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Yvonne Davet (Traducteur)
EAN : 9782264030351
336 pages
10-18 (15/12/1999)
3.91/5   80 notes
Résumé :
Deux plongées dans une Angleterre désarçonnée au lendemain de la Première Guerre mondiale et redoutant la suivante à travers les aventures de deux héros : George "Fatty" Bowling (Un peu d'air frais), un modeste agent d'assurance aux prises avec les contraintes de son morne quotidien ; et dans Et vive l'aspidistra, Orwell nous conte les errances de Gordon Comstock, poète ignoré et employé de librairie qui a déclaré la guerre au culte de l'argent et qui, bien sûr, va ... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (8) Voir plus Ajouter une critique
« Et vive L'Aspidistra », publié en 1936, est un roman un peu étrange, à la fois monotone et glaçant, que l'on peut situer à mi-chemin entre « Dans la dèche à Paris et à Londres » et « 1984 ».

George Orwell y abandonne le récit autobiographique et adopte la forme romanesque qu'il reprendra avec bonheur dans « 1984 ». Si le roman quitte le rivage de la misère abordé par « Dans la dèche à Paris et à Londres », la vie à la lisière du dénuement que mène son personnage principal, Gordon Comstock, rappelle les tribulations d'Orwell dans son ouvrage consacré à la description des conditions de vie des plus miséreux.

L'antipathique Gordon annonce par de nombreux aspects le futur « héros » valétudinaire de 1984, Winston, tant les deux personnages partagent un caractère aussi clairvoyant que velléitaire. La lutte obsessionnelle que mène Gordon contre l'argent tout au long du roman préfigure la lutte contre le régime totalitaire d'inspiration communiste que mènera, à son tour, et parfois à contrecoeur, le désormais célèbre Winston Smith.

Orwell annonce la couleur dans l'incipit, un extrait de l'épître aux Corinthiens qu'il a librement adapté : le thème central du roman est l'argent. « Et quand j'aurais le don de prophétie, et que je connaîtrais tous les mystères et toute la science, quand j'aurais toute la foi jusqu'à transporter des montagnes, si je n'ai pas d'argent, je ne suis rien ».

« Et vive l'Aspidistra » nous conduit sur les traces de Gordon Comstock, trentenaire éduqué qui a fait le choix délibéré de ne pas laisser l'argent dicter sa vie. Il a ainsi quitté un poste avantageux dans une régie de publicité pour devenir employé dans une librairie et consacrer son temps libre à écrire de la poésie qu'il essaie tant bien que mal de faire publier. Gordon vit chichement de son maigre salaire de libraire, loue une chambre de « célibataire », compte en permanence chaque penny, et parvient en réalité tout juste à joindre les deux bouts. Sa situation précaire est la cause de mille tracas quotidiens, et affecte aussi bien sa relation amicale avec Ravelston, jeune homme affable et fortuné, que sa relation amoureuse avec Rosemary, jeune femme épatante, qui lui refuse néanmoins tout rapport charnel.

Le lecteur saisit rapidement toute l'ironie de la situation : en choisissant de lutter contre l'argent, Gordon s'est paradoxalement mis dans une mouise où le manque d'argent dicte chacun de ses choix, et finit par le définir en tant qu'être social, ami désargenté auprès de Ravelston et amoureux chaste auprès de Rosemary. le titre du roman, de prime abord pour le moins opaque, prend ici tout son sens : l'aspidistra est une plante vivace, partie intégrante de chaque foyer londonien et symbolise une forme de normalité, d'appartenance à la société. La détestation de Gordon à l'égard de l'aspidistra qui représente à ses yeux le système dont il refuse de faire partie illustre à merveille toute l'ironie glaçante de l'auteur.

Le roman est comme « 1984 » un roman à thèse. L'auteur s'attache à nous dépeindre dans les moindres détails la monotonie et la petitesse de la vie de Gordon, et nous montre page après page à quel point l'argent régit chaque instant de la vie de son « héros », en dépit de sa tentative désespérée de s'extraire du système. Si une forme d'ennui accompagne parfois la lecture, c'est une angoisse insidieuse qui saisit le lecteur lorsque celui-ci réalise à quel point la pauvreté ronge Gordon de l'intérieur, au risque de lui voler son âme.

