Citations sur Eugène Onéguine (206)
Les générations se succèdent ;
Ainsi notre tribu frivole
Grandit, s'agite, se démène
Et pousse au tombeau les aïeux.
Notre temps viendra à son tour.
Nos descendants auront leur heure
Et nous chasseront de ce monde.
Enivrez-vous, en attendant,
Amis, de cette vie légère.
Je sais qu'elle a peu de valeur
Et n'y tiens pas outre mesure.
J'ai dit adieu aux illusions ;
Mais de lointaines espérances
Viennent parfois troubler mon cœur.
Mais il est triste de se dire
Qu'on a gaspillé sa jeunesse,
Qu'on l'a trahie à chaque instant
Et qu'elle nous l'a bien rendu,
Que les meilleurs de nos désirs,
Que les plus pures rêveries
Sont allés à la pourriture
Comme les feuilles de l'automne.
Chapitre huitième, Strophe 11.
On nous a instruits, cultivés,
Polis. Qu'y avons-nous gagné ?
Un air affecté, et c'est tout.
Moscou compte autant de beautés
Que la nuit d'aimables étoiles;
Mais la lune sur le ciel noir
Brille, et éclipse ses compagnes.
Mais celle que je n'ose pas
Troubler par le chant de ma lyre,
Comme une lune en majesté
Brille seule parmi les femmes.
Elle semble fouler la terre
Avec une fierté céleste !
Trouver quelqu'un qu'on puisse aimer,
Quelqu'un qui ne trahira pas;
Quelqu'un qui apprécie les choses
Et les mots selon notre goût;
Qui ne dit aucun mal de nous;
Qui prend soin de notre confort;
Qui nous pardonne nos défauts
Et qui jamais ne nous ennuie.
Vous chercherez en vain ce fantôme,
cessez de perdre vos efforts.
N'ayez d'amour que pour vous-même,
Mon très respectable lecteur.
L'objet en est digne; jamais
vous ne trouverez plus aimable.
La parenté, ce sont ces gens
Pour qui nous avons des égards,
Qu'il nous faut aimer, respecter,
A qui (la coutume l'exige)
Nous devons, autour de Noël,
Une visite ou une lettre,
Afin que le reste du temps
Ils cessent de penser à nous.
L'ivresse du monde est mortelle,
Et nous sommes pris vous et moi,
Chers amis, dans son tourbillon.
Je me rappelle un jour d'orage ;
J'étais jaloux de tous ces flots
Qui venaient, chacun à son tour,
Ramper, pleins d'amour, à tes pieds !
J'aurais voulu, comme la mer,
Effleurer ces pieds de mes lèvres !
Domptant la froide intelligence,
Cent fois heureux celui qui croit,
Celui qu'un cœur béat fait vivre
Comme au relais un routier ivre
Ou ( soyons tendre ) un papillon
Buvant la fleur de la passion.
Mais pauvre est l'homme sans vertige,
Qui voit demain dès aujourd'hui,
Qui, mots ou gestes, se traduit
Le moindre élan et qui s'afflige,
L'homme qui porte son passé,
Toujours conscient, toujours glacé.
Il note un bref poème tendre,
Souvenir d'une rêverie,
Trace qui fixe pour longtemps
Une fugitive pensée.