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L'Ingénieux Hidalgo Don Quichotte ... tome 2 sur 2
EAN : 9782020222136
590 pages
Seuil (30/09/2001)
4.21/5   280 notes
Résumé :
LES GRANDS TEXTES DU XVIIe SIÈCLE

Gloire à l'ingénieux hidalgo Don Quichotte de la Mancha et à son fidèle écuyer, Sancho Pança ! Et honte sur l'infâme imposteur Avellaneda, dont les récits apocryphes souillèrent l'épopée grandiose. Qu'à cela ne tienne, l'aventure recommence. Le digne successeur d'Amadis de Gaule parviendra-t-il à briser le sortilège qui pèse sur Dulcinée ? Ce brave Sancho gouvernera-t-il un jour cette île qu'on lui a promise, en récom... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (28) Voir plus Ajouter une critique
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Alors que le premier Don Quichotte a été écrit par Cervantès afin de combattre les mauvais romans de chevalerie, ce deuxième tome ne s'attaque avant tout qu'à un mauvais plagiaire. Par contre, si l'adversaire est incomparablement plus modeste, les exigences du génial auteur ne diminuent pas pour autant.
En effet, malgré l'immense succès de son premier opus, Cervantès ne va pas se contenter de reproduire le même type de roman, mais pousser encore plus loin son art en donnant encore plus de précision et de crédibilité à ses personnages.
Tandis que le tome I était donné au lecteur comme le récit de l'historien Ced Hamet Benengeli, ce qui implique une certaine distance d'un historien rapportant son interprétation de faits qui lui ont été rapportés souvent indirectement, le tome II part du regard critique direct, de Don Quichotte et de Sancho eux-mêmes, sur les récits qui ont été faits de leurs (més)aventures. Ceux-ci ne sont d'ailleurs pas pleinement satisfaits du travail d'historien accompli par Cid Hamet Benengeli: certains passages auraient pu être laissés de côté, d'autres auraient du être ajoutés, certains passages restés obscurs méritent aussi des éclaircissements que les deux « héros » n'hésitent pas à apporter, etc. Mais surtout, ils se sentent carrément insultés par le récit du plagiaire qu'ils critiquent sans merci.
Si le contenu idéaliste et bouffon de leurs aventures reste le même, celles-ci se déroulent donc désormais à un niveau de réalité supérieur. Leurs traits psychologiques sont d'ailleurs tracés beaucoup plus clairement, les détails des conversations apparaissent d'avantage, et ils nous semblent donc beaucoup moins bêtes que dans le tome I, surtout Sancho.
Cette fois-ci, ce ne sera donc pas la lecture trop surabondante de mauvais romans de chevalerie, mais la lecture de ses propres aventures qui donnera à Don Quichotte l'envie d'aller se risquer à de nouvelles aventures chevaleresques et c'est d'ailleurs ce qui se produit aussi pour tout lecteur de ce tome II : ils vont le lire parce qu'ils ont d'abord lu le premier. En espérant que vous apprécierez, comme moi, cette nouvelle incursion du chevalier à la triste figure et de son écuyer autour de son village encore d'avantage que la précédente.
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Voici les secondes aventures de Don Quichotte, écrites dix ans plus tard, Cervantes étant furieux qu'un écrivain d'alors ait essayé de le plagier. Et le thème du plagiat est omniprésent dans ce second ouvrage.

J'ai retrouvé avec un égal plaisir Don Quichotte et, plus encore, son écuyer Sancho Panza, qui est, quelque part, le véritable héros de ces histoires.

