Guide pour se perdre en montagne

Ce guide pour se perdre est une série d'articles sur ce qu'il ne faut surtout pas prendre ou faire pour bien appréhender la montagne.
En effet, comme l'a dit Lao Tseu, le chemin le plus court c'est le détour.
Paolo Morelli aime la mauvaise foi, la critique acerbe, dure, acide, il tape là où cela fait mal, jette quelques épices dans la plaie et part en rigolant.
Son livre se lit d'une traite, ou par petites touches: comme on veut. On se retrouve, se reconnait forcément dans l'une ou l'autre des situations évoquées, des attitudes moquées.
Il faut donc avoir un peu de recul, ne pas prendre au sérieux la marche et la montagne pour apprécier pleinement ce livre. Ou peut être, au contraire, savoir que le véritable sérieux se moque de lui même et rit de ses défauts, car toute passion comporte des défauts !
Morelli descend aussi en flèche tous ces faux sérieux, ces écologistes citadins, les donneurs de leçon, les embrigadeurs, les penseurs en rond, les chasseurs, les lecteurs trop assidus de cartes, etc... Chacun et chacune peut en prendre pour son grande dans ce dictionnaire impertinent (c'est le moins que l'on puisse dire) de la montagne.
Religion, politique, pratique sportive à la mode, tout y passe pour notre plus grand plaisir, chaque page est ponctuée d'un éclat de rire.
C'est en tous cas l'effet que ce Guide a eu sur moi, une véritable petite pépite pour qui aime sortir des sentiers battus et des images d'Épinal.

Ceci n'est pas un guide.
La forme est celle d'un dictionnaire amoureux de la faune montagnarde, mais avec un a piori.
Le postulat est exposé à l'article expérience : "la seule occasion d'acquérir une vraie connaissance, la seule qui en vaille la peine, c'est de se perdre. Si on ne sait plus où on va ni d'où on vient, si avancer c'est se tromper à coup sûr, si on éprouve malgré tout le besoin d'aller de l'avant... c'est en réalité la seule expérience qui régénère."
Ce n'est ni l'épectase ni le satori et pourtant cette conception m'a, le temps de la lecture, retourné l'esprit comme une drogue (expérience rare qui m'a aussi rappelé la lecture de Notre-Dame-des-Fleurs de Jean Genet).
Partant de là, on voit facilement s'opposer le Maestro et le vagabond, et avec ce dernier on tourne un regard tendre sur la faune des montagnes. de l'ironie on glisse vers le paradoxe et finalement à l'absurde qui est une des formes de la poésie autant que de l'humour. Cette scrutation, certes anthropomorphique, des moeurs et motivations du règne animal, nous interroge sur celles des hommes et sur notre volonté.