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EAN : 9782213614021
376 pages
Fayard (12/04/2006)
4.5/5   8 notes
Résumé :

Gaz, pétrole, islam. Les " grands " de ce monde ont trouvé un nouveau terrain d'affrontement : les cinq Etats indépendants que sont le Kazakhstan, le Kirghizistan, l'Ouzbékistan, le Tadjikistan et le Turkménistan d'Asie centrale. Déjà, la Chine envoie ses commerçants, l'Iran et la Turquie se cherchent des alliés, la Russie ne veut pas lâcher ses anciennes républiques, les États-Unis installent leur... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (4) Ajouter une critique
Basée à Moscou pendant une dizaine d'années, la journaliste Anne Nivat n'a pas usurpé le prix Albert-Londres qui lui a été décerné en 2000 pour ses articles sur la guerre de Tchétchénie ("Chienne de guerre", Fayard). Car son oeuvre, déjà prolifique, s'inscrit dans la plus noble tradition du grand reportage : dans les endroits les plus reculés de la planète, Anne Nivat nous fait partager le plaisir qu'elle prend à voyager, à la rencontre des gens, de leur façon de vivre et de penser. Son humilité, sa générosité contrastent agréablement avec les boursouflures égocentriques d'un Bernard-Henri Lévy en Amérique.
Cette fois-ci, elle nous emmène en Asie centrale, principalement dans cette vallée de la Ferghana bizarrement découpée entre le Tadjikistan, le Kazakhstan et le Kirghizistan. Au fil de ses voyages, échelonnés entre 2003 et 2005, on découvre des populations abandonnées à une indépendance qu'elles ne voulaient pas dans des Etats auxquels elles ne s'identifient pas. A découvrir par exemple l'enclave ouzbèke de Sokh, en territoire kirghize, peuplée à 99 % de Tadjiks, on touche du doigt combien le découpage administratif de ces ex-Républiques soviétiques est lourd de rivalités communautaires.

Anne Nivat a sillonné les plaines puis les monts de l'Asie centrale. Elle ne nous donne pas une analyse politique ou sociologique de ces Etats, qu'on trouvera par exemple dans l'excellent ouvrage de Marlène Laruelle et Sébastien Peyrouse, "Asie centrale, la dérive autoritaire. Cinq républiques entre héritage soviétique, dictature et islam" (CERI/Autrement, janvier 2006). Son ambition est ailleurs. Elle préfère se donner le temps d'aller à la rencontre des habitants et de nous livrer leurs témoignages. le risque est de ne pas obtenir une image « fidèle » de ces régions, mais plutôt le reflet des préoccupations de l'auteur : la condition des femmes, la montée de l'Islam, les violations des droits de l'homme. Mais comment ne pas s'attendrir au mariage de Mounotchotkhon et de Roustamtchon (sic) célébré dans la plus pure tradition tadjike ? Comment ne pas être séduit par Karakoul la jeune et jolie journaliste kirghize d'Anten-TV ? Comment ne pas admirer Saidjan, l'activiste ouzbek qui sera arrêté à Andijan quelques mois après son interview ?

Malgré le regard toujours bienveillant que Anne Nivat porte sur ses interlocuteurs, son livre témoigne de l'écrasante pauvreté de ces populations reléguées aux confins du monde connu. Pauvreté économique de ces pays qui depuis la disparition de l'URSS ne bénéficient plus d'aucune solidarité fédérale et, par conséquent, ne cesse de regretter l'ère soviétique : « l'idéal, ç'aurait été que l'URSS continue d'exister, mais pas dans un système communiste » confie le chef d'un village dans la Pamir tadjik (p. 207). Mais plus préoccupante encore, pauvreté intellectuelle des plus pauvres comme des plus riches. Les premiers accèdent de moins en moins au système éducatif qu'aggrave la dérussification mise en oeuvre par des autorités en mal d'authenticité. La pauvreté intellectuelle des seconds n'est pas moins inquiétante : Anne Nivat nous livre un description terrifiante de quelques nouveaux riches à Tachkent, dont la grossièreté n'a d'égale que le mauvais goût.