« Et vive l'Aspidistra » est ainsi le titre faussement enjoué d'un roman sombre, très sombre qui annonce le chef d'oeuvre noir comme l'ébène qu'écrira Orwell en 1948. Tandis que gronde la rumeur de la seconde guerre mondiale, l'auteur emploie à dessein la forme romanesque pour dire tout le mal qu'il pense du système capitaliste qui transforme chaque homme en esclave d'un nouveau Dieu fait de papier.
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Le nom de George Orwell est souvent associé à deux dénonciations, à deux textes "1984" d'une part et "La Ferme des Animaux" dans lesquelles il dénonce les régimes policiers et totalitaires. le hasard des ballades sur Internet, m'a permis de connaitre d'autres textes moins connus, dont "Vive l'Aspidstra", non réédité et devenu indisponible en livre neuf. En occasion il atteint plus de 3 fois le prix mentionné en neuf....normal me direz-vous : "Et vive l'Aspidistra" a pour thème l'Argent, l'argent qui mène nos sociétés et dont on ne peut se passer. L'Argent nécessaire à la vie de chacun de nous.
La famille de Gordon était autrefois aisée; mais les partages dus au nombre d'oncles et de tantes, ont laissé assez peu d'agent à ses parents. Malgré tout ils ont tout fait afin que Gordon puisse suivre des études. Il était celui qui allait remettre la famille sur les rails de l'argent. Julia sa soeur a été sacrifiée et a du trouver un emploi de serveuse dans un salon de thé.
Gordon a des capacités indéniables, il est apprécié de ses supérieurs dans l'entreprise La nouvelle Albion, qui conçoit des "réclames", des slogans publicitaires, un mot qu'on n'employait pas à l'époque. Il savait trouver les mots justes, accrocheurs pour les affiches de sirop pour la toux, etc. Ces réclames destinées à faire vendre, à gagner de l'argent le dégoutent. Il souhaite "déclarer la guerre au dieu Argent et à tous ses pourceaux de prêtres", alors il quittera cet emploi bien payé afin de se consacrer à la poésie. Mais son recueil "Souris" pour lequel le Times écrira : "des promesses exceptionnelles", ne s'est vendu qu'à 153 exemplaires. Il n'intéresse personne, même soldé à 1 shilling, au lieu des 3 shilling six pence, prix initial. Alors, il travaille dans une librairie minable qui est aussi une bibliothèque privée. Il vit dans une chambre minable, et a mis au clou son pardessus..
Son ami, Philippe Ravelston, par ailleurs éditeur de ses textes, a beaucoup d'argent, c'est lui qui paye les repas de restaurant et qui aussi lui prête des sommes dont il ne reverra sans doute jamais la couleur...Il est socialiste. Socialiste et riche. Un socialisme qu'Orwell égratigne : "Tout garçon de seize ans intelligent est socialiste. A cet âge-là on ne voit pas dépasser l'hameçon de l'appât assez pâteux." le capitalisme, comme le socialisme sont montrés du doigt. Nombreuses sont les phrases qui conservent toute leur actualité et leur pertinence
Avoir de l'argent devient une obsession pour Gordon, mais il refuse d'en gagner, il refuse de rentrer dans ce système où l'argent détruit tout. Ce manque d'argent lui interdit de recherche un meilleur travail, d'être créatif et de finir son poème de 2000 vers , "c'était le manque d'argent, uniquement le manque d'argent qui le dépouillait du pouvoir d'« écrire »". .Amoureux de Rosemary, il aimerait faire l'amour avec elle, mais il lui dit : "je t'assure que je ne peux pas faire l'amour avec toi quand je n'ai que huit pence en poche. du moins, quand tu sais que je n'ai que huit pence."
Et dès qu'il reçoit une somme importante qu'il n'espérait pas, c'est pour immédiatement tout dépenser en repas luxueux avec Rosemary et Ravelston, pour se saouler d'alcools forts, au point d'être arrêté par la police et descendre encore plus bas.
Argent des riches, argent des pauvres, dieu Argent, quête de l'argent...Orwell dénonce ce culte de l'argent, cette quête perpétuelle de chacun, ce besoin d'en avoir toujours plus pour certains, et de pouvoir simplement vivre pour d'autres.
Argent et Aspiditra mises au même plan par Orwell. Les deux piliers de la société anglaise. L'Aspidistra: cette plante de belle-mère, qu'on retrouvera souvent dans les descriptions d'Orwell, dans toutes les chambres louées, dans tous les appartements, riches ou pauvres, Aspidistra, que tout couple nouvellement marié s'empresse d'acquérir.
Mais peut-on refuser, une vie entière, toute relation avec l'argent ?
Un peu longuet quelques fois, mais un grand Orwell. C'est bien dommage que ce livre ne soit pas disponible et ne soit pas réédité. En effet Orwell développe dans chacun de ses livres ses idées, chacune délivrant un message nouveau. Chaque livre nous permet de mieux comprendre sa perception du monde. Son humanisme