Le tout m'aura tellement plus que je mets ces livres dans ma valise indispensable pour me rendre sur une île déserte, tant l'oeuvre de Don Quichotte nous rappelle sans cesse de ne jamais nous prendre au sérieux, que celui qui paraît fou est souvent bien plus sage que le plus sérieux des personnages et que la vie est bien trop courte pour la vivre de manière par trop austère.
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El Ingenioso Hidalgo Don Quixote de la Mancha - Segunda Parte
Traduction : César Oudin, revue par Jean Cassou
Notes : Jean Cassou
Présentation : Jean Carnavaggio

ISBN : 9782070379019

Eh ! oui, il fallait bien que cela arrivât : puisque j'étais allée jusqu'au bout du premier tome, et avec plaisir, je devais terminer le parcours . Bien que le nombre de pages soit à peu près le même à un ou deux feuillets près, je me suis montrée plus rapide dans la lecture de ce second volume. Il faut dire que j'avais pris le rythme et que la troisième et dernière "sortie" de Don Quichotte et de Sancho Pança se trouve considérablement relevée par leur rencontre avec le duc et la duchesse (leur patronyme n'est pas précisé), couple d'aristocrates extrêmement riches et entichés eux aussi, à leur manière, de romans de chevalerie.

Ces romans les ont distraits surtout en raison de leur extravagance. Là où, pour le Quichotte, tout est sérieux, le duc et la duchesse ne trouvent que mascarade et gausseries diverses. Cervantes ayant eu l'idée - très moderne d'ailleurs - d'évoquer dans le texte la parution du premier volume des aventures de son Don Quichotte à lui, dont il attribue la paternité à un Maure nommé Cid Ben Engeli, le duc et la duchesse ont évidemment entendu parler du recueil et l'ont dévoré avec force éclats de rire. du coup, ils se font tout le plaisir qu'on s'imagine de recevoir en leur château, en chair et en os, le Chevalier A La Triste Figure, désormais Chevalier des Lions, et son fidèle écuyer.

Ils les traitent somptueusement mais, esprits semble-t-il assez puérils, ne se font pas faute de concocter mille et un tours à leur jouer pour conforter le premier dans sa certitude d'appartenir à la chevalerie errante et le second, dans l'idée qu'il finira par lui venir un "gouvernement", d'une île de préférence. de fait, le duc nomme bientôt Sancho gouverneur de l'une de ses provinces, avec ordre à ceux qui s'y trouveront de lui inventer niche sur niche afin de voir si la simplicité naturelle du brave Sancho y résistera. Mais, à la profonde stupeur de toutes et de tous, Sancho s'en tire fort bien et juge et tranche comme un vrai Salomon. Mieux : l'exercice du pouvoir finit par le dégoûter et c'est de son plein gré qu'il abandonne son "gouvernement" pour s'en aller retrouver son bon maître, Don Quichotte.

Pendant ce temps, au château du duc, un Don Quichotte mélancolique - l'absence de Sancho lui pèse - se voit en proie aux provocations d'une certaine Altisidore, jeune femme qui se déclare effrontément amoureuse de lui et qui souhaiterait qu'il lui donnât la main plutôt que de servir la toujours incomparable Dulcinée du Toboso. Ajoutez à cela que, avant la rencontre entre le duc et la duchesse d'une part, et Don Quichotte et son écuyer d'autre part, ce dernier a réussi à faire croire à son maître, lequel (contrairement à ce qu'il appert dans le tome I) n'a en réalité jamais vu - "de ses yeux vu, vous dis-je" - la fameuse Dulcinée, que la malheureuse a été victime d'un enchanteur et transformée en une paysanne rougeaude et sentant l'ail et le gousset. Fidèle néanmoins à la parole donnée, fût-ce à une illusion, le Quijote n'en réserve pas moins son honneur et sa chasteté pour sa Dulcinée, ce qui amuse énormément les initiés et suggère à l'infernal couple ducal une nouvelle mômerie : faire apparaître l'enchanteur Merlin en personne sur un char somptueux, lequel Merlin déclarera que le seul moyen de mettre fin au sort indignement jeté sur Dulcinée est que Sancho Pança accepte de se donner, de bon coeur et en pleine volonté, trois-mille-trois-cent et trente-trois coups de fouet (trois mille trois cents minimum, en tous cas).

