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Corinne Atlan (Traducteur)
EAN : 9782264047724
432 pages
10-18 (02/04/2009)
3.68/5   423 notes
Résumé :
Une curieuse digression sur les kangourous. Un éléphant qui se volatilise. Un nain diabolique qui danse. Ou une jeune fille "cent pour cent parfaite". A travers ces dix-sept nouvelles, petits contes anodins de notre quotidien, Haruki Murakami entraîne son lecteur dans une dimension parallèle à l'imaginaire délécieusement drôle et bizarre, au fil d'un Japon nostalgique et moderne à la fois.
Farouchement zen et férocement fantastique, l'auteur déploie encore un... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (40) Voir plus Ajouter une critique
3,68

sur 423 notes

Une relecture "plaisir" avec ce recueil qui compte 17 nouvelles et autant de personnages insolites et comme toujours avec l'auteur nous nous retrouvons en prise avec ce sentiment délicieux qui est celui de vivre une expérience hors-norme presque mystique. Dès lors que nous pénétrons dans son univers insaisissable et qui pourtant nous semble si familier, tout ce qui nous apparaît habituellement banal et sous le sens devient étonnamment curieux sous sa plume. J'ai choisi aujourd'hui de vous parler plus longuement de cinq nouvelles. Mon amie Mh17 a chroniqué tout récemment "L'éléphant s'évapore" qui donne son titre au recueil et "Le nain qui danse", je vous invite à consulter sa chronique, ces deux nouvelles sont formidables.


"L'oiseau à ressort et les femmes du mardi."

Ceux et celles qui ont déjà lu les ouvrages de l'auteur reconnaîtront les premières pages de l'énigmatique "Chroniques de l'oiseau à ressort" (dans mon île déserte jusqu'à la fin des temps).
"A-t-on sans le savoir un angle mort fatal dans un coin de notre tête ?", un monde englouti au plus profond de notre âme qui ne demanderait qu'à resurgir par une belle journée chaude et ensoleillée du mois de mai ? Telle est la question qui s'impose au narrateur de cette nouvelle à l'issue de la très étrange journée qu'il vient de passer. Retour en arrière sur un mardi qui s'annonçait des plus ordinaires dans la vie de Toru Okada. Comme tous les matins il vaque à ses occupations habituelles d'homme au foyer puisqu'il a démissionné sans raison valable du poste qu'il occupait au sein d'un cabinet juridique, il s'apprête à déjeuner de spaghettis quand soudainement il reçoit un appel téléphonique (le premier d'une longue série), au bout de la ligne la voix suave d'une femme qu'il ne connaît pas mais qui elle semble bien le connaître, du moins certains détails de sa vie privée, s'en suit une conversation déroutante et un jeu de séduction auquel Toru parvient à se soustraire non sans ressentir un certain trouble qui va s'accentuer au fil de la journée. Dans cette nouvelle ce sont les bizarreries qui surviennent soudainement dans la vie du narrateur qui nous ouvrent les portes d'un imaginaire que nous ne parvenons pas à saisir tant ce dernier s'accroche à chaque élément tangible de son quotidien (cuisine, ménage, repassage). Une mystérieuse inconnue au téléphone, le chant hypnotique de l'oiseau à ressort, la disparition du chat de la maison, la rencontre improbable avec une jeune fille de 16 ans, le comportement étrange de sa femme... Des faits inhabituels qui semblent vouloir écarter notre narrateur d'une vie monotone et sans surprises.

*Avec mon premier je dévale les pentes enneigées et comme Toru je veille à ne pas basculer.


"La seconde attaque de boulangerie."

