AccueilMes livresAjouter des livres
Découvrir
LivresAuteursLecteursCritiquesCitationsListesQuizGroupesQuestionsPrix BabelioRencontresLe Carnet
EAN : 9782073014276
144 pages
Gallimard (05/10/2023)
3.82/5   80 notes
Résumé :
«C’est cet effort d’absence volontaire, de déracinement voulu, de distanciation active par rapport à son milieu qui paraît toujours naturel, c’est donc cette manière de s’éloigner de soi-même — ne serait-ce que momentanément et provisoirement —, de se séparer du natal, du national et de ce qui, plus généralement, le fixe dans une étroitesse identitaire, c’est cela et surtout cela que j’appellerai errance.»
Que lire après Petit éloge de l'erranceVoir plus
Critiques, Analyses et Avis (22) Voir plus Ajouter une critique
3,82

sur 80 notes
5
7 avis
4
10 avis
3
3 avis
2
0 avis
1
0 avis
♫ J'm'en fous, j'm'en fous
De tout
De ces chaînes qui pendent à mon cou
J'm'enfuis, j'oublie
Je m'offre une parenthèse, un sursis
Je marche seul [...]
En oubliant les heures
Je marche seul
Sans témoin, sans personne
Que mes pas qui résonnent
Je marche seul♫
-Jean-Jacques Goldman- 1985 -
---♪---♫---🦶--⬜🔴⬜--🦶---♫---♪---
Je n'ai pas vraiment suivi vos routes
J'ai voulu tracer mon chemin
Comme un Samouraï en déroute
qu'on appelle aussi Ronin
La Châtre- Périgueux par la voie de Vézelay
Renouer avec les souvenirs, de l'avenir se rapprocher
Toujours plus loin, aller plus haut, au-delà, Ultreïa !!
Oka-e-ri-na-sa-ï en hiragana
ou "welcome to Japan" en langage universel
La quintessence de l'âme de quoi se compose-t'elle ?
Un futon pour Shiro le chiot blanc
Ou un disque rouge au milieu d'un rectangle de tissu blanc...
Abhorration du corps étatico-moral, mais dans quel état j'erre !?
Ce n'est que ton mouton de Panurge qui cuit, quand tu dis j'erre...
Commenter  J’apprécie          1132
Akira Mitzubayashi est un japonais atypique.

Le français est sa langue d'élection, il est un éminent spécialiste de Rousseau, sa femme est française et il a longtemps résidé en France, faisant constamment la navette entre son Japon natal et la France, son pays de coeur, et enseignant , au Japon, la littérature française des Lumières.

Aussi ne nous étonnons pas qu'il fasse un Petit éloge de l'errance, culturelle, linguistique et intellectuelle!

Errer, pour lui c'est d'abord faire un pas de côté,  se démarquer de la meute mimétique et docile, aveuglément soumise au chef.

 Se retrouver seul.

Et, avec ce pas de côté,  prendre le vent, changer d'air, chercher un angle d'attaque ou une perspective insolites,  et tenter de "faire société "par concordance de projets,  en créant,  avec d'autres errants,  une  société fondée non plus sur la tradition et l'obéissance mais sur un pacte social où chacun donne un peu de sa force et  de sa liberté pour le mieux-être de tous.

 Un "contrat social" à  la manière de Rousseau.

Puisant son argumentaire tant dans la littérature que dans la musique, recherchant ses exemples  tant  dans l'actualité récente que dans L Histoire, tant dans les oeuvres de son cher Rousseau   que dans les films de Kobayashi ou Kurosawa, il  dresse le portrait de ces quelques grands errants qui , en quittant le troupeau,  ont fait progresser l'humanité vers une société plus consensuelle et plus juste.

Il convient d'errer, donc, mais sans forcément bouger, car ce chantre de l'errance est un grand sédentaire : il s'agit plutôt d' inscrire son parcours dans une civilisation choisie, une langue d'élection , une culture par affinité.

 En se référant  à la sémantique  et à la temporalité  très particulières de la langue japonaise, il analyse en finesse ce qui , dans sa langue natale même,  constitue un obstacle à cette "errance choisie", à l' ouverture à ce qui est étranger, à  cette horizontalité des échanges,  cette inscription dans un temps relié au passé et ouvert sur l'avenir,  sans lesquelles  aucune rencontre, aucun pacte social n'est possible.

