L'écriture est belle, très belle. Les mots s'assemblent, coulent, dansent, empreints de lumière et de couleurs et donnent naissance à un livre merveilleux.
Je n'ai qu'une envie, le relire encore et encore.
Synopsis : Un ancien café "le dernier sou" est loué à un hollandais, Théo, nègre pour une maison d'édition. La petite fille de la propriétaire du lieu, Laure, âgée de 17 ans, vient faire le ménage. Ils font connaissance et Théo lui prête un livre, Galigaï de Mauriac. Plus tard, il lui apprendra l'écriture, elle est douée pour cela ! Voilà c'est le début, pour la suite, je vous encourage vivement à lire ce beau roman.
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Ce livre raconte deux histoires : l'histoire de Laure et l'histoire de Lou, mais c'est avant tout l'histoire de Laure et Lou car les deux sont indissociables.
A mesure des mots enfilés comme des perles, plantés dans le sol de la Grande Thiérache et affranchis de la pesanteur, on découvre deux chemins, un aller et un retour, ni parallèles ni opposés et pourtant indiscutablement liés, se nourrissant l'un de l'autre. L'auteur a su utiliser des mots simples, comme une vie peut être simple autant qu'elle est compliquée, un vêtement léger qui ne voile pas les pensées de ses héroïnes mais nous les offre sans artifice. Car si ces deux femmes sont différentes, la pudeur des mots qui nous les livre est un peu la même, évitant tout voyeurisme sans masquer leurs âmes.
Ce roman m'a séduite car malgré la rapidité avec laquelle on entre dans ces vies et l'on en sort, on glisse aussi bien dans la peau de Lou ou de Laure. C'est toujours cette simplicité qui se fait efficacité, cette simplicité qui ne rime pas avec facilité mais avec justesse, qui porte le récit. J'aurais apprécié de suivre un peu plus longtemps, sur un peu plus de pages ces destins, mais après tout, y avait-il autre chose à dire ?
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J'ai montré à Théo ce que j'écris. Il a dit :
- C'est bon petite, c'est bon ! Tu es douée pour ça. Continue, ajoute des adjectifs, beaucoup d'adjectifs, des synonymes aussi. Bouleverse l'ordre de tes paragraphes, coupe, découpe, copie, recopie, corrige, recommence. Bouleverse le temps et les temps. Le passé est par excellence, c'est vrai, le temps du récit mais quand on écrit, il est des moments où le souvenir de ce que l'on raconte, de ce que l'on "se" raconte, est si banal, si commun, si routinier, si quotidien ou au contraire si vif, si intense qu'il justifie pleinement l'emploi du présent. Il ne faut pas décrire mais évoquer, laisse au lecteur qui n'est pas plus bête que toi, le soin d'imaginer les choses à son idée.
Pour garder tout cela - c'est du moins l'argument que j'ai utilisé pour convaincre Mamie qui prétendait qu'il n'y avait rien ici que l'on puisse voler - nous avons Persépolis. Persépolis est un chien abandonné que j'ai recueilli et que j'ai réussi à imposer à force d'obstination. Je l'ai appelé Persépolis parce que, Persépolis, c'est en quelque sorte l'anagramme de Perd Ses Poils et que perdre ses poils c'est précisément ce qu'il fait le bougre.
Retranchée dans la haie, camouflée de verdure, immobile et retenant mon souffle, j'observe l'activité fébrile dont font preuve les abeilles. Ici, comme à Schipol, sur la planche de vol, les butineuses pressées atterrissent et décollent. Au sol, les ouvrières, plus jeunes, humble personnel non encore navigant et chargé des tâches ingrates, les libèrent de leur charge qu'elles s'en vont aussitôt ranger dans les rayons.
J'ai laissé les abeilles à leurs occupations et j'ai repris ma route.
D'où me vient ce besoin que j'ai soudain d'écrire ? Cette manie nouvelle de me bourrer de sottises comme d'autres se bourrent de chocolat. Cette faim qui est en moi, qui me dévore et qui n'est pas Crandelain pour deux sous ? Cette urgence qu'à l'instar de mes cheveux roux et de mes yeux verts, on n'y sait retrouver ailleurs ? De ce soldat qui, à n'être pas couché sous l'Arc de Triomphe, ne m'en est pas moins inconnu ? Des livres que maintenant je lis ? Ou n'est-ce pas plutôt d'un exemple qui serait contagieux et me toucherait de près ?
Venant de tout autre que de Théo, le terme "petite" usé à mon encontre m'aurait rapetissée. Venant de Mamie et en la circonstance, il me chargeait d'opprobre et me faisait voir rouge. De vierge que j'étais au sens littéral du terme, je me sentais devenir astrologiquement taureau, mais il me fallait me dominer et rester calme encore.