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EAN : 9782940523047
262 pages
Editions des Syrtes (16/01/2014)
4/5   3 notes
Résumé :
Une âme douce est une interrogation sur le théâtre de Tchekhov et sur la littérature, sa place dans la vie et sa dimension éthique. La Cerisaie et La Mouette sont encore aujourd’hui deux des pièces les plus populaires du répertoire dramaturgique mondial. Grand amoureux du théâtre, Alexandre Minkine cherche à renouveler la lecture des œuvres de Tchekhov en les débarrassant des innombrables strates de commentaires qui pèsent sur leur réception.
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Critiques, Analyses et Avis (3) Ajouter une critique
Afin de vous inciter à le lire (et un peu comme une enquête policière commence par une énigme), Minkine vous pose une question au début du livre : « Quelle est la surface de « La Cerisaie » ? » Ni des acteurs, ni des metteurs en scène de la pièce n'ont été capables d'y répondre. Or elle est donnée dans le texte, mais il faut la trouver ou plutôt la calculer. Ce n'est que la première pièce du puzzle.

Cette propriété fait plus de 1 100 hectares. Minkine fait la démonstration que l'on a absolument pas la même approche de la vie lorsqu'on a été élevé sur un domaine aussi vaste que dans une maison actuelle à l'horizon fermée, et, pas la même compréhension de la pièce et des personnages, en ignorant ce fait.

Puisque ce petit détail de plus de 1000 hectares, m'a échappé, qu'y-a-t-il d'autre dans l'oeuvre de Tchekhov que je n'aie pas perçu ? Immédiatement cette question vous vient à l'esprit. Et on se laisse prendre par la lecture.

Pas à pas Minkine nous conduit dans le monde d'Anton Pavlovitch. Comme un guide, dans une vieille maison, braque sa torche électrique sur des traces du passé que l'on n'aurait jamais remarquées, il vous explique pourquoi c'est là et à quoi cela servait, parce que le ça-va-de-soi de l'époque et la classe sociale des personnages ont disparus !

Il analyse les trois pièces et cherche à nous les montrer telles qu'il pense que Tchekhov les a conçues. Il relève toutes les erreurs de mise en scène, de choix des acteurs, d'interprétation du texte. Pour cela il s'aide de la Correspondance du romancier.

Il veut nous démontrer que pour comprendre Tchekhov il faut avoir un certains niveaux de culture sur cette époque-là et aussi en générale, culture que possédait l'aristocratie russe du 19e siècle, Shakespeare, Maupassant.. Pour regarder ses pièces il faut même connaître le jeu des acteurs d'il y a plus d'un siècle...

A travers l'exemple de trois pièces de Tchekhov, dont le sens profond s'éloigne chaque jour un peu plus de nous, Minkine fait le procès de l'inculture actuelle. Mais, en même temps, il démontre aussi que la fin d'une génération c'est la fin de sa culture propre et que la suivante ne garde des générations précédentes que ce qui peut s'intégrer à sa nouvelle façon de voir le monde. Ainsi, par exemple, les pièces de Hugo ne sont-elles plus d'actualité.

En lisant Minkine on ne peut s'empêcher de penser à Montaigne. Comme lui il s'adresse à ses lecteurs, mais surtout il comprend qu'une citation dans une pièce de théâtre ne peut être comprise que par un public averti tout comme Les Essais ne peuvent pas être lu sans un solide appareil de notes.

Un tel livre ne se lit pas seul. Vous devez de front ouvrir ceux de l'auteur russe et même de bien d'autres : Tourgueniev, Maupassant, Shakespeare... Minkine met la barre très haute, comme Lavillenie (ou Bubka), il oblige son lecteur à venir instruit ou à s'instruire le long du chemin.

Minkine redonne une épaisseur aux oeuvres de Tchekhov, un poids. Non ce ne sont pas des pièces poétiques, elles sont, d'une certaine façon codées !