Du côté du village de Don Quichotte, curé et barbier, alliés au bachelier Carrasco, n'ont pas renoncé à faire réintégrer ses pénates à leur seigneur et maître. Une première tentative, au tout début de l'histoire - Carrasco s'étant déguisé en chevalier errant, dit le Chevalier des Miroirs, désireux de combattre et de vaincre Don Quichotte afin que celui-ci se soumette à sa volonté - est pour le bachelier un cuisant échec. Il s'en revient au final, cette fois-ci sous le titre de Chevalier de la Blanche Lune et se montre cette fois-ci plus heureux. Vaincu, Don Quichotte doit accepter de retourner à son village et d'y passer au moins une année sans songer à reprendre ses vagabondages.

Las ! le terme est venu pour le Quijote. La tristesse de ne se plus voir chevalier errant, ne serait-ce que pour un an seulement, l'âge sans doute, une santé que tout le monde dit fragile, finissent par l'emporter non sans qu'il n'ait recouvré la raison et renié avec beaucoup d'amertume ces romans de chevalerie qui firent ses délices - et assureront, sans qu'il le sache, la postérité de son nom et de celui de son écuyer.

Au-delà d'une histoire qui alterne émotions et rires, "Don Quichotte" pose nombre de questions : le Quijote est-il vraiment "fou" ? Et Sancho, si simple soit, mais aussi fort capable de diriger une province avec la finesse d'un vrai politique, ne l'est-il pas autant que lui ? Ou n'est-il que subjugué par un personnage dont le charisme, quoique assez déroutant, s'affirme peu à peu, sans avoir l'air d'y toucher, comme incontestable ? Et que dire du duc et de la duchesse, assurément les plus fous du deuxième tome , capables de dépenser des sommes immenses et de déployer des efforts inouïs pour se livrer à des tours qu'un gamin de dix ans jugerait lui-même comme farces d'assez mauvais goût ? Qu'est-ce que la folie, qu'est-ce que le bon sens ? N'alternent-ils pas en chacun de nous au gré des circonstances et avec plus ou moins de puissance ? Cervantes n'évoque certes pas les gènes et l'ADN mais le lecteur moderne, lui, peut y songer. Celui qui se complaît aux lectures philosophiques trouvera en outre dans le roman de l'Espagnol une foule d'interrogations profondes sur la nature originelle de la vérité et de la sagesse. En un mot comme en cent, le "Don Quichotte" de Cervantes est une véritable mine d'or qui, malgré des dehors souvent bouffons, a traversé les siècles parce ce que son seul et unique sujet, c'est vous qui me lisez - et moi qui écris, et eux, à côté, qui nous regardent. Cet esprit vagabond, dans ce corps si maigre et si ridicule, c'est le nôtre quand il songe que rien n'est plus beau que la liberté et la noblesse. Quant à l'esprit de Sanco Pança, c'est notre bon sens quand il décide de n'en faire qu'à sa tête et de vérifier si, par hasard, il n'y a pas d'autre voie plus juste à expérimenter que celle qu'il prend habituellement ...

