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EAN : 9782021088960
208 pages
Seuil (03/10/2016)
3.63/5   26 notes
Résumé :
Algérie, années 80. Une jeune femme court éperdument à travers la rocaille, son bébé dans les bras. Seule, sans protection, ses chances de survie sont minces, quand la population mâle à l’unisson se déchaîne contre « la pécheresse ». Il n’y a pas longtemps, elle vivait paisiblement avec Papa Hassan et Maman Asma. Tout cela est si loin. Chassée du village et de la tribu, Zoubida aura beau déployer une énergie surhumaine pour défendre sa vie et celle de son enfant, el... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (13) Voir plus Ajouter une critique
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Découverte imprévue et réussie lors de mes pérégrinations dans ma médiathèque de cet écrivain guinéen, Tierno Monénemno…

Au centre du récit, une jeune femme,Zoubida, avec un père taiseux mais aimant… se renfermant et faisant mettre le voile à sa fille adorée, dès qu'elle aborde l'adolescence…

« Je l'ai toujours vu ainsi, en chasseur de dragons. Il était le guerrier effarouché qui prenait les autres, tous les autres, pour les ennemis à abattre. Mais je ne voulais pas un guerrier. J'avais besoin d'un père. Quelqu'un qui parle, quelqu'un qui rit, quelqu'un qui aime. Il nous aimait, nous n'en doutions pas, mais à sa manière, c'est-à-dire de loin, dans le réduit du silence. Ses mots étaient aussi rares et ses gestes aussi sobres que ceux d'un étranger de passage. » (p. 139)

Zoubida , dans un pays où les femmes n'ont aucun droit de cité, soumises aux diktats masculins, va subir de plein fouet toutes ces maltraitances…La catastrophe survient , puisqu'elle a osé avoir un bébé hors mariage, avec en plus un européen, un breton, fils d'un colonel, Loïc, qui , même si il éprouve des sentiments à son égard, ne veut surtout pas d'attaches, et encore moins d'une « paternité »… ayant été traumatisé par un père despote et violent !

Zoubida veut garder son enfant… elle devra donc supporter de lourdes épreuves dont la prostitution, et les viols quasi légaux de Mounir, son proxénète « et « protecteur »…
Zoubida, fort courageuse , décide de fuir pour échapper aux violences des hommes, décidés à la punir et à la soumettre..!

« -Explique-moi !
-Que veux-tu savoir ?
-Où suis-je ? Une prison, un lupanar, un harem ?
-Tout cela à la fois !
-Et pourquoi ?
-Pour nous apprendre à vivre !
- On ne peut rien apprendre enfermé dans une cage.
-Ne me parle pas de liberté ! Les chaînes seront toujours là. Longues ou courtes, visibles ou invisibles.
-Je m'évaderai
-Ils te rattraperont. Impossible d'éviter celles que l'oeil ne peut pas voir.
-Je les briserai toutes, même celles que mon oeil ne peut pas voir.
-Avec tes songes ? »(p. 43)

Elle ne baisse pas les bras, se refuse à se soumettre à son destin de « femme souillée », rejetée… elle tuera son « tortionnaire », se retrouvera en prison, ne réalisant pas qu'elle a été condamnée à la perpétuité… Mais enfin, sur son chemin, une lumière magnifique se présentera à travers Arsane, un visiteur de prison et ses Livres ! Je ne dirai pas un mot de plus !!!

La prison sera curieusement… grâce aux livres un début de « libération » et d'ouverture des horizons pour Zoubida…

« Lis-les comme ils arrivent. N'obéis qu'à ton appétit ! Ne t'occupe point de ranger. Surtout pas de rayonnages dans ta jolie petite tête ! Laisse ça aux ébénistes et aux érudits ! Dis-toi que la littérature est un extraordinaire festin, un délicieux fourre-tout. Goûte à tous les plats, pêle-mêle selon tes goûts, selon tes envies ! Lis tout... Voltaire, Flaubert, Camus, Le Clézio, mais il n'y a pas que les Français... Pouchkine, Gogol, Soljenytsine, mais il n'y a pas que les Russes... Faulkner, Caldwell, Salinger, Roth, mais il n'y a pas que les Américains... Sassine, Achebe, Hampâte Bâ, Kourouma, Lanou Tansi mais il n'y a pas que les Africains, Maalouf, Darwich, Abû Nuwâs, mais il n'y a pas que les Arabes... Plus tu varieras les lectures, plus cette pièce s'élargira, plus ton esprit s'illuminera. Alors, tu n'habiteras plus une prison mais un ciel plein d'étoiles... »