Comme pour la précédente nouvelle les lecteurs de Murakami feront le rapprochement avec son recueil illustré "Les attaques de la boulangerie". Ici nous retrouvons le même narrateur, avec quelques années de plus, dans le modeste appartement qu'il partage avec sa femme à Tokyo quand au moment du coucher tous deux sont pris d'une faim insatiable et obsédante qui les empêche de trouver le sommeil, hormis quelques bières dans le réfrigérateur, les placards sont complètement vides, nos jeunes mariés vivent d'amour et d'eau fraîche. le narrateur raconte alors à sa femme comment quelques années plus tôt il a braqué une boulangerie avec un ami et comment le boulanger leur a cédé son stock de pain avec une facilité déconcertante. Une histoire complètement absurde qui ne va pas manquer d'inspirer sa femme puisque nous retrouvons notre jeune couple quelques heures plus tard sillonnant les rues de Tokyo à bord d'une Corolla et sur le point de braquer un Mac'Do faute de pouvoir trouver une boulangerie ouverte à 2h30 du matin. Une nouvelle à l'atmosphère décalée et saugrenue qui m'a aussitôt remis en mémoire un slogan bien connu : "Chez Mac'Do venez comme vous êtes !" dans laquelle toute la poésie de Murakami est condensée dans trente petits hamburgers tout chauds qui ne demandent qu'à être goulûment avalés pour combler le vide des estomacs ou peut-être bien le vide de l'existence.

* Dans mon deuxième on enferme les animaux y compris éléphants et kangourous.


"Sommeil"

Qui n'a pas un jour souffert d'insomnie passagère ? Ce fut mon cas en 2008 puisque comme la narratrice de cette nouvelle, je ne dormais pas ou peu durant deux semaines mais contrairement à elle je me retrouvais bien incapable d'ouvrir un roman fut ce même le chef d'oeuvre de Tolstoï : "Anna Karénine", il me fut donc impossible de mettre à profit tout ce temps durant lequel je ne dormais plus. Nous le savons tous, pour leur bon fonctionnement notre corps et notre cerveau ont besoin d'être mis en veille durant un minimum de temps au risque d'y laisser notre santé physique et mentale et pourtant la narratrice de ce récit cesse soudainement de dormir durant 17 jours consécutifs sans subir le moindre effet secondaire inhérent au manque de sommeil et surtout sans qu'il n'y ait de raison à cela. Mariée à un dentiste réputé, maman d'un petit garçon, elle mène une vie agréable et bien rangée loin de tous soucis matériels, une vie que bien des japonaises pourraient lui envier.
Une nouvelle onirique et envoûtante sur le temps qui passe, le temps qu'on ne prend pas pour soi et qui nous dit que les plaisirs réprimés finissent toujours par resurgir un beau jour. Ce que l'on aurait dû faire, ce que l'on n'a pas fait, les regrets qui finissent par nous rattraper...

* Quand je sens mon troisième venir, je m'enveloppe d'une petite laine douillette.


"La chute de l'Empire romain, la révolte indienne de 1881, l'invasion de la Pologne par Hitler, et le monde des vents violents."

Un dimanche comme tous les autres dans la vie parfaitement réglée et sous contrôle du narrateur qui ici est pour le moins un original puisqu'il a pour habitude de consigner quantité de faits anodins dans son journal intime à des heures précises et régulières en écoutant de la musique inoffensive, il aime aussi convertir les différents évènements et éléments de son quotidien en pourcentage, seule petite excentricité dans cette vie hyper organisée : sa petite amie, avec laquelle il accepte de se livrer à quelques jeux érotiques, la demoiselle aime qu'on lui bande les yeux durant l'acte.
10 h 48 : le ciel est dégagé, notre narrateur étend son linge à l'extérieur de la véranda ; 14 h 07 : le vent se lève ce qui l'interpelle car à 10 h 48 il faisait un temps superbe ; 14 h 36 : le téléphone sonne, personne au bout du fil hormis le sifflement lugubre du vent qui lui rappelle les indiens sur le sentier de la guerre en 1881. Il raccroche, retourne à son journal intime, confus, puis se remémore l'invasion de la Pologne par Hitler au même temps que sa séance de cinéma du samedi tandis que la tempête fait rage dehors (le monde des vents violents). 15 h 55 : le vent s'arrête, retour au calme. Et puis ? Et puis rien ! le narrateur retrouve sa petite amie pour une soirée coquine.
Une courte nouvelle très drôle et complètement incongrue. En quelques pages seulement on saisit l'état d'esprit du narrateur, un homme en proie à des petites manies, des lubies inoffensives qui s'angoisse si tout n'est pas sous contrôle dans sa vie et qui, pour pouvoir se souvenir des évènement ordinaires qui la traversent, les assimile tout simplement à des évènements historiques.


*Dans les feuillages et les branchages de mon quatrième l'oiseau à ressort y pose délicatement ses petits.


