Le jeune Giovanni Pico della Mirandola
(1463-1494), la tête pleine de « guirlandes théologiques »,
témoigne d'une atmosphère qui sent le bûcher...
Dans la surenchère ambiante,
surgit la figure de l'Homme Élu, plus admirable que les anges ;
« Qui n'admirerait notre caméléon ? »
« Quis hunc nostrum chameleonta non admiretur ? »...
Cette image assez charmante de l'homme condamné à être libre,
est toutefois étayée par l'armature très classique de l'exceptionnalité humaine ;
Les amateurs d'idéalisme transi apprécieront la prose de Pico,
livrée ici en français et en latin ;
Ce petit livre est en fait une introduction à une armada de thèses,
sur la science morale, la dialectique et la piété théologique,
qui constituent sa philosophie tripartite...
Ici comme ailleurs, Dieu ou l'Homme Élu m'est apparu comme une excroissance égotiste ;
Le triptyque qui a plutôt retenu mon attention, est le croisement continuel des sources arabes, grecques et latines.
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Les origines de l'humanisme.
Qu'est ce qui distingue l'homme de l'animal ?
Pour Pico, l'homme n'est pas un être naturel, il dispose d'une particularité qui le distingue des animaux : la liberté mais également la perfectibilité.
C'est une réflexion profonde pour cette époque : pour lui , l'homme est artificiel, n'a pas les dons naturels ni de place propre qui sont attribués aux animaux.
C'est très certainement le fondement des droits de l'homme et très en avant garde sur le contrat naturel des animaux.
Cet auteur a été mésestimé.
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Si nous ne t'avons donné, Adam, ni une place déterminée, ni un aspect qui te soit propre, ni aucun don particulier, c'est afin que la place, l'aspect, les dons que toi-même aurais souhaités, tu les aies et les possède selon ton vœu, à ton idée... Tu pourras dégénérer en formes inférieures, qui sont bestiales ; tu pourras, par décision de ton esprit, te régénerer en formes supérieures, qui sont divines.
Très vénérables Pères, j’ai lu dans les écrits des Arabes que le Sarrasin Abdallah, comme on lui demandait quel spectacle lui paraissait le plus digne d’admiration sur cette sorte de scène qu’est le monde, répondit qu’il n’y avait à ses yeux rien de plus admirable que l’homme. Pareille opinion est en plein accord avec l’exclamation de Mercure: «O Asclepius, c’est une grande merveille que l’être humain».
Si donc vous voyez ramper sur le sol un homme livré à son ventre, ce n’est pas un homme que vous avez sous les yeux, mais une bûche; si vous voyez un homme qui, la vue troublée par les vaines fantasmagories de son imagination, comme par Calypso, et séduit par un charme sournois, est l’esclave de ses sens, c’est une bête que vous avez sous les yeux et non un homme.
C'est la philosophie, précisément, qui m'a appris à dépendre de ma conscience plutôt que des jugements du dehors, et à toujours me soucier moins des mauvaises opinions sur mon compte que de la nécessité de ne rien dire ou faire de mal moi-même.
Mais à quoi tend tout cela? A nous faire comprendre qu’il nous appartient, puisque notre condition native nous permet d’être ce que nous voulons, de veiller par-dessus tout à ce qu’on ne nous accuse pas d’avoir ignoré notre haute charge, pour devenir semblables aux bêtes de somme et aux animaux privés de raison.