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Citations sur Cité 19, tome 1 : Ville noire (26)

Pour la première fois, le mot "inconsolable" correspondait à quelque chose de réel pour Faustine. Elle comprit que certains mots devaient être appris deux fois : la première avec le cerveau, la seconde avec le cœur.
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Le ciel était gris et il pleuvait tout fin. Un rayon de soleil perça lorsque Faustine jeta une fleur dans la tombe. Elle leva au ciel ses yeux pleins de larmes et murmure un « merci ».
Merci à son père de l'avoir, depuis ses cinq ans, consolée de l'absence de sa mère...
Pour la première fois, le mot « inconsolable » correspondait à quelque chose de réel pour Faustine. Elle comprit que certains mots devaient être appris deux fois : la première avec le cerveau, la seconde avec le coeur.
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— Qui ça, « ils » ?
— Comment ?
— « Ils vont finir par nous repérer », tu disais. Tu parles de la police ? Tu parles des agents de Lagrange ?
Elle eut envie d’ajouter : « Ou de Zapruder ? » Par prudence, elle se tut. Comme il restait silencieux, elle reprit :
— Allez, je te le jure sur ce que j’ai de plus cher. Je ne suis pas un espion déguisé. Je suis un bon gars. Je veux dire : une bonne fille !
Ils sortaient maintenant du palais. Faustine entendit à nouveau le ronflement de l’orgue, ses notes qui flottaient autour des arbres comme une brume musicale. Justement, la vapeur des chaudières les entoura bientôt jusqu’à la taille.
Elle suivait Florent sans chercher à savoir où il l’emmenait.
— Qu’est-ce que tu as de plus cher ?
D’un geste vif, il avait tourné la tête vers elle. Faustine attendit quelques secondes avant de répondre :
— Eh bien… Mon père et ma mère, tiens !
Il hocha le menton.
— Moi, je n’ai plus mes parents. Tous les deux dans le champ de navets.
Faustine se rendit compte qu'elle n'était peut-être pas mieux lotie que Florent. Elle croyait dur comme fer que son père se trouvait quelque part dans cette ville. Mais où ? Quant à sa mère… Elle ignorait ce qui s'était passé il y a douze ans, mais les chances étaient très minces que Sylvia soit encore en vie.
— Mes parents, je ne sais pas où ils se trouvent. Mais ils sont tout de même ce que j’ai de plus cher !
— Tu es seule, alors ?
Elle devina qu’il concluait à l’absence d’un petit ami. Cette remarque l’avait chatouillée. D’autant que depuis un moment, elle ne pensait plus du tout à Vikram.
— Je te le dirai, si tu me dévoiles qui se cache derrière ce « ils »…
Il sourit et continua de la guider à travers le brouillard. Cherchant à se repérer dans le parc, elle se tourna pour embrasser le palais du regard.
C’était, à travers la brume, un spectacle extraordinaire. On aurait dit le Colisée de Rome revu par des architectes du Second Empire. Ses arches jaillissaient de la fumée, en plein cœur de Paris, comme sous les doigts d’un magicien.
À ce moment, elle entendit la voix de Florent dans son dos:
— Ils nous épient, tu sais. Ils nous testent.
Elle se tourna vers lui. Son expression avait changé.
— Ils veulent savoir de quoi nous sommes capables. Toi en particulier.
— Les Veilleurs, prononça-t-elle à voix basse.
Il la fixa sans rien dire. Elle prit cela pour un oui.
— Tu les as vues, les images ? Ces gens au crâne rasé ? Toi aussi tu es un avatar, n’est-ce pas ? Un « dormeur », comme ils disent...
Elle ne comprenait ces mots qu'à moitié. Les prononcer devant Florent, c’était soulever un peu le voile qui les recouvrait.
— Ils nous retiennent prisonniers ?
— Désolé. Je n’ai pas le droit de te répondre.
Elle eut un frisson d'horreur. Quoi qu’il dise, elle savait maintenant qu’elle ne se trouvait pas sous le Second Empire, mais dans une gigantesque illusion façonnée pour elle et les autres. Avatars, Dormeurs, peu importaient leurs noms : on les manipulait comme elle.
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Pour y faire quoi? Peu importe. Il ne fait que passer dans ce récit. On ne le reverra plus.
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En quittant l'immeuble de la rue des Cartonnages, elle se demandait si Manon pourrait quitter le monde de la confection pour entrer, comme elle, dans le journalisme.
Mais il lui semblait que dans cette époque-là, on échappait difficilement à sa condition.
Cette pensée lui venait tandis qu'elle observait les gens dans la rue. Chacun portait sur ses habits, son visage, ses mains abîmées ou vernies, la marque de sa provenance. L'ouvrier, le militaire, le prêtre, la femme du monde, étaient reconnaissables entre mille.
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Faustine baissa les yeux sur les pavés de la cour.
– Comment ai-je fait pour me retrouver dans le Paris d’Haussmann ?
Le nom d’Haussmann, pour Faustine, évoquait toute une époque : le Second Empire. C’était au baron Haussmann que Paris devait ses boulevards et ses jardins publics. Lorsqu’il avait pris ses fonctions de préfet, la capitale ressemblait à une ville du Moyen Âge. Les façades étaient jaunes et noires, décrépies par l’humidité et la suie. Les rues étaient des dédales, des impasses, des goulets. Paris étouffait. Sans parler des légions de microbes qui remontaient de ses égouts. Haussmann avait tout transformé. Quatre-vingt mille ouvriers, quarante mille immeubles, mille deux cents hectares de chaussées et de trottoirs. A coups de pioche, le baron avait remporté la plus grande bataille de son temps : celle du boulevard contre le coupe-gorge, du solide contre le vermoulu, du neuf contre le vieux.
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Elle comprit que certains mots devaient être appris deux fois : la première avec le cerveau, la seconde avec le cœur.
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Enfant, tu as trop vu. Et voir est un aveuglement.
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Elle était la première conservatrice du musée à venir d’Angleterre. Elle avait apporté sa connaissance de l’art anglais à ce temple du XIXe siècle, qui cherchait toujours à élargir ses collections. Sylvia connaissait sur le bout des doigts Paris et son histoire, avait écrit sur la capitale une quantité d’ouvrages richement illustrés. Privée de sa mère, Faustine avait cherché à la retrouver dans ses livres. Et le virus s’était transmis de mère en fille : Faustine voulut tout savoir sur Paris. Elle espérait même, à force d’arpenter la ville, croiser sa mère au détour d’une ruelle.

