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EAN : 9782702016930
396 pages
Buchet-Chastel (01/04/1996)
3.73/5   15 notes
Résumé :
Charles Plisnier s'est inspiré de son itinéraire personnel pour écrire cette suite narrative à travers laquelle cinq personnages, qu'il met radicalement en situation, s'éprouvent, se livrent avec violence et se déchirent.
Charles Plisnier se charge d'une corvée ingrate entre toutes, relater la destruction d'une espérance collective, incarnée par le communisme. Toute péripétie est pour le narrateur une occasion de regarder le monde autrement. Plisnier excelle... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (3) Ajouter une critique
C'est peut-être en partie parce qu'il était un auteur belge que Charles Plisnier a manqué de peu le Goncourt pour son précédent ouvrage "Mariages", mais c'est en ajoutant une nouvelle inédite nommée "Iégor" à un recueil de nouvelles partiellement éditées qu'il retente sa chance en 1937 avec "Faux Passeports". Bien lui en a pris car il a finalement remporté ce prix convoité et amplement mérité du premier Goncourt "non-Français". C'est grâce aux Éditions Espace Nord que chacun peut aujourd'hui découvrir ou redécouvrir cet ouvrage qui présente un double intérêt.

Le premier c'est pour moi la redécouverte d'une page d'Histoire. En effet, ce livre, recueil de cinq nouvelles sur le thème de la lutte de l'Internationale communiste, a ressemblé pour moi à un "Rendez-vous en terre inconnue», le communisme n'étant pas une période ni un mouvement qui m'intéresse particulièrement, j'ai donc fait des révisions intensives et finalement très intéressantes. L'auteur appartenait à l'Internationale communiste et en fut chassé en 1929 au congrès d'Anvers pour avoir choisi le camp des trotskistes. A l'instar de l'auteur, le narrateur dont il se démarque pourtant avec une insistance suspecte "Le "je" de ce livre n'est pas moi." a suivi le même parcours. Il nous conte donc à travers cinq nouvelles des rencontres faites au gré de son parcours, des rencontres fortes et marquantes pour lui, révélatrices d'une époque clef de l'Histoire.

C'est ici que réside le second intérêt de ce livre, car Plisnier nous montre à l'aide de son narrateur, le portait d'une époque en souffrance, où les protagonistes luttent pour un idéal qui leur échappe, où il fait le constat navrant de la dérive communiste au moment où Staline organise les procès de Moscou. Ce constat est ici fait sans amertume, sans critique acerbe, bien plus, il est fait avec de l'amour, l'amour d'un Parti qu'il ne reconnaît plus et l'amour des ces êtres qui s'y sont dédiés corps et âmes, convaincus jusqu'au bout, défenseurs du Parti envers et contre tout, "On peut donner au Parti autre chose que sa vie."

L'écriture de Plisnier est très belle, très académique, parfois un peu trop alambiquée à mon goût mais il ne faut pas oublier qu'elle date de 1937, il m'a donc fallu un certain temps pour en tirer toute la substance. Ben oui parce qu'aujourd'hui on cause quand même beaucoup moins bien, mais on va me dire allons petite réac, la langue évolue, il faut vivre avec son temps, alors Yo Charles, je t'ai kiffé grave ! Malgré quelques paragraphes qui m'ont semblé un peu longuets, il nous sort des petites merveilles d'une grande sensibilité qui dénotent non seulement un grand intérêt pour l'être humain en général mais également une clairvoyance admirable quant aux jugements qu'il porte. Et comme le suggère la postface c'est effectivement l'histoire de Iégor qui a définitivement fait pencher ma balance en faveur de ce roman, un magnifique portrait à ne pas manquer.

Parlant de postface, je dois avouer que celle-ci, écrite par Pierre Mertens est très intéressante et m'a beaucoup aidée pour décoder les feuilles de Plisnier car - non le Plisnier n'est pas un arbre ! Hum... - car, donc, j'en avais bien besoin ! J'en recommande donc la lecture à quiconque qui, comme moi, se sentirait un peu perdu dans cet univers dédié à l'Internationale communiste. L'essentiel est donc, qu'au delà de l'Histoire de ce parti, c'est le parcours de ces individus, leur force de caractère, leurs idéaux, leur dévouement qui permet de comprendre un peu mieux les rouages d'une grande machine capable d'emporter dans ses entrailles des femmes et des hommes dépassés par la folie de l'Histoire.
En cela, ce livre constitue une analyse unique et implacable, que je crois transposable à de nombreuses autres situations politiques ou religieuses, de l'embrigadement inconscient capable de pousser à toutes les extrémités et c'est un coup de génie que Plisnier nous livre avec un temps d'avance sur son époque.