Passionnant, limpide et convaincant.

Et court, ce qui ne gâte rien.
Commenter  J’apprécie          574
Enfant de l'après-guerre, né au Japon de parents japonais, Akira Mizubayashi a choisi le français comme langue de coeur. Il a commencé à l'étudier jeune avant de partir suivre un cursus universitaire en France, séjour dont il repart Docteur ès Lettres.

Spécialiste et disciple de Rousseau, et plus particulièrement de son Contrat social, Akira Mizubayashi confronte dans ce Petit éloge de l'errance sa vision humaniste et pleinement démocratique avec la société japonaise qui reste cloisonnée dans des liens hiérarchiques très forts et où l'individu passe après le groupe, qu'il s'agisse de la famille, de l'entreprise et, tout en haut, de l'État toujours symbolisé par l'Empereur même si depuis la défaite d'août 1945, ce dernier a renoncé à son ascendance divine ainsi qu'à tout pouvoir politique et gouvernemental.

L'auteur se base sur des anecdotes et témoignages, personnels ou non, pour démontrer les dangers qu'il ressent dans une société et un État où toute remise en cause, ou même tout dépassement ou originalité comportementale - bref ne pas respecter le consensus conformiste - est rejetée et vilipendée. Et même condamnée à mort lors de l'époque de l'impérialisme effréné et de l'instauration d'un régime militaro-dictatorial à l'ère Shôwa (Hirohito).
Akira Mizubayashi regrette l'incapacité à tirer des leçons du passé lorsqu'il constate l'incurie, les mensonges et l'absence de prise de responsabilité des instances gouvernementales, scientifiques pro nucléaires et des entreprises telles Tepco lors de la catastrophe de Fukushima. Et que le gouvernement actuellement en place véhicule des idées ultranationalistes qui ont de dangereux relents de l'époque précédent la capitulation de 1945.

Le moyen de se détacher de ce conformisme-carcan, pour lui : opter pour l'errance. Pris dans le sens où l'on s'éloigne des voies tracées par la Majorité pour gagner en indépendance d'esprit. La contrepartie étant la solitude et une certaine tristesse à porter. Ces deux traits, solitude volontaire et indépendance, sont très mal considérés dans l'archipel et l'auteur en fit les frais dans sa carrière universitaire après son retour de France, ainsi que son père, dans des circonstances plus graves, lors de la Guerre de Quinze Ans (1931-1945).

L'auteur cite plusieurs exemples d'êtres qu'il considère comme errants, à commencer par Rousseau. Mais également Mozart ou encore l'immense cinéaste Akira Kurosawa dont Les sept samouraïs illustre parfaitement le type d'hommes prêts à s'extraire de leur sort pour se transformer non seulement en défenseurs d'une village de  paysans (normalement improbable car dégradant pour un samouraï même ronin) mais aussi - et surtout - en instigateur d'une communauté non plus basé sur le rapport inféodé à une instance supérieure mais sur une sorte de pacte social rousseauiste.

