Je m'étonne que ce joli récit , aux allures de conte tendrement fantastique, n'ait recueilli que si peu de commentaires et de critiques. Se pourrait-il qu'il soit passé à peu près inaperçu ?
Ce serait bien dommage. Car les lecteurs , et surtout les lectrices qui ont le sens de l'humour, et du merveilleux, y trouveront un récit plein de grâce, de charme mais aussi d'émotion.
Pour moi, mais je me trompe peut-être, un petit roman délibérément symbolique, et qui me semble -t-il nous parle en termes voilés, hautement poétiques, d'une addiction qui doit ressembler à l'anorexie, et même à l'anorexie morbide. La Sirène m'apparaît en effet comme la métaphore d'une créature intérieure dont la narratrice s'était rendue prisonnière, mais avec qui elle a pu couper les amarres. A travers l'épanouissement puis l'effacement de sa créature marine, Cypora Petitjean-Cerf donne ainsi vie et forme aux névroses, à l'enfermement dans la solitude, le repli sur soi, dans lesquels s'emmurait son personnage. Le méchant/gentil restaurateur chinois, avec ses gardes du corps armés de mitraillettes et ses mises en garde qui ne seront pas écoutées, n'étant peut-être eux aussi qu'une métaphore du corps médical et des soignants...
Voilà, c'est ma lecture, et j'en mettrais (pour ainsi dire) ma main au feu.
Cet insolite "Musée de la Sirène " fonctionne, quoi qu'il en soit, comme une très jolie fable, particulièrement sensible, délicate et poétique, sur la reconquête de soi. Et qui me donne diablement envie de lire d'autres livres de ce jeune auteur!
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Drôle de livre, vraiment que ce "Musée de la sirène ! Mais aussi, drôle de sirène !
Est-ce un conte ? A moitié !
Une histoire vécue ? Sans doute pas mais on y reconnait l' évocation de sentiments qui sonnent si juste qu'ils nous émeuvent profondément.
Est-ce alors un roman d'aventure ? Vous n'y êtes pas même si un chinois saugrenu nous plonge dans des rebondissement rocambolesques mâtinés de farce et d'humour.
Ne serait-ce pas alors un peu l'histoire de toutes les femmes, de la jeunesse à l'attaque des ans, racontée de manière originale et dans un style si étourdissant qu'il tient le lecteur en haleine ? Je le crains.
Une consolation pour nous toutes cependant : Peut-être, un jour, aurons nous notre musée !
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La vie d'Annabelle va changer lorsqu'un jour elle installe une sirène volée dans un restaurant chinois dans sa salle de bain. Après quelques difficultés, une grande amitié va naître de cette rencontre. Un joli roman que j'ai apprécié de lire.
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« J’ai passé trois jours de suite dans la salle de bains. Mon chevalet dressé près de la baignoire, mes tubes de peinture disposés sur un tabouret, j’ai peint la sirène. Elle semblait ravie. Je ne l’avais jamais vue rouler ces yeux-là. A tel point qu’à un moment une chose incroyable s’est produite : elle s’est mise à chanter. Mais pas comme les sirènes qui rendent les marins fous et font échouer leurs bateaux, non. Ca ressemblait à une plainte d’animal, modulée pour former des notes. A la place des paroles, elle chantait des sons inarticulés de bête, mais très beaux. Sur le moment, ça m’a bouleversée. J’ai dû m’asseoir. Je me suis arrêtée de penser, de vouloir, de désirer, de craindre. Je l’écoutais. Quand elle a cessé de chanter, j’ai recommencé à peindre. Ses joues avaient rosi et j’ai dû changer un peu mes couleurs. »
Je l'aime, donc je n'ose pas le regarder. Son visage vacille, se tord et se perd au milieu des visages que je lui invente. Manger les vrais traits, oublier, reconstituer : c'est le travail absurde de la mémoire qui tricote l'image d'amour.
Le jour ou la peur aura disparu de ma vie, je serai devenue une autre.
La petite semelle noyée, engloutie, je n'en ai parlé à personne. Les gens s'imaginent tous la sirène certes amoindrie, certes fatiguée, mais la sirène tout de même, belle et tragique, qui sombre dans la mer. C'est ce que tout le monde pense. Pour la semelle, vraiment, personne ne sait. C'est une image que je chéris car elle n'appartient qu'à moi. C'est une plaie secrète que j'entretiens.
Cette semelle ridicule, c'est la petite source de douleur intime dont j'ai besoin pour créer.
Cypora Petitjean-Cerf - La belle année .A l'occasion du Salon du Livre de Paris 2012, Cypora Petitjean-Cerf vous présente son ouvrage "La belle année" aux éditions Stock.http://www.mollat.com/livres/cypora-petitjean-cerf-belle-annee-9782234071766.htmlNotes de Musique : Taiko Les tambours de Tokyo - 8 - Sukeroku Bayashi