"La dernière pelouse de l'après-midi."

J'ai aimé le côté nostalgique et empreint d'une belle poésie de cette nouvelle, le fait qu'il n'y ait pas de chute ne m'a pas aucunement dérangée. le narrateur se souvient l'été de ses 19 ans et plus précisément la journée du 14 juillet alors qu'il travaille pour une entreprise spécialisée dans l'entretien des espaces verts, un job dans lequel il est très investi malgré son jeune âge, chaque jour il tond les pelouses des particuliers avec passion et non sans une certaine rigueur pour pouvoir offrir un voyage à sa fiancée qui vit dans une ville éloignée. Malheureusement cette dernière décide de rompre subitement laissant notre jeune narrateur dans une sorte de vide existentiel. C'est donc sa dernière journée de travail qu'il nous raconte : il doit se rendre dans une maison à l'extérieur de la ville, une charmante petite maison située à mi-pente d'une colline dont le terrain est bordé d'hortensias et comporte un beau carré de pelouse à tondre de 200 mètres carrés. Sur place il est accueilli par la maîtresse de maison, une veuve quinquagénaire au premier abord austère qui sirote du White Horse sous un soleil de plomb. Les heures passant et l'alcool aidant cette femme va se révéler sous un jour différent et invitera notre narrateur à partager un verre en sa compagnie une fois son travail accompli...
Une nouvelle que chacun interprètera avec sa propre sensibilité. le hasard d'une rencontre, deux vies qui se croisent et ne se croiseront certainement jamais plus. le narrateur se retourne avec beaucoup de sensibilité sur le souvenir de cette femme qui ce jour là ne demandait rien d'autre qu'un peu de réconfort. Parfois il est plus facile de partager ses peines avec un inconnu.

* Mon quatrième se termine en tire-bouchon comme celle du petit cochon.


Pour conclure je vous invite à découvrir ce beau recueil dans lequel Murakami excelle à explorer la normalité (si tant que la normalité existe) dans tout ce qu'elle peut comporter d'anormal. Dans chacune de ces 17 histoires l'impossible devient possible, l'insolite se mélange à la banalité du quotidien des personnages pour venir créer ce petit déséquilibre, cette faille subtile qui donne aux histoires de Murakami cette teinte si spéciale et indéfinissable. Et puis Murakami c'est aussi un certain regard sur la société japonaise bien moins lisse et disciplinée qu'elle n'y paraît.

* Mon tout qualifie ce roman sans que le terme ne soit péjoratif bien au contraire ...




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Lu après que la critique d'une amie m'en aie donné l'envie (elle se reconnaîtra) en shuntant ma P.A.L ce qui ne constitue pas encore une infraction passible de sanctions par une nouvelle police crée spécialement à cet effet.
Pas de regret, c'est du Murakami pur jus. En refermant ce livre, je me suis laissé aller à comparer l'auteur à Stephen King. Il y a des points communs chez ces deux auteurs dans la montée en tension, la suggestion du fantastique.
Là où l'étasunien pur jus en fait un bon gros hamburger bien savoureux et bien gras, le nipporiginaire (belle invention non ?) reste sur du sushi. C'est brut, fin et subtil.
Une lecture vraiment très agréable.
Ma nouvelle préférée ? Difficile... Les "Lederhosen" peut être...
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Petits résumés des nouvelles :
A propos de ma rencontre avec la fille cent pour cent parfaite par un beau matin d'avril (1981) – recueil volume 5
L'auteur croise un matin dans la rue la fille 100% parfaite mais n'ose lui adresser la parole ; elle disparaît dans la foule, il le regrette. Il invente alors ce qu'il aurait pu lui dire, l'histoire de ces deux jeunes gens qui se trouvèrent 100 % parfaits tout de suite mais voulurent se mettre à l'épreuve et ne se retrouvèrent pas, eux ce fameux matin d'avril.
En 1983, la nouvelle fut adaptée au cinéma par Naoto Yamakawa.

Family Affair (1985) – recueil volume 8
L'auteur vit avec sa soeur qui va se marier. Il n'aime pas le fiancé de sa soeur qui semble trop rangé. Lui il est plutôt du genre blagues, filles et alcool et le fossé se creuse entre le frère et la soeur.