A la fois d'intérêt historique, philosophique, sociologique, politique et culturel (en 140 pages, c'est extraordinaire), le Petit éloge de l'errance est également écrit dans un français qui peut faire pâlir d'envie et de confusion, par sa perfection, bon nombre de natifs de l'hexagone.
Un ouvrage court mais percutant et éclairant, permettant d'appréhender toujours plus en profondeur (s'efforcer en tout cas) la mentalité japonaise en dépassant les images qu'on peut en avoir en tant qu'Occidentaux.
Commenter  J’apprécie          414
Mizubayashi nous parle de la difficulté pour l'individu, au Japon, de s'affranchir de la pensée collective. « La communauté nationale, ici, n'est pas le résultat d'un acte d'association libre et volontaire. Elle n'est pas une construction politique qui passe par un acte. Elle est plutôt d'essence ethnique dans la mesure où elle est caractérisée par la permanence et la pureté imaginaire du sang. Elle précède les individus ; elle les englobe et les engloutit. » Quiconque, au Japon, se démarque du groupe prend le risque d'être rejeté. Sur un plan historique également. L'auteur explique ainsi que peu de gens se sont opposés au gouvernement militaire des années 30 ou à la reprise du nucléaire après Fukushima. Il y a comme un « engourdissement » collectif qui peut très vite déboucher sur une irresponsabilité individuelle. L'auteur, enseignant de français et ayant vécu plusieurs années en France fait le parallèle avec la société occidentale, basée au contraire sur l'individu. Spécialiste de Rousseau, il s'appuie sur « Le contrat social », pour expliquer la différence fondamentale entre la pensée japonaise et occidentale.
L'errance, au Japon, commence donc avec le non-conformisme, dans de simples actions quotidiennes et constitue en cela un véritable défi à la collectivité.
Dans les derniers chapitres, l'auteur critique de manière très soutenue l'action du gouvernement actuel qui prône un retour aux valeurs nationalistes en voulant modifier la constitution de l'après guerre.
A l'aide d'exemples puisés dans le cinéma, la littérature, la musique…, ce petit essai est vraiment très instructif pour comprendre la pensée japonaise.
Commenter  J’apprécie          310
Eloge de l'errance est un essai limpide qui expose la difficulté d'être différent dans la société japonaise. Akira Mizubayashi raconte ce qui l'a personnellement conduit à choisir d'être un non conformiste, un homme conscient de son autonomie et de ses responsabilités, mais aussi de sa solitude et de son étrangeté.
Le livre débute par la description magnifique et musicale de la séquence d'ouverture de Yojimbo de Kurosawa. qui introduit, d'emblée, la figure légendaire du ronin, ce samouraï médiéval qui s'exclut volontairement du groupe pour défendre les opprimés. Un autre film de Kurosawa, Sanjuro (1960) avec le même type de guerrier solitaire et errant marque à jamais le petit Akira. Suivent ensuite des anecdotes touchantes qui décrivent ses vaines tentatives pour s'incorporer au groupe, la honte qu'il a éprouvée enfant à se sentir différent, la première très humiliante où Il est moqué cruellement par le groupe et la seconde toute mignonne où il est compris par la maîtresse. Plus tard, jeune professeur, il se heurte aux règles hiérarchiques immuables en vigueur dans les universités nippones. Il se révolte alors contre ce pouvoir injuste et cette soumission à des règles préétablies qu'il oppose au contrat social de Rousseau. Celui-ci repose sur un pacte libre et volontaire des individus. Mizubayashi expose ensuite ce qui lui apparaît comme les racines historiques et linguistiques du conformisme japonais, la structure verticale et le présentisme de la langue. Puis il insiste sur le fait que cette culture aboutit à l'irresponsabilité généralisée. Ce fut le cas des militaires et politiques traduits devant le Tribunal militaire pour crimes de guerre au sortir de la Guerre et c'est le cas au moment où il écrit en 2011 après la catastrophe de Fukushima. Personne ne se sent personnellement concerné. La responsabilité individuelle est diluée par le groupe. Et les conséquences sont minimisées (avant d'être oubliées). Ensuite, il évoque ces grandes figures d'errants qu'il admire tant ( avec son père) les Rousseau, Mozart, Kurosawa, Kobayashi et Sôseki. Enfin dans l'épilogue il revient sur sa propre errance, celle qui l'a conduit à "épouser" la langue française pour se décentrer par rapport au Japon.

j'ai beaucoup aimé ce livre clair et concis, vivant et souvent touchant, qu'il ne faut pas prendre pour un essai philosophique. C'est très autobiographique, donc égocentré, avec des généralisations sans doute un peu trop faciles. J'aimerais bien savoir si l'ouvrage a été traduit en japonais et ce que ses compatriotes en ont pensé.
Commenter  J’apprécie          256