C'est au final cette régression sans issue qui inquiète le plus. Certes le fondamentalisme musulman progresse – auquel Anne Nivat consacre la troisième et dernière partie de son ouvrage. Mais on comprend qu'il est minoritaire et médiocrement organisé. Il constitue tout au mieux la planche de salut de populations vouées au désespoir. Car c'est ce manque d'espoir qui est le plus poignant : quel espoir pourraient nourrir ces populations éloignées de tout, abandonnées de Moscou et du monde, confrontées à une géographie hostile et renvoyées à une histoire cruelle ?
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Asie centrale. Entre 2001 et 2005. Au croisement des civilisations

Anne Nivat avec laquelle j'ai eu la chance de pouvoir échanger quelques mots à l'occasion d'un salon il y a quelques années, la fille de Georges Nivat, un des plus grands spécialistes de littérature russe, nous emmène à ses côtés en Asie centrale, avec courage, à une période charnière de l'histoire récente. Oui, mais c'est où? me direz vous…

L'Asie centrale est un bloc aussi grand que l'Europe occidentale, logé entre la Russie, la Chine, l'Afghanistan et l'Iran, avec seulement 60 millions d'habitants en 2005. Elle est constituée de cinq pays, forts méconnus, le Kazakhstan, le Kirghizistan, l'Ouzbékistan, le Tadjikistan et le Turkmenistan. Ces pays sont des ex-républiques de l'union soviétique, à majorité musulmane, et dirigés, en 2005, par des autocrates ex communistes. Cela n'a pas beaucoup changé depuis d'ailleurs… le russe, que maitrise bien entendu Anne Nivat, est la lingua franca de la région, héritage de 70 ans de domination soviétique.

Anne Nivat nous montre au travers de son immersion dans des populations très diverses, ventilées entre les cinq pays par l'arbitraire de Staline, avec une logique implacable, diviser pour régner, la complexité de ce monde où les autorités, on ne peut plus dures, prônent un islam modéré là où, par réaction, se crée un islamisme politique qui deviendra le creuset du terrorisme que nous connaissons aujourd'hui.

Un livre passionnant, un jalon à mi-chemin de la chute de l'empire soviétique et d'aujourd'hui, qui permet d'éclairer un des grands enjeux de notre époque.
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Pour nous faire ressentir la diversité des populations, des langues et des ethnies; l'imbrication des territoires, les frontières compliquées et artificielles d'après les Indépendances, Anne Nivat nous plonge dans le Ferghanasthan, vallée de Ferghana, à l'est de l'Ouzbékistan, bordée par le Tadjikistan et le Kirghizistan.
Plus qu'un récit de voyage ou un essai, c'est une galerie de portraits d'hommes et de femmes (plus de femmes).
dans la première partie Gens des Plaines nous croisons, un metteur en scène, une musicienne, une sonneuse de cloches qui est aussi chanteuse de jazz, une employée des trains, et beaucoup d'autres qui racontent leur vie, leurs espoirs, parfois regrettent la période soviétique, parfois non....musulmans mais aussi chrétiens. Empathie, rencontres.
Dans la seconde Gens des montagnes, elle nous emmène aux confins orientaux, de la Chine ou de l'Afghanistan. Ouigours, pamiris vivent dans des montagnes impressionnantes enclavées par des pistes improbables. du temps de l'Union soviétiques la frontière était stratégique et certaines populations choyées. les jeunes pouvaient étudier, les routes étaient entretenues. Les jeunes républiques ont mieux à faire que de prendre le relais et ces gens des montagnes sont souvent oubliés. pourtant ils sont parfois artistes, cultivés et en tout cas hospitaliers malgré les tracasseries des autorités. AnneNivat nous fait partager leur quotidien difficile.
en dernière partie Gens d'Islam, elle aborde la question épineuse du fondamentalisme. Plus de 70 ans d'athéisme soviétique laissent des traces. les musulmans redécouvrent leur religion. Mais il manquent de repères. Où les trouver? dans l'Islam modéré traditionnel? dans l'Islam gouvernemental qui tente de s'implanter ou au contraire dans les versions islamistes venant de l'extérieur?
Anne Nivat a visité ces populations en 2003 et 2005, en pleine guerre d'Irak juste après les évènements d'Andijan (Ferghana) et les procès qui ont rempli les prisons ouzbèkes. Elle est sévère avec ce dernier gouvernement. mais comment ces dix dernières années la situation a-t-elle évolué? Difficile de le savoir.