La leçon que l'on tire d'Une âme douce, c'est que l'on lit trop vite, que bien souvent le sens exact d'un texte nous échappe en même temps que certains détails. Finalement qu'avons nous compris d'Eschyle?
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"Une âme douce", c'est une immersion en profondeur dans l'univers de Tchékov, un dramaturge mondialement connu. le seul Russe peut-être que l'on cite à côté de Shakespeare". le monde entier monte "Les trois soeurs, la Cerisaie", encore et toujours.
L'auteur de cet essai s'interroge d'abord sur le genre : S'agit-il d'un théâtre poétique ? "Mais dans les pièces, on parle sans arrêt d'argent, de dettes, d'intérêts".
Bien au-delà d'une analyse sur le théâtre de Tchékov, l'auteur se livre à une vaste enquête sur la littérature, l'impact des grands textes sur la vie et l'oeuvre des écrivains. Il établit des analogies dans les situations ou dans les mythes avec les tragédies d'Eschyle, Sophocle, Euripide ou Shakespeare.
Plus près de nous, Maupassant est souvent cité dans ce texte . "Mais les Français, en cent quinze ans, après des centaines de mises en scène, n'ont pas reconnu Maupassant et ses idées à travers les répliques de Trigorine, un personnage d'Anton Tchékov".
Autre passage : "Les critiques qualifiaient Tchékov de Maupassant russe."
Plus loin, l'auteur remarque : Nous ne pouvons comprendre les personnages tchékoviens que dans la messure où nous avons lu les mêmes livres : DostoÎevski, Schopenhauer..."
Autre allusion : " les personnages de "La Mouette" citent Shakespeare, Maupasant, Gogol, Tourgueniev, mentionnent Tolstoï, Zola..."

De nombreux paragraphes sont consacrés à l'importance de la mise en scène. L'auteur se livre à une vive critique sur ce sujet. Il insiste sur l'importance du travail des divers créateurs de spectacles, aussi primordial que le texte ou la qualité de l'interprétation.

Alexandre Minkine est écrivain, critique de théâtre, également analyste politique, d'où de nombreuses digressions sur les bouleversements historiques de la Russie du 20e siècle. Les multiples aptitudes et activités de l'auteur, alliées à une immense culture expliquent sans doute le mélange des genres de ce récit foisonnant et passionnant mais parfois confus et redondant.
Ce texte s'adresse indéniablement plus aux amoureux de l'oeuvre de Tchékov
qu'aux non-initiés qui risquent d'être un peu perdus face à l'abondance du propos.
Mon point d'interrogation est le suivant : faut-il relire les textes ou revoir les pièces avant ou après la découverte d'"Une âme douce". A coup sûr, la lecture est plus profitable si vous avez en mémoire "La Cerisaie, La Mouette, Oncle Vania ou Les trois soeurs". Sinon, comme moi, vous serez prêts à replonger dans toute l'oeuvre de Tchékov, mais aussi de Pouchkine, De Maupassant...Une grande envie de retour aux classiques.
Merci aux éditions des Syrtes et à Babelio pour ce texte, en leur présentant à nouveau mes excuses pour le retard de ma chronique, indépendant de ma volonté.


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Une plongée dans le théâtre de Tchékhov.

Dans cette ouvrage, l'auteur s'attache surtout à trois pièces "phares" de Tchekhov: La Cerisaie, La Mouette et Les Trois Soeurs.
En lisant Alexandre Minkine je découvre de nombreux détails qui étaient passés inaperçus lorsque j'avais découvert ces pièces. Il s'agit d'une analyse des personnages, de références à la vie de Tchekhov, à l'histoire de la Russie, mais aussi de réflexions sur des mises en scène différentes de ces pièces (et des incohérences commises par certains metteurs en scène...!) .Une chose est sûre, désormais, je serais plus attentive à mes lectures de Tchekhov!