critiques presse (1)
NonFiction
27 novembre 2014
Le cri solitaire et poétique d’un écrivain japonais, un éloge de la liberté de pensée et de conscience.
Lire la critique sur le site : NonFiction
Citations et extraits (49) Voir plus Ajouter une citation
Où aller ? Quel chemin prendre ? Il interroge l'horizon et fait un tour complet sur lui-même. C'est alors qu'il trouve une longue branche d'arbre par terre. Il la ramasse et la lance en l'air. Elle tombe. On dirait, que posée en diagonale, [...] elle indique une direction. Sur fond de musique d'une innocence et d'une nonchalance enfantines, le samouraï enjambe la branche et se résout à prendre la direction indiquée par le hasard.
Ainsi Kurosawa introduit-il, d'emblée, la figure emblématique d'un individu solitaire et errant dans son chef d'oeuvre de 1961. (Yojimbo)
Commenter  J’apprécie          450
- Tu as une boîte à couture pour apprendre à coudre. Ce n'est pas pour la montrer aux autres, ni pour la comparer avec celles des autres. La seule chose importante, c'est que tu as tout ce qu'il faut dans cette boîte pour bien apprendre à coudre, pour pouvoir mettre en pratique les instructions de la maîtresse...
C'était le dernier mot de la conversation familiale, décisif, définitif, sans appel, avec tout le poids de l'autorité paternelle, imperceptible mais réelle.

1. BLESSURES -.Ou les origines du désir d'errance.-p.40-
Commenter  J’apprécie          360
Rien ne garantit que la majorité a raison. L'Histoire fourmille d'exemples qui montrent le contraire. C'est pourquoi le respect et la prise en compte des voix minoritaires sont essentiels. Mais la soumission plus ou moins forcée ou plus ou moins volontaire de chacun à la tendance majoritaire rend inaudibles ces voix minoritaires ; elle fait de la société japonaise une société figée, immobile, incapable de rectifier ses orientations de façon souple et réfléchie. Seule une « catastrophe » inimaginable peut l'obliger à se remettre en cause, à chercher d'autres voies, à évoluer d'une manière différente. Cela a été le cas en 1945 avec le désastre de la guerre que résument, d'une manière à la fois cruelle et éloquente, les deux bombes atomiques.

2620 – [Folio n° 5821, p. 73]
Commenter  J’apprécie          180
L’État tel que les Japonais l'appréhendent et le vivent ne ressemblent d'aucune manière à celui du « Contrat social », ni à celui de la Déclaration (de 1789) en tant que résultat d'un acte d'« association politique » pour la conservation des droits naturels et imprescriptibles de l'« homme ». Leur Etat, c'est CELUI qui s'impose, en deçà et au-delà de la volonté de chacun, comme une sorte de données millénaires ethnico-géographiques qu'on ne saurait mettre en doute sous peine d'exclusion ou même de mise à mort comme en témoigne le sort réservé aux résistants, libéraux ou communistes des années sombres et fanatiques de l’avant-guerre. C'est CELUI qui fait sentir aux Japonais qui reviennent de l'étranger une douce chaleur et une force enveloppante propres à la communauté familiale à travers ce petit énoncé magique qu'est « Okaerinasaï ».

2420 - [Folio n° 5821, p. 66]
Commenter  J’apprécie          120
Errer, c'est, selon le Trésor de la langue française,《aller d'un côté et de l'autre sans but ni direction précise》. J'ai envie de modifier légèrement cette définition. Errer, c'est plutôt《aller seul, de préférence à pied, d'un côté et de l'autre sans but ni direction précise》. Errer implique en effet l'idée de solitude. C'est pour être seul qu'on décide de s'en aller, de marcher vers on ne sait où. Mais aucun marcheur ne saurait écarter ou supprimer pour toujours et de façon définitive l'idée d'un but à atteindre ou celle d'une direction à prendre.
Commenter  J’apprécie          150

Videos de Akira Mizubayashi (25) Voir plusAjouter une vidéo
Vidéo de Akira Mizubayashi
Payot - Marque Page - Akira Mizubayashi - Suite inoubliable
autres livres classés : japonVoir plus
Les plus populaires : Littérature étrangère Voir plus


Lecteurs (237) Voir plus



Quiz Voir plus

Retrouvez le bon adjectif dans le titre - (5 - essais )

Roland Barthes : "Fragments d'un discours **** "

amoureux
positiviste
philosophique

20 questions
849 lecteurs ont répondu
Thèmes : essai , essai de société , essai philosophique , essai documentCréer un quiz sur ce livre

{* *} .._..