Longtemps, j'ai douté de l'universalité de "Don Quichotte." Ce n'est plus le cas aujourd'hui. Don Quichotte et Sancho Pança sont les reflets de nous-mêmes, qui s'opposent, s'affrontent, fusionnent et se complètent avant de se séparer à nouveau pour reprendre le cycle. En cette époque périlleuse, où toutes les valeurs s'effacent, s'enfuient, se cachent ou n'osent plus donner de la voix, il est bon de savoir que, au fond de tout être, pourvu qu'il ait le courage de les réveiller pour combattre la malhonnêteté et l'ingratitude, sommeillent un Don Quichotte ET un Sancho Pança, équipe redoutable ô combien en raison de la foi inconditionnelle qu'ils conservent pour ce qui est beau et bon. Tant que cela sera, la race humaine pourra espérer. Merci à Miguel de Cervantes Saavedra pour l'avoir gravé de si belle manière dans le marbre de l'Imaginaire universel. ;o)
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Don Quichotte et Sancho... on retrouve les tribulations de nos deux compères à travers l'Espagne. Si l'on est habitué aux déboires de Don Quichotte, empalant des ailes de moulin avec sa lance sous l'oeil sceptique de Sancho, c'est une toute autre histoire dans ce deuxième tome. En effet, on vit au fil des pages la "quichottisation" de Sancho. Don Quichotte semble revenir à la réalité, parfois assez durement, à force de coups et de blessures, et perdre la force de croire en ses divagations. Cervantes nous dévoile alors un Sancho qui se laisse prendre au jeu, enthousiaste et téméraire, décidé à se lancer dans de nouvelles aventures délirantes, comme pour indiquer que c'est bon, la relève est assurée.
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Quel plaisir de retrouver Don Quichotte et Sancho Pansa dans ce second volet de leurs aventures publié dix ans après le premier volume.
Cervantès indigné qu'un auteur ait osé s'approprier ses héros pour les mettre en scène dans un roman qui se veut une suite du premier, a du reprendre la plume pour poursuivre l'histoire authentique du duo et a exploité l'idée ingénieuse de faire participer le lectorat à la trame romanesque.
Le succès du récit initial fait que maintenant en Espagne tout le monde connait Don Quichotte et son écuyer, ce qui fait que lorsqu'ils quittent à nouveau leur village à la recherche de nouvelles aventures, ils vont rencontrer des personnes qui les reconnaîtront et qui vont chercher à exploiter ces bouffons tellement drôles en leur proposant des aventures pittoresques, en se jouant de leur naïveté, en organisant de véritables mises en scène pour réjouir un public toujours plus nombreux et friand de divertissement.
Bien sûr le comique est toujours présent, les histoires enchâssées dans le récit principal toujours pleines d'enseignement, mais ici les deux héros sont plus complexes, plus fouillés et à travers leurs échanges, la réflexion philosophique affleure et parcourt tout le texte.
Qu'il s'agisse d'une critique des institutions et de préceptes sur l'exercice du pouvoir, de la politique royale d'expulsion des morisques, ces musulmans convertis chassés d'Espagne, de l'attitude de l'Eglise, du sort réservé aux femmes dans une société fondamentalement inégalitaire, Cervantès exprime des idées en avance sur celles de son temps et fait preuve d'un humanisme joyeux car avant tout il croit que l'homme est perfectible et qu'il peut trouver en lui-même la force de mener à bien son destin.
Le roman se déroule en brefs chapitres se renvoyant l'un à l'autre de façon à susciter la curiosité du lecteur, ce qui lui donne envie de connaître la suite.... Procédé bien connu à l'heure actuelle qui a été exploité de tous temps par les romanciers mais qui était à l'époque de Cervantès d'une incroyable modernité.
J'ai pris un plaisir délicieux à la lecture de ce monument de la littérature espagnole qui mérite vraiment qu'on se plonge dans le texte sans se contenter des connaissances diffuses que l'on peut en avoir sans lecture préalable.
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Citations et extraits (57) Voir plus Ajouter une citation
