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EAN : 9782070361762
640 pages
Gallimard (26/10/1972)
3.92/5   83 notes
Résumé :
Le roman de Zoé Oldenbourg a pour cadre la France au début du XIIIe siècle. S'il retrace la grande pitié de ce monde rude et raffiné, la misère des pèlerins et des vagabonds sur les routes du Midi, les malheurs de la guerre, il évoque plus particulièrement la vie des petits seigneurs des environs de Troyes, avec ses tournois, ses mœurs courtoises et grossières, ses drames de famille et ses sanglants règlements de comptes...
Au centre de l'action se fixe en tr... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (12) Voir plus Ajouter une critique
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Cela faisait longtemps que je voulais découvrir l'oeuvre de Zoé Oldenbourg, romancière et historienne d'origine russe, spécialiste du Moyen Âge. Une visite estivale à l'abbaye de Royaumont — tout récemment agrémentée d'un joli potager médiéval, avis aux amateurs — m'a permis d'acquérir cet ouvrage à la librairie du musée. Et quel ravissement !

"La pierre angulaire" suit trois générations de seigneurs à l'aube du XIIIe siècle : Ansiau, le vieux maître de Linnières, en Champagne, quitte définitivement les siens pour entreprendre un pèlerinage en Terre Sainte sur la tombe de son fils aîné. Herbert, dit "le Gros", son fils cadet, connu dans tout le comté pour sa cruauté et sa dépravation, lui succède à la tête du domaine. Haguenier, le fils d'Herbert, jeune homme idéaliste qui termine son apprentissage de chevalier, revient alors à Linnières pour la célébration de son adoubement...
Mêlées à leurs destins tragiques, se trouvent d'intéressantes figures féminines, telles que dame Aalais, l'épouse d'Ansiau, respectée comme la véritable maîtresse du domaine ; Aielot, la soeur d'Haguenier, aussi solide qu'Herbert ; la délicate Marie de Mongenost, dame de coeur qui met Haguenier à l'épreuve de l'amour courtois ; ou encore Églantine, la folle enfant d'Ansiau, que le départ de son père laisse sans protection.

Cette histoire "noble et sentimentale", lauréate du prix Femina 1953, est une fidèle représentation des contrastes du Moyen Âge et des contradictions de l'âme humaine, capable du pire comme du meilleur. le récit est à la fois épique et spirituel, l'extrême violence y côtoie l'amour le plus pur, et la religion, omniprésente, le dispute à la superstition et à la paillardise. La finesse du texte et des dialogues, ainsi que le réalisme de la reconstitution historique, témoignent d'une érudition digne de Marguerite Yourcenar ou de Hella S. Haasse, façon "L'Oeuvre au noir" ou "En la forêt de longue attente" – même si l'époque est différente.
Je retiens cependant la cinquième étoile en raison de la mauvaise qualité d'impression et des innombrables coquilles de l'édition Folio. Celle-ci date de 2006 et aurait mérité une sérieuse relecture.

Arrivée trop rapidement au bout de ses 630 pages, je m'aperçois que ce roman passionnant appellerait presque une suite... À défaut, je me contenterai du prologue. Et je note immédiatement "Argile et cendres" — retraçant la vie d'Ansiau et des siens avant La pierre angulaire — dans mon pense-bête.
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Deuxième volume d'un cycle consacré à la famille de Linnières dont je n'ai pas lu le premier (Argile et cendres), La pierre angulaire se déroule aux environs de Troyes et sur les routes, pour suivre les pas de trois hommes : Ansiau de Linnières, le vieux croisé, laisse ses terres et sa baronnie à son fils, Herbert dit le Gros, pour retourner à Jérusalem, un pèlerinage dont il sait qu'il ne reviendra pas ; Haguenier, son petit-fils, est adoubé et s'applique à suivre les règles de la chevalerie, tant dans ses relations avec les êtres que dans ses convictions religieuses, ce qui ne l'empêche pourtant pas de tomber amoureux de la très belle Marie de Mongenost, déjà mariée ; enfin Herbert, qui a attendu longtemps de pouvoir diriger la seigneurie, cherche à étendre son pouvoir sur la région par des alliances et vit à sa guise pour le reste, entre son épouse et ses concubines, heureux d'être débarrassé d'un père aimé de tous et ne comprenant pas son fils qu'il a fait élever loin de lui, en Normandie.

