Mauvais fils

George Pelecanos, roman après roman, tisse la sombre épopée de sa ville, Washington, en revenant sans cesse sur son motif pour n'en donner à voir, le plus souvent, que l'envers : les quartiers déshérités, les ravages de la drogue, la criminalité… Ses histoires poussent comme des mauvaises herbes entre les pavés de la déglingue et, quand il s'aventure dans les parages de la classe moyenne, la réussite matérielle de ses personnages a le goût amer des fruits cueillis trop tard ou déjà tombés au sol.
Thomas Flynn gère une entreprise de pose de moquettes qui marche plutôt bien, une affaire qu'il a bâtie à la force du poignet avec l'aide de sa femme Amanda. Par chance, la maison héritée de ses parents se trouve dans un quartier qui accueille une population de plus en plus aisée et Flynn, sans posséder tous les signes ostentatoires de richesse des professions libérales, ne se débrouille pas trop mal. Hélas, son fils de dix-sept ans, Chris, a suivi un parcours de délinquant qui l'a conduit à l'établissement pénitentiaire pour mineurs de Pine Ridge. Là, ce fils de bonne famille, surnommé Le Blanc par ses compagnons d'infortune, se retrouve plongé dans un environnement délétère qui joue peu à peu le rôle de révélateur sur ses propres dérives.
Si Pelecanos s'attarde longuement sur l'emprisonnement de Chris Flynn et les relations qu'il noue avec certains jeunes du centre, il s'intéresse surtout au difficile chemin de sa réinsertion. Sera-t-il tenté à nouveau par l'argent facile ? Capable de résister aux tentations qu'il suscite ?
Mauvais fils ne séduira peut-être pas les amateurs de polars nerveux car, à la manière du norvégien Gunnar Staalesen dans Pour le meilleur et pour le pire, Pelecanos prend son temps pour installer l'histoire dans sa complexité psychologique. Il clôt le livre sur l'émotion incandescente d'une réconciliation avec, dans un contrechamp époustouflant, le constat de la fragilité de l'existence : un rappel salutaire de l'imprévisibilité de nos trajectoires en ce monde.

Thomas Flynn aurait voulu que son fils, Chris, soit meilleur que lui. Mais, malgré une enfance passée dans un quartier plutôt huppé, avec des parents attentionnés, Chris est devenu une petite frappe égoïste jusqu'à atterrir dans une prison pour mineurs. À sa sortie, embauché avec un de ses anciens codétenus dans l'entreprise de pose de moquette de son père, Chris tente de s'amender. Et puis un jour, sous le parquet d'une maison dans laquelle ils travaillent, Chris et son ami Ben découvrent un sac contenant 50 000 dollars. Un argent qui doit bien appartenir à quelqu'un qui aura sans doute très envie de le récupérer.

Revoilà donc George Pelecanos pour une nouvelle chronique de la vie à Washington et des contradictions qui tiraillent les hommes. C'est toujours avec un certain plaisir que l'on retrouve cet auteur fin et son regard aigu et bienveillant sur sa ville et ses habitants. C'est que Pelecanos à ce don de vous embarquer tout au long de quatre cents pages dans une intrigue qui aurait pu tenir en cinquante grâce à sa capacité à vous attacher aux personnages et à instiller tout doucement juste assez d'action et de suspense pour vous donner envie de continuer à tourner les pages pour connaître le fin mot de l'histoire.
Et, de fait, cela fonctionne toujours avec Mauvais fils. Toutefois, peut-être trop à l'aise avec sa recette, Pelecanos tend à nous la resservir à chaque fois en se contentant d'en changer un peu l'assaisonnement. On y trouve de moins en moins de sel, mais de plus en plus de sucre. Cela donne des personnages attachants, certes, dont les portraits sont plutôt bien brossés, mais qui manquent de plus en plus de ces zones d'ombres qui donnaient cette épaisseur à un Nick Stefanos, un Peter et un Dimitri Karras, un Derek Strange ou un Terry Quinn.
Et, depuis quelques temps (depuis Les jardins de la mort, pour moi), l'impression est tenace de lire toujours plus ou moins la même histoire de braves gars qui ont fait une bêtise et passent leur vie à essayer de l'expier avec des accents de plus en plus mélodramatiques.

Alors, oui, Mauvais fils est un bon roman et, sans doute, de ces livres qui se placent sans problème au-dessus du gros de la production en terme de qualité et de profondeur.
Reste que George Pelecanos nous a pourtant habitué à mieux et nous a rendu peut-être plus exigeant. Voilà un roman qui nous fait passer un agréable moment de lecture mais qui, pour moi, manque de cette bande-son qui nous faisait vibrer, de héros vraiment borderline, d'une peinture plus acerbe et plus aigue de Washington et de ses habitants. La sauce est encore bonne mais elle prend un peu moins bien. Espérons que la nouvelle série annoncée avec un héros enquêteur vétéran de la guerre en Irak et la reprise des aventures de Derek Strange nous permettrons de retrouver cette fougue qui nous avait séduits à la lecture de Funky Guns ou de Blanc comme neige.