[...] ... L'histoire raconte que, quand Don Quichotte criait après Sancho afin qu'il lui apportât son casque, celui-ci était occupé à acheter des fromages blancs, que les bergers lui vendaient. Or, il se trouva tellement pressé des cris de son maître qu'il ne sut qu'en faire, ni où les mettre, et, pour ne les point perdre, car il les avait déjà payés, il s'avisa de les placer dans l'armet [= petit heaume] de son maître, et avec cette bonne précaution, il courut voir ce qu'il lui voulait. Alors Don Quichotte lui dit : "Ami, donne-moi ce casque : car ou je suis ignorant des aventures, ou bien ce que j'aperçois en est une qui me doit contraindre et me contraint de prendre mes armes." Lors, le gentilhomme au Vert Caban, qui entendit ces paroles, jeta ses regards de tous côtés et ne découvrit autre chose qu'un chariot qui venait à leur rencontre, et où il y avait deux ou trois petites banderoles. Cela lui donna à entendre que ce chariot devait porter quelque monnaie de Sa Majesté, et il le dit à Don Quichotte. Mais lui, qui croyait et pensait toujours que tout ce qui lui arrivait n'était qu'aventures sur aventures, lui fit cette réponse : "Homme découvert, homme à moitié combattu. Je ne perds rien à me tenir sur mes gardes, car je sais par expérience que j'ai des ennemis visibles et invisibles ; et j'ignore où, en quel temps et en quelle figure ils me doivent assaillir." Ce disant, il se tourna vers Sancho et lui demanda sa salade, laquelle il fut contraint de lui bailler sans avoir loisir d'en tirer les fromages blancs. Don Quichotte la prit, et, sans regarder ce qui était dedans, se l'enchâssa promptement en tête. Mais, sitôt qu'il commença de presser les fromages, le petit-lait commença de courir par sa face et par toute sa barbe. Cela le mit en un tel trouble qu'il dit à son écuyer : "Que peut être tout ceci, Sancho ? Il me semble que le sommet de ma tête devient mou, ou que la cervelle me fond, ou que je sue des pieds à la tête. Certainement je sue, mais ce n'est pas de crainte ; sans doute l'aventure qui me doit maintenant arriver est fort terrible. Si tu as quelque chose pour m'essuyer, donne-le moi : car cette excessive sueur m'aveugle les yeux." Sancho ne dit mot, et lui donna un mouchoir et rendit grâces à Dieu de ce que son maître ne fût pas tombé sur ce qu'il en était. Don Quichotte s'essuya et ôta son casque pour voir ce qui, à son avis, lui rafraîchissait ainsi la tête, et, y voyant dedans cette blanche bouillie, il la porta à son nez, et en la sentant tint ce discours : "Par la vie de ma dame Dulcinée du Toboso, ce sont ici des fromages blancs que tu y a mis, traître, brigand, écuyer mal avisé !" Sancho, entendant ce que son maître disait, lui répondit d'un grand flegme, avec beaucoup de dissimulation : "Si ce sont des fromages blancs, que Votre Grâce me les donne et je les mangerai ... Mais non, que le Diable les mange, car ce doit être lui et non autre qui les y a mis. Eh quoi ! pensez-vous donc que je fusse si téméraire de salir ainsi le casque de Votre Grâce ? Vous avez bien trouvé le fol ! Sur ma foi, monsieur, à ce que Dieu me donne à entendre, je dois avoir aussi des enchanteurs qui me persécutent, comme étant une créature et un membre de Votre Grâce. Ils y auront mis sans doute cette immondice pour exciter à colère votre patience, afin que vous me froissiez les côtes ainsi que vous avez coutume de le faire. Mais, à la vérité, je m'assure que pour cette fois ils se sont abusés : car je me confie sur le bon jugement de mon maître, qui considérera que je n'ai ni fromage, ni lait, ni autre chose qui le vaille, et, si je l'avais, je le mettrais plutôt dans mon estomac que dans votre salade. ..." ... [...]
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"- Sancho, (...) ce que je te recommande en premier lieu, c'est d'être propre, de te rogner les ongles et de ne les laisser point croître, ainsi que font quelques-uns, qui sont si ignorants et si bêtes qu'ils croient que de grands ongles leur embellissent les mains, (...). Sancho, il ne faut point que tu ailles sans ceinture et les vêtements lâches (...). Ne mange point d'ail ni d'oignon, afin que l'odeur ne découvre ta rusticité. (...) Fais attention, Sancho, à ne pas mâcher des deux côtés à la fois et à n'éructer devant personne.
- Je n'entends pas, dit Sancho, ce mot d'éructer."
Et don Quichotte lui dit : " Éructer, Sancho, veut dire roter, et c'est un des plus vilains mots qu'ait la langue castillane, encore qu'il soit fort significatif ; de sorte que les délicats ont recours au latin (...).
- En vérité, monsieur, dit Sancho, parmi les conseils et les avis que vous me donnez, et que je pense garder en ma mémoire, je ne mettrai point en oubli de ne pas roter, parce que j'ai accoutumé de le faire fort souvent." (...)
"Lorsque tu monteras à cheval, ne porte point ton corps sur l'arçon de derrière, ni ne lève les jambes tendues, roides et éloignées du ventre du cheval, ni ne te fais point paraître si mou qu'il semble que tu sois monté sur ton grison (...).
- Monsieur, répondis Sancho, je vois bien que toutes les choses que Votre Grâce m'a dites sont bonnes, saines et profitables. Mais de quoi me peuvent-elles servir (...) ? "