Mais la rencontre tardait à se produire. Après avoir exploré la capitale dans ses moindres recoins, Faustine, au fil des ans, croyait de moins en moins à ces retrouvailles.

Jusqu’à l’âge de quinze ans, elle habita avec son père dans une loge donnant sur la Seine. Le musée était son vestibule.

Puis, un beau matin :

— Papa, et si je me trouvais une chambre dans le quartier ?

Louis Treussart s’était étonné en entendant sa fille dire sa préférence pour une chambre solitaire, près du musée où elle pourrait aller et venir.

Elle avait envie de vivre ailleurs que chez son père. Non pas parce qu’elle ne l’aimait plus, mais pour prendre son essor.

Comme un oiseau de nuit.

Faustine garda ses mitaines en dentelle et les compléta d’une paire de jeans et d’un piercing au-dessus du sourcil droit.

Elle venait d’avoir seize ans.
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- Cela pourrait être tellement mieux !
Elle avait tourné la tête et interrogé du regard l'homme qui avait prononcé ces mots. Il pouvait avoir quarante ans. Sous ses cheveux blonds platine, son visage était étrangement dépourvu de rides. Il portait des habits élégants mais ce qui frappait surtout, c'était l'assurance qui émanait de lui.
Sans regarder Sylvia, il avait ajouté :
- Pourquoi la copie ne serait-elle pas meilleure que l'original ?
- Précisément parce qu'elle est une copie, avait lâché Sylvia.
Les yeux de l'homme s'étaient posés sur son visage. Elle avait aussitôt éprouvé une brûlure.
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