Lien : http://miriampanigel.blog.le..
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Un essai fait par la journaliste Anne Nivat, l'une des seules reporters de guerre a avoir pu couvrir le conflit tchétchène. Couvrant l'Asie Centrale (Kazakhstan, Ouzbekistan, Kirghizstan, Tadjikistan et Turkmenistan), elle rencontre les populations locales qui déplorent la fin du communisme, les guerres civiles, la misère nouvelle provoquée par les conflits locaux (intra nationaux, entre les pays en -Stan, les retombées du 11 septembre, de la Tchetchenie, de l'Afghanistan, du début de la guerre d'Irak).

Elle explore également la montée de l'Islam en tant que religion personnelle et idée politique, notamment Hizb-ut-Tahir, mais aussi les affres de la torture, de la corruption, les velléités ethniques et la montée d'ONG. Je serais intéressée de lire un livre 15 ans plus tard et voir où en sont les personnes qu'a rencontré Nivat, mais également où en est la région.
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Citations et extraits (3) Ajouter une citation
Notre voiture est en quelque sorte réquisitionnée pour faire office de taxi gratuit. Là encore, je suis obligée d’obtempérer ; pourtant, je sais déjà que cette présence officielle me gênera pendant les longues heures du dur voyage. Et personne dans ce commissariat pour nous dire combien d’heures de route exactement nous séparent encore de cette inatteignable Khorog. Les estimations oscillent entre cinq et neuf.
Surprise : le major qui s’installe dans notre voiture est une femme charmante, le contraire de ce que j’avais imaginé et redouté. Grande brune au nez aquilin, cheveux courts, lèvres faites et ongles manucurés, Parvina, trente neuf ans, est en pantalon et corsage à manches courtes (une tenue moderne dans un pays à tendance conservatrice pour ce qui est de la tenue des femmes, même si les Pamiries font exception : davantage soviétisées, elles ont toujours été plus modernes que leurs compatriotes des autres vallées du pays). Pendant le voyage, nous n’échangeons que quelques questions polies ; une journaliste, étrangère de surcroît, restera toujours un objet de méfiance pour un officier des services secrets.
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Désarçonné par la nouvelle vie post-soviétique, le chef de village estime cependant que "chacun devrait tacher de se trouver du travail, une occupation quelle qu'elle soit, pour ne pas se laisser aller", et il déplore que la plupart de ses administrés, oisifs, passent leur temps à jouer aux cartes en buvant de la vodka, quand ils ne partent pas des journées entières dans la nature, déraciner des tezgen, accompagnés de leurs ânes. Lui aussi place beaucoup d'espoir dans l'ouverture de la route vers la Chine, dont il a suivi la construction avec grand intérêt. "Finalement, conclut-il, l'idéal, ç'aurait été que l'URSS continue d'exister, mais pas dans un système communiste. J'imagine une URSS qui se serait adaptée au capitalisme, à la démocratie. Ainsi, elle n'aurait pas perdu sa puissance et les Etats-Unis ne la traiteraient pas avec si peu d'égards. N'est-ce pas d'ailleurs ce que la Chine a réussi à faire?"
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On me raconte que les sentiers menant au sommet sont autant de pèlerinages différents où les rites et les haltes ont des effets magiques bien spécifiques. La montagne, dont la forme rappelle vaguement celle d’une femme enceinte allongée sur le dos, est truffée d’endroits censés porter bonheur ou réputés guérir certaines maladies, voire l’infertilité. En ces lieux, la roche maintes fois caressée est si polie qu’elle est douce comme du velours. Ici, on peut se laisser glisser sur le dos au long d’un toboggan naturel de pierre de quelques mètres de long ; là, il convient d’introduire sa main droite dans une anfractuosité elle-même plus ou moins en forme de main. On compterait sept « lieux saints » sur l’ensemble de la montagne.
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Vidéo de Anne Nivat
Anne Nivat vous présente son ouvrage "La haine et le déni : avec les Ukrainiens et les Russes dans la guerre" aux éditions Flammarion. Entretien avec Aude Ferbos.
Retrouvez le livre : https://www.mollat.com/livres/3034668/anne-nivat-la-haine-et-le-deni-avec-les-ukrainiens-et-les-russes-dans-la-guerre
Note de musique : © mollat Sous-titres générés automatiquement en français par YouTube.
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