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Comment l'aspidistra devint-il, de l'époque victorienne jusqu'à sans doute la Seconde Guerre mondiale, une véritable icône de l'intérieur domestique « comme il faut », emblème de la respectabilité conventionnelle petit-bourgeoise en Angleterre ? Un article de presse récent émet l'hypothèse que, dès que l'illumination des logements londoniens passa majoritairement au gaz de ville, cette plante d'intérieur était la seule à être suffisamment robuste pour survivre à ses effluves : sa mode aurait survécu à l'électrification ; d'autre part, on peut avancer que l'essor des portraits photographiques des premières décennies du XXe siècle, où les décors d'intérieurs étaient reconstitués en studio, favorisait le minimalisme bon marché d'une pose où le personnage debout ou assis se faisait pendant à un guéridon surmonté d'un aspidistra : on en trouve d'innombrables exemples dans les photos de l'époque.
Toujours est-il que Gordon Comstock, le héros de ce roman précoce d'Eric Blair qui ne signait pas encore George Orwell, considère cette plante comme le symbole de tout ce qu'il hait, voire comme son ennemie personnelle. Depuis sa jeunesse au sein d'une famille qui a toujours vécu dans les privations et a placé en ses études tous les espoirs d'élévations sociale, Gordon, féru de poésie et de révolte sociale, a déclaré la guerre à l'argent et s'est escrimé à éviter d'en gagner assez. Mais chez lui un rapport obsessionnel, voire franchement monomaniaque à l'impécuniosité contribue à démolir le charme de l'indigence et l'empêche de jouir du bonheur de la bohème. Cette guerre qu'il déclare mener contre la pourriture du système économique environnant ne le conduit ni à une réflexion et encore moins à une action subversive – ne serait-ce que par le socialisme d'intentions de son très riche ami Ravelston – ni à une vie alternative d'anachorète serein, mais au contraire à la hargne victimaire d'un aspirant petit-bourgeois frustré par des conditions de vie de prolétaire, incapable cependant d'en connaître les astuces et les plaisirs. Son inspiration poétique se tarit dans la souillure alors qu'il est animé par un sentiment d'humiliation, le plus souvent imaginaire. Il se dédouane de ses comportements antipathiques avec ses amis, immoraux avec sa soeur et décidément abjects envers sa petite amie par la sempiternelle ritournelle de la pauvreté ; et le lecteur d'aujourd'hui le trouve sans doute encore plus odieux que ses contemporains du fait de ses crasses misogynie et homophobie.
En vérité, seules deux « batailles » justifient ce qu'il qualifie de guerre contre l'argent : sa démission d'un poste d'articlier publicitaire, et sa dilapidation en une seule nuit d'ivresse, de ripaille et de stupre d'un solide cachet inespéré... Mais son quotidien fait de quelques années de misère, d'invocation de la destruction de l'univers entier et de tentation à se laisser soi-même choir « dans le ruisseau » ne lui permet de s'arroger aucun héroïsme de belligérant. Les gens de son entourage sont encore trop bons pour ce qu'il mérite, pense-t-on.
Son retour dans les rangs les plus conventionnels et détestables du salariat, à l'évidence avec davantage de succès qu'il n'en avait jamais eu auparavant, serait-il le résultat d'un pari insensé, d'une acte d'audace terriblement dangereux de Rosemary, d'un ultime geste d'amour sacrificiel ou d'une profonde intuition féminine de sa part ? Serait-il l'effet d'une simple maturation, d'une sortie de l'adolescence qui a été plus tardive et plus risquée pour le protagoniste que pour un homme ordinaire dans sa condition ?
Représenterait-il déjà le pessimisme un peu cynique et très désabusé qui caractérisera l'ensemble de l'oeuvre orwellienne en ce qu'elle s'attelait à déconstruire les idéaux d'amélioration de la société qui avaient cours à son époque... ?