Autour de ces trois hommes gravite tout un monde.

Les rencontres que fait le vieux, les femmes qui entourent Herbert et Haguenier, le pays qui se déchire au sud avec la Croisade contre les Albigeois, les terres à gérer, la vie des paysans, les catastrophes naturelles, les manoeuvres des uns face à la bonne volonté des autres, les liens qui se nouent et se dénouent, l'univers de ces êtres se dessine au fil des pages.

Au début, j'ai été facilement entraînée à la suite de cette multitude de personnages.
Les descriptions sont vraissemblables, nous sommes immergés dans ce XIIIe siècle commençant et ce qui régit la société champenoise de l'époque.
Passer du long chemin suivi par le vieux aux manoeuvres de son fils et de celles-ci aux expériences parfois cuisantes du petit-fils pour suivre ses convictions se fait facilement.

Cependant, au fil du roman, la place que prennent les affres amoureuses du jeune Haguenier, la dépravation trop appuyée de son père comme pour en faire l'exact contraire, et les interrogations métaphysiques de tous, m'ont franchement lassée.

De plus, je dois bien admettre que je n'ai pas été conquise par le style assez pesant de l'auteur, et ai été agacée par quelques anachronismes qu'il lui était facile de vérifier.

Mais bon, je suis tout de même parvenue au bout de cet ouvrage, lequel aura eu la vertu de me replonger dans ce Moyen Âge qui m'a toujours passionnée.
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Zoé Oldenbourg s'est passionnée, on le sait, pour l'histoire médiévale et elle nous a laissé deux ouvrages importants : l'un centré sur les premières croisades et les relations complexes des chevaliers francs avec les Byzantins et avec les cités-États des Musulmans (Alep, Damas, Mossoul et le Caire), et l'autre consacré à la "Croisade" menée contre les "Cathares" dans le Toulousain, l'Albigeois, le Perapertuses, etc. (Le Bûcher de MontSégur ) .
Avec La Pierre Angulaire, c'est la possibilité pour la romancière de faire passer ce qu'elle pense pouvoir dire du Moyen Âge, une époque dont elle voit la grandeur mais aussi les ténèbres, car l'auteure semble fascinée par ce clair-obscur du tableau que l'on peut dresser de la période : les "héros" de la Pierre Angulaire ont d'ailleurs en eux ces contrastes violents, capables des pires cruautés et des remords les plus excessifs. de la guerre au pèlerinage, des amours charnelles les moins chastes aux macérations les plus ascétiques, c'est un Moyen Âge assez dur mais haut en couleurs qui nous est décrit avec passion par Zoé Oldenbourg, qui ne semblait pas rebutée par ce qu'elle nous donnait à voir, admirative qu'elle était pour tout cet accès de force brute spontanée, qui pour elle était peut-être l'expression la plus haute de ce dont est capable un être humain, livré d'un côté à ses plus bas instincts et de l'autre appelé à s'élever en empruntant le chemin de la souffrance et de la privation appliquées à soi-même. Réalisme sans doute, mais exagéré, car Zoé Oldenbourg était sans concession et tenait un discours qui laissait fort peu de place à l'espérance. Même son christianisme semblait être réduit au mystère de la Passion, De La Croix, et de la Rédemption dans la douleur. Peut-être était-ce la conséquence des déboires d'une "émigrée de la Russie blanche", dépitée et amère du sort réservé aux anciens aristocrates chassés de leurs palais et de leurs positions de privilégiés par les Révolutions de Kerenski puis de Lénine ?
François Sarindar, auteur de : Lawrence d'Arabie. Thomas Edward, cet inconnu.
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Il y a bien longtemps que la bibliographie de Zoé Oldenbourg me fait de l'oeil. Historienne émérite, romancière reconnue, les romans de cette dernière et leurs promesses de Moyen-Age sont pour moi, qui fut une fervente lectrice de Jeanne Bourrin et de Régine Pernoud notamment, plus qu'attirants. "La Pierre angulaire" figurait donc en très bonne place sur la liste de mes envies. Je l'ai donc commencé avec une sorte d'ardeur... bien vite refroidie. Douchée.