Un style très fluide, léger, poétique que celui de cet écrivain guinéen pour raconter le sort peu enviable réservé aux femmes… les violences, humiliations courantes, qui leur sont faites … Toutefois, Zoubidane est un personnage solaire, qui adore la vie…se bat envers et contre tout… se refuse à être enfermée dans une sorte de fatalité !

Après cette première lecture appréciée, je vais poursuivre la connaissance de cet auteur, avec la lecture du « Terroriste noir » !
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Elle court Zoubida . Elle court parce qu'elle fuit. Elle court dans le désert, son bébé dans les bras. Elle fuit son village, sa famille, la honte , la lapidation, la vindicte populaire . Elle fuit son passé et court sans penser à son avenir, juste à sauver sa peau.
Elle ne sait pas qu'en fuyant tout cela, elle va rencontrer les hommes et leur bite avide de son cul. Ce n'est qu'une femme , objet des hommes dans l'Algérie de 1980. Ce n'est même pas une femme . Tout juste une salope, une pute. Elle va finir au bled chez Karla, après souffrances et beaucoup de courage Mais pour quel avenir ?

Quel beau roman ! A la structure un peu décousu, sans que cela soit gênant, mais avec une humanité profonde dans cette Algérie des années 80.
Algérie, ce carrefour des peuples , arabes, turcs, français, sub saharien.. (il n'y avait pas encore de chinois :) !)
L'auteur , à travers Zoubida, nous offre une belle tranche d'humanité , dans le combat pour survivre, le courage de son héroïne.
Ce livre est tout en contraste. Les hommes ne pensent qu'à baiser Zoubida.
En toute impunité, puisqu'avant d'être une femme, c'est au mieux une salope et au pire une pute .
Les femmes sont soumises. Pas Zoubida . Elle veut vivre pour l'amour de son fils .Elle est prête à tout.
Ce livre est un carrefour du monde. On y croise Alfred le bantou, Salma la beurette qui déboule de Bourgoin, Arsanne le Kabyle, Loïc le breton. Tous ont leur culture , leur croyance, leur espoir , leur criante. Tous cohabitent, malgré les guerres, les différences, les incompatibilités. Cela donne un roman dense, plein de belles histoires et de conception de la vie.
C'est un roman que l'on lit trop vite. On n'a presque pas le temps de s'imprégner de la lumière du désert, de la beauté des oasis. On aimerait poursuivre avec Zoubida, côtoyer un peu plus Alfred, égorger Mounir et laver l'affront des parents de Zoubida.
Je finirai par une citation de ce livre :
"Plus tu varieras tes lectures, plus cette pièce s'élargira,plus ton esprit s'illuminera. Alors, tu n'habiteras plus une prison mais un ciel plein d'étoiles... Tes avocats n'y pourront rien, seules tes lectures te sauveront."
Belle, très belle lecture.
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Un petit moment de lecture agréable! Un portrait de femme émouvant dans une Algérie des années 80 où la vie de la femme n'est qu'une ligne tracée par tout homme qui croise sa route. Quel parcours que la vie de notre héroïne Soubida! Rejetée, humiliée, elle fuit son village avec son bébé au bras, qu'elle a eu avec un Européen hors mariage, ce qui est un crime, aussi pour ses parents que pour sa tribu, et pourquoi pas pour tout le village. Ca n'en finit pourtant pas , cette humiliation! Pendant toute sa fuite, elle se présentera comme une proie facile, comme une victime toute accommodée pour des bourreaux....
Ce livre décrit certaines réalités vraiment choquantes, telle la pratique de l'esclavage, surtout pour des femmes déjà affaiblies par les vicissitudes de la vie, ou par certaines contrainte des traditions ou de la religion. Bien que le livre nous relate des atrocités, l'écriture est plaisante, légère, vivante, si bien que ça se lit d'une seule traite!
