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Critique de Presence


Dwight McCarthy (le héros du précédent tome) est en train de profiter de la vie avec Shellie, une gentille dame de petite vertu quand on frappe à la porte. Un excité baraqué du nom de Jack Rafferty insiste pour passer du bon temps avec la même dame dans le cadre d'une relation tarifée. Il souhaite également qu'elle fasse appel à ses collègues pour distraire les potes avec qui il est venu. Shellie lui fait observer qu'elle ne souhaite pas qu'il la tabasse de nouveau, et qu'elle ne souhaite pas que ses copines se fassent malmener par ses sbires. Tout cela tourne mal et Jack finit la tête dans la cuvette des WC dont il n'a pas tiré la chasse.

Un peu échaudé par cet intermède peu glorieux, il emmène ses potes dans le quartier chaud de Sin City pour s'offrir les services de prostituées dans le cadre d'une transaction économique plus conventionnelle. Mais son agressivité amène les filles à prendre des mesures drastiques concernant son espérance de vie. Malheur : cet homme était un représentant des forces de l'ordre et le statu quo stipule que le quartier chaud est sous la maîtrise des filles à la seule condition que les flics aient droit à des passes gratuites et qu'ils ne soient pas malmenés. Il faut donc rapidement maquiller ce faux pas. Seulement une autre organisation récupère la tête du macchabé policier pour essayer d'imposer sa loi (et ses taxes) sur le quartier chaud.

Frank Miller invite pour la troisième fois ses lecteurs à une promenade touristique dans Sin City. Cette fois-ci, il s'intéresse au quartier baptisé "Old Town" qui est dédié à la prostitution. Sa particularité réside dans le fait qu'il n'y a ni mac, ni souteneur et que les filles assurent elles mêmes leur défense (grâce à leurs prédispositions peu communes aux sports de combats et au maniement d'armes blanches ou à feu de tout genre).

Encore une fois, Miller ignore totalement la dimension sociale de son récit pour se concentrer sur la virilité des hommes et le commerce féminin du sexe. La trame du récit est une fois de plus sur le mode de l'exagération ce qui est parfaitement relayé par le parti pris graphique (les rues avec des courbures dignes des courses poursuites dans un dessin animé de la Warner). Ce style de récit ne repose que sur des exagérations et finit par nuire à l'histoire qui enfile les postures des héros, sans jamais pouvoir faire des personnages autre chose que des caricatures. Par exemple, même en tant que lecteur acquis à la cause de cet univers, il est difficile d'adhérer un seul instant à des personnages comme Miho ou Becky : ils sont à la fois trop impossibles et trop superficiels. Comme l'attrait de la nouveauté des 2 premiers tomes s'est émoussé, Miller donne l'impression de déjà tourner en boucle.

Ce constat vaut également pour les dessins. Miller a toujours recours au noir et blanc (sans nuances de gris) pour des formes épurées, au point d'en être parfois abstraites. L'impact visuel est toujours aussi fort, mais Miller semble avoir pris moins de risques que dans les 2 premiers tomes. du coup, certaines cases sont un peu confuses (il faut s'y reprendre à 2 fois pour comprendre ce qui est dessiné) et d'autres sentent un peu la redite.

Pour autant il n'est pas possible non plus de bouder son plaisir. Il y a à plusieurs reprises des passages d'une noirceur exceptionnelle. Lorsque Jack fait irruption chez Shellie, Miller sait rendre palpable l'insupportable tension qui s'installe n'attendant qu'un mot de travers pour virer au massacre. de même, il réussit à immerger le lecteur dans le délire de Dwight en train de parler au cadavre de Jack, dans une scène à la fois surréaliste et dérangeante de folie latente et de pression. Et certaines séquences d'action restent longtemps imprimées dans la mémoire du fait de graphismes d'une efficacité hallucinante : Jack en apnée dans la cuvette, Manute malmenant Gail, Dwight s'enfonçant dans le goudron, etc.
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