L'éléphant s'évapore (1985) Zo no shometsu – recueil volume 8
A la fermeture d'un zoo, un vieil éléphant, trop vieux pour être transférer ailleurs, est cédé à une ville. Un matin, il a disparu sans laisser aucune trace, avec son vieux gardien. le narrateur, sait quelque chose et se confie un jour à une jeune femme qu'il a rencontré lors d'un cocktail pour son travail : fasciné par l'éléphant, il allait souvent l'observer depuis une colline un peu dissimulé ;

L'oiseau à ressort et les femmes du mardi (1986) Nejimakidori to kayôbi no onna tachi – recueil volume 8
Le narrateur, au chômage reçoit un étrange coup de téléphone d'une femme qui veut qu'il lui consacre 10 minutes. Il refuse. Plus tard dans la journée la femme appelle à nouveau, le narrateur laisse faire : la femme qui dit le connaître commence à décrire une scène porno avec elle comme sujet. le narrateur raccroche et part à la recherche de son chat disparu depuis 4 jours que sa femme, qui lui a téléphoné entre-temps, lui demande de retrouver. A la recherche du chat, il rencontre une étrange jeune fille qui l'invite chez elle pour attendre son chat. Etendu au soleil sur un transat, il laisse la fille parler : elle imagine ce que ce serait que de disséquer un cadavre à la recherche de son noyau dur. Finalement le soir arrive, le narrateur rentre chez lui ; sa femme le soir l'accuse d'avoir tué le chat comme il tue tant de monde d'un simple regard.

La chute de l'Empire romain, la révolte indienne de 1881, l'invasion de la Pologne par Hitler, et le monde des vents violents (1986) – recueil volume 8
Le narrateur écrit son journal de la semaine un jour de très grand vent en attendant que sa copine ne le rejoigne. Toute la semaine il a jeté une phrase sur son calepin pour se rappeler le dimanche ce qui s'est passé pour son journal ; ces phrases ce sont celles du titre.

La dernière pelouse de l'après-midi (1982) – recueil volume 3
L'auteur tond des pelouses, méticuleusement, pour mettre de l'argent de côté et offrir un voyage à sa petite amie qu'il voit deux fois par an ; celle-ci lui écrit qu'elle le quitte. Il décide d'arrêter de tondre les pelouses, n'ayant plus besoin d'argent. Il raconte sa dernière pelouse avec cette femme d'une cinquantaine d'année étrange, qui boit beaucoup et lui fait visiter sa maison, spécialement la chambre de sa fille absente.

La fenêtre Mado – recueil volume 5
Un étudiant corrige des essais d'écriture de différentes personnes qui se sont abonnés à ce service d'un nouveau genre. Bien que ce ne soit pas permis, il rencontre l'un des écrivains, dîne avec elle et goûte son fameux hamburger puis prend congé. Plusieurs années après, passant en métro devant l'immeuble de la femme il essaie de reconnaître sa fenêtre. Et bien sûr il se demande s'il n'aurait pas dû coucher avec elle.

La seconde attaque de la boulangerie (1986) Panya saishûgeki – recueil volume 8
Le narrateur et sa femme sont réveillés en pleine nuit par une faim de loup, mais ils ne trouvent rien à manger dans leur cuisine. Tiraillé par la faim le narrateur repense à une autre faim qu'il avait eu avec un ami dix ans plus tôt et qui les avait poussé à attaquer une boulangerie. Malheureusement l'attaque c'était terminée bizarrement : le boulanger leur avait offert de prendre tous les pains qu'ils voulaient gratuitement si ils acceptaient d'écouter avec lui un disque de Wagner. Cette action a été le début de la rupture des deux amis et du changement de vie du narrateur. Quand sa femme entend ça elle pense qu'une malédiction s'est alors abattu sur lui, ce qui explique leur faim de cette nuit. Elle décide qu'il leur faut attaquer une nouvelle boulangerie, mais cette fois pour de bon.

Le communiqué du kangourou (1981) – recueil volume 3
L'auteur est préposé aux réclamations dans un grand magasin. Là, il va répondre à une lettre qui l'a frappé alors qu'elle n'est rien d'autre qu'une lettre de réclamation sur une erreur de disque. Il le fait via une cassette qu'il enregistre pour révéler à l'auteur de la lettre qu'il aimerait bien coucher avec elle, c'est ce qu'il a déduit du courrier de réclamation. C'est tout. Au même moment il a été voir des kangourous au zoo, ce qui ne lui paraît pas plus ni moins absurde.

