Citations sur Le portrait d'un homme heureux. André Le Nôtre, 1613-1700 (30)
D'ordinaire les jardiniers plaisent aux femmes. Leur intimité avec la nature , leurs connaissances un peu mystérieuses , parsemées de mots latins , leurs respect du temps , des saisons et des lenteurs nécessaires , leurs préoccupation du plaisir.
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D'ordinaire, les jardiniers plaisent aux femmes. Leur intimité avec la nature, leurs connaissances un peu mystérieuses, parsemées de mots latins, leur respect du temps, des saisons et des lenteurs nécessaires, leur préoccupation du plaisir: autant de traits qui les séduisent. Sans oublier quelques données physiques qui en ont troublé plus d'une: des mains larges et calleuses, des visages burinés par le grand air, certains fumets qu'ils engendrent, sueur et terre, quand le travail fut rude, au bout de la journée...je n'oublie pas le cadre propice aux êtreintes inédites: un enclos de haies ou de contre-espaliers donne plus d'idées neuves que les murs de la chambre conjugale.
Dans l'apparent silence des jardins, celui qui sait voir se délecte de ces grands duos muets.
L'amour et un cheminement d'apparence en apparence, jusqu'à la peau nue dont le grain n'est pas celui qu'on attendait. Malheur à celui ou celle, jardin ou femme, qui ne surprend pas son visiteur.
Sans commanditaire, l'œuvre d'un jardinier demeure dans des cartons. Pour devenir réalité, le rêve a besoin d'espace et d'argent. Plus qu'aucun autre art, celui des jardins dépend d'un bon vouloir allié à de gros et durables moyens.
Derrière leurs façades austères, les palais résonnent de passions douloureuses. Les puissants en leurs conseils ont l'âme tourmentée des jeunes filles au dortoir. Comme dans tous les bureaux, des idylles naissent entre collègues. Mais les seules flammes véritables brûlent pour lr chef, surtout s'il dirige le pays. A ce sortilège, tous succombent, j'en témoigne, même les plus laïcs, les plus républicains. (p.131).
Il met en scène les deux fonctions principales du jardin, décorer et donner à regarder. Un jardin décore le paysage tout en offrant des perspectives nouvelles sur ledit paysage. (p.105).
L'eau permet au Grand Siècle de se contempler tout entier et sous toutes ses facettes, géomètre et baroque, passionné d'ordre et de méthode tout autant que de surprises et d'illusions, mystique aussi bien qu'affamé de jeu et de plaisir... (p.79).
Certains succès tardifs ressemblent à des ouvertures d'opéra. Dès les premières mesures, on dit tout. On a trop longtemps attendu pour ne pas être préparé. On a trop espéré en vain pour ne pas savoir la rareté et la fugacité de la chance : quand l'occasion se présente enfin de montrer sa capacité, on se livre en entier.
D'où vient l'Age d'or, cette sorte de vague qui soudain hisse tpus les arts d'un pays jusqu'à l'excellence ?
Il y faut la richesse, sans doute. Mais tant d'époques opulentes amassent et bâtissent sans rien produire d'immortel. Il y faut des mécènes qui rêvent et commandent. Mais que peuvent leurs folies si personne ou trop peu, n'y sait répondre ? Comment expliquer cette mobilisation générale venue du tréfonds d'un peuple - ou d'un morceau de siècle - un chef d’œuvre collectif ? le génie de quelques uns n'y suffit pas.Il doit reposer sur le talent et le savoir-faire d'innombrables. Des hommes et des femmes nés dans les mêmes années. Au lieu de s'ignorer, ils se voient, ils se parlent, ils s'apprécient ou se détestent, ils projettent ensemble ou se défient. Bref, un âge d'or c'est l'enfant commun de toute une génération.
Chapitre X L'amitié (p 67 édition GC)