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Dans ce roman Orwell dépeint les affres de la création littéraire et poétique traversés par tous les artistes qui refusent toute compromission avec le monde de l'argent, le capitalisme, le système et la société bien pensante.
A travers la vie misérable de Gordon, Orwell nous entraîne tout au long des errements d'un écrivain poète qui veut se consacrer à son art et à lui seul. Il refuse les emplois rémunérateurs, la vie normée et disciplinée des citoyens qui sont dans le système, et ornent leur salon d'aspidistras ...
Si Gordon lutte contre le système, il accepte néanmoins l'aide de sa soeur Julia qui sacrifie pour lui, le seul membre de la famille qui semble doté d'atouts pour « réussir dans la vie », ses maigres économies. Il consent également a accepter l'aide de son ami Ravelston. Ami qui lui-même traverse une profonde crise morale. En effet, Ravelston a beaucoup de mal à concilier ses idéaux socialistes avec son aisance financière. Il n'y peut rien, mais il est né dans l'aisance et n'a pas besoin de travailler pour vivre. Il tente de s'acheter une conscience en aidant son ami Gordon.
Dès le début, Gordon accepte la compromission. Même s'il refuse de se soumettre au dieu argent (money-God), il accepte néanmoins de sacrifier sa famille en la ruinant, ses amis en entraînant chez eux de profondes et douloureuses interrogations existentielles.
Et sa vie amoureuse n'est pas épargnée non plus. Il refuse l'amour de Rosemary sous prétexte que toutes les femmes ont le culte de l'argent et que celui-ci pervertit inévitablement les relations entre hommes et femmes.
Orwell peint la lente mais irrémédiable glissade de Gordon dans l'alcool, la saleté, la misère. Il en arrive à se dire même son art ne vaut plus la peine et il décide d'arrêter d'écrire.
Jusqu'au jour où … il sera rattrapé par le système. Et le Dieu-argent finira pas remporter la bataille.
Roman pessimiste s'il en est, Et vive l'aspidistra ! laisse peu de place aux idéalismes. Face au matérialisme, les idéaux les plus grands doivent un jour ou l'autre rendre les armes, ce n'est qu'une question de temps.
Au delà de la création littéraire qui est le sujet de ce roman, ce combat perdu d'avance n'est-il pas aussi celui des belles et nobles idées, qu'il s'agisse de l'adolescence, de l'humanisme, ... ?
Mais que l'on se console, si cette bataille perdue donne souvent lieu aux plus belles pages de la littérature et de la poésie, alors, on n'a pas vraiment tout perdu ...
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Pour savoir qui était George Orwell, qu'on ne connaît souvent que comme l'auteur de 1984 et La Ferme des Animaux, il faut lire la biographie de Stéphane Maltère parue en mai 2015 chez Gallimard. On y découvre comment Eric Blair est devenu peu à peu cet écrivain renommé, essuyant de nombreux échecs mais s'acharnant à son travail littéraire. le livre se lit comme un roman, et il m'a donné envie de lire, entre autres, Et Vive l'aspidistra dont le titre est plus un repoussoir qu'autre chose. Je ne sais pas pourquoi, mais il me donnait l'impression d'un texte sur une révolution en Amérique du Sud...
Mais l'aspidistra, c'est une plante récurrente dans le roman, dont la logeuse de Gordon Comstock se sert pour orner toutes ses fenêtres.
Gordon Comstock est un drôle de narrateur (le livre est écrit à la 3e personne, mais le point de vue interne nous donne directement accès aux pensées souvent mesquines de ce personnage qui fait figure, dès les premières lignes, d'anti-héros). Issu d'une famille pauvre, il a décidé de devenir écrivain. le problème, c'est que jusque là, à part son recueil de poèmes Souris, vendu à une centaine d'exemplaires, il n'a pas fait grand chose. Il refuse de gagner de l'argent et pourtant, se plaint de ne pas en avoir : il a quitté tous les emplois qui lui auraient permis de vivre confortablement! Il est désormais embauché dans une librairie/bibliothèque, où il passe dix heures par jour. le premier chapitre est hilarant : la description des personnages qui défilent à la librairie, la façon qu'a Gordon de les percevoir, est très drôle.


