À l'écoute des harmonies secrètes, c'est la fin d'une aventure littéraire, d'un cycle de douze volumes entamés il y a plusieurs années. Ce fut un parcours… particulier. Faute de meilleurs qualificatifs. Je ne sais toujours pas si j'ai vraiment aimé. J'ai persévéré dans ma lecture surtout parce que je l'avais commencée. Je ne l'ai pas détesté, ça c'est certain. Mais aimé? Quand même. Je l'ai trouvé intéressante par moments, instructive, un peu à la manière d'un voyage dans le temps. Peut-être un Anglais du milieu du XXe siècle pourrait l'apprécier à sa juste valeur puisqu'il s'y reconnaitrait davantage.
Quelques considérations historiques, philosophiques et littéraires, entre autres, ont réussi à capter mon attention de manière passagère et régulière. Après tout, on navigue dans la haute société anglaise, un univers cultivé. Découvrir les codes de cet univers était intrigant, un peu comme dans À la recherche du temps perdu. Ici, l'on a suivi Nick Jenkins pendant plusieurs décennies. Dans ce douzième tome, même si son âge n'est pas spécifiquement indiqué, il n'est plus tout jeune. Passé, l'âge des souvenirs d'enfance, de la guerre, des incertitudes liées à son avenir d'écrivain. le lecteur a devant lui un homme d'âge mûr, un homme qui regarde le monde avec des yeux qui commencent à fatiguer mais surtout un recul, une perspective sur le monde.
D'ailleurs, comme dans la plupart des autres tomes, il se passe peu. Nick retrouve ses amis, ses connaissances à droite et à gauche. Chez lui, à un banquet. Et ils parlent. Ils parlent de ce qui a été, de ce qui est et de ce qui sera. Bref, un flot continu de paroles. le mariage de l'un, l'infidélité de l'autre… la mort de certains. Quelques personnages avaient déjà trouvé leur fin dans les tomes précédents. La main du destin continue de faire son oeuvre. Disons que, à la fin, le monde trouve un semblant d'équilibre.
Je suis toujours épaté d'être parvenu à suivre cette histoire malgré la (très) grande quantité de personnages « de passage », cités ici et là à travers les douze tomes. Tous, même ceux qui ne font que passer très furtivement, sont excellemment bien dépeints. Quelques mots et leur psychologie est aussi claire que du cristal. Heureusement, quelques uns sont assez importants pour paraître dans quelques bouquins, voire plusieurs, comme Widmerpool, Isobel Trolland, Moreland, docteur Trelawney, Quiggin, etc. Pour les autres… eh bien, pour être complètement franc, je ne me suis jamais rappelé d'eux tous. Toutefois, est-ce si important? Sans doute pas. J'ai porté davantage attention à l'atmosphère, aux impressions qui se dégageaient de cette fresque. le temps qui passe, la vie… Et cet humour noir si britannique.
À l'écoute des harmonies secrètes propose une fin qui semble appropriée et juste, tout à fait à l'image du cycle. Toutefois, je ne sais pourquoi, je m'attendais à un petit quelque chose de plus… spectaculaire. Pourtant, je sais que ça aurait été à l'encontre de ce qui a été mis en place, à la psychologie du protagoniste. En effet, contrairement au narrateur de
Marcel Proust, Nick Jenkins est trop posé, égal, pour se laisser aller à des débordements d'émotions. le lecteur aura droit jusqu'à la fin à une analyse fine et détachée des traditions, des moeurs de la société anglaise du XXe siècle.
Incidemment, ce douzième et dernier tome est l'occasion de jeter un dernier regard sur l'ensemble du cycle. Il constitue un témoignage important d'une époque. C'est un style : précis, minutieux, tout en étant facile d'accès, mais au rythme lent. Ça m'a surtout donné l'envie de me replonger dans À la recherche du temps perdu.