Un dictateur fait face à un peloton d'exécution et se souvient du parcours qui l'a mené d'une enfance misérable aux portes du pouvoir absolu. le récit de cette ascension sonde avec talent la détermination et le machiavélisme dont le protagoniste avide de puissance est capable pour atteindre son objectif. Arrivé à ses fins, le dictateur règne en maître absolu et dirige d'une poigne de fer les rouages de son État. La rencontre d'une femme mystérieuse imposera à ce caractère monolithique et brutal de composer avec le sentiment amoureux duquel il était parvenu à se préserver jusque-là. Dès l'instant de cette rencontre, on mesure le bouleversement qui va s'opérer dans l'âme de cet homme sanguinaire et cruel. Même si l'auteur caricature (à outrance à mon sens) les dictatures militaires des pays du Maghreb tout au long de l'ouvrage, le prix qu'exige la liberté en constitue le thème principal. Très belle découverte.
Mai 2014
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Tout au long de mon existence, j'ai souffert de ces crises nauséeuses qui chamboulaient mon estomac. J'ai beaucoup rêvé de paix et de repos dans un refuge d'ombre et de verdure. Je voulais aussi écouter jouer le vent dans les feuillages. Je n'ai connu que des chemins désolés et des collines nues. J'ai subi un soleil dont le zèle faisait éclater les pierres. Aucun souffle ne venait jamais rafraîchir mon visage suant. Sans ombre, sans verdure et sans brise, il ne peut y avoir de quiétude. Bien plus grave, il ne saurait y avoir d'indulgence.
Quelle vie !
Je pars du sage principe qu'il vaut mieux pénaliser injustement un responsable efficace et fidèle plutôt que de laisser impunies les bévues d'un incapable. On ne peut qu'inciter le premier à redoubler d'ardeur tandis qu'on risque d'encourager l'incurie du second. De toute façon, je savais que les uns et les autres avaient toujours quelque chose à se reprocher. Au début, beaucoup crurent pouvoir me cacher leurs petits vices. Leur dérisoire manie du secret me faisait sourire. Même sur leur prime enfance, j'en savais plus que leur propre mère.
La garnison se trouve ainsi soumise au règne des sergents. Ils sont légion. Ce sont les seuls vrais chefs. Leurs décisions sont sans recours. Si tu veux la paix, il te faudra leur obéir aveuglément, en dépit de leurs exigences parfois inattendues. Ici, nul ne peut survivre s'il ne bénéficie pas de la sollicitude des porteurs de chevrons. Tu auras l'occasion de t'en rendre compte.
Je croyais que ma calamiteuse enfance d'orphelin livré à lui-même m'avait suffisamment averti de la cruauté du monde et fourni en armes capables de me permettre d'affronter sans danger la vie humaine.
Les plus cupides croyaient me duper en habillant pauvrement leurs enfants et en interdisant à leur femme de porter les bijoux qui encombraient les tiroirs alors que je tenais à jour la comptabilité précise de leur fortune illégalement acquise. Ceux qui dans leur bureau abusaient du whisky ne buvaient en public que du jus d'orange. Ceux qui aimaient les garçons affichaient un puritanisme de façade. Les trafiquants de drogue faisaient mine de ne pas supporter la fumée des cigarettes.
Apos' Strophes d'été
Bernard Pivot propose une sélection d'Apos et de Strophes : -
Suzanne Chantal pour "Jérôme Manni le vénitien" (rediffusion du 26/03/89) -
Rachid Mimouni pour "
L'honneur de la tribu" (rediffusion du 09/04/89) -
Jean Cayrol pour "Oeuvre
poétique" (rediffusion du 11/09/88) -
Roger Grenier pour "
Pascal Pia ou le droit au néant" (rediffusion du 30/04/89) - Edouard J. Maunick pour "Anthologie...