Le monstre vert (1991) Midori no Kedamono – recueil Kenshinton no yûrei
Une femme qui s'ennuie chez elle regarde par la fenêtre et voit surgir un monstre de sous la terre. Celui-ci vient lui avouer son amour. La femme n'en veut pas et le torture mentalement pour qu'il disparaisse ; il disparaît. Une allégorie un peu simpliste des idées noires qui peuvent trotter dans l'esprit d'une personne qui s'ennuie.

Le nain qui danse (1984) – recueil volume 3
Le narrateur rêve d'un nain qui est la danse personnifiée. le lendemain matin, dans son usine de fabrication d'éléphants, il raconte son rêve à son co-équipier. Celui-ci lui dit qu'il a déjà entendu parlé de ce nain et qu'il devrait aller poser la question à un vieil ouvrier. Celui-ci lui confirme tout, cette histoire de nain qui aurait séduit la famille impériale avant la révolution et qui peut être leur aurait fait subir des maléfices. Depuis la révolution le nain est recherché partout. le narrateur tombe ensuite amoureux d'une très belle fille très hautaine. Fort à propos le nain réapparaît dans un rêve et lui propose de l'aider à conquérir la fille en entrant dans son corps et en dansant pour elle, mais à condition que pas une parole ne soit échangée sinon, le nain garderait le corps à tout jamais.

Le silence (1991) – recueil volume 5
Un homme raconte comment après avoir frapper un camarade de classe « trop parfait », sa vie devient un enfer au collège où il se retrouve accuser de harcèlement sur un autre élève qui s'est suicidé. Tout le monde le fuit et il vit ses derniers mois de lycée dans le silence et le mépris.

Les granges brûlées (1983) – recueil volume 3
L'auteur, il est écrivain, a rencontré une fille, une amie qui, après un voyage revient avec un nouveau petit copain. Tous trois se rencontrent quelques fois. Un jour, le petit copain raconte à l'auteur qu'il brûle des granges, comme ça, des granges qui n'attendent que ça. Il lui avoue que s'il est venu chez lui, c'est qu'il est en repérage.

Les Lederhosen (1985) – recueil volume 5
Le narrateur s'entend raconter une histoire absurde de divorce pour l'achat d'un lederhosen, short allemand en cuir à bretelles : la femme, en l'achetant lors d'un voyage en Allemagne, se rend compte qu'elle n'a pu rien à faire avec son mari et abandonne en même temps sa fille. Point !

Sommeil (1989) Nemuri – recueil volume 8
L'auteur est une femme ; mariée, elle vit une vie simple et sans soucis. Un jour elle s'aperçoit qu'elle n'a plus besoin de dormir sans que cela ne se ressente en terme de fatigue ou autre. Elle profite de ce temps ainsi gagné à lire. La nuit, il lui arrive aussi de se promener. L'obscurité la met mal à l'aise : et si la mort c'était voir l'obscurité sans ne plus rien pouvoir faire d'autre. Une nuit qu'elle est partie se promener en voiture elle est agressée ou semble l'être 

TV People (1989) TV pîpulu – recueil TV People
Un homme voit entrer chez lui de petits hommes qui installent chez lui un téléviseur. Il semble être le seul à s'en apercevoir, sa femme ne remarque rien. La même chose se passe à son bureau. Ceci se passe alors que l'auteur a une de ses migraines du dimanche soir. C'est tout, rien d'autre ne se passe. La nouvelle a été écrite à la suite du visionnage du clip d'un morceau de Lou Reed, Original Wrapper.