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Incarcéré à l'âge de 17 ans, Chris Flynn retrouve ses parents à sa sortie de prison. Bien que déçu par ce fils qui ne ressemble en rien à la version idéalisée qu'il s'en était faite, Thomas Flynn, son père, décide de ne pas le laisser tomber et lui offre une place dans son entreprise de pose de tapis. La vie semble retrouver son cours normal et l'attitude générale de Chris semble trouver grâce aux yeux de son père : il arrive à l'heure, fait le boulot correctement -bien sûr il est loin d'avoir le niveau de compétence de son meilleur ouvrier- et fréquente une jeune fille très appréciée de ses parents. Mais le destin funeste veille et place sur la route de Chris et de son compagnon de travail un sac rempli de billets. Ne sachant ni à qui il appartient ni depuis combien de temps il est planqué à l'endroit où ils l'ont trouvé, les deux garçons décident...de le laisser là. Chris est sûr de la sagesse de sa décision, ne regrette rien et n'en parle à personne. Il n'en va pas de même de son compagnon.
Il en va souvent ainsi dans les intrigues de Pelecanos : au-delà du noeud strictement policier de son intrigue, l'auteur s'attache aux conditions sociales de ses personnages et au cadre socio-économique
de leur environnement. Avec ce 'Mauvais fils', ce sont surtout les relations familiales qui retiennent son attention : comment les parents de Cris se sont rencontrés, comment leur relation amoureuse a évolué, ce que la perte de leur premier enfant a induit dans leur manière d'éduquer Chris et comment Chris s'est retrouvé, bien qu'issu d'un environnement protecteur et relativement aisé, à prendre de la drogue et à basculer dans la petite délinquance. Comme souvent dans les romans américains, Pelecanos se contente de montrer, sans proposer de circonstances atténuantes ou d'explications. Chris non plus n'arrive pas à expliquer son comportement. A un moment, il a fait certaines choses, illégales et blessantes pour certains, et il a donné l'impression de se détourner de ses parents -et principalement de son père. Pourtant, quand il y repense, il sait que jamais il n'a oublié la douce enfance que celui-ci lui a permis de vivre ni la relation privilégiée qu'ils entretenaient. A un moment, son enfance était finie et ses premiers pas d'adulte ont été posés dans une mauvaise direction. Homme de devoir et sans doute influencé par sa femme, Thomas a certes pris ses distances, sans pour autant cesser de veiller, de loin, sur Chris. La nouvelle épreuve mise sur leur route et racontée ici sera l'occasion pour les deux hommes de se prouver mutuellement à quel point leur lien familial était resté solide. Pelecanos creuse ici la veine de ses précédents romans ('Drama City', 'Un jour en mai' ou 'Les jardins de la mort'), dans laquelle il semble cette fois pourtant un rien s'appesantir. Si l'intrigue est ponctuée par de grands et beaux moments, et si elle illustre à merveille les failles béantes de communication entre parents et enfants, il n'en reste pas moins qu'elle semble se traîner quelque peu, tant la base policière se révèle mince. Pour son prochain opus, on espère retrouver l'auteur dans un forme plus rock'n'roll, avec intrigue tordue et personnages plus toniques à l'appui.

L'histoire :
Après avoir commis plusieurs délits et déçu son père, Chris se retrouve dans la prison pour mineurs de Pine Ridge dans la banlieue de Washington. Il y découvre les aléas de l'incarcération et malgré le fait d'être le seul Blanc, parvient à s'intégrer. Dix ans plus tard, il mène une vie rangée. Il travaille pour son père comme poseur de moquette avec Ben, un de ses anciens co-détenus devenu son ami. Un jour sur un chantier, les deux collègues tombent sur un sac contenant 50 000 dollars. Pour Chris, pas question d'y toucher mais Ben est plus hésitant. Cette découverte va alors faire resurgir le passé.

Mon avis :
Ce roman traite de plusieurs thèmes : la délinquance issue des milieux défavorisés, la réinsertion des anciens prisonniers, les relations père-fils compliquées, le passage à l'âge adulte ou encore le racisme. Tout ça réuni dans un seul et même livre écrit par George Pelecanos, producteur et scénariste de la série "Sur écoute" (série qui m'est totalement inconnue malgré sa célébrité vantée au dos du livre).
L'auteur nous sert une écriture très détaillée et assez terre-à-terre, on ressent bien son métier de scénariste derrière sa plume. C'est un roman de bonne construction qui se lit aisément. On peut le diviser en trois grandes parties : Chris délinquant prisonnier, Chris retour à la vie normale et Chris tiraillé entre ses deux personnalités. le hic c'est que j'ai ressenti de l'ennui à la lecture des deux premières (il ne se passe pas grand chose...) mais j'ai adoré la dernière. L'histoire aurait pu être plus intéressante si l'action avait débuté plus tôt.
Cependant la lutte psychologique de Chris entre le Bien et le Mal est très bien décrite, ce qui engendre un personnage réaliste et complet. Mon favori est celui de Ben, collègue et ami de Chris, qui a ce côté touchant dû à son passé foireux, il a cet espoir et cette sensibilité qui en font quelqu'un d'attachant.
Malgré ce que l'on pourrait croire au vu des sujets traités, l'auteur n'est pas tombé dans la caricature et ça c'est un point très appréciable. le dénouement quant à lui ressemble à une leçon de morale, pas celle qui agace, non, mais celle qui fait réfléchir.
C'est vraiment dommage que les deux-tiers de ce livre soient si mous, sinon on aurait eu affaire à un roman réussi. Je le termine sur une note positive qui malheureusement n'effacera pas la lassitude ressentie au début. Et vous, qu'en dites vous ?
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Mauvais fils est un roman qui, comme souvent chez Pelecanos, débute par une connerie adolescente. Ici, c'est Chris Flynn qui s'y colle. Rapidement, on quitte le domaine du polar pour aborder des thèmes variés : devenir adulte, la relation avec ses parents... Un roman intéressant mais pas renversant. Pas vraiment un polar, pas vraiment un roman noir, tout en restant lié aux deux genres. C'est une belle étude psycho-sociologique, à laquelle il manque toutefois un peu de rythme au niveau du récit et un peu d'inventivité au niveau du langage car j'ai trouvé le style assez pauvre.