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Critique de Alfaric


"L'Avènement de l'empire" est un omnibus des "Révélations de Riyria" qui regroupe le tome 3 ("L'Empire de Nyphron") et le tome 4 ("Tempête d'émeraude") du cycle.


Concernant "L'Empire de Nyphron" :

Dans ce 3e épisode, une jeune servante devenu noble par le caprice d'un connard carriériste doit veiller sur une jeune paysanne devenue impératrice par le caprice d'un connard carriériste. Amilia doit ainsi répondre aux ordres de son Éminence Maurice Saldur si elle veut survivre, tout en protégeant desdits ordres Modina Novronia, alias Thrace devenue neurasthénique voire à moitié folle depuis le dénouement du tome 2. Comment dire… C'est Princesse Sarah contre le Cardinal de Richelieu ! Mdr

J'avoue sans honte que ce POV m'a beaucoup plu car c'est drôle, c'est mignon, c'est sympa. Et en plus cela respire les intrigues des vieux films de cape et d'épée : elles sont un peu téléphonées voire clichées, mais c'est tellement La Dernière Séance que je ne peux pas m'empêcher d'aimer.
Mention « Mort de Rire ! » également à la jeune orpheline aux boucles blondes et au raton-laveur domestique…

D'un autre côté la princesse Arista déçue du total échec de sa mission d'ambassadrice, tente le tout le tout en se lançant dans la négociation avec les républicains de Degan Gaunt… sans le dire à son frère le roi Alric. lol
Sauf que durant son périple avec Royce et Hadrian, elle découvre la vraie vie des vrais gens. Pas de serviteurs, pas de confort, pas d'hygiène, mais des repas pourris et des nuits à la belle étoile, et ce avant même de partager les conditions d'existence miséreuse des prolétaires de Ratibor… Je l'avais bien vu venir que Desideria la princesse rebelle mais pas trop quand même allait se transformer en émule d'Arlette Laguiller, par contre la grosse révolte à la Braveheart avec des discours à la Braveheart et des tragédies à la Braveheart, je l'avais moins senti arriver. Là encore mdr… Princesse rebelle + idées progressistes = revival Star Wars ?
Pouvait-on en attendre moins de la part de l'auteur originaire de Detroit, la ville sinistrée symbole vivant de la faillite totale de l'American Dream et du néolibéralisme ? Non, Ratibor la ville pourrie est une allégorie à peine déguisée de la misère de la cité ouvrière du Michigan, qui elle-même n'est que l'arbre de la forêt des millions d'abandonnés du Rust Belt.

Ces 2 POVs féminins se taillent la part du lion, les 2 compères de Riyria étant réduits au rôle de chaperons ou de messagers. Royce mis au courant de la noble ascendance d'Hadrian par le mage Ershanadon tente de sortir son ami de son mal de vivre… en l'emmenant une énième fois en vadrouille avec lui !
On explore le passé de Royce à Colnora, où on en apprend plus sur son rôle de Brunissoir au sein du Diamant. Evidemment de petites ressemblances avec l'Edmond Dantès d' Alexandre Dumas ne sont pas fortuites. On explore le passé d'Hadrian à Hintinda, où on en apprend plus sur ses héritages de Gardien. Evidemment de petites ressemblances avec le D'Artagnan d'Alexandre Dumas ne sont pas fortuites.
Pourtant les personnages gardent encore bien des secrets (voir le tome suivant pour Hadrian qui se la joue Conan), et ils finissent par sortir de leur marasme personnel dans la dernière partie du récit (pour empêcher l'armée impérialiste de triompher, Hadrian doit rejoindre l'armée nationaliste de Degan Gaunt et Royce l'armée royaliste d'Alric).

Il est amusant de voir les plans prétendument chiadés des uns et des autres systématiquement foirer. Si de mystérieuses puissances supérieures permettent aux homines crevarices de retomber sur leurs pieds, ici c'est le vieux magicien manchot Ersrahaddon (le bon vieux code gandalfien) qui permet par un deus ex machina d'éviter la catastrophe à nos héros et aux forces du Bien…
On notera que Riyria se fait entourlouper par un nouveau venu appelé à prendre de plus en plus d'importance dans la série : Merrick Marius est à Royce chez Michael J. Sullivan ce qu'Artemis Entreri est à Drizzt Do Urden chez R.A. Salvatore. Les connaisseurs apprécieront…


Concernant "Tempête d'émeraude" :

Dans ce 4e épisode, l'auteur originaire de Detroit continue sa fantasy à la Robin des Bois, version Alexandre Dumas. Nous sommes dans la littérature de l'imaginaire populaire, héritière directe du roman-feuilleton populaire. Nobles progressistes et républicains révolutionnaires, ouvriers et paysans, héros et manants, tous s'allient pour lutter contre les gros connards carriéristes qui ne pensent qu'à l'argent et au pouvoir que ce dernier peut amener. Liberté, Egalité, Fraternité… Bref JUSTICE FOREVER !