... Gordon Comstock est obsédé par l'argent, mais à l'inverse de tout le monde : il n'en veut pas. Il veut fuir tout emploi confortable qui rapporterait, et ce principe le conduit de plus en plus bas. Rosemary, sa petite amie, est d'une patience incroyable. Son ami socialiste, Ravelston, le supporte avec la même gentillesse, et lui ne veut rien entendre : non, on ne payera rien pour lui. Qu'il vive dans la misère, sans personne, il n'acceptera pas de reprendre cet emploi de publicitaire qu'il a quitté de son plein gré.
Le roman est un enfoncement progressif : Gordon se plaît à se laisser "couler", loin de l'ambition, du confort, quitte à vivre dans un taudis avec les punaises :
Symboliquement, son ennemi, c'est l'aspidistra : on trouve cette plante chez tous les gens de Londres, et tout particulièrement chez ceux que le système a happés. Il prend cette plante en haine et, où qu'il aille, il la rencontre.
La focalisation interne 3e personne rend familier de Gordon, au point que, comme son entourage, il nous agace, nous navre, mais on n'arrive pas à le trouver détestable. Pénible, oui, tellement à cheval sur ses principes absurdes qu'on le voit passer à côté de sa vie. Un chapitre, particulièrement, nous place dans cette position : Gordon a gagné 10 livres grâce à l'un de ses poèmes publié dans une revue américaine. Lui qui n'a pas d'argent va pouvoir mieux vivre quelque temps et, que fait-il? Il les claque en une soirée, sous l'oeil impuissant de Rosemary et de Ravelston, s'enivrant au point qu'il va finir en cellule.

