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Citations sur Les choses : Une histoire des années soixante (148)

Où étaient les dangers? Où étaient les menaces? Des millions d'hommes, jadis, se sont battus, et même se battent encore, pour du pain. Jérôme et Sylvie ne croyaient guère que l'ont pût se battre pour des divans Chesterfield. Mais c'eût été pourtant le mot d'ordre qui les aurait le plus facilement mobilisés. Rien ne les concernait, leur semblait-il, dans les programmes, dans les plans: ils se moquaient des retraites avancées, des vacances allongées, des repas de midi gratuits, des semaines de trente heures. Ils voulaient la surabondance; ils rêvaient de platines Clément, de plages désertes pour eux seuls, de tours du monde, de palaces.
L'ennemi était invisible. Ou, plutôt, il était en eux, il les avait pourris, gangrenés, ravagés. Ils étaient les dindons de la farce? De petits êtres dociles, les fidèles reflets du monde qui les narguait. Ils étaient enfoncés jusqu'au cou dans un gâteau dont ils n'auraient jamais que les miettes.
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On ne peut vivre longtemps dans la frénésie. La tension était trop forte en ce monde qui promettait tant, qui ne donnait rien.
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... de nos jours et sous nos climats, de plus en plus de gens ne sont ni riches ni pauvres : ils rêvent de richesse et pourraient s’enrichir : c’est ici que leurs malheurs commencent.
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Il est évident qu’on peut toujours se mettre devant une feuille de papier et essayer de dire, disons, ce que l’on a dans la tête. Maintenant, en général, dans la tête, on n’a pas grand-chose. On a de beaux sentiments, on a des idées généreuses, on a des expressions intelligentes, on a des bouts de phrase, et toutes ces choses-là ne servent à rien. Il faut quelque chose, une espèce de modèle littéraire qui vous permette d’avancer d’une manière un peu plus sûre.

Pouvoirs et limites du romancier français contemporain
Conférence du 5 mai 1967 à l’université de Warwick
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Il leur semblerait parfois qu’une vie entière pourrait harmonieusement s’écouler entre ces murs couverts de livres, entre ces objets si parfaitement domestiqués qu’ils auraient fini par les croire de tout temps créés à leur unique usage, entre ces choses belles et simples, douces, lumineuses. Mais ils ne s’y sentiraient pas enchaînés : certains jours, ils iraient à l’aventure. Nul projet ne leur serait impossible. Ils ne connaîtraient pas la rancœur, ni l’amertume, ni l’envie. Car leurs moyens et leurs désirs s’accorderaient en tous points, en tout temps. Ils appelleraient cet équilibre bonheur et sauraient, par leur liberté, par leur sagesse, par leur culture, le préserver, le découvrir à chaque instant de leur vie commune.
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Ce serait une pièce du soir. Alors l’hiver, rideaux tirés, avec quelques points de lumière — le coin des bibliothèques, la discothèque, le secrétaire, la table basse entre les deux canapés, les vagues reflets dans le miroir — et les grandes zones d’ombres où brilleraient toutes les choses, le bois poli, la soie lourde et riche, le cristal taillé, le cuir assoupli, elle serait havre de paix, terre de bonheur.
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Leur appartement serait rarement en ordre mais son désordre même serait son plus grand charme. Ils s’en occuperaient à peine : ils y vivraient. Le confort ambiant leur semblerait un fait acquis, une donnée initiale, un état de leur nature. Leur vigilance serait ailleurs : dans le livre qu’ils ouvriraient, dans le texte qu’ils écriraient, dans le disque qu’ils écouteraient, dans leur dialogue chaque jour renoué. Ils travailleraient longtemps. Puis ils dîneraient ou sortiraient dîner ; ils retrouveraient leurs amis ; ils se promèneraient ensemble.
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Pour ce jeune couple, qui n'était pas riche, mais qui désirait l'être, simplement parce qu'il n'était pas pauvre, il n'existait pas de situation plus inconfortable. Ils n'avaient que ce qu'ils méritaient d'avoir. Ils étaient renvoyés, alors que déjà ils rêvaient d'espace, de lumière, de silence, à la réalité, même pas sinistre, mais simplement rétrécie - et c'était peut-être pire -, de leur logement exigu, de leurs repas quotidiens, de leurs vacances chétives. C'était ce qui correspondait à leur situation économique, à leur position sociale. C'était leur réalité, et ils n'en avaient pas d'autre.
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Un vieil étudiant, c'est quelque chose de sinistre ; un raté, un médiocre, c'est plus sinistre encore.
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Et c'est ainsi qu'après quelques années de vie vagabonde, fatigués de manquer d'argent, fatigués de compter et de s'en vouloir de compter, Jérôme et Sylvie accepteront- peut-être avec gratitude - le double poste responsable, assorti d'une rémunération qui pourra, à la rigueur, passer pour un pont d'or, que leur offrira un magnat de la publicité [...] Ce ne sera pas vraiment la fortune. Ils ne seront pas presidents-directeurs généraux. Ils ne brasseront jamais que les millions des autres. On leur en laissera quelques miettes pour le standing, pour les chemises de soie, pour les gants de pécari fumé. Ils présenteront bien. Ils seront bien logés, bien nourris, bien vêtus. Ils n'auront rien à regretter.
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