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Elle court avec un bébé dans les bras. Elle court parce qu'elle a fauté...mais elle ne va pas courir longtemps, car Mounir, le proxénète va lui trouver une occupation après l'avoir enfermée dans une chambre sordide. Elle, c'est Zoubida Mesbahi
Elle est là, avec d'autres filles dans une prison, un lupanar, un harem...tout ça à la fois, pour leur apprendre à vivre... les coups et le viols pour la mater! Et puis il y a ce bébé. La seule issue qui s'offre à elle c'est le crime...un crime qui l'entraîne dans une autre prison...dans laquelle tous les hommes ne sont pas des salauds. Pour une perpétuité dont on s'évade par l'esprit grâce aux livres apportés par Arsane, le visiteur de prison. Un visiteur qui prendra de plus en plus d'importance dans la vie de Zoubida.
Et puis, il y a ces souvenirs d'enfance...et ces autres personnages tous plus ou moins hors des clous, ces barbus de sinistre mémoire, Salma, la fille venant de Bourgoin-Jallieu, Alfred, Papa Hassan, Loïc qui a eu le pucelage de Zoubida il y a longtemps, Touria, pute depuis l'âge de 14 ans !
Ces narrations et personnages s'entrecroisent et alternent, donnant parfois une impression de décousu, mais permettant aussi de mieux connaître le passé familial de Zoubida, la vie dans ce bled peuplé d'ennui ...et d'habitants sans aucun intérêt.
Le roman alterne drame, violence, humour, personnages sordides ou lumineux...
Bref, un bon moment de lecture !
Lien : https://mesbelleslectures.co..
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Un auteur guinéen fait parler une jeune femme algérienne, née dans un bled de l'ex-colonie française, plombé par le silence, les injonctions, les traditions, le jugement des autres, dans un pays des années 1980 perdu entre les rêves communistes, une indépendance fratricide pleine de non-dits, et l'islamisme venu d'ailleurs. Zoubida raconte sa fuite avec son bébé et les hommes croisés : son père méconnu, celui avec lequel elle faute, ceux qui la traitent de salope et lui sautent dessus pour en profiter, l'ami camerounais à qui elle écrit, l'homme rencontré enfin.
Le roman a des airs de conte, dans une écriture "directe" qui se lit vite, ça donne un peu l'impression d'un survol mais c'est en même temps la voix d'une libération qui n'a rien d'anodin.
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Citations et extraits (20) Voir plus Ajouter une citation
Le thé, ici appelé attaya, comporte trois phases de dégustation, chacune précédée d'une très longue préparation. Pour la première, la dose de thé est très forte avec peu de sucre. L'infusion est servie fumante et très amère, difficile à avaler, supportable seulement par les habitués ; on l'appelle le thé de la mort. Lors de la deuxième phase, plus sucrée, la dose de thé est plus légère et on y ajoute de la menthe, ce qui donne une infusion très agréable à siroter. Aussi suave qu'une salive de premier baiser, le palais en est amoureux, c'est le thé de l'amour. Mais, hélas! ce plaisir est éphémère et suivi d'une sorte de réminiscence : le troisième et dernier service, une eau jaunâtre, très sucrée, qui ne porte plus en elle que le souvenir du thé ; c'est le thé de l'amitié.
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- On a du mal à croire que [le Sahara] fut fertile il y a des millénaires.
- Avec des fleuves, des chutes d'eau et des lacs! C'est ici le début du monde. C'est notre origine à tous. L'oeuf primordial, la crèche d'Adam et Ève. Le jardin d'Éden. Et comme nous l'avons déserté, le sable est apparu. Pourquoi sommes-nous partis?
- Le bon Dieu nous a donné des jambes!