Un cargo pour la Chine (1980) Chûgoku yuki no surô bôto - recueil volume 3
L'auteur a une peur presque atavique des Chinois, comme semble-t-il la plupart des Japonais. Cette nouvelle raconte ses premières rencontres avec des Chinois, comme si c'était des aventures extraordinaires alors qu'il se révèle que ce sont des gens comme les autres. La première fois c'est un examinateur pour une épreuve qui se déroule précisément dans un collège Chinois ; la seconde, c'est une fille qui travaille avec lui avec laquelle va se nouer une relation étrange jusqu'au jour où il va la raccompagner chez elle en lui indiquant la mauvaise direction de métro puis en oubliant son adresse et son numéro ; le troisième est un ancien collègue de lycée qu'il rencontre de nombreuses années plus tard et auquel il n'a rien à dire. Rien que de banal.
Le titre est la reprise du titre d'un morceau de Sonny Rollins que l'auteur aime particulièrement, On a slow boat to China.
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L'écriture, le récit en lui même, a la capacité de porter, déporter, transformer l'événement. Aussi extravagant que puisse être le déroulement de l'instant sous la plume de Murakami rien n'est jamais déroutant. Élégance, aisance, légèreté, magnifique liberté.
L'esprit du conte respire. Les passages s'ouvrent, basculent les uns vers les autres et restent ouverts. Vers d'autres mondes, d'autres perceptions. Rien ne se clôt ou plus exactement tout s'évapore dans l'annonce, la rupture, ou le non achèvement de l'instant. Disparu, évanoui, comme un flocon de neige venu se poser sur la pierre d'un volcan. L'étrangeté du quotidien se mêle à la quotidienneté de l'étrange. Comme si il existait toujours deux faces, deux angles, comme si le monde était pourvu de deux ailes, s'ouvrant et se refermant, lui donnant le rythme d'une respiration profonde. Ici et pourtant hors de notre vue. Là bas et pourtant si proche encore. 17 nouvelles. 17 mouvements. 17 fantaisies fantastiques dont nous sommes tous les personnages. Ce n'est pas une question de langage, de temps, d'espace ou de niveau, juste la question de l'angle que nous choisissons. Une lettre peut contenir toute l'évanescence du monde non pas parce qu'elle en est l'esprit mais parce que c'est l'esprit qui l'a construite. Nous sommes la perception de ce que nous créons. le monde n'est il pas l'écho de tout ce qui naît, vit, demeure, ressurgit, souffre et meurt parfois en nous ?
C'est cette liberté de langage, cet angle de vie, cette redécouverte de l'esprit, qui, chez Haruki Murakami me réjouit.
Nouvelles traduites du japonais par Corinne Atlan, et pour la nouvelle, TV people, par véronique Brindeau.
A noter : « Nuits blanches » (d'après Sommeil, nouvelle faisant partie du présent recueil) d' Haruki Murakami , adaptation et mise en scène de Hervé Falloux, avec Nathalie Richard, est à l'affiche de Théâtre de l'Oeuvre, 55 rue de Clichy, 75009 Paris et ce, jusqu'au..25 janvier 2015.

Astrid Shriqui Garain
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« Moi, j'ai dit bizarre ? Comme c'est bizarre ! » Louis Jouvet dans "Drôle de drame" 1937.
Ce livre est bizarre...
Cette lecture a été une déception car j'aime les nouvelles qui ont une chute. Or, ce n'est pas le cas pour celles-ci.
Toutefois, l'écriture de Murakami étant belle, je lui mets quand même quelques étoiles.
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Citations et extraits (36) Voir plus Ajouter une citation
Les souvenirs, ça ressemble aux romans, ou peut-être les romans ressemblent-ils aux souvenirs ?
Pour la première fois depuis que je me suis mis à écrire des romans, j'en ai véritablement conscience : les souvenirs ressemblent aux romans, ou peut-être, etc.
Vous faites des efforts pour ordonner tout ça joliment, et puis le fil de vos idées vous entraîne ici ou là, et finalement il n'y a plus de fil du tout. Exactement comme quatre chatons à peine nés roulés en boule les uns sur les autres. Tout tièdes de vie, mais instables sur leurs pattes. Je trouve vraiment honteux que ces petites créatures fassent l'objet d'un commerce (car elles font l'objet d'un commerce). Il y a vraiment de quoi rougir. Et si moi je rougis, vous pouvez être sûr que le monde entier a honte.
Pourtant, si on considère l'existence humaine comme une suite d'actes stupides fondés sur des mobiles relativement purs, différencier ce qui est juste de ce qui ne l'est pas n'est plus un problème. C'est là que naissent les souvenirs, et les romans aussi. C'est une espèce de machine dont personne ne peut arrêter le mouvement perpétuel, qui se balade à travers le monde en faisant grincer ses rouages, tirant un unique et interminable fil à travers le monde.
Si la machine fonctionne bien, pourquoi pas ? Mais il n'y a aucune raison que ça marche. Cela n'essaie même pas de marcher.
Alors, que faut-il faire, hein ?
Et bien, mettre à nouveau ces petits chatons les uns sur les autres. Ils sont tout fatigués et tout doux. Que pensent-ils ces petits chatons, quand ils ouvrent les yeux et se rendent compte qu'ils sont empilés comme des bûches préparées pour un feu de camp, hein ? Tiens, c'est bizarre, se diront-ils peut-être. Si seulement ils se disaient ça, au moins ça, je me sentirais sauvé.