C'est un livre drôle et grinçant aussi, dans lequel Orwell dévoile encore sa fascination pour la pauvreté, lui qui a été capable de vivre comme un miséreux pour pousser l'expérience jusqu'au bout. En est sorti le roman : Dans la dèche à Paris et à Londres, à lire aussi!





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Citations et extraits (22) Voir plus Ajouter une citation
La plupart du temps, quand aucun client ne venait, il passait son temps à lire la littérature de camelote sous couverture jaune que contenait la bibliothèque. Des livres de ce genre, vous pouvez en lire en moyenne un par par heure. C’est vraiment une « littérature d’évasion », cette denrée des bibliothèques à deux pence ! On n’a jamais rien inventé qui demande moins d’effort à l’intelligence ; même un film en comparaison exige un certain effort. Aussi, quand un client demandait un livre de telle ou telle sorte, que ce fût de la catégorie « Sexe » ou « Crime » ou « Ouest sauvage », ou « Roman d’amour », Gordon était en mesure de donner un conseil de connaisseur.
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- Mais qu’est-ce que le socialisme signifierait donc, selon toi ?
- Oh! Quelque chose dans le genre du « Meilleur des mondes » d’Aldous Huxley ; seulement pas si amusant. Quatre heures par jour dans une usine modèle, à serrer l’écrou n°6003. Rations distribuées, dans du papier imperméable à la graisse, à la cuisine communale. Excursions à pied en commun de la maison de Marx à la maison de Lénine et retour. Cliniques d’avortement gratuites dans tous les coins. Tout ça c’est bien dans son genre, bien sûr. Seulement nous n’en voulons pas.
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En un certain sens, l'extrême mépris qu'il avait pour son travail lui facilita les choses. Il put prendre en patience cette vie de bureau dénuée de sens, parce que, pas une minute, il ne la considéra comme définitive. D'une manière ou d'une autre, un jour, Dieu savait comment et quand, il s'en évaderait. Après tout, il y avait toujours à son actif le fait qu'il "écrivait". Un jour, peut-être, il serait capable de gagner à peu près sa vie en "écrivant"; et l'on se sent débarrassé de la puanteur de l'argent, si l'on est "écrivain", n'est-ce pas ? La vue de tous les types de son entourage, surtout des plus âgés, le mettait au supplice. Voilà ce que l'on devenait, à adorer le Dieu Argent ! S'établir, faire son chemin, vendre son âme pour une petite maison de banlieue et un aspidistra ! Se transformer en ce typique petit cuistre à chapeau melon - le "petit homme" de Strube - le docile petit-bourgeois qui pousse le verrou à fond vers les six heures quinze pour faire un dîner de pâté-maison et de compotes de poire en conserve; ensuite une demi-heure à écouter le concert symphonique de la B.B.C., et puis peut-être un brin de commerce charnel licite, si sa femme "se sent d'humeur à cela" ! Quel destin ! Non, on n'était pas destiné à vivre ainsi ! Il fallait sortir immédiatement de là, de la puanteur de l'argent. C'était une sorte de complot qu'il mijotait. Il était comme voué à cette guerre contre l'argent. Mais c'était encore un secret. Les gens du bureau ne le soupçonnèrent jamais d'avoir des idées peu orthodoxes. Ils ne découvrirent même jamais qu'il écrivait de la poésie - non qu'il y eut grand-chose à découvrir, car en six ans il n'eut pas vingt poèmes publiés dans des périodiques. À première vue, il était exactement pareil à tout autre employé de la City - rien qu'un soldat de l'armée de ceux qui, essaimant vers l'est le matin, vers l'ouest le soir, voyageaient debout, en se tenant à la courroie, dans les compartiments du métro.
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3. « Pour lui un livre était purement et simplement une marchandise, comme un pantalon d'occasion. Lui-même n'avait jamais lu un livre de sa vie, ni pu comprendre pourquoi il y avait des gens qui en lisaient. Son attitude à l'égard des collectionneurs qui passaient des heures courbés avec amour sur ses éditions rares était celle d'une prostituée sexuellement frigide à l'égard de sa clientèle. N'empêche qu'il semblait savoir, rien qu'en le prenant dans ses mains, si un livre avait ou non de la valeur. Sa tête était une véritable mine de renseignements sur les ventes aux enchères et les dates des éditions originales, et il avait un flair merveilleux pour dénicher une bonne affaire. Sa manière préférée d'acquérir des marchandises, c'était d'acheter en bloc les bibliothèques des personnes qui venaient de mourir, particulièrement celles des pasteurs. Chaque fois qu'un pasteur mourait, M. Cheeseman arrivait sur les lieux avec la promptitude d'un vautour. Les pasteurs, expliqua-t-il à Gordon, ont si souvent de bonnes bibliothèques et des veuves ignorantes. » (pp. 281-282)
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Le regard terne, il contempla le mur de livres. Il les haïssait tous, les vieux et les nouveaux, les livres pour intellectuels et les livres pour gens dépourvus de sens artistique, les moroses et les gais. Leur simple vue lui rappelait sa propre stérilité. Car lui qui était censé être un "écrivain", il n'était même pas capable d'"écrire"! Car ce qui était en question, ce n'était pas simplem le fait de ne pas obtenir la publication, mais le fait de ne rien produire,ou presque rien. Et toute cette littérature camelote encombrant les rayons, et bien, elle existait, en tout cas ; c'était tout de même quelque chose de réaliser.
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