- Oui, mais le voyage s'éternise. Nos pieds ne répondent plus, nos idées s'épuisent. Nous sommes cernés d'impasses. C'est ici qu'il faut revenir pour recommencer.
- Tu es différent de Loïc, tu espère encore. Le dépassement, toujours le dépassement!
- C'est cela qui nous distingue des plantes, des poules d'eau et des biques.
- Et si c'était Loïc qu avait raison?
- Ah non, pas mon abominable rival! On a le droit de faillir, certainement pas de renoncer. Il y a sûrement un objectif à atteindre, un rêve à réaliser.
- Faut-il encore des prophètes?
- Ce sont eux qui nous font avancer. Et pour moi, pas d'esprit de clocher, tous les prophètes se valent : Marx, Proudhon, Moïse et les autres.
- Ah, nous voilà revenus au temps des révélations!
- Pourquoi sommes-nous au Sahara? Rien de mieux que le désert pour révéler aux hommes et pour les révéler à eux. Tu sais ce que disait Nietzsche? «De tous temps, les hommes libres, les véridiques ont habité le désert.»
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Lis-les comme ils arrivent. N'obéis qu'à ton appétit ! Ne t'occupe point de ranger. Surtout pas de rayonnages dans ta jolie petite tête ! Laisse ça aux ébénistes et aux érudits ! Dis-toi que la littérature est un extraordinaire festin, un délicieux fourre-tout. Goûte à tous les plats, pêle-mêle selon tes goûts, selon tes envies ! Lis tout... Voltaire, Flaubert, Camus, Le Clézio, mais il n'y a pas que les Français... Pouchkine, Gogol, Soljenytsine, mais il n'y a pas que les Russes... Faulkner, Caldwell, Salinger, Roth, mais il n'y a pas que les Américains... Sassine, Achebe, Hampâte Bâ, Kourouma, Lanou Tansi mais il n'y a pas que les Africains, Maalouf, Darwich, Abû Nuwâs, mais il n'y a pas que les Arabes... Plus tu varieras les lectures, plus cette pièce s'élargira, plus ton esprit s'illuminera. Alors, tu n'habiteras plus une prison mais un ciel plein d'étoiles...
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- "Mais non, Zoubida. Ce sont des livres.
-Très bonne idée.
-Tu verras, le temps va très vite passer. Si tu les lis, cette chambre te paraîtra aussi vaste que le ciel, aussi odorante qu'un verger. L'univers est une chambre de prison, c'est le livre qui en détient la clé."
A la visite suivante, il m'apporta un dictionnaire et un recueil de poèmes :
"Un Turc. Lui aussi, il a fait beaucoup de prison. Il s'appelle Nâzim Hikmet. Tu sais ce qu'il disait, Nâzim ?
"On nous a eus.
"Nous sommes en prison,
"Moi dans les murs,
"Toi dehors.
"Mais qu'importe ce qui nous arrive.
"Ce qui est pire,
"C'est de porter en soi la prison."
Ici, on ne compte pas les années. Les jours passent sans vous adresser un petit coucou. Les nuits succèdent aux nuits. Néanmoins, les horloges du bon Dieu me paraissent moins lourdes, en compagnie de Nâzim Hikmet et de quelques autres têtes fêlées que je lis dans le désordre, qui m'aident à affronter les ténèbres et les loups. (p. 169)
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-Explique-moi !
-Que veux-tu savoir ?
-Où suis-je ? Une prison, un lupanar, un harem ?
-Tout cela à la fois !
-Et pourquoi ?
-Pour nous apprendre à vivre !
- On ne peut rien apprendre enfermé dans une cage.
-Ne me parle pas de liberté ! Les chaînes seront toujours là. Longues ou courtes, visibles ou invisibles.
-Je m'évaderai
-Ils te rattraperont. Impossible d'éviter celles que l'oeil ne peut pas voir.
-Je les briserai toutes, même celles que mon oeil ne peut pas voir.
-Avec tes songes ?(p. 43)
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Et si... vous me disiez toute la vérité | Entretien avec l'écrivain guinéen Tierno Monénembo
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