La guerre civile est déclarée, est, une fois la dernière page atteinte, un roman particulièrement ambigu.
D'un côté, on ressent une véritable sensibilité, une colère sourde mais prête à émerger et à se deverser sur une société de travailleurs où les mots "Liberté, Egalité, Fraternité" ne sont plus qu'un slogan destiné à mieux reconnaitre l'Hotel de ville.
Le personnage d'Arnaud n'est pas un idéaliste à côté de ses pompes, il incarne une génération qui encaisse de plein fouet les effets des crises multiples qui s'ajoutent les unes aux autres et qui obscurcissent le bout du tunnel, alors que les réclames publicitaires abrutissantes nous promettent un eden qui ne sera jamais le nôtre.
D'un autre côté,
Christophe Paviot a voulu faire de son héros un personnage neutre dans sa globalité, un "monsieur tout-le-monde" invisible, mais le problême est qu'il a si bien travaillé cet aspect de son "jeune premier" (qui n'en est pas un) que la sobriété et la discretion dont il s'entoure a fini par "m'eloigner" quelque peu du héros, et par ce biais, de son univers et donc du roman.
Le roman est ambigu, parce que l'histoire coule de source, et si j'en viens à regretter de ne pas avoir frissonner pour le personnage, inclure des courses-poursuites sans queue ni tête ou un suspense à l'américaine aurait été une trahison pur et simple du message et de l'idée de l'auteur.
Notamment parce qu'Arnaud n'est pas un Che Guevarra en puissance, il n'entend pas révolutionner le monde pour finir comme illustration de t-shirts pour ados. Arnaud, c'est moi, c'est nous, c'est n'importe quel Français qui subit la société, non pas comme une claque violente, mais comme un cancer qui s'immisce et se glisse sournoisement dans le seul but de ronger les êtres de l'intérieur.
A la différence près qu'Arnaud agit. Pas comme un syndicaliste qui se mettra en grève, pas comme un encarté qui collera des affiches.
Arnaud est une ombre amère, une "grenade dégoupillée", et agit en tant que tel, afin de se venger de cet univers qui le dévore.
J'ai beaucoup hésité avant de mettre une note.
Je partais sur un 3/5, parce que le fossé qui s'est creusé entre le héros et moi à cause de "l'invisibilité du premier", fut tel que la fin ne m'a pas véritablement provoqué d'émotion, même si ce n'était pas le but requis.
Mais je finirai sur un 4/5, parce que le ton est juste, le propos est d'actualité, et surtout parce que ce n'est pas "imaginé" par un rond-de-cuir grabataire qui va tenter de se projeter, avec succès ou non, dans la peau d'un cadre trentenaire.
Le discours d'Arnaud, et de
Christophe Paviot, a cette particularité étonnant de venir du coeur, et d'être à fleur de peau à la fois.