Merci aux Éditions Espace Nord et à Masse Critique Babelio.
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La Fédération Wallonie-Bruxelles remet en valeur les titres du patrimoine littéraire belge francophone. La collection Espace Nord, propriété de la Fédération, présente le prix Goncourt 1937 : « Faux passeports » de Charles Plisnier. Voilà une belle initiative !
Charles Plisnier est aujourd'hui méconnu voire oublié. Il est l'auteur d'une oeuvre littéraire importante. Son parcours politique conditionne le sens de son livre « Faux passeports ». Admirateur de la révolution russe de 1917, il devient membre du parti communiste, mais il en est exclu en 1927 pour « déviationnisme trotskiste ».
Publié en 1936, le livre s'enracine dans le contexte historique de l'époque. Les procès politiques se succèdent en URSS alors que les périls montent en Europe.
L'épigraphe « le je de ce livre n'est pas moi. » qui précède l'Avertissement de l'auteur ne saurait égarer. Charles Plisnier témoigne d'évènements et de rencontres mais le romancier s'en est « démarqué » pour ne « pas désigner des vivants … à la police ou aux comités des partis » (p 12). Les cinq récits illustrent l'engagement sans limite de militants révolutionnaires, clandestins, exilés. Tendus vers l'action, leur conviction est sans faille. Santiago, anarchiste espagnol décide de retrouver son pays pour peser sur le destin de la nouvelle république. Dikta pousse l'auteur à retrouver une militante communiste Multi qui défie la torture et la mort. Carlotta et Alessandro ont fui l'Italie fasciste, Corvelise culpabilise d'avoir déserté en 1914. Le cinquième récit paraît le plus abouti, il oppose le narrateur à Iégor, un bolchévik de la première heure. Les grands procès de Moscou ouvrent un débat sur les limites de l' engagement. Iégor soutient " qu'on peut donner au parti autre chose encore que sa vie ".Les décisions du parti dépassent l'entendement du militant , il est nécessaire de s'y plier. Le narrateur a de l'empathie pour ces militants, il observe et cherche à comprendre. La conclusion de l'auteur intitulée « Adieu à ces créatures » lui permet d'évoquer quelques figures célèbres emportées par la tourmente stalinienne. Une postface de Pierre Mertens, écrite en 1991, éclaire ce « roman » à la chute de l'URSS. « Faux passeports » appartient à la lignée des livres prémonitoires : « Retour de l'URSS », « le Zéro et l'Infini »… La qualité et la finesse de l'écriture explique, de surcroît, que « Faux Passeports » fut le premier lauréat belge à obtenir le prix Goncourt. « Faux passeports » de Charles Plisnier est un livre réussi qui mérite amplement une (re)découverte. Merci à Babelio, aux Editions Impressions Nouvelles et à la Fédération Wallonie-Bruxelles pour cette lecture stimulante.
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Quand je suis tombé sur le livre, il n'y avait pas de résumé sur la quatrième de couverture, alors en voyant le titre j'ai pensé que c'était un livre policier, sur un gangster qui essaie de passer les frontières avec des faux passeports...

Ahah, eh ben... non, loin de là.

Pour le coups, nous sommes sur un ouvrage contenant diverses nouvelles qui ont comme points communs, le communisme et ses adhérents (une nouvelle = un adhérant avec son histoire)

Sur ce livre, j'ai eu des moments où j'avais du mal à suivre l'histoire et a la comprendre. Peut-être que c'est de ma faute, que je n'étais pas suffisamment concentré pour bien tout comprendre, je ne sais pas.

Mais je sais que je ne reviendrais pas sur le livre avant longtemps.
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Citations et extraits (10) Voir plus Ajouter une citation
Cet homme qu'on allait juger était de ces assassins particulièrement lâches qui tuent de loin avec les mains des autres. Sa disparition devait sauver beaucoup de vies et les meilleures. Mais de penser qu'il fût d'avance condamné et que je fusse l'un de ses accusateurs me faisait regarder le monde autrement. D'une âme assez tranquille, j'avais parlé de guerres, de révolutions, mais est-ce que je me représentais ces choses, ou si seulement je remuais des mots plus lourds, plus tragiques. Pour la première fois je réalisais ce que pèse une vie humaine.
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Carlotta reprochait à Alessandro d'être lâche et livré à mille faiblesses bourgeoises : le goût des mots, la peur des responsabilités, cette complaisance pour ses amis qui est la pire forme de la trahison. Elle disait qu'il pouvait, oui, risquer les Îles, la prison, le poteau ; que c'était bien facile de finir ainsi en une fois, d'avoir du courage ; mais qu'il avait peur des remords, comme un enfant du loup-garou.
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Mais je ne vis jamais femme plus abandonnée, plus adorante. Vraiment, oui, elle trouvait tout bien et beau. Qu'elle n'eût jamais connu de vrai plaisir, de vrai désir, j'en pouvais au moins douter. Si c'était son esprit seulement qui se vouait à cet homme, ah ! comme cet esprit devait pousser ses racines dans la chair pour qu'elle sourît ainsi de ce sourire de femme apaisée.
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En fait, je disais que je venais au communisme par les voies de la doctrine, mais je sais maintenant que ce qui me persuadait, c'étaient les tristes images de la vie : une ouvrière éblouie devant de faux bijoux, l'air content d'un garçon livreur mal lavé, les queues des cinémas, tout ce qui montrait la bourgeoisie appâtant les pauvres avec son matérialisme veule et l'appétit de la perdition.
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[...] ; je mesurais cette révolution qui s'acharnait à briser les siens, à saccager leurs songes les meilleurs et leurs œuvres, et je la prenais en haine. Mais, contradiction étrange, pour ce Iégor, qui l'incarnait si durement, je ne trouvais en moi qu'affection et tendresse. Avait-il suffi que je voie en lui un vivant semblable aux autres, capable de souffrir, de jouir, d'oublier les temps, de garder une main dans la sienne ? Et au contraire, une telle antinomie n'était-elle point faite, comme tout ce qui témoigne de l'inhumain, de l'anormal, pour m'inspirer effroi et colère ?
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