Le coeur du texte en est leur analyse littéraire, aussi bien de didascalies parfois laissées de côté, que de nombreuses références littéraires qui sont présentes en particulier dans La Mouette, de Hamlet à Maupassant.
Le tout ne forme pas un texte indigeste, loin de là, l'analyse est entrecoupée d'extraits de pièces ou de correspondances de Tchekhov, et, s'il s'adresse à des lecteurs ayant un minimum de connaissances sur l'oeuvre du dramaturge, il est d'une lecture tout à fait accessible .
Lien : http://lecture-spectacle.blo..
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Citations et extraits (13) Voir plus Ajouter une citation
Tchekhov à Souvorine

25 novembre 1892 Melikhovo

Soulevez la jupe de notre muse; vous y verrez un endroit lisse. Rappelez-vous que les écrivains que nous appelons éternels et qui nous grisent présentent un même signe commun très important : ils avancent et nous appellent à les suivre. Alors, tout votre être sent qu'ils ont un objectif.

Les meilleurs d'entre eux sont réalistes et décrivent la vie telle qu'elle est. Mais du fait que chacune de leurs lignes est pénétrées, comme d'une sève, de la conscience de leur but, vous y sentez non seulement la vie telle qu'elle est, mais aussi telle qu'elle devrait être, et cela vous captive. Et nous? Nous décrivons la vie telle qu'elle est et ensuite - il 'y a plus moyen de nous faire bouger! Nous n'avons pas d'objectifs à court ni à moyen terme et notre âme est d'un vide affligeant.

Nous n'avons pas de politique, nous ne croyons pas à la révolution, Dieu n'existe pas, nous n'avons pas peur des fantômes... Qui ne veut rien, n'espère rien, ne craint rien ne peut devenir artiste... Je ne me jetterai pas dans la cage d'escalier comme Garchine, mais je ne me leurrerai pas en espérant dans un avenir meilleur.

Je ne suis pas responsable de ma maladie et ce n'est pas à moi de me soigner, car il faut croire que cette maladie poursuit des objectifs louables qui nous sont cachés et qu'elle m'a été envoyée à dessein...

1637 - [p. 68]
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Puis, un nouveau mouvement du balancier : on s'est mis à idéaliser la noblesse. Toutes les dames du XIXe siècle sont devenues des femmes de décembristes. Tous les hommes des Andreï Bolkonski. Alors, qui sont ceux que Pouchkine désignait comme « populace mondaine », « canaille mondaine »? Qui jouait ses esclaves aux cartes ? Qui lâchait les chiens sur des enfants de paysans, entretenait des harems ? Qui avait mis les moujiks dans un état de fureur tel qu'en capturant un officier blanc ils l'empalaient au lieu de lui tirer une balle dans la nuque comme le commande l'humanité.
C'est la révolte intérieure parfois inconsciente de l'homme soviétique contre l'idéologie dominante qui a fait naître cette admiration pour la noblesse.

1623 - [p. 35/36]
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Les paysages sont anéantis. Hier, quand on roulait, des deux côtés de la route il y avait des champs, des bois, des prés, des forêts à perte de vue. Aujourd'hui, des palissades de cinq mètres de haut. On a l'impression d'avancer dans un tunnel. Que les murs de ce tunnel soit hauts de cinq ou de cent mètres, c'est pareil : la terre disparaît. On ne vous a laissé qu'un ciel au-dessus des barbelés. Quelqu'un s'est emparé de la terre et la patrie a disparu. La vue, qui forme l'individu bien plus que le drapeau et l'hymne national, s'est perdue.

1612 - [p. 14]
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Tchekhov ne pensait pas faire du théâtre poétique. Il était préoccupé par la cohérence des personnages. Et il avait une vision très lucide de ses contemporains quels que soient la classe, le milieu dont ils étaient issus (comme seuls les médecins peuvent le faire). Dire que ses pièces sont poétiques revient à déclarer que Tchekhov ne comprenait pas ce qu'il faisait. Un génie inconscient. Ou bien à en faire ce qu'était Mozart d'après Salieri : un noceur oisif.

1613 - [p. 31]
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Pouchkine voyageait seul. Plus que cela : il réfléchissait, n'ayant rien d'autre à faire. Il n'allait tout de même pas converser avec le dos du cocher.
Les compagnons de route, la radio et la télé ne vous laissent pas le loisir de réfléchir.
Tchekhov a fait une partie du trajet jusqu'à Sakhaline avec des militaires et a souffert de leurs conversations futiles (il s'en est plaint dans ses lettres).

1621 - [p. 33]
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