En effet, les tout premiers chapitres m'ont échaudée pour ne pas dire ennuyée. le décor est bien planté, les personnages s'annoncent complexes comme je les aime, la langue est belle mais c'est là que le bât blesse. Elle est si belle cette langue, si travaillée que cela l'alourdit, lui donne un côté très surfait, artificiel et franchement ampoulée (c'est d'ailleurs ce qui m'a fait abandonner les Pérégrines de la susdite Dame Bourrin... alors que j'avais beaucoup aimé le reste de ses ouvrages!). Trop de tournures pseudo poétiques, trop d'anastrophes à la Yoda. C'est beau mais indigeste, cela nuit à la clarté du propos. Parlons en de la clarté d'ailleurs: dans les tout premiers chapitres (encore eux, décidément!) certains liens entre les personnages sont un peu confus. le neveu d'un personnage est ensuite appelé son cousin. Un gendre n'est plus le gendre de personne passé un paragraphe mais devient un beau-frère. Bien entendu, la suite du roman justifie, clarifie ce genre de choses. de plus, cela colle bien à l'époque également et à la manière d'envisager la famille, le clan. Enfin, ce sont des détails qui n'empêchent pas au roman de se déchiffrer, mais je me suis sentie parfois un peu perdue. Pour être plus brève donc, entre La Pierre Angulaire et moi, c'était mal engagé, mais je suis une lectrice obstinée et je me suis agrippée à la pierre aussi escarpée fut-elle.
Miracle de l'obstination? de la littérature? Accoutumance aux anastrophes? Allez savoir... Toujours est-il que le charme a finalement opéré et que je me suis laissée ravir, bercée, envoûtée par cette langue devenue berceuse et enchantement, par cette histoire belle et cruelle.
Zoé Oldenbourg a placé son intrigue en Champagne, au XII°siècle, le siècle des croisades et des hérésies, de l'amour courtois, des sorcières et des bûchers, des preux au coeur pur, de Dieu et du sang versé. La trame? Les intrigues parallèles et entrecroisés de trois hommes d'une même noble famille: Ansiau le grand-père a autrefois perdu son fils aîné lors des croisades. Vieux, las, mais fier, il se lance sur les routes pour gagner Jérusalem, laissant derrière lui sa femme et abandonnant son domaine à son fils Herbert. Ce dernier, dit "le gros" est une jouisseur brutal, violent, tyrannique qui régente les siens pour son propre intérêt, qui ne craint ni Dieu, ni les hommes et dont les bâtards hantent le domaine au moins autant que ses enfants légitimes. Parmi eux, Haguenier, jeune chevalier fraîchement adoubé, idéaliste et amoureux. Un peu fragile aussi. Autour de ces trois hommes gravite une galerie de personnages ambigus, attachants, fascinants: un demi frère à moitié fou d'amour, une bâtarde un peu sorcière, une tante aux moeurs légères, un moine défroqué et un gamin dévoué. Les destins des uns et des autres s'entremêlent avec fracas pour des issues souvent tragiques dans ce Moyen-Age pétri de paradoxes. Pour moi, c'est là l'un des aspects les plus prégnants du texte au delà de sa beauté et de son tour de force romanesque: Oldenbourg nous donne à voir une époque fascinante capable d'enfanter autant de lumière que de ténèbres. Si les personnages sont à même de ressentir les sentiments les plus nobles et les plus purs, d'accomplir les actes les plus grands; ils sont aussi susceptibles de donner dans la sauvagerie et la cruauté. Ainsi à la pureté d'un Haguenier s'oppose la noirceur d'Herbert mais le premier est tout aussi capable des pires excès quand le second peut révéler une fragilité poignante. le Moyen-Age de l'auteur a sans doute une bonne part de réalisme mais il est aussi désespéré, pessimiste. Ainsi, la foi semble sans espoir: les personnages s'abîment dans les élans mystiques mais en ne convoquant que la passion et les hérésies sont réprimées dans le sang et la violence et l'amour n'apporte ni sérénité, ni bonheur et encore moins la jouissance. Cette noirceur sublime le récit, le grandit, en fait le sel tout autant que le cadre retranscrit avec un souci de précision et de vraisemblance à saluer et les péripéties passionnantes qui l'émaillent. Ce roman qui commençait péniblement, on ne peut plus le lâcher ensuite et j'en ai sacrifié ma dernière nuit.
"La Pierre Angulaire" a commencé par m'ennuyer et me faire craindre le pire. Puis, elle s'est finalement révélée et m'a fait cette fois ressentir le pire: la compassion pour des personnages construits sans aucun manichéisme (qu'on les aime ou pas, ils sont tous parfaitement imparfaits, parfaitement humains. Moi je n'en ai franchement détesté qu'une) qu'on sait jetés dans une histoire qui sera plus forte qu'eux et qui les broiera.
