Roman écrit dans les années 50.
L'histoire se passe en 1783, dans l'île d'Ouesssant. Laurent Brenterch, connu sous le nom de Miserere, est un célibataire endurci. C'est aussi un ancien qui a participé à la guerre d'indépendance des Etats-Unis. Maintenant il plante des pommes de terre, Un légume nouveau ramené des "Amériques". A l'occasion il pille quelques épaves venus s'échouer sur les côtes.
La vie sur l'île est dure, les femmes sont très majoritaires, leurs maris marins sont la plupart mort en mer ou à la guerre. La démographie est problématique.
L'homme a deux visages : attaché à son île et l'envie d'évoluer, donc de regarder vers le continent.
L'écriture est dure, minimaliste, rocailleuse. On y sent les tempêtes, les embruns, le désespoir des habitants et la tension qui règne sur l'île. Ne soyez pas surpris si vous avez le visage mouillé et que d'un coup de langue agile vous vous aperceviez que cette eau est salée.
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"C'est mal de piller les épaves" dit le recteur...
La plupart des îliens le font pourtant, en cachette.
Mais "Miserere", plus ouvert aux idées nouvelles, refuse de faire semblant de se conformer à la consigne, (et à la bafouer en douce.)..
Et puis, laisser à la mer les bonnes choses contenues dans un bateau abandonné, c'est un autre péché, donc il refuse de promettre en sachant d'avance qu'il ne tiendrait pas son serment...
Oui, il est plus honnete, mais il ne semble pas savoir que parfois on a tort d'avoir raison...
Même s'il s'est mis ses congénères à dos, Miserere retrouvera l'estime générale en mer.
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L a tempête file, et les bateaux, et la nuit. A chaque seconde éclatent des milliers de lames et les étraves défoncent la mer. La nuit et les hommes iront jusqu'au bout d'eux-mêmes, le mécanisme est déclenché.
Nuit sans étoiles, grasse et gluante comme du varech frais, peuplée de gouttes de pluie solitaires et menues qui touchaient le corps avec douceur.
Un crabe, les deux pinces ouvertes, voilà très exactement à quoi ressemble notre île. [...] Ce n'est pas nous qui l'avons modelée ainsi, pas plus que nous ne l'avons ceinte de ses courants fantastiques, virant bord pour bord à la marée, ni flanquée de son île Keller, auberge rouge pour tempêtes. Ce n'est pas nous qui avons éparpillé dans ses eaux les mille éclats de granit, que l'on peut nommer indifféremment des rochers, des cailloux ou des pierres, et qui sont tous capables, dès qu'on les sollicite, de crever un bateau dont le capitaine eût déjà fait le tour du monde.
Dehors le vent augmentait. Les chevaux et les moutons qui couchaient sur la dune auraient demain la tête pleine de rêves et leur viande sentirait davantage la mer goémoneuse.
Sous le ciel bas et maintenant hurleur, elle traversait les champs et les prairies de son lourd pas masculin, en larges hanchées qui déportaient son corps, tantôt à droite, tantôt à gauche, et le vent soulevait ses cheveux comme des algues et claquait dans ses jupes comme sur une armoire.
Émission complète : http://www.web-tv-culture.com/naissance-d-un-goncourt-de-yann-queffelec-1317.html
Il est né à Paris mais ses racines sont belles et bien bretonnes. Yann Queffelec a toujours revendiqué cet attachement, il l?a prouvé dans plusieurs de ses ouvrages comme son « Dictionnaire amoureux de la Bretagne ». Plus jeune, il se rêvait aventurier sur les mers, prenant la plume au gré de ses escales. Car si la voile était sa passion, l?envie d?écriture était déjà présente, encouragée par une mère aimante et affectueuse. En revanche, côté paternel, ces velléités n?étaient pas bien vues. Pas facile pour le grand romancier de la mer que fut Henri Queffelec, grand prix de l?académie française en 1958 avec son « Royaume sous la mer » d?imaginer son fils marcher dans son sillon. Ce conflit père-fils qui perdura jusqu?à la mort d?Henri Queffelec a profondément marqué son fils Yann qui en a fait un livre « L?homme de ma vie ». Au-delà de ces souvenirs personnels, Yann Queffelec a aussi bien sûr écrit de nombreuses fictions mais toujours les relations familiales et le mal-amour se répondent en écho. Avec près d?une quarantaine d?ouvrages alternant romans, récits, essais ou poésie, le parcours d?auteur de Yann Queffelec est bien sûr marqué par le prix Goncourt, en 1985, avec « Les noces barbares ». Ce titre reste associé à la rencontre entre Yann Queffelec et l?éditrice parisienne Françoise Verny, une rencontre improbable, un soir d?hiver sur le quai d?un port de Bretagne, quand Françoise Verny eut cette phrase à destination du futur romancier « Toi, chéri, t?as une gueule d?écrivain ». On imagine la scène? Avec humour, tendresse et émotion, Yann Queffelec nous raconte les mois qui vont de cette rencontre portuaire inattendue à l?obtention du Goncourt, cette relation quasi filiale entre ce jeune auteur en devenir et cette éditrice, faiseuse de talents, à la personnalité bien trempée. Dans ce livre où le lecteur est pris à témoin par l?auteur, Yann Queffelec se dévoile, avec ses bons et ses mauvais côtés, il nous parle d?une époque peut-être révolue ou auteur et éditeur ne faisaient qu?un et il lève le voile sur le monde secret de l?édition parisienne. Tout cela avec une écriture pleine d?originalité, de sonorité et de poésie. « Naissance d?un Goncourt » de Yann Queffelec est publié chez Calmann-Lévy.
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