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3,88

sur 3266 notes
Arrrrrrgggggggghhhhhhhhh !!!
Ceci est le cri proche de l'agonie d'une lectrice (moi) qui pensa ne jamais se désembourber de la troisième épreuve de son triathlon littéraire murakakamien.

Grrrrrrrrrrrrrrr!
Ceci est le cri de colère de la même lectrice (moi toujours) , qui après avoir été appâtée au thon à sushi lors du premier volume, a persisté avec le second tome alors que les trop nombreuses arêtes signalaient une très nette baisse de qualité.
Cela sentait déjà la godiche, il y avait des airs de Bridget Jones, et l'on s'attendait à ce que des écureuils tristes en début de semaine (les lundis par exemple) dansent avec des tortues (une valse) dès la première nuit ou bien le premier jour (je me mets en mode clonage avec Murakami qui ne cesse d'égayer son absence d'intrigue par de jolies citations d'auteurs connus et/ou reconnus).

La référence à l'illustre Wittgenstein n'offre aucune caution à ce 1Q84 T3, proche de la pire indigence. Pas plus que Proust.
Maître de la redite dès le second tome, Murakami est élevé au grade de Grand Chevalier du délayage creux dans ce troisième volume.
Trois personnages ne cessent de conjecturer. Aomamé (qui devient aussi intéressante qu'un bol de haricots de soja), Tengo (plus plat qu'une limande-sole), Ushikawa (aussi méchant dedans que vilain dehors, utile pour le rabâchage pédagogique ).

La conjecture à foison des uns et des autres permet à l'écrivain nippon de redire une bonne trentaine de fois ce qu'il avait déjà été écrit plus de vingt fois précédemment. L'avantage est que son lecteur est certain de ne pas s'égarer, de ne commettre ni faux sens, ni contre-sens.
Et comme l'intrigue est aussi vide que le réfrigérateur d'une anorexique (une tranche de jambon cuit, un yaourt allégé ici. Un bâtonnet de cèleri, une soupe au miso là-bas), il est possible de déposer ses neurones pour un dépoussiérage le temps de la lecture.

En revanche, l'achever (la lecture) constitue un très louable effort de volonté dont je ne suis pas peu fière. On se réconforte comme on peut.
Sans parler de la qualité littéraire globale de ces …. (bouh ouh ouh) quelques 1500 pages au total. (Petit aparté: en 1500 pages, le Don Paisible offre un incroyable moment de lecture).

Ainsi, pour illustrer mon propos, il aurait été dommage de se priver de cette remarquable péripétie:
"Elle n'avait pas envie d'uriner. Elle sortit du réfrigérateur une bouteille d'eau minérale, en but deux verres. Mais l'envie n'était toujours pas là. Après tout, elle n'était pas pressée. Elle mit de côté les tests de grossesse, s'installa sur le canapé et se concentra sur sa lecture de Proust. L'envie d'uriner se manifesta trois heures plus tard. Ce qu'elle fit dans un récipient adéquat".

J'ai admiré la futée Aomamé. Faire pipi dans un dé à coudre n'aurait pas été judicieux. Ni dans un entonnoir. Effectivement, un récipient adéquat s'imposait. A mon tour, je me suis lancée dans quelques hypothèses distractives : avait-elle utilisé une tasse à thé? Une petite casserole? Un pot de confiture vidé au préalable? On se désennuie avec les moyens du bord.
Dans la foulée, j'ai salué le talent de l'écrivain quant à l'hasardeux mariage de l'évènement urinaire avec la recherche proustienne du temps perdu.

Deux cents pages plus loin, aucune amélioration n'était à espérer.
"elle se massait le visage à l'aide de crème et de lotion et, avant de se coucher, elle s'appliquait un masque. Comme, de nature, elle jouissait d'une bonne santé, très peu de soins suffisaient pour qu'immédiatement sa peau soit lisse et éclatante".
Passionnant, non? Et avec 1Q84, vous prendrez bien un abonnement à Elle?