(Chapitre XLIII, Des seconds conseils que donna don Quichotte à Sancho Pança)
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- En bonne foi, femme, répondit Sancho, si Dieu m'envoie quelque chose qui sente le gouvernement, je marierai notre Mari-Sancha si haut, si haut, qu'on ne l'atteindra pas à moins de l'appeler votre seigneurie.
- Pour cela, non, Sancho, répondit Thérèse; mariez-la avec son égal, c'est le plus sage parti. Si vous la faites passer des sabots aux escarpins, et de la jaquette de laine au vertugadin de velours ; si, d'une Marica qu'on tutoie, vous en faites une doña Maria qu'on traite de seigneurie, la pauvre enfant ne se retrouvera plus, et, à chaque pas, elle fera mille sottises qui montreront la corde de sa pauvre et grossière condition.
[Chapitre V]
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–Je viens te fouetter, Sancho, et acquitter en partie la dette que tu as contractée. Dulcinée périt ; tu vis sans te soucier de rien ; je meurs dans le désespoir ; ainsi, défais tes chausses de bonne volonté, car la mienne est de te donner dans cette solitude au moins deux mille coups de fouet.
– Oh ! pour cela, non, s’écria Sancho ; que Votre Grâce se tienne tranquille ; sinon, par le Dieu véritable, il y aura du tapage à nous faire entendre des sourds. Les coups de fouet auxquels je me suis obligé doivent être donnés volontairement, et non par force. Maintenant, je n’ai pas envie de me fouetter. Il suffit que je donne à Votre Grâce ma parole de me flageller et de me chasser les mouches quand l’envie m’en prendra.

