Emma.
La violence de l'agression est insoutenable dans l'efficacité de la plume de Maud Mayeras. Seul son style factuel permet de digérer certains passages. L'auteure évoque très bien le corps supplicié, le corps souffrant, l'intimité des soins, la reconnaissance et l'acceptation du corps violenté.

Ce qui frappe aussi dans ce livre, c'est le présent de la narration à la première personne : une écriture dans l'introspection immédiate de la victime au fur et à mesure de son réveil à l'hôpital, de sa prise de conscience des évènements, de la remontée des souvenirs et de la reconstruction de la mémoire, puis des péripéties de plus en plus angoissantes. Ce JE déroute et ensorcelle car il ne raconte pas, il commente en direct.
Le récit est ponctué, interrompu de courtes phrases en italique, récurrentes et lourdes de menace diffuse, qui entretiennent le côté angoissant. L'italique, dans des passages plus longs, est aussi la marque des souvenirs, de la mémoire qui revient, des interrogations d'Emma sur ses actes passés et de ses projections dans l'avenir ; ce sera aussi l'annonce de la solution du mystère, le moment où, bluffée, je me suis écriée dans un gémissement douloureux : « non ! Ce n'est pas possible… », faisant sursauter les chiens qui dormaient dans le salon… Car ce récit se lit et se vit, croyez-moi, tant on se retrouve embarquée dans la quête d'Emma.
L'univers référentiel de Maud Mayeras rejoint celui de Lewis Caroll avec Alice au pays des merveilles. Mais, de l'autre côté du miroir, Emma ne vit pas un conte de fée : elle revit son martyre et les pires moments de sa vie et, quand elle semble enfin trouver un peu de répit, le pire est encore à venir. Et quand le pire arrive, il n'y a pas d'effet de surenchère comme parfois dans les dénouements : ici, tout prend sa place dans la trame superbement construite, car le lecteur se rend compte qu'il avait toutes les cartes en main pour comprendre, tout comme Emma, et que les moindres détails qui intriguaient auraient pu, déjà, mettre en lumière la résolution de l'énigme.

Je recommande ce roman.
Hey ! Maud Mayeras, je ne vais pas vous lâcher de sitôt… On va se retrouver, « ma belle » !
Commenter  J’apprécie          180



Ont apprécié cette critique (15)voir plus




{* *}