Dans la multitude de non-évènements, de bavardages et ratiocinations divers, on s'achemine sûrement vers un mélo sirupeux. La fin ne déçoit pas. On reste les doigts tout poisseux (mais les neurones frais).

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« Cette maison a été appelée la ''Tour'', Jung s'était inspiré des huttes primitives qu'il avait vues au cours d'un voyage en Afrique. Il l'a voulue d'un seul espace, sans aucune cloison. Un lieu de vie très austère. Jung estimait en effet qu'on n'avait pas besoin de plus. Pas d'électricité, de gaz ou d'eau courante. Il s'approvisionnait en eau depuis la montagne voisine. Beaucoup plus tard, il a compris que cet espace constituait une sorte d'archétype. Au fil des années, quand il en ressentit le besoin, il a cloisonné la Tour, il l'a divisée. Puis Jung y a ajouté un étage, et encore plus tard, plusieurs annexes. Sur les murs, il a peint des fresques, qui étaient la représentation de la division et du développement de la conscience individuelle. En somme, ce bâtiment a fait fonction de mandala à trois dimensions. Il a fallu douze années avant que la Tour soit achevée. Cet édifice est d'un intérêt considérable aux yeux des spécialistes de Jung. Saviez-vous tout cela ? »

P522. La résidence se dresse toujours en bordure du lac de Zurich, à Bollingen, d'après ce que j'ai entendu dire, il semble qu'à l'entrée de la Tour se dresse toujours une pierre, sur laquelle Jung a gravé de ses mains une inscription : '' Qu'il fasse froid ou non, Dieu est ici ''.

Bienvenue dans le monde paradoxal de la vie, la réalité, le rêve... la mort. Vous l'aurez compris, c'est largement inspiré du sieur Carl Gustav Jung, et majestueusement illustré par Haruki Murakami. Où commence le rêve ou se termine la vie, les protagonistes ici ont chacun un avis, le rêve réel, sorte de transmigration, de réincarnation, de métempsycose, le monde derrière un torii, frontière entre l'enceinte sacrée et le monde profane d'ici.

Point de valise, pour gravir ton échelle
Revenir à la surface d'un monde réel
Déjouer les mensonges et autres paradoxes
Une paire de bottillons et un sac à dos.

4h du mat, en direct, des chemins de Compostelle,
La chouette, sagesse de ma nuit, hulule-t'elle ?
Je tente de démêler cet enchevêtrement, cet embrouillamini
Qui a comblé mes pas sous la pluie, mais me gâche un peu la nuit.
J'ai demandé à la lune.... Sur mon chemin de l'infortune
Cueillir en rêvant une rose des vents... Sur un rayon Deux Lunes.


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Ça y est, je suis arrivée au bout du troisième tome tant attendu et je ressens comme un grand vide car je me dis que l'auteur ne peut pas laisser ses lecteurs comme cela. Certes, la fin est on ne plus ouverte et laisse le lecteur vagabonder dans toutes les directions possibles mais justement, il y a encore trop de choses à dire à découvrir...

Dans ce troisième volet, le lecteur voit apparaître un troisième personnage principal, Ushikawa, qui engagé à la solde des Précurseurs, est chargé de retrouver Aomamé, la meurtrière du leader. L'intrusion de ce nouveau personnage dans ce troisième ouvrage est une excellente idée, de mon point de vue, de la part de l'auteur, puisqu'il permet au lecteur de vivre à la fois les évènements de manière intrinsèque, au travers de Tengo et d'Aomamé mais aussi de prendre du recul et d'envisager celles-ci sous un autre angle de vue.
Ushikawa est une sorte de détective privé, très intelligent et qui remonte facilement les étapes. Cela permet au lecteur de se remémorer ce qu'il s'est passé dans les deux premiers tomes mais aussi d'en apprendre plus sur les deux protagonistes, choses qu'ils ignorent parfois eux-mêmes.