Extrait de la nouvelle "La dernière pelouse de l'après-midi".
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Je me rappelle nettement la première nuit où je n'ai pas dormi. J'avais fait un cauchemar, un rêve sombre et glauque, dont j'ai oublié le contenu précis mais qui m'a laissé une impression sinistre. Je me suis réveillée brusquement, en sursaut, comme si quelque chose m'avait arrachée au sommeil à l'instant le plus dangereux, le plus effrayant du rêve, au point de non-retour. Je suis restée pantelante un bon moment après mon réveil. Je ne pouvais plus bouger, mes bras et mes jambes étaient comme paralysés. J'entendais ma respiration résonner désagréablement comme si j'étais allongée, seule, dans une grotte.
C'est un cauchemar, me suis-je dit. Et puis, j'ai attendu patiemment, allongée sur le dos, que ma respiration se calme. Mon coeur battait violemment, mes poumons se gonflaient et se vidaient comme un soufflet pour envoyer rapidement du sang vers mon coeur, marquant le passage du temps. Quelle heure peut-il bien être, me demandai-je soudain. Je voulus regarder le réveil à mon chevet, mais je ne pouvais pas tourner la tête. À ce moment là, il me sembla distinguer une ombre noire à mes pieds, vaguement visible dans la pénombre. Je retins mon souffle, sentant tout l'intérieur de mon corps, coeur et poumons compris, s'arrêter de fonctionner un instant. Je concentrai mon regard sur cette ombre.
Elle cessa soudain d'être vague, comme si elle n'attendait que mon regard pour se matérialiser, et prit des contours extraordinairement précis, une forme réelle se coula à l'intérieur, avec tous ses détails. Un vieillard maigre, vêtu de vêtements noirs ajustés, se tenait debout en silence au pied de mon lit.


Extrait de la nouvelle "Sommeil".
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- Trente Big Mac à emporter, dit ma femme.
- Je vous donne tout l'argent que j'ai si vous voulez, mais vous ne voudriez pas aller consommer ailleurs ? demanda le chef. Ça va terriblement embrouiller la comptabilité. Je veux dire...
- Il vaut mieux faire ce qu'elle dit, répétai-je.
Les trois employés se rendirent à la cuisine et se mirent au travail. L'étudiant faisait griller les hamburgers, le chef les insérait dans des petits pains, l'employée les rangeait dans un sachet blanc, et personne ne pipait mot. Je m'adossai contre un énorme réfrigérateur, le canon de mon pistolet dirigé vers la plaque du gril. Sur le gril grésillaient des rangées de steaks hachés rose pâle, ovales comme des gouttes d'eau, je sentais le doux fumet de la viande grillée monter par tous les pores de ma peau comme une nuée d'insectes microscopiques, se mêlant à la circulation de mon sang pour atteindre les moindres recoins de mon être. Ces particules achevaient leur course rassemblées au fond du gouffre affamé qui s'ouvrait au centre de mon corps et venait en tapisser les parois roses.
J'avais grande envie de m'emparer d'un ou deux des hamburgers enveloppés de sachets blancs dont la pile gonflait à vue d'œil à côté de moi, mais je décidai d'attendre que les trente fussent prêts, n'étant pas très sûr qu'un tel acte n'aille pas à l'encontre de notre objectif. Il faisait une chaleur étouffante dans la cuisine, et je commençais à transpirer sous ma cagoule de ski.