[Chapitre LX]
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[...] ... Don Quichotte les suivit des yeux, et, lorsqu'elles eurent disparu, il se tourna vers Sancho et lui dit : "Sancho, que t'en semble ? Ne suis-je pas bien haï des enchanteurs ? Regarde, je te prie, jusqu'où s'étendent leur malice et le sort qu'ils ont jeté sur moi, puisqu'ils m'ont voulu priver du contentement que me pouvait donner la vue de ma maîtresse telle qu'elle est naturellement ? Ah ! Je ne suis né au monde que pour être le modèle des malheureux, et le blanc et le but où visent et vont donner toutes les flèches du malheur. Tu dois aussi remarquer, Sancho, que ces traîtres ne se sont pas contentés de changer et transformer ma Dulcinée, mais qu'ils l'ont encore métamorphosée en une figure basse et laide comme celle de cette villageoise. Ils lui ont pareillement ôté ce qui est si propre aux grandes dames, je veux dire la bonne odeur, parce qu'elles sont toujours parmi les fleurs et l'ambre. Or, je t'apprends, Sancho, que, quand je vins pour faire monter Dulcinée sur la bête que tu dis être une haquenée et qui, à mon avis, est une ânesse, elle m'a jeté une odeur d'ail cru qui m'a soulevé et empesté le coeur. - O canailles," s'écria alors Sancho. "O maudits et pervers enchanteurs ! Heureux qui vous verra tous enfilés par les ouïes, comme harengs saurés qui pendent à la cheminée. Vous savez beaucoup, vous pouvez beaucoup et vous faites grand mal. Il vous eût dû suffire, marauds, d'avoir changé les perles des yeux de madame en glands de liège, et ses cheveux de fin or en crin de queue de boeuf rouge, et finalement tous ses gestes de bien en mal, sans toucher nullement à l'odeur. Pour le moins, eussions-nous joui de ce qui restait caché sous cette affreuse écorce, quoique à la vérité je puisse dire que je ne vis jamais sa laideur, mais sa beauté, que rehaussait encore un fort beau signe à la lèvre droite, en manière de moustache, où l'on voyait sept ou huit poils rouges comme des fils d'or et longs de plus d'un pied. - Selon," dit Don Quichotte, "la correspondance qu'ont ces signes de la face avec ceux du corps, Dulcinée en doit avoir un autre à la fesse, du côté qu'est celui du visage. Toutefois, pour de telles grains de beauté, les poils que tu viens de dire sont bien grands. - Je vous puis bien assurer," répliqua Sancho, "qu'ils y paraissaient comme s'ils y étaient nés. - Ami," dit Don Quichotte, "je le crois : car la nature n'a mis chose aucune en madame Dulcinée du Toboso qui ne fût parfaite et accomplie. C'est pourquoi, quand elle aurait cent signes comme celui que tu dis, ce ne seraient point des signes tout court, mais plutôt des signes du zodiaque ou des étoiles resplendissantes. ..." ... [...]
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Videos de Miguel de Cervantes (7) Voir plusAjouter une vidéo
Vidéo de Miguel de Cervantes
Miguel de Cervantès parmi nous avec Philippe Sollers - Anniversaire Cervantès (1966 / France Culture). Par Denise Centore et Severo Sarduy. Avec Philippe Sollers. Diffusion sur France Culture le 20 avril 1966. Illustration : Miguel de Cervantes Saavedra, 1547-1616. Détail de la gravure de Frederick Mackenzie (1787-88 - 1854). Miguel de Cervantes, francisé en Miguel de Cervantès (de son nom complet Miguel de Cervantes Saavedra), né le 29 septembre 1547 à Alcalá de Henares et enterré le 23 avril 1616 à Madrida, est un romancier, poète et dramaturge espagnol. Il est célèbre pour son roman "L’Ingénieux Hidalgo Don Quichotte de la Manche", publié en 1605 et reconnu comme le premier roman moderne. Cervantes mène d'abord une vie aventureuse de soldat et participe à la bataille de Lépante en 1571, où il perd l'usage de la main gauche. Cette main paralysée lui vaut le surnom de « Manchot de Lépante ». Le 26 septembre 1575, à son retour vers l'Espagne, il est capturé par les Barbaresques avec son frère, Rodrigo, et, malgré quatre tentatives d'évasion, il reste captif à Alger. En 1580, il est racheté en même temps que d'autres prisonniers espagnols et regagne son pays. Marié et séparé de son épouse et occupant diverses fonctions, il se lance alors dans l'écriture par le roman pastoral "La Galatea" en 1585. En 1605, il publie la première partie de ce qui reste comme son chef-d'œuvre : "L'ingénieux Hidalgo Don Quichotte de la Manche" dont la deuxième partie ne paraît qu'en 1615. Sa parodie grandiose des romans de chevalerie et la création des personnages mythiques de Don Quichotte, Sancho Panza et Dulcinée, ont fait de Cervantes la plus grande figure de la littérature espagnole et l'un des romanciers les plus éminents du monde. Son roman "Don Quichotte" a été traduit dans plus de 140 langues et dialectes et fait partie des livres les plus traduits au monde. Ses premières œuvres théâtrales, peu appréciées de son vivant, ont pourtant donné lieu à de nombreuses imitations. En particulier, la tragédie en vers, "Le Siège de Numance", écrite de 1581 à 1583, a connu entre 1600 et 1813 cinq imitations sous des titres divers et a inspiré à Lope de Vega "La Sainte Ligue". Lectures de textes de Cervantès et de Jorge Luis Borges par Jean Topart et Michel Bouquet.
1ère partie : 00:00 2ème partie : 43:23
Sources : France Culture et Wikipédia
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