Roman qui s'ouvre sur une multitudes de dénouements possibles : Tengo et Aomamé sont-ils revenus en 1984 ou sont-ils dans un nouveau monde, qui ne serait donc ni celui de l'année 1984 ni celui de 1Q84 ? La petite chose qui grandit dans le ventre d'Aomamé va-t-elle réellement joué le rôle de DAUGHTER ? La secte pourra-t-elle continuer à survivre et l'un de ses membres pourra-t-il à nouveau entre "Les Voix" ?
Autant de questions qui restent sans réponse (un tome 4 aurait-il été envisagé ? ).

En tous cas, une pure merveille, l'écriture est toujours aussi fluide et limpide et l'intrigue toujours aussi envoûtante. Je me suis complètement laissée séduire par ces trois volets à tels point que j'en redemande. A découvrir !
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Eh bien me voilà quitte des 2 lunes, des Little People, d'Aomamé et de sa « petite chose », de Tengo et de son père ( ?), et d'Ushikawa, le détective à grosse tête chargé de retrouver Aomamé.

Me voilà quitte, oui, et bien contente d'en avoir fini. Ce troisième volume m'a semblé pesant dans tous les sens du terme. Que d'atermoiements, que de circonvolutions, que de détours (et je viens de me rendre compte que j'adoptais ici un style répétitif en calquant mon esprit sur la pensée de Murakami...) pour expliquer la traque obstinée d'Ushikawa, les longs jours de contemplation et de réflexion que Tengo passe avec son père dans le coma, et l'attente monotone d'Aomamé, entrecoupée par des coups fiévreux à la porte de l'appartement où elle se cache.

Car il s'agit d'attente, ici, essentiellement. Puis vers les ¾ du roman, cela s'emballe quelque peu : la mort fait son apparition, et l'amour va bientôt se resserrer autour de Tengo et Aomamé.

Mais bon... J'ai été patiente. Il faut dire que le style de Murakami me plait, et c'est cela qui m'a aidée à tenir. Et puis ses réflexions, aussi...Ses nombreuses comparaisons font mouche à tous les coups, notamment lorsqu'il parle de la mort, par exemple : « La mort d'un homme, dans n'importe quelle circonstance, c'est terrible. Un trou s'ouvre dans le monde. Et nous, nous devons saluer cette disparition avec respect. Sinon le trou ne pourra jamais être comblé. Il ne faut pas laisser le trou ouvert, quelqu'un pourrait tomber dedans. »

Je termine en reprenant une phrase d'Aomamé à propos de sa lecture de Proust, qui pourrait exactement s'appliquer à mon impression vis-à-vis de ce 3e tome :
« L'écriture est subtile, magnifique, et à ma manière, je peux comprendre la structure de cet astéroïde solitaire. Simplement je n'avance pas beaucoup.
Comme si j'étais sur un bateau, et que je ramais vers l'amont de la rivière. Je manie les rames tant et plus, puis, dès que je pense à quelque chose et que je me repose un peu...ah, je m'aperçois que le bateau est revenu à son point de départ.
Je crois que maintenant c'est ainsi que je dois lire. Plutôt que d'avancer pour suivre l'intrigue.
De la sorte, cela me donne la sensation que le temps oscille de manière irrégulière. Ce qui se situe avant peut bien être après, et l'après avant, cela n'a pas d'importance. »
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Si vous aimez la douceur, la lenteur d'une écriture qui prend son temps pour vous emmener où elle le désire, une écriture qui saupoudre, au passage, un soupçon de fantaisie fantastique, qui joue avec les différents temps du récit, 1Q84 est un livre fait pour vous.
En ce qui me concerne, à partir du moment où mes yeux ont commencé à cheminer sur les premières lignes de ce bouquin, je n'ai eu de cesse de vouloir aller plus loin, de savoir…
Je vous avouerai tout de même, que parfois, dans ce livre 3, j'ai trouvé que Murakami tirait un peu trop sur l'élastique de son récit, prenant le risque de lasser son lecteur. Il me fait rêver lorsque les détails de son écriture me permettent de distinguer une tonalité particulière, une couleur atypique, il m'ennuie lorsqu'il m'informe à chaque fois que son nouveau personnage, Ushikawa, va aux toilettes.

Il n'empêche que j'ai beaucoup aimé cette trilogie !

Avant de cliquer sur le petit bouton « OK », je voulais partager avec vous cette dernière citation :

« - Bon. Si vous le voyez vraiment, que ferez-vous sur ce toboggan ?
- Nous regarderons la lune. »

http://www.dailymotion.com/video/xvv4yi_jorane-j-ai-demande-a-la-lune_music#.UOspF7bylbt

(merci Milado, pour m'avoir aidée à trouver ce que je cherchais mal !)

Enfin, je vous souhaite à tous 明けましておめでとう ( se prononçant : Akemashite omedetô).
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Dernière partie de cette volumineuse histoire, et de loin ma préférée.

Murakami a l'excellente idée de rompre la marche à deux temps qui oscillait entre Aomamé et Tengo pour introduire un troisième point de vue, celui d'Ushikawa, l'homme à la tête de crapaud, rencontré lors de la première partie. Mais pour être tout à fait complète, je devrais aussi parler de cet homme qui vient frapper aux portes des appartements, de ce receveur mystérieux qui réclame ce qu'il prétend être son dû, avec sa voix insistante et pénétrante jusqu'à lire dans vos pensées les plus intimes.

Grâce à cela, la narration est beaucoup plus rythmée et plus entrainante que dans le deuxième volet, et je me suis prise de sympathie pour l'affreux bonhomme, l'avorton Ushikawa (j'adore les écrivains qui parviennent nous rendre sympathiques les loosers, les outcasted et les médiocres). Les trois voix se succèdent, et chacun des protagonistes vit les événements avec sa propre perception du temps qui se distord, s'étire ou s'accélère selon le point de vue.

Cette troisième partie prend très franchement des allures de roman policier et nous emporte avec suspens dans cette course poursuite, dans la Tokyo hypnotique, surpeuplée et embouteillée. Tengo règle ses comptes avec son père mourant dans la ville des chats, Aomamé reste confinée, géographiquement coincée entre l'amour et la mort, et s'évade grâce à des rêves symboliques, et Ushikawa tente coûte que coûte de sauver sa vilaine peau de tortue.

L'histoire d'Aomamé et de Tengo se termine donc ici, mais il reste encore plein de points d'interrogation dans mon petit cerveau surexcité: qu'est-il advenu du survivant de l'assaut de la partie politique de la secte ? qui est ce corbeau qui semble espionner les allées et venues de Fukaéri ? la mère de Tengo a-t-elle été assassinée et, si oui, pourquoi et par qui ? qu'allaient proposer les représentants des Précurseurs à Aomamé ? Quel rôle joue la sinfonietta de Janacek dans toute cette histoire? Sans oublier l'éventuelle analogie avec le roman d'Orwell, 1984, qu'il me reste à découvrir … Bref, de quoi nourrir mes prochaines insomnies, en contemplant la lune.
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Je voulais finir cette trilogie. Passer à autre chose, il m'a fallu 3 jours pour arriver à bout.
Ce fut long et périlleux.
La fin était évidente et c'est peut-être pour cela que j'ai moins apprécié ce roman.

Enfin, une chose est sûre je peux continuer ma découverte de la littérature japonaise.
Je lirais bien sûr d'autres livres de Haruki Murakami, il y en a tant d'autres à découvrir.

Une trilogie que je vous conseille de lire, surtout si vous aimez la science-fiction (ce n'est pas trop ma tasse de thé), les univers parallèles et les longues descriptions des environnements des personnages.

Bonne lecture !
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Un peu déçu par les deux premiers tomes que je trouvais survendu par rapport à mes précédentes lectures de Murakami (Kafka sur le rivage et La ballade de l'impossible ) j'ai mis du temps avant de m'attaquer à ce livre 3. Ce temps me semble salutaire puisque j'ai pu mieux apprécier ce dernier opus et comprendre justement l'importance accordée au temps dans cette trilogie.

Ce livre est particulièrement celui de l'attente que ce soit pour les 3 narrateurs mais aussi pour le lecteur. Un peu comme depuis le début de la trilogie, Murakami plonge son lecteur dans une attente et une espérance de ce qui va survenir. J'ai enfin compris le sens de ces lancinantes répétitions des faits survenus auparavant dans l'histoire. Outre l'intérêt de faciliter le suivi pour une trilogie quand même bien longue, ces redites contribuent au rythme très (trop) lent du récit. le message qui me semble transparaître du roman est que l'attente contient en elle-même un certain plaisir, notamment dans les relations sentimentales , comme le confirme la célèbre phrase de Clemenceau " le meilleur moment dans l'amour, c'est quand on monte l'escalier". Les sentiments d'Aomame et Tengo sont d'autant plus forts quand ils ne parviennent pas tout de suite à se retrouver.

Malgré tout, pour le lecteur, la lassitude le gagne parfois, et la récompense attendue ne peut évidemment être aussi forte que pour les protagonistes fictifs. On enrage ainsi également un peu de ne pas connaître assez de détails sur ces Little People et leurs modes de fonctionnement. Mais c'est vouloir faire de Murakami un auteur de science-fiction qui pourrait nous décrire précisément ce monde parallèle alors qu'il me semble plus judicieux de le rapprocher d'un Garcia Marquez et de son réalisme magique. On sent que la frontière entre réel et magique est ténue et il ne faut pas chercher à tout comprendre.

L'intérêt reside également dans la construction à 3 narrateurs, où la chronologie s'entremêle et où le lecteur s'inquiète parce qu'il ne sait plus où ni quand il se trouve. L'introduction d'Ushikawa comme narrateur dans ce troisième livre renforce l'intérêt de l'exercice puisqu'il s'oppose aux deux autres tout en leur ressemblant totalement par sa personnalité en marge de la société. Les liens de plus en plus clair entre l'enfance des personnages et la construction mentale à laquelle leur histoire aura aboutie sont également très interessants à observer.

Il reste un goût de déception et une hypothèse: que la forme trop longue de la trilogie ne soit pas propice au maintien de l'atmosphère poétique que Murakami avait mieux réussi pour moi à installer dans mes précédentes lectures.
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Aomamé n'a pas appuyé sur la gâchette. L'espoir de retrouver Tengo a été plus fort que le désir d'en finir définitivement avec le monde de 1Q84. Elle est retournée dans l'appartement où elle se terre depuis qu'elle a tué le Leader des Précurseurs et, tous les soirs, elle s'assoit sur le balcon pour guetter le toboggan où elle avait aperçu l'homme qu'elle aime. L'attente est longue mais la jeune femme n'est plus seule. Dans son ventre croît une Petite Chose, fruit de la rencontre de deux coeurs lors d'une nuit d'orage.
Mais Tengo, qui ne pense lui aussi qu'à retrouver Aomamé, a quitté Tokyo. Il est reparti pour la Ville des chats où son père attend la mort, plongé dans un profond coma. C'est là que la jeune femme lui est apparue, recroquevillée dans une chrysalide de l'air. Depuis, sous prétexte de veiller le mourant, il passe ses journées à l'hôpital en espérant la revoir.
Mais ces retrouvailles tant attendues sont compromises. Les Précurseurs ont lancé l'inquiétant Ushikawa aux trousses d'Aomamé. Petit et difforme, l'homme ne paie de mine mais il est intelligent et malin. A force de fouiner, de fouiller, de réfléchir, il est le seul à avoir fait le lien entre le professeur de mathématiques écrivain et l'instructrice sportive. Sûr de lui, il sait qu'en surveillant Tengo sans relâche, il finira par mettre la main sur Aomamé pour la livrer à ses commanditaires.