Sauf qu'ici on commence directement dans le drame par la mort d'une des figures les plus importantes de la série… SPOILER


Tandis qu'à la cour d'Aquesta Amilia continue de protéger Thrace des homines crevarices, Royce et Hadrian, ce dernier encore sous le choc des révélations du tome 3, s'embarque sur le Tempête d'Émeraude pour déjouer les machinations de leur Némésis Merrick Marius.
L'auteur a décidé de rendre hommage au roman d'aventures maritimes, et mine de rien j'ai trouvé cela réussi même si je serais bien incapable de me poser en spécialiste du genre. Ainsi tout est là : mystérieuse destination, mystérieuse cargaison, mystérieux passagers, conflits entre membres d'équipage, conflits entre officiers, crypto mutinerie, poursuite en mer, abordage et naufrage. D'ailleurs parmi les rescapés on compte un certain Defoe. Un hasard sûrement, parmi quelques autres que les connaisseurs d'aventures maritimes apprécieront… ^^
Je gage que certains vont encore râler contre la complexité du vocabulaire maritime. Je leur rappelle par avance que cette série a été conçue pour une adolescente dyslexique…

Mais les aventures en mer cèdent ensuite la place à un trek dans la jungle où Hadrian révèle qu'autrefois il a marché dans les pas du Conan de R.E. Howard. Quelle différence Gallenti le Tueur et Amra le Lion ? Presqu'aucune, et l'auteur se fait plaisir avec plusieurs clins d'oeil.

Le point d'orgue de se roman est le combat dans l'arène du Palais des Quatre opposant un groupe de prisonniers à un clan de combattants peaux-vertes pratiquant la magie la noir sous le regard du seigneur de guerre halluciné surnommé « le Puma » (qui a dit Marlon Brando dans "Apocalypse Now" ?). C'est une excellente scène d'action que j'ai vraiment bien kiffé, digne de série télé Spartacus, et elle a d'autant mieux marché que je m'étais vraiment attaché à ceux qui ici vont mourir tragiquement.
Morituri te salutant !

En fait, l'auteur a pris le soin d'étoffer la personnalité de chacun des petits personnages du livre et c'était très agréable.
Néanmoins, certains points font un peu artificiels : la disparition et la réapparition plus tard dans le récit d'un des personnages principaux, le retour d'Hilfred au moment où sa protégée a le plus besoin de lui, les intrigues entre caciques dans le village tropicale (qui n'a pour but que de faire du foreshadowning par le biais de la shamane voyante, et de nous indiquer que Gwen DeLancy fait partie, avec Arcadius, Miranda Gaunt, de ces personnages qui en savent bien plus long que nous les héros et les lectures sur les enjeux en présence, auxquels il faut peut-être ajouter l'aristocrate ruiné Nimbus (son nom, son arrivée et sa gentillesse sont trop énormes pour être honnêtes)).
De la même manière, on pourrait aussi reprocher dans le grand final de faire un peu trop mention d'événements qui sont contés dans "Les Chroniques de Riyria", dont à connaissance l'auteur mais pas les lecteurs au jour d'aujourd'hui !
Vu le parti pris résolument roman-feuilleton, associé à un style plutôt visuel, on ne pas râler car cela fait parti du truc !
Et entre Thrace qui peu à peu émerge de sa neurasthénie pour redevenir la Jeanne d'Arc qu'elle a failli devenir à la fin de l'épisode 2, Amilia qui à force de côtoyer la pourriture Maurice Saldur commence à maîtriser les arcanes du pouvoir, et Arista qui après avoir perdu son V marche dans les pas d'une Evey magicienne, on dépasse largement le cadre d'un revival de Drôles de dames. Mais pouvait-on en attendre moins de la part d'un auteur privilégiant autant altruisme et progressisme ?

Un tome plus sombre que les précédents avec le nettoyage ethnique que subissent les minorités elfes, la grande migration des peaux vertes face aux troubles venus du Nord, les forces d'Erivan qui semblent vouloir prendre leur revanche sur l'humanité, Thranic le bourreau et le tortionnaire qui fait payer aux autres sa haine de lui-même, la tragédie de l'arène… Dommage qu'on en fasse un peu trop sur les enfants elfes et sang-mêlés victimes de l'anthropophagie des tribus gobelins…

Les derniers espoirs des défenseurs de la liberté reposent donc sur les épaules d'une femme de chambre adolescente… On est mal barré hein !
A moins que… Justice Forever ? Vivement la suite ! ^^


En terme d'écriture, c'est un miracle car on est de plus en plus loin des maladresses des débuts de la série : au-delà du côté autodidacte de l'auteur, c'est là qu'on voit avec la différence entre des livres autoédités et des livres édité en bonnes et dues formes qui ont bénéficié d'un véritable travail de correction donc d'amélioration. Combien d'auteurs n'ont-ils pas eu la chance d'être ainsi épaulés (et d'avoir assez d'humilité pour accepte d'être épaulés) pour pouvoir progresser ?
Avec Riyria nous avons un cycle fantasy grand public qui s'améliore de tome en tome, en développant les personnages et l'univers et en amenant les enjeux à des niveaux plus élevés. Les néophytes et les gamers sont visés, et les easy readers devraient bien aimer. Michael J. Sullivan appartient bel et bien au courant de la Fantasy néoclassique !


PS : déjà agréablement surpris du virage qualitatif pris par la série, je ne m'attendais pas à ce que la suite gagne encore en qualité sans sacrifier au fun et à la coolitude, les deux marques de fabrique du cycle.
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