Et puis, cette écriture qui au fil des pages s'allège, s'épure, à l'image des personnages, qui se dénude pour mieux raconter et qui soudain semble si limpide. Miracle de la conteuse et de son histoire. Miracle aussi, ces personnages qui ne me quittent pas et qui m'émeuvent encore après la dernière page quand je les aurai volontiers abandonnés après la première.
Il ne me reste plus qu'à essayer la cendre et l'argile et j'en suis contente.
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Une lecture passionnante, fascinante! Je n'ai pas senti le fardeau de 600 pages qui se sont défilé promptement entre mes mains. Je n'ai pas lu les deux premiers tome de la saga Argile et Cendres pour mieux me concilier avec ce troisième tome, mais cela ne m'a pas empêché de savourer La pierre angulaire, qui est une fresque familiale de l'époque médiévale. On suit l'histoire de trois personnages: un grand-père, un fils, et un petit-fils qui constituent trois générations qui marquent en même temps trois mouvements de l'histoire. Trois destinées qui nous retracent des moments où la passion est d'une extrême dévotion, la passion pour la foi, la passion pour un amour qui vous consume jusqu'aux os, la passion pour défendre un honneur, une position, la passion pour le mal. C'est un moyen-age où la joie semble marcher avec la douleur, la lumière s'incruste dans les ténèbres...
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Citations et extraits (8) Voir plus Ajouter une citation
La nuit était froide et sans lune. Mais il y avait tant d'étoiles qu'il semblait ne plus y avoir de place pour un coin de ciel noir. Il n'y avait qu'à regarder fixement pour en voir apparaître encore et encore ; parmi les grandes aux rayons jaunes et bleus et verts qui tremblotaient et clignotaient, il y en avait des milliers de petites, toutes blanches, comme du fil d'argent dans un tissu de brocard ; et la grande route de Saint-Jacques s'étalait toute parsemée de gemmes comme un long drap d'autel tout blanc. Couché par terre dans les herbes sèches, la tête renversée en arrière, Auberi regardait, s'efforçant de comprendre comment toutes ces lumières tenaient ensemble, il lui semblait entendre ces cascades d'étoiles rouler lentement et se déverser quelque part derrière la terre dans un gouffre au bout du monde.
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Le repas était long, et les viandes étaient apportées sur les tables, par ordre d'importance, la volaille d'abord, puis le menu gibier, puis les cerfs et les chevreuils assis comme vivants sur des plats longs d'une aune, dressant leurs têtes graciles, ornées de verdure et de rubans, les cornes dorées, et autour de leurs flancs les épices étaient disposées sur de larges feuilles de vignes faisant des arabesques noires et rouges en forme de plantes ou de bêtes. [...]
Pour le dessert, il y eut des cygnes, et des paons à la queue déployée, et de petites cailles posées en essaims sur les herbes épicées. Puis il y eut des fruits confits, et du miel servi dans des petits pots de couleurs vives, et de la pâte d'amandes.
Comme la fête ne devait pas être seulement pour la bouche et les yeux, mais aussi pour les oreilles, la musique était douce, et devant chaque table les vielleurs et les luthiers jouaient des airs nouveaux, les faisant accompagner de chant.
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Songez que je suis votre dame et votre seigneur, puis-je être pour vous comme une autre femme ? Pour vous tous, la femme est une marchandise qu'on peut acheter, les moins chères avec de l'argent, les autres avec des chansons et des promesses, et des services, et une longue attente. Mais dans le fond, vous ne voyez pas de différence.
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Écoute, Auberi, un enfant, vois-tu, c'est pire qu'une bête, parce que c'est plus rusé et plus paresseux. On ne fait jamais rien de bon d'un enfant qui n'est pas tenu durement.
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Le mal appelle le mal, et du mal il ne sort que du mal, jusqu'à ce que les temps soient révolus.
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merci @Zoé de Tarlé pour le montage
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