Tengo et Aomamé pourront-ils joindre leurs mains et les serrer très fort comme ils l'ont fait, il y a vingt ans de cela, dans une salle de classe de l'école primaire d'Ichikawa ? Telle est la question posée dès le livre 1 de 1Q84 et qui trouvera une réponse à la toute fin de ce livre 3.
Cependant, Murakami n'est pas homme à livrer rapidement tous ses secrets. Avant de réunir, ou pas, ces deux coeurs solitaires, il nous promène encore dans ce monde étrange où deux lunes illuminent le ciel nocturne. A la voix de Tengo et Aomamé, il ajoute celle d'Ushikawa, un individu peu recommandable qui pourtant est le plus à même de comprendre ceux qu'il piste, partageant avec eux les blessures des êtres qui ont vécu sans amour. En cette année 1Q84, ces trois-là se rapprochent, s'éloignent, se frôlent, se cherchent jusqu'à un dénouement forcément ouvert. On ne saura rien de la Petite Chose qui grandit dans le ventre d'Aomamé, de son rôle éventuel dans la secte des Précurseurs. de ceux-ci on ne saura rien non plus. Les Voix se feront-elles entendre à eux à nouveau ?
Et surtout, on ne saura pas s'il existe un chemin qui mène de 1Q84 à 1984 ou s'il y a un troisième monde, différent tout en étant si semblable. Mais c'est là toute la magie de cette fin qui n'en est pas une ! le retour au monde sans mystère de 1984 est possible, au même titre qu'une troisième voie, un monde sans soucis, sans épreuves, un monde où peut-être Aomamé retrouverait son amie policière toujours vibrante de vie et d'amour...
Le talent d'Haruki Murakami est au-delà des mots. Il sait comme personne nous tenir par la main pour nous montrer son univers étrange, et puis, il nous lâche, avec dans le coeur et dans la tête, des personnages, des images, des sentiments qui y resteront longtemps...
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On entre dans 1Q84 comme dans un jeu. Un jeu qui serait assez proche des jeux «d'escape the room» que l'on trouve sur internet et dont le but est de trouver la clé qui va permettre de sortir d'une pièce.
On doit tout d'abord se familiariser avec le lieu, collecter différents objets, les combiner entre eux, traquer les détails pour obtenir des indices, résoudre des énigmes, dégoter des codes, piétiner énormément jusqu'au découragement et au passage collecter un maximum de pierres précieuses. Et des pierres précieuses il y en a beaucoup dans ce roman en trois tomes :
«les petits oiseaux ne cessaient de changer de position comme des notes de musique qui bougeaient sur une portée»
Si je peux faire un autre parallèle, je dirais que la voie express N°3 de Tokyo, lieu du basculement de l'histoire, joue la même fonction que l'avenue «Muholland Drive» de David Lynch. Dans le film de Lynch, un virage à droite ou à gauche sur Muholland Drive fait chavirer l'héroïne vers le réel ou le fictif. Dans le livre de Murakami, le tigre de la publicité Esso sur la voix express, en regardant à droite ou à gauche révèle le même indice.

Comme toujours dans les romans de Murakami, il y a plusieurs niveaux de lecture en fonction des pistes privilégiées par le lecteur. À son rythme, chacun suivra son propre raisonnement, finira par trouver la clé, mais une fois la porte ouverte, le paysage découvert sera peut-être différent de celui des autres lecteurs.

Comment un écrivain se débrouille t'il avec la réalité et la fiction qu'il est en train d'écrire ? Comment cette fiction peut s'immiscer dans la réalité au point de perturber sa vie ? de ne plus savoir s'il vit dans la réalité (une lune) ou dans le monde imaginaires (deux lunes) qu'il a crée. de laisser ses personnages de fiction, les little poeple, envahir ses pensées au point de se laisser emprisonner dans «une chrysalide de l'air» en suspension entre deux mondes. Voilà pour moi, les questions que ce livre soulèvent. Une belle métaphore sur le travail d'écriture.

Murakami a ce talent de nous placer, comme Alice, sur le fil du miroir. À nous de choisir si nous voulons nous laisser emporter par la fiction, ou rester sagement assis, un oeil au-dessus de l'épaule de l'écrivain.
ll y a sans aucun doute d'autres pistes et d'autres pierres précieuses que je n'ai pas su voir. C'est donc avec un grand intérêt que je lirai vos critiques pour découvrir ce que j'ai raté.
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