Extrait de la nouvelle "La seconde attaque de boulangerie".
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J'ai poussé un léger soupir, un soupir d'intensité trente pour cent environ, ai replié le journal et me suis mis à ranger le linge dans le placard. Ensuite je me suis fait un café, toujours en écoutant de la musique inoffensive, et je me suis remis à rédiger mon journal en buvant mon café.
Jeudi, j'avais couché avec ma petite amie. Elle adorait faire l'amour avec un bandeau sur les yeux. C'est pourquoi elle se baladait toujours avec, dans son petit sac, un de ces bandeaux en tissu qu'on vous donne dans les avions long-courriers.
Moi, ce n'est pas vraiment mon truc, mais elle est si mignonne avec son bandeau sur les yeux que je ne fais aucune objection à sa petite manie. On est humains, on a tous nos petites bizarreries, n'est-ce pas ?
En gros, c'est ce que j'ai écrit à la page du jeudi. Ma politique en matière de journal intime, c'est quatre-vingts pour cent de fait, et vingt pour cent de remarques personnelles.
Vendredi, j'avais rencontré un vieil ami dans une librairie de Ginza. Il portait une cravate aux motifs vraiment bizarres : d'innombrables numéros de téléphone sur un fond de rayures...
J'en étais là quand le téléphone a sonné.

Extrait de la nouvelle "La chute de l'Empire romain, la révolte indienne de 1881, l'invasion de la Pologne par Hitler, et le monde des vents violents".
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Un extrait de la nouvelle « Le nain qui danse »

Je me lavai soigneusement la figure, me rasai, fis griller du pain, préparai du café. Je donnai à manger au chat, changeai sa litière, mis une cravate, me chaussai.
Puis je pris le bus pour me rendre à la manufacture, où je fabriquais des éléphants.
Naturellement, ce n’est pas facile de fabriquer des éléphants. C’est gros et cela nécessite un assemblage très complexe. Rien à voir avec fabriquer des épingles à cheveux, ou des crayons de couleur. L’usine a été construite sur un immense terrain, elle est divisée en plusieurs bâtiments d’une taille imposante. Chaque section de distingue par une couleur différente. Ce mois-ci, je venais d’être muté à la section » oreilles », je travaillais donc dans le bâtiment au plafond et aux piliers jaunes. Mon casque et mon pantalon aussi étaient jaunes. Je fabriquais exclusivement des oreilles d’éléphant. Le mois précédent, j’étais dans le bâtiment vert, et vêtu d’un pantalon vert, un casque vert sur la tête, je fabriquais des têtes d’éléphant. Nous changeons de section tous les mois, comme des bohémiens changent de campement. C’est la politique de l’usine. Comme ça, chacun d’entre nous peut suivre dans la totalité le processus de fabrication. Ici, on ne peut accepter qu’un ouvrier passe sa vie à fabriquer uniquement des oreilles d’éléphant, ou des doigts de pieds d’éléphant. Des gens haut placés ont dessiné le plan de mutation, et nous suivons ce plan.
Fabriquer des têtes d’éléphant est un travail gratifiant. C’est extrêmement délicat, il faut une telle concentration qu’à la fin de la journée, on est épuisé au point de ne plus pouvoir ouvrir la bouche pour parler à qui que ce soit.
Au bout d’un mois de ce régime, j’avais perdu trois kilos. Mais j’avais le sentiment d’accomplir quelque chose. En comparaison, fabriquer des oreilles d’éléphant, c’est tout simple. Il suffit de modeler ces larges appendices plats, d’y ajouter quelques rides, et le tour est joué. C’est pour ça que nous appelons le passage dans cette section : « faire la pause-oreilles ». Après un mois de pause oreilles, je suis passé à la section « trompe ». Ça aussi c’est une tâche délicate, qui nécessite des nerfs d’acier. La trompe doit être flexible, et le conduit des narines bien dégagé tout au long, sinon l’éléphant risque de s’énerver et de s’emballer.
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Vidéo de Haruki Murakami
Pierre Földes a choisi d'adapter six nouvelles de l'écrivain Haruki Murakami dans son film d'animation "Saules aveugles, femme endormie". Pour conserver l'atmosphère de fantastique décalé et de mélancolie, Földes enchevêtre les histoires et suit le parcours de quatre personnages après le tremblement de terre et le tsunami qui ont touché le Japon en 2011.